lundi, 29 août 2022
il n'est point d'obligation de note
”Rapportez toujours la flamme au feu et non pas à la fumée.”
Ce serait Denis d'Halicarnasse, cité par Pascal Quignard dans le livre L'homme aux trois lettres, qui aurait écrit ceci.
Et ceci n'est qu'une bribe re-tenue parmi cent autres des pages effeuillées. Quand, dans l'estuaire du Fleuve, fluent et refluent les marées.
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samedi, 05 mars 2022
Marcel CONCHE s'en est allé
Pour quelques heures, je délaisse Marcel Proust et ses Jeunes Filles en fleurs, James Joyce et son Ulysse.
Quelques heures, peut-être même quelques jours, pour réouvrir les Fragments d'Héraclite que Conche traduisit, les Essais de Montaigne qu'il commenta...
Marcel Conche, ouvreur de ces chemins, qui m'écrivit lettre si chaleureuse en guise merci pour mon envoi de Passay, village de pêcheurs, me fut un très précieux guide
Voici ce qu'il publiait sur la quatrième de couverture de ses Fragments d'Héraclite, livre paru en juin 1986.
Qui est le “véritable" Héraclite ? La présente édition des Fragments de son œuvre perdue... vise à restituer autant que cela est possible la pensée même d'Héraclite, dans son unité et sa cohérence. Ce qui surgit ainsi des ruines du texte est une structure belle, un cosmos, une sorte de temple grec déployant son harmonie dans la durée. Chaque fragment apporte sa précision nécessaire ; chacun est complémentaire de tous les autres, même si quelques-uns, plus décisifs, jouent le rôle de pierres d'angle. De ce temple, profondément logique, émane un rayonnement, une sagesse, un appel, un espoir. De l'éternelle vérité, aucun philosophe fut-il dans une proximité plus grande ?
Avec Héraclite, dit Hégel, “ la terre est en vue".
12:11 | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 15 septembre 2021
lire enfin Proust au mitan des Octantes ?
Une gageure
Un pari
Une impasse
Un remords
Une folie de vieillard insensé
?????
Lisons donc.
11:07 | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 03 août 2020
l'homme aux pirates
Pendant Ouvrez les guillemets,
lors d'Apostrophes, pour moi, Pivot pouvait aller se rhabiller.
Cet homme-là, homme aux pirates, était cette liberté de penser, de voyager, qui me tenait éveillé.
Gilles Lapouge
est mort en cet août 2020. Ses mots sont vivants. Et même ceux qu'il empruntait comme exergues — les tristes puristes, disent épigraphes — pour annoncer ses chapitres de piraterie étaient de puissantes saveurs.
Shakespeare
Dieu tout-puissant ! Il y a dans toute chose mauvaise une essence de bien pour les hommes qui savent la distiller.
Saint-John Perse
Pour nous le libre lieu de mer, non ce versant de l'homme usuel aveuglé d'astres domestiques.
Voltaire
Votre Excellence m'excusera, dit Pangloss; la liberté peut subsister avec la nécessité absolue; car il était nécessaire que nous fussions libres; car enfin la volonté déterminée...
Baudelaire
Étonnants voyageurs! Quelles nobles histoires!
Nous lisons dans vos yeux profonds comme les mers!
William Faulkner
Mais avez-vous la prétention de me dire exactement quelle est la proportion du mal dans l'apparence du mal...
Henri Michaux
Et moi, je me suis contenté de l'Équateur.
Paul Claudel
Tout ce que le cœur désire peut toujours se réduire à la figure de l'eau.
L'Apocalypse
Bientôt ce sera la fin de tout; et il y aura un nouveau ciel et une nouvelle terre.
Arthur Rimbaud
Elle est retrouvée.
Quoi? — L'Éternité.
C'est la mer allée avec le soleil.
Et
Sseu-Ma-Ts'ien, Roland Barthes, Samuel Beckett, Franz Kafka, Claude Lévi-Strauss, Robinson Crusoé, Jean Genet, Rabelais, Xénophon, Jacques Lacan et... et.......
Ces lignes dernières :
De leurs repaires désertés nous reviennent les échos du vide : ils nous parlent du goût de néant, du goût d'éternité qui dévasta jadis quelques cœurs détestables ou généreux — inconsolés.*
* Gilles Lapouge, les pirates, Balland, 1969.
En merci à Angèle Paoli
de Terres de femmes
qui sur Twiter fait signe
pour ce qui donne sens.
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dimanche, 08 mars 2020
repentir
REPENTIR, n.m. (1170); de se repentir
.....................................................
