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dimanche, 21 octobre 2007

Lire en fête ?

"Lire en fête" un peu tristounet sur l'île de Versailles. un atelier d'écriture par ci, une bibliothèque des prisons par là, quelques liseuses pour enfants et beaucoup de "bouquinistes". Était-ce bien des bouquinistes ? Certaines et certains ressemblaient plutôt à des enfants ingrats qui venaient brader la bibliothèque de leurs vieux parents décédés. Ça sentait l'entre-deux-guerres avec des Paul Bourget, Maurice Dékobra, Paul Morand, Jacques Chardonne, pas mal de René Bazin — ô "La terre qui meurt", ô Les Oberlé — directement issus de bien-pensantes étagères vendéennes.
Quelques Péguy, Gide et Koestler réédités chez Gallimard, en collection Blanche, fin des années quarante et les innombrables Fleuve Noir, Masque Noir, défraîchis, écornés. Et encore des Bibliothèque Nelson — à onze ans, dans mon grenier de la rue Rosière d'Artois, au n°9, j'y dévorai La reine Margot et Vingt ans après.

Un petit éclat rouge : je suis tombé entre deux tomes des Oberlé sur APOLLINAIRE, dans ma chère collection Poètes d'Aujourd'hui, chez Seghers. Ce n'est pas la première édition par André Billy, n°8, mais le n°227 de mai 1975 par Daniel Oster. C'est très post-soixante-huit, entre psychanalyse et sémiotique, jeux de mots inclus, et ce, dès les premières lignes :

Au moment d'écrire sur Guillaume Apollinaire, découverte de l’apolinéarité d'Apollinaire, toujours en ligne au-dessus de lui-même. Apollinaire, le poète hors de soi, périphérique. Poésie en recherche d'apogée. Flottement, expansion, extériorisation ou évanouissement. Rarement linéaire, marginal de son propre discours. On ne peut donc parler d'Apollinaire que d'une façon apolinéaire, par-dessus, en vol, commentateur-Icare, au risque de se brûler les ailes. (Apollinaire s'écrit avec deux ailes.) Apollinaire exige que je nous tienne en respect entre terre et ciel.

Pourquoi ne m'étais-je point procuré le n°8 ?
Sans doute parce que j'ignorais encore les Seghers et qu'en 1954, déjà dans les marges de la littérature qu'on m'enseignait — et que j'aimais d'ailleurs, j'avais clandestinement dans mon pupitre de lycéen Apollinaire par lui-même de Pascal Pia, dans "Écrivains de toujours" Au Seuil (1954), glissé prudement sous le Paul Claudel de Louis Barjon aux Éditions Universitaires, maison très appréciée chez mes Bons Pères.
C'était assez éclectique, c'était mes premières démarches critiques hors des manuels scolaires et, ma foi, Apollinaire et Claudel, côte à côte, ce m'était déjà une belle harmonie des contraires. Quoique, Claudel ?
Mon achat d'hier ne fut donc que la remontée sentimentale de mes lectures adolescentes.
Il fut troublant, cet Apollinaire de Pascal Pia, ce n'était encore ni les Poèmes à Lou, ni Les onze milles verges, mais quel plus doux émoi, alors, que la prose de L'enchanteur pourrissant, soutenu par les gravures sur bois d'André Derain.

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« Je suis belle comme le jardin d'avril, comme la forêt de juin, comme le verger d'octobre, comme la plaine de janvier ». S'étant dévêtue alors la dame s'admira. Elle était comme le jardin d'avril où poussent par places les toisons de persil et de fenouil, comme la forêt de juin, chevelue et lyrique, comme le verger d'octobre, plein de fruits mûrs, ronds et appétissants, comme la plaine de janvier, blanche et froide........... .
«........J'ai laissé mon castel Sans-Retour, sur le mont Gibel. J'ai laissé les jeunes gens que j'aime et qui m'aiment de force, au castel Sans-Retour, tandis qu'ils aiment de nature les dames errant dans les vergers, et même les antiques naïades.
Je les aime pour leur braguette, hélas ! trop souvent rembourrée et j'aime aussi les antiques cyclopes malgré leur mauvais œil. Quant à Vulcain, le cocu boiteux m'effraye tant que de le voir, je pète comme bois sec dans le feu. »

