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La mort de Niangon

 

La mère mourut, un soir de saison sèche. Le jour avait été lourd. Dans le soleil couchant, le tam-tam fut frappé, lugubre.

Quelque chose, comme une possession intime, se détacha de lui, glissant de son être, imperturbable, aveugle. Ce devint une certitude, quand il alla visiter la morte. II revit Ama, son amante, les seins nus, tête rasée, se contorsionner en hurlant. Au pied de l’immense lit où gisait le cadavre.

Et tout autour échevelées et bruyantes, les femmes du village hurlaient en cadence en tordant les bras luisants derrière leur nuque.

Sitôt le seuil franchi, il s’était arrêté, étonné. Les murs étalaient de grandes balafres noires et rouges. Le corps roide dans un pagne bariolé. Il fut au pied du lit, Ama, de son corps hurleur, proche à le toucher. Sans avoir senti sa présence.

Une femme cria plus fort. La braillade s’écroula. La salle sembla vide, de silence. Anéanti, lui seul, son amour comme ignoré. Elle s’était perdue parmi les femmes.

Il y eut une poussée en lui, lointaine, qui l’entraîna au côté de la morte, très lointaine de la petite enfance : la veillée aux morts, dans un pays barré de pluies et de rafales de vent, les femmes en noir aux visages de cierge, denses, les hommes rudes perdus dans une tristesse insolite et pieuse. Il contourna le lit, du pouce traça le signe sur le front de la morte. Et devant les femmes, et devant les hommes qui, curieux, s’étaient approchés sur le pas de la case, devant eux, figés par ce rite inconnu qui bravait la mort, il baisa cette tête, les lèvres attardées au bord de cette vie éteinte, penché dans un silence ténu à l’exaspération.

Écrit par grapheus tis Lien permanent | Commentaires (0)

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