♦ 3° Peint. (1798). Changement apporté, correction faite en cours d'exécution (à la différence du Repeint, fait après coup). « Toutes les bribes de crayonnage, tous les ratages, tous les repentirs, tous les essuie-pinceaux du peintre » (GONCOURT) — Par ext. les repentirs d'un dessin, d'un manuscrit. « Les ratures et les repentirs » (BAUDEL.).
......................................................
petit ROBERT, 1973
Hier à "Bouguenais bouquine", présentant Retours d'histoire de Benjamin Stora, je n'ai pu m'empêcher de dire ma désolation de n'avoir point lu de romans depuis quelques années. Sinon mes relectures des cinq, six, sept auteurs que je fréquente depuis la fin de mes adolescences.
Ma modeste diatribe — la note précédente — contre les aigreurs "écrivaines" de deux de mes romanciers préférés ne doit pas retarder une prochaine réouverture des pages de La Presqu'île et des Eaux étroites, des Tablettes de buis d'Apronenia Avitia et de Tous les matins du monde.
À moins que feuilletant au hasard les huit tomes des Petits Traités, je ne tombe sur le XXXIIe, Liré qui relate, en ses ultimes paragraphes, mon grand premier poète, celui de mon enfance, un certain Joachim Du Bellay mourant...
De Julien GRACQ
La Presqu'île
Les Eaux étroites
De Pascal Quignard
Les tablettes de buis
Tous les matins de monde
Petits traités
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dimanche, 17 mars 2019
Saluer un ouvrier typographe
Bruno Savin.
Nous sommes son dernier Livre.
Nous, ces cinquante, soixante femmes et hommes qui, depuis trente ans, avions amassé, recueilli, transcrit des pans entiers de la vie d'une communauté de pêcheurs et de survenus, au bord de ce lac.
Nous certes, et aussi, nos compagnons du Centre de l'histoire du travail de Nantes qui nous proposaient, vingt ans après, la réédition de cet ouvrage À Grand-Lieu, un village de pêcheurs — Passay se raconte.
Depuis L'aubépine de mai en 1988 jusqu'à ce mai 2018, ce fut une belle tâche où, au bas de l'ultime page, s'inscrivait, dans la modestie coutumière qu'exige le labeur de l'imprimeur :
Typographie, traitement des images et mise en pages
no-et-no
Bruno Savin, Nolwen Couëtoux
Me reviennent toujours, lors des funérailles auxquelles je participe, les coutumes de ces Dogons du Mali qui, pour faire accéder le mort au statut d'ancêtre "vivant" brisent l'outil de travail du défûnt.
Pour Bruno, il eût été difficile de briser un bas-de-casse ou un clavier...
Quand se refermaient sur une chanson de Georges Brassens, les portes qui allaient nous dissimuler Bruno, j'ai rêvé d'un aller sur le lac — nous lui avions promis de l'y emmener avec nos compagnons pêcheurs — emportant son "dernier livre", le nôtre, pour disperser au gré du vent et des eaux les deux-cent-quatre-vingt feuillets de son dernier labeur.
Mais ce n'était qu'un rêve.
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dimanche, 19 août 2018
Lecture de bord de mer
Quand Sollers rejoint Ulysse, puis ayant lu un calligraphe chinois, quand il se rapproche d'Héraclite,
je comprends pourquoi : Athéna se promène dans son jardin et l'écrivain aquitain vieillissant est devenu sage.
.............................................. Silence, silence. Les fleurs et les mouettes ne m'ont rien dit.
Un type pour qui les dieux grecs seraient là se trouverait en état d'observation et d'invocation constantes, de déchiffrement permanent des forces positives ou négatives, à l'affût du moindre signe et de la plus furtive variation du vent. Il saurait quel dieu lui en veut, lequel ou laquelle le protège, bref il serait le contraire du somnambule ou du fanatique d'aujourd'hui.
C'est un navigateur, pas un occupant terrestre. Rien à foutre d'une frontière ou d'un territoire, les courants, les vagues, les remous, les criques sont ses partenaires, il préserve sa liberté, il suit les étoiles. Il est, à lui seul, la négation de la négation, c'est-à-dire l'infini. Prétention? Mais non, expérience modeste, les Heures, « gardiennes de la porte du ciel », l'entendent. S'il crie, il sera écouté.
Le mot « contradiction », en chinois, s'écrit avec deux idéogrammes. Le premier signifie « bouclier », le second « lance ». La lance est censée percer tous les boucliers, le bouclier, lui, résiste à toutes les lances. La contradiction est totale, nul ne peut en sortir, sauf celui qui peut fabriquer à la fois ce bouclier et cette lance. Un dieu, par conséquent, mais il a disparu, il se cache. La désolation de la négation règne partout.