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Lui ayant prêté cet Apollinaire, l'une de mes amours d'alors me l'avait rendu en rougissant. Et pourtant elle n'était point bégueule.
Donc, Apollinaire m'a enjolivé ce samedi d'un "Lire en fête" qui s'exténue — lointaine, "la Fureur"... !
Ce qu'il écrivit à vingt ans me troubla à dix-huit et m'émeut encore à....

Sur toi Hélène souvent mon rêve rêva
Tes beux seins fléchissaient quand Pâris t'enleva.

jeudi, 04 octobre 2007

Je continue de m’instruire

Voilà enfin achevée la seconde rénovation de la Basse Bouguinière ; le peintre a enlevé ses échelles et autre échafaudage.
Une année aura été nécessaire, mais ce qui vient d’être fait nous mènera bien encore aux trente ans qui s’annoncent — je ne doute de rien quant à ma longue vieillesse !

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la Basse Bouguinière, 30 ans après sa première rénovation

Le jardin a rétréci, mais la “librairie” a un bel escalier et je continue de m’instruire.

Avant-hier, inscription à l’Université Permanente, dans les locaux des anciens Chantiers de la Loire, près des grandes Machines Nantaises - vous avez bien entendu parlé des suites de Royal de Luxe, de l’Éléphant, des Anneaux de Buren, d’Estuaire 2007 et du Hangar à bananes, d'où de trop beaux jeunes gens, hélas, partent, ivres, se noyer en Loire.
Naguère — enfin, jadis — pour moi, il y avait “le” Pont-Transbordeur, et là où le père construisait des bateaux, le fils vient y faire du Grec.*

Je me suis promis une meilleure assiduité. Enfin ! l'an écoulé, j’avais quelques excuses : un trou béant en place du vieil escalier, des bâches plastiques sur les rayons de livres, l’inaccessibilité au “ Bailly” et le petit “Mac”, sa LiveBox et son imprimante descendus dans la salle de séjour.

Donc, du Grec et un soupçon — six séances — d’approche architecturale autour du Palais de Justice, le nouveau, celui de Jean Nouvel et du Passage Pommeraye, l'ancien, de Jean-Baptiste Buron et Hippolyte Durand-Gasselin : le XIXe et le presque XXIe siècle confrontés !
Et puis, pour persévérer dans les lieux branchés — parfois le petit Nantais du marché Talensac se demande ce qu’il vient y foutre — l’Université Pop’ (sic) du Lieu Unique (l’ancienne biscuiterie LU) et ses cours de littérature contemporaine gérés par Bruno Blanckeman de l’Université de Haute-Bretagne, un homme à la belle gestuelle un tantinet ecclésiastique, à la diction fort précieuse, aux “hein !” subtilement glottés, qui renvoie dos à dos Tzvetan Todorov qui déplore la disparition de la littérature, et les tenants de la Littérature-Monde — Le Bris, Rouaud et les Antillais qui “claironnent la vitalité retrouvée” de cette même littérature, Blanckeman, lui, se contentant d’habiller de mots neufs — littérature consentante/littérature résistante — le vieux, très vieux, conflit entre bonne et mauvaise littérature, tout en faisant glousser les belles vieilles rombières du Lieu Unique, — j’en suis un des vieux fourbes —, sur "Alexandre Nothomb et Amélie Jardin, sur Max Réza et Yasmina Gallo" (à moins que ce ne soit Alexandre Réza, Amélie Gallo, Max Nothomb et Yasmina Jardin, je ne sais plus ! À votre guise !) et les retours "polnarefiens"de littérateurs "qui montrent leur vécu à tous les passants" (sic).