À présent, sois attentif : Athéna passe dans le jardin, sous la forme de ta dernière amie de passage. Tu la vois de dos, elle ne sait pas qui elle est, sa grâce est éclatante, sa démarche lente et souple, comme si elle volait un peu au-dessus du gravier. Tu admires son cou, ses épaules, son chemisier bleu sombre à pois blancs qu'elle a l'habitude de mettre en descendant de l'Olympe. Elle n'est pas du tout là, bien entendu, et, si elle était là, elle n'aurait à te dire que des banalité courantes........
Philippe Sollers
Mouvement (2018)
Grecs, pp. 246-247
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dimanche, 24 juin 2018
une histoire de lectures : Sollers depuis 55 ans
Sollers, c'est une histoire de lectures qui commence difficilement en mars 1963. Je suis à Biskra dans la première année fastueuse et naïve de l'indépendance algérienne. Je m'offre pour mon anniversaire L'intermédiaire chez mon petit libraire algérien de la place Ben M'hidi. J'ai vaguement entendu parler d'Une curieuse solitude dans la presse, du parrainage de ce jeune auteur par Mauriac. Nous sommes de "la classe" ; j'ai su qu'il avait simulé une schizophrénie pour être exempté d'Algérie.
Pas emballé mais amusé par cette "Introduction aux lieux d'aisance" avec une très forte citation de Thérèse d'Avila en exergue : "Faites ce qui est en vous". Il me faudra attendre le retour en France, mes premières approches du Nouveau Roman — j'ai lu dans un numéro d'Esprit en 56 ou 57 sur le thème. N'en ai retenu que Nedjma de Kateb Yacine — je suis dans la théorie littéraire pour comprendre Robbe-Grillet, Michel Butor, Claude Simon que je peine à déchiffrer, j'achète donc L'écriture et l'expérience des limites. Mais... bof !
Sollers est enfoui pour vingt ans dans les sables de mon intellect qui répugne à ce qu'il estime être l'illisibilité. Il faudra en 1994 une traversée du golfe de Gascogne entre Nantes et Porto pour que je glisse dans mon sac Femmes, paru en 1983, acheté en 1984, à peine ouvert, déjà refermé pour dix ans. L'étirement des calmes de ce juillet 94 sur Biscaye me fera plonger dans la douce énumération des noms de femmes, Kate la journaliste, Cyd l'Anglo-américaine, Flora l'anar espagnole, Bernadette la féministe, Ysia la Chinoise, Louise la claveciniste, Deborah la "régulière"...
À peine débarqué j'enchaîne avec Portrait du Joueur, puis dans le même sillage, Le Cœur absolu. Chaque été verra désormais son Sollers de l'année en poche dans le sac marin pour meubler les heures de quart et la paresse des mouillages. Lectures entre délectation facile et détestation certaine.
Jusqu'aux essais sur Casanova l'Admirable, Vivant Denon le Cavalier du Louvre, Mystérieux Mozart, La Guerre du Goût, L'Éloge de l'Infini, Discours parfait et le gros tout dernier Fugues : alors là, j'aime. Pour le regard et la plume aigu.e.s et alertes du critique, que ce soit sur la langue, la peinture, la philosophie, la poésie chinoise, les nostalgies aquitaines d'Hoderlin...
Mais si je reviens à ces livres qu'il nomme "romans"qui oscillent entre fiction, autofiction, autobiographie — allez savoir ! —critique littéraire, notes de lectures, "copiages" sans vergogne — quelle liberté ! — pour épaissir le dos du livre,
Anxieuse réflexion de Stendhal : plaisait-il ? N'était-il pas « babilan » (autrement dit plus ou moins voué au fiasco par impuissance) ? Mais qu'est-ce que « plaire », pour un homme, sinon renvoyer à sa partenaire sa propre image magnifiée ? Il a « plu », Stendhal, mais rarement et pas longtemps. En réalité, il a perçu comme personne la profonde frigidité féminine assortie de ruses et simulacres divers, bref l'hystérie tantôt convenable et dévote, tantôt explosive pour dissimuler son vide. En termes décents du 19e siècle, on dira que Mme X ou Mme Y manque de tempérament, ou bien qu'elle en a un, mais factice. Stendhal veut atteindre ce point narcissique obscur. Il y parvient, et c'est l'amour, au sens cristallisé que ce mot peut prendre.
Trésor d'Amour, p.61
Je puis, chaque an qui passe, reprendre cette chronique. Depuis Trésor d'Amour, il y eut, toujours en poche, L'Éclaircie, Médium, L'École du Mystère. J'attendais Mouvements, Complots, Beauté.