Bref ! Un beau menu avec Didier Daeninck, Jean-Marie Gustave Le Clézio, Jacques Jouet, Linda Lê, Olivier Rolin, Assia Djebar, Pierre Guyotat et quelques autres... un bref passage de Pascal Quignard qui s’était abstenu, l’an dernier et... un “arrêt sur ouvrage” d’un certain Mark Z. Danielewski traduit par un non moins incertain Claro...
De quoi satisfaire mes plaisirs de lutte contre l’érosion de la langue, de déconstruction et reconstruction des formes, de confrontation à l’obscur, “le tâtonnement expressif” de mon “éveilleur d’échos” de la semaine dernière, Michel Chaillou, homme toujours en avant, “pas encore mort, pas encore très âgé et pas trop souffrant”, dirait le professeur Blanckeman.
Assia Djebar et Pierre Guyotat, qui viendront nous rendre visite, m’auraient largement comblé et le professeur ci-dessus cité est, au-delà de son brillant, un homme de littérature fort perspicace !
Suffirait que notre bon professeur de Grec ancien, plus qu’excellent helléniste, veuille mettre un peu plus d’andragogie (pédagogie des adultes, vue du Québec)) dans sa méthode pour que je puisse me dire :
« Décidément, je m’offre une belle année. »

* Affirmation dite et redite...

vendredi, 28 septembre 2007

"un arrangeur d'échos"

Hier, rencontre avec Michel Chaillou, à la Tour Bretagne, — je crois qu’il devait être l’invité de l’Académie de Bretagne — il vient d’avoir le grand prix de littérature de l’Académie Française ; grand bien lui fasse pour la vente de ses bouquins, pour moi ça n’ajoute vraiment rien à la densité de son œuvre et de sa langue.
Nous avons en commun d’être Nantais, d’avoir subi les bombardements de septembre 1943, d’avoir “fait” la guerre d’Algérie ; nous avons passé un long après-midi de mai 2001 au Salon du Livre de Montaigu, placés à la périphérie, déserte, du lieu, quand sévissaient en son centre, envahi par la foule, des auteur(e)s déjà oublié(e)s.

Je venais proposer À Grand’Lieu un village de pêcheurs, il avait, sur sa table, ses bouquins publiés et non encore épuisés, je lui ai dit mon bonheur du Sentiment géographique et de son Petit guide pédestre de la littérature française au XVIIe siècle, nous avons parlé de littérature, de Nantes, de Montaigne, je lui ai pris Domestique chez Montaigne à la lecture duquel j’éprouve un plaisir d’égarement identique à celui du Sentiment géographique.
L’égarement n’y est point dû aux volutes de la syntaxe, mais à l’entrelacement des siècles à l’entour du château de notre philosophe bien-aimé.
« La lecture est un tâtonnement expressif, on peut donc lire de l’obscur. » énonce Chaillou et je le suis fort bien en ce chemin. Il faut se laisser aller bien aux “entre’bâillements” et ne point craindre l’endormissement

Je l’ai retrouvé hier, plus émacié et tout autant passionné, modeste et incisif, l’entretien a porté sur son dernier ouvrage L’écoute intérieure.

J’apprécie son projet d’écritures : dix-sept ouvrages encore, il a les dix-sept titres et les dix-sept premières phrases de chaque ouvrage. Dont il n’a rien dévoilé, par crainte de désamorcer ses imaginaires.
Je lui ai demandé si,dans les dix-sept, il n’y avait pas un second Petit traité pédestre de littérature pour goûter au plaisir d’une nouvelle mise en appétit, à propos d'auteurs ignorés.
il a “botté en touche” avec un grand sourire et a reparlé de son enfance chantenaysienne.

Ah ! Si ! Nous avons aussi en commun de nous interroger sur la manière d’aborder “notre” guerre d’Algérie. Plus de cinq cents livres publiés à ce jour, mais aucun des livres lus qui rende compte de notre expérience propre.
«L’Histoire a laissé le passé en jachère ! » dit encore Michel Chaillou.

jeudi, 27 septembre 2007

ne pas oublier Louis Poirier

Avant-hier, j'ai failli oublier la passion enfantine de Julien Gracq pour le rugby, passion solitaire qui s'exerça dans la lecture du Miroir des sports et dans ses resquilles, le long des palissades du stade de l'île Gloriette, où le SNUC — maillot blanc à ceinture verte, blanche et rouge — affrontait le Vélo-Sport Nantais ou le Racing-Club de Trignac.


...le rugby n'intéressait apparemment que moi. C'étaient là des orgies d'enthousiasme solitaires qui, dans mon isolement sur mon échelle, ne pouvaient ni se décharger parmi les cris d'une foule unanime, ni trouver ensuite écho et se diluer dans les émois d'un milieu sympathisant, des séquences dépareillées, fulgurantes, que je reprojetais longtemps avant de m'endormir, ainsi que les chutes d'un film, sur la nuit du dortoir. Elles font encore pour moi seul, d'un coin anonyme et aujourd'hui rebâti de cette île Gloriette, si faubourienne et si grise, un coin des ruines d'Olympie.

LA FORME D'UNE VILLE, pp.167-168.


J'ai fréquenté l'île Gloriette ... et le stade Malakoff, désormais "Marcel-Saupin", récemment remodelé (!) ; c'était pour la passion du football, le FC Nantes était encore encore en 2e Division. Mon père qui avait joué à la Mellinet, le "grand patro" nantais, m'y entraînait le dimanche après-midi. Il ne m'a emmené que de rares fois au stade de Malville, près du Parc de Procé, où le SNUC avait émigré dans l'après-guerre. Ma mère et lui me racontaient de sanglantes histoires de langues avalées dans les farouches mêlées qui me fascinaient tant et que je n'ai expérimentées — les mélées, pas les langues — que dans les "mauls" de soule que le moniteur d'éducation physique du collège nous proposera plus tard.
Bref, nous n'étions pas "rugby" dans la famille et de ce manque j'en gardai quelque nostalgie.
D'où mon bonheur de me laisser aller, samedi après-midi, à "des orgies d'enthousiasme" pour Fidji-Galles !

dimanche, 01 juillet 2007

de amicitia II


« Chance... que l’amitié ait pris entre nous cette force qui enjambe l’absence... »
Camus à Char, janvier 1954


En feuilletant parallèlement et par hasard, chez Co et Jo, un chaleureux livre d'amitié, Le marin à l'ancre, quand, épistolairement (!) Bernard Giraudeau fait "voyager" Roland, son copain en fauteuil. La sensualité y est belle, plus populaire certes, mais
« Ré n'est pas Nuku Hiva. »
C'est certain, mais moi qui, comme vous, Bernard Giraudeau, ai abordé les deux îles, je ne suis pas sûr que, dans l'instant où l'une et l'autre nous sont apparues sur l'horizon, il n'y ait pas eu la même émotion. Comme ce soir encore quand la mémoire les fait à nouveau surgir pour des partages amicaux.
Je lis avec bonheur et Giraudeau et Camus.

vendredi, 29 juin 2007

lectures au mouillage

J’avais emporté, ajoutés aux Pléiades de Char et de Perse, un Sollers et un Quignard, j’aime bien ces “sauts et gambades”, feuilletages nonchalants au hasard de quelques moments de solitude au mouillage.

De Sollers donc, L’Étoile des amants. Du roman à la Sollers : une dame, plutôt jeune femme, cette fois c’est Maud, de longues énumérations rarement fastidieuses — entre la page 33 et la page 37, cinq, dont une longue d’ornithologie marine, les autres oscillant entre substantifs animaliers et verbes d’actions amoureuses — et de longues, plus longues encore, citations dont le lecteur doit identifier la source et l’auteur — ici, il s’agirait de très vieux textes orientaux.
Et une île, Ré, sans doute qui, de roman en roman, se dessine au long des matins, des soirs, des nuits, des plages, des nages et des brises légères. Un océan vu d’une île par un terrien comme la Mer de Debussy est une mer entendue depuis les planches d’une plage de Manche.
Lecture légère comme littérature allégée.
Une fois par an, prenez une ou deux femmes, une île, ou une ville, des énumérations, des citations, cette fois d’un philosophe, Nietzsche par exemple, cette autre fois d’un poète, Rimbaud, tiens, et vous obtenez une ponte annuelle de 200 à 500 pages selon l’étendue de l’œuvre abordée et des citations extraites.

Le Quignard, c’est autre chose, c’est un blogue à l’antique ; depuis les Petits traités, il cultive le genre du texte bref — d’une à dix pages — et court de d’une extrémité à l’autre de notre histoire d’Occident.
Surgissent souvent une fêlure, ou des cruautés. J’avais pris Les Paradisiaques qui nous épargnent le plus ces infimes blessures.
C’est d’une érudition qui confine au déjanté et la crudité témoigne d’une pensée dégagée de tous péchés.

Je ne suis pas méchant, j’aime bien l’un et l’autre, l’un plus que l’autre, certainement, mais ces temps-ci, Sollers et Quignard ne m’aident guère à vivre.

J'ai retrouvé sur ma table la Correspondance Camus/Char. Je suis loin d'avoir oublié le centenaire et avec ces tant vieilles amitiés qui resurgissent de l'adolescence, il y a provende.

dimanche, 24 juin 2007

retour de mer

à André, l'ami d'adolescence, patron d'ÉON VOR

Après trois semaines de houles, de pluies, de vent et d'amitié, Dac'hlmat est à nouveau depuis la nuit dernière au mouillage de Vilaine.

Pour me relier à nouveau à celles et ceux qui fréquentent les modestes parages de ce blogue.

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Aux Glénan, calme d'un matin de juin


«... Il a plu, c’est le jour. Lune couleur d’alun. Et le ciel au levant prend couleur de sarcelle. À toute grâce, bienvenue !
L’aube d’Été est, sur la mer, le premier pas d’amante nue hors de son linge foulé bas...
Et peut-être n’a-t-il plu : si douce, ô pluie, fut ton approche... »

Saint-John-Perse
Strophe,
Amers.

dimanche, 03 juin 2007

phares et livres

trois semaines durant, le blogue s'affichera dans un silence blanc. Les cybercafés et cyberbases sont rares en Bretagne-sud et je n'ai ni carte Airport, ni "ouiphi" pour relier mon petit Mac à mes phalanstères.

M'en vas — enfin ! — en mer. Pas loin, mais en mer. J'emporte — FB m'a "contaminé" — mes Pléiades "Char" et Perse".
Pierres et vent, quoi !
Je n'irai donc point rencontrer FB au Lieu Unique pour la présentation de ses "Déplacements". Dommage, dommage.
Sortant de l'estuaire de Vilaine, je vais seulement m'éviter des rognes à propos des manifestations qui prétendent célébrer de façon "branchée" et populaire — une aporie, non ? — l'estuaire de Loire.
FB n'y est pour rien, c'est l'homme qui dirige le Lieu Unique et qui est aussi l'instigateur d'Estuaire 2007 qui suscite mon ire.
Mes préférences nantaises vont plutôt au "petit" homme qui agite les Folles Journées... Les vieux cons ne se refont pas !

Je penserai fort à JCB.
N'allant pas en Iroise cette fois, je ne pourrai contempler Ar-Men. Ni Kéréon — celui dont je rêve.
Je vais arrondir les Cardinaux dans le sud-est d'Hoëdic et les Birvideaux entre Belle-Île et Groix. Plus humbles, moins exposés aux vents et aux courants...
Quoique !

samedi, 19 mai 2007

la librairie telle qu’en elle-même

Char centenaire

note adressée à JCB, en espérant qu'il lui reste encore une boite de chocolats

A Bordeaux, à l'angle des rues Porte-Dijeaux et Vital-Carles, Mollat est toujours Mollat.
J’avais entre les mains la Correspondance Camus-Char que, déjà, je voyais sur une table Le père Diogène de Ryner. Mais j’étais là pour Char.
Je m’évite une “montée” à Paris : j’ai mis dans mon panier le catalogue de l'exposition Char à la BNF. Toutes les toiles exposées n’y sont pas et je manquerai la contemplation de certaines peintures — il y a belle lurette que j’ai composé mon Musée imaginaire en collectionnant les cartes postales, plus tard les livres, souvent offerts — ; cependant, je regretterai les "Nicolas de Stael" et les "Vieira Da Silva".

Je retiendrai une photographie très poignante de Giacometti dessinant le visage de Braque mort : le profil émacié du sculpteur laissant deviner une tendresse attentive.
Je n’oublie pas son dessin évoqué dans ma note du 28 février sur le serpent et la femme ; il me faut encore écrire une ou deux notes sur les mots dans les textes de Char — près de vingt occurences —avant de revenir au Serpent, le troisième Fascinant, que je lis toujours comme le contre-sens du mythe adamique — vous savez, cette histoire de la Genèse (III,1-24) où il est question d’une pomme, d’une femme, d’un serpent, d’un homme, de la connaissance, du bien et du mal, tous ces êtres sans majuscules !

J’ai glissé dans le panier, juste avant de passer à la caisse, Poèmes en archipel, anthologie de textes de René Char (en Folio, pas en Poésie/Gallimard) ; à Nantes, je l’avais plusieurs fois feuilleté et chaque fois reposé sur la table ; je n’aime guère, hors les miennes ou celles de très proches, les anthologies. Celle-ci, introduite par Pascal Charvet, est fencore ortement dominée par madame Char et Paul Veyne et annonce clairement son projet pédagogique “pour le grand public et particulièrement pour le public scolaire”. Et pourquoi pas ?
Ne sais trop qu’en penser ? Brève introduction au poème, précédée d’une introduction au recueil, en fausse page, de belles illustrations que l’on retrouve dans tous les bouquins sur Char : ça peut aider. Le choix ne cède pas à la facilité. Madame Char et monsieur Veyne acceptent à nouveau l’aphorisme.
Mais réduire les Dentelles de Montmirail à quatre d’entre eux m’évoque plus une amputation qu’une anthologie.
Quelle aurait été mon entrée dans Char avec un tel livre, il y a cinquante ans ? Je ne regrette pas le lyrisme obscur du bouquin de Pierre Berger ; il en rajoutait, mais n’atténuait point l’éclat du logos.

Ce logos de Char qui serait fichu de me faire à nouveau pratiquer la vertu théologale de l’espérance.
Mais non !

Revenir de tout l’avenir au présent et le garnir de son espoir même jamais réalisé.

lettre de Char à Camus du 4 octobre 47

vendredi, 18 mai 2007

après une belle soirée d'amitié à la Hume*

J’ai été frappé par un syndrome décrit par François Mauriac dans les Mémoires intérieurs... Il explique être arrivé à l’âge où les héros de roman de ne font plus rêver, il dit : «... à mesure que le temps s’écoule, que notre avenir temporel se réduit, lorsque les jeux sont faits, que l’œuvre est achevée et la copie remise, que l’aventure humaine touche à sa fin , alors les personnages de roman ne trouvent plus en nous d’espace où se mouvoir... Voici le temps où Julien, Fabrice, Dominique, Lucien, quand je m’efforce de les arracher au gouffre, ne me racontent plus que des histoires à dormir debout. » Je suis arrivé à une certain âge moi-même. Le roman, le roman contemporain, n’arrive plus à me ravir.

Jean-Claude Zylberstein
dans Libé-Livres d’hier.


Ça ne m’explique point ma désaffection pour le roman d’aujourd’hui ; ça me conforte dans mon désintérêt : je ne serais donc pas le seul à être atteint par ce syndrome mauriacien.
Demeurent les fascinations déjà anciennes : l’Angelo de Giono, le Moravagine de Cendrars, le Meursault de Camus, la Desqueyroux de Mauriac, l’ombre de certains personnages chez Gracq... sans doute quelques autres... que ma mémoire, loin de sa librairie, ne fait point remonter.

J’irais quand même bien voir du côté du Père Diogène d’Han Ryner sur qui écrit Robert Maggiori, dans le même Libé-Livres, Ryner étant pour moi à ce jour inconnu. Mais ce n’est point dans l’ordre du roman contemporain.

Trouverai-je Ryner, cet après-midi, chez Mollat, qui m’est une espèce de pélerinage, me ramenant à mes pratiques “lectorales” (!) des années 70 ?

Il n’y a pas que les bouquins ; dans Le Monde d’hier, un article sur un sympathique Tariq Krim, bêtement titré “le nouveau gourou du Web”, titre démenti par la vision que Krim semble affirmer sur les rapports en l’Internet et l’éducation. Un patriote du Net, comme, naguère on disait un citoyen du monde !
J’avoue avoir encore certaines difficultés à mettre son agrégateur Netvibes en œuvre.

* Er Klasker et Grapheus tis chez Cœur de Ptah, les compagnes, trop silencieuses en blogosphère, mais seulement en blogosphère, étant bien plus que (!) présentes.

lundi, 16 avril 2007

insomnie pour une embellie matinale

Trois heures trente, dans la nuit, insomnie qui dure, écouteurs, des voix anciennes, une diction trop déclamatoire, façon années 1950.
Gide et son salut de boxeur, Gérard Philippe, la raucité de Maria Casarès : c'est Henri Pichette et ses Épiphanies !

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Le poète dit encore :
C'est le livre du monde, le vent tourne la page, voici le fragment du cœur singulier, voici les pluriels dans leur unisson, c'est l'espèce par tous les temps du verbe et la mise à jour sous l'œil immémoriaL

L'amoureuse poursuit :

Les bergères des nuages
les cristalliers de la neige
les archers du soleil pacifique
Les pontonniers de l'arc-en-ciel
Les vents oiseleurs
les artificiers d'aurore boréale
les pilotes d'étoiles filantes
les plénipotentiaires de l'orage
les navigateurs de l'azur précis


Bonheur matinal de rouvrir Les Épiphanies et de plonger dans une profusion d'images.

mercredi, 11 avril 2007

rien à voir avec la note précédente... ou si peu

Hier, journée "livres".
Dépôt du CD pour l'édition de Une Centenaire, la Société coopérative des pêcheurs... Eh, oui ! On ne dépose plus un manuscrit ; mais j'ai encore de vieux restes de "jeune" maquettiste quand l'informatique des années 80-90 et PageMaker nous autorisaient à toutes les utopies de "circulation phalanstérienne" des écrits ; j'ai donc accompagné le CD d'une maquette, décidée avec le groupe de Passay, que reprendront, je l'espère, les infographistes de Siloë.

De la rue des Carmélites à la Petite Hollande, je passe par la Place Royale — du Peuple, en mai 68 — la fontaine est ruitelante, ruisselante. Normal, sa rénovation vient d'être achevée et elle célèbre autour de la Loire, les fleuves de France. Dommage, le trident d'or que brandissait la Loire s'est mué en vulgaire trident de métal noir. J'ai oublié le petit nikon.

Rue de la Fosse, halte intéressée chez Coiffard : je commande "Visites aux vivants" de Cathie Barreau et le bouquin, recommandé par un Litorien, "Un laboratoire de littératures", aux éditions de la BPI.
Plongeant dans les rayons "poche" de l'autre côté de la rue, je cherche "L'Amour, la Fantasia" de Djebbar, je tombe sur les tomes IV et V du Dernier Royaume de Quignard. Le bonheur ! Je retarde ainsi mes plaisirs de lecture en attendant la parution en poche et ce n'est point par seul souci d'économie. À côté, le dernier paru en poche... de Sollers. J'hésite, le Carnet de nuit me reste encore en travers des... yeux, mais je sais déjà que je prendrai la Vie divine la semaine prochaine quand Djebbar, Barreau et BPI seront livrées.
L'addiction du collectionneur ! Si cette vie divine était absente de mon étagère “Sollers en poche”....

J’achève, torturé par un tour de rein qui me tord, devant les éventaires des bouquinistes — c’est récent à Nantes — place de la Bourse, dans l’ombre de la statue de Villebois-Mareuil ; ce sera un lieu à fréquenter. Sympathique contre-point à la FNAC proche. Fin de journée chaudement ensoleillée.

Villebois-Mareuil, ce colonel vendéen qui aida les Boers dans leur lutte contre les Britanniques, me ramène à ma lecture actuelle de Aveuglantes lumières.

Les rejetons du siècle apaisant n'aiment pas la guerre, et c'est tout à leur honneur. Ils répugnent à la penser, et ce n'est pas à leur crédit.

Régis DEBRAY

lundi, 09 avril 2007

lecture pour quasi rien

Ça tient plus de la démarche du collectionneur : j'achète les bouquins de Sollers qui paraissent en poche.
Acheté en mars, feuilleté ces jours-ci : Carnet de nuit, édité en 1989, publié en Folio (n°4462).
Des notes d'une ligne à une page entre du salace, du lettré, du croyant, du bordel, du critique... Point trop de citations — le précédent Folio Illuminations qui se voulait "un livre d'heures pour temps de détresse" (?) n'était cousu qu'avec du Rimbaud, du Nietzsche, du Novalis et pour faire exotique du Parménide, du Tchouang-tseu, d'autres... ce pouvait être une table d'orientation.
Avec Carnet de nuit, si peu. Ce que je ressens comme une arnaque éditoriale : ou le "collectionneur s'est fait avoir ou le lecteur sélectif a perdu son efficacité.
Quand monsieur Joyaux paraîtra en Pléiade je pourrai déchirer les 106 pages de ce carnet. Si jamais, monsieur Joyaux dit "Sollers" paraît en Pléiade... de mon vivant !
Enfin ! Il y a deux pages et demi de "vers à Baudelaire", comme mes pêcheurs de Grand-Lieu disent le "bouquet à Rubis" :


Entends, ma chère, entends la douce Nuit qui marche.

vendredi, 23 mars 2007

note nocturne

Scannant Gaston Bachelard — deux pages de La poétique de la rêverie — pour une amitié précieuse, cet épigraphe, tiré du Roman du lièvre, de Francis Jammes :

« J'ai tout à la fois l'âme d'un faune et d'une adolescente. »

Je les aime tant, ces deux anciens.
Poète, longue barbe, "philosophe", l'un. Philosophe, barbe longue, "poète", l'autre.

jeudi, 22 mars 2007

double entorse...

... aux pratiques énoncées dans ma note du 11 mars sur librairies, chaînes de distribution et Toile.

Je viens d'acheter Grammaire du français contemporain sur Amazon, après avoir entendu, la semaine durant sur France Cul, Jean-Claude Chevalier. Et comme je n'avais plus de grammaire à disposition...! Hier après-midi, quand je vais lorgner à la fnac les nouveaux MAC, j'aperçois Google-moi de Barbara Cassin * ; j'achète. Ça met des traces encrées dans les réflexions d'un site incontournable comme Affordance et je ressens encore la nécessité du papier.

Logiquement, j'eusse dû commander Cassin sur la Toile et Chevalier chez le libraire. Je fais souvent tout à l'envers, n'étant point à un paradoxe — ou une contradiction ? — près.

Au Lieu Unique — LU, les petits-beurres nantais — Bruno Blanckeman commente, pendant une heure trois-quarts, Faire l'amour de J-P Toussaint. C'est quasi aussi intéressant que la lecture du roman même. Mais je ressens un grand éloignement de ces écrits dits post-modernes.
Comme une "insignifiance" au sens que donne Castoriadis à cette notion.
Pour une meilleure attention à ce texte, il m'eût fallu temporairement remettre Char et Bachelard sur les étagères.
"Renouveler les imageries usées des lieux communs" ?
Ou s'abandonner au vide vain entretenu par le climat ennuyé qui s'étale devant notre impossibilité à maîtriser l'accélération des flux mentaux et émotionnels qui sont exigés de nous ?
Décider d'une halte ?

* Dans le Libé de ce jour, François Bon "humanise" Google en écrivant sur Matt Cutts, "tête chercheuse de Google" et donne l'url du bonhomme. Mais c'est en américain. Dommage.