En cet été commençant, dans les assoupissements béats et opiacés qui tentent d'effacer les lacérations trop aigües de l'acide urique, je "m'évaille" dans Mouvement où se mêlent, s'imbriquent, s'enlacent la Bible et quelques psaumes, Jonas et son foutu caractère, Job et ses amis faux-jetons, la dialectique de Hegel, la coke, Dante et ses cercles de l'Enfer, la seconde mort de Lazare, Pascal et les Pensées, de brèves phrases plagiées des Illuminations*, les incestueuses filles de Loth, les amantes multiples, simultanées et avec des retours du cardinal de Retz, des plus marquises aux belles servantes et je ne sais combien de poètes chinois — je vais, non les énumérer, mais bien les dénombrer dans l'ordre des millénaires et des siècles — trente-trois depuis Jin Yi, né en 200 avant notre ère et Mao lui-même, mort le 9 septembre 1976. S'ajoutent l'internet, Lascaux, google, les textos et leurs textomanes males et femelles…. et toujours les livres :
"les vrais livres, radicalement réveillés dorment à poings fermés, c'est leur force. Ces blocs de sommeil sont d'une lucidité incroyable. Je sais où les trouver et comment leur parler".
Mouvement, p. 65
J’attends donc pour meubler cette chronique la publication en poche de Complot et de Beauté.
Lecteur en suspens !
* "Sorti de là, — de la grotte de Lascaux — à l'aurore, je pourrai entrer ni vu ni connu, armé d'une ardente patience aux splendides villes".
"Et j'ai longtemps habité sous de vastes portiques"
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jeudi, 25 janvier 2018
Il y a quarante ans...
... Il s'en allait. Marchait-il sur les eaux de la baie de Douarnenez ? Je ne sais. Par delà le siècle, je le salue, me fustigeant de ne point le lire assez assidument.
Il avait écrit :
"Chaque fois qu'on lit un poète mort, on le re-suscite."*
je relis Georges PERROS.
*Papiers collés III, coll. Le Chemin, Gallimard 1978.
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vendredi, 11 août 2017
répondre à René Char
En octobre 1938, le huitième Cahier G.L.M. publie le texte d'une enquête anonyme: « La Poésie indispensable » - sorte de manifeste sur le statut de la poésie - à laquelle les lecteurs sont invités à répondre en citant vingt poèmes* qu'ils jugent «indispensables» non pas en référence à l'idée qu'ils se font de la culture, mais à celle, plus essentielle, de leur existence.
Le texte de l'enquête a été rédigé par Char qui livre sa propre réponse, sous son nom et à la suite du texte.
Jean Arp, André Breton, Roger Caillois, Robert Desnos, Francis Curel, Paul Eluard, Pierre-Jean Jouve, Gilbert Lely, André Masson, Benjamin Péret, Philippe Soupault... et d'autres encore répondent dans le cahier suivant.
* Pourquoi 20 ? A cause de l'incommodité de ce nombre. Mais vous êtes invité à motiver votre désaccord.
ENQUÊTE DANS LES CAHIERS G. L. M.*
LA POÉSIE INDISPENSABLE
Questionnaire.
Soit duplicité soit ignorance, les conducteurs écoutés de la Poésie soulèvent de moins en moins de protestations de la part de l'ensemble des lecteurs contre leur volonté grossière de réduire à nouveau cette Poésie aux dimensions gracieuses, inoffensives ou politiquement utilisables (excluant alors merveilleux, érotisme, humour et fantastique, dénoncés hypocritement comme facteur de confusion et d'ankylose), que l'esprit bourgeois et un certain opportunisme révolutionnaire n'ont jamais désespéré d'imposer. Cette démarche va à l'encontre de l'interrogation creusante, en permanence posée à l'homme — ce briseur de satisfactions —, par la simplicité sans limites de son devenir autant que par l'essence magique de son origine (en proie aux déchirements des milieux contradictoires où il circule, en proie à son angoisse, à son mal-être, aux rapports non fondamentaux avec les structures des sociétés, en proie aux allégresses tranchantes, en proie à de subtiles nausées, etc.).
NOUS VOUS POSONS LA QUESTION SUIVANTE :
Contre toute tentative d'annexion, de stabilisation, d'estimation bornée de la Poésie, désignez-nous vingt poèmes, sans restriction de pays ni d'époque, dans lesquels vous aurez reconnu l'INDISPENSABLE qu'exige de vous non pas l'éternité de votre temps mais la traversée mystérieuse de votre vie.
1937
in La Recherche de la Base et du Sommet
Ma réponse à René CHAR
Tardive, certes.
Quatre-vingts années après le lancement de cette enquête !
Mais il a bien fallu soixante-dix ans au lecteur depuis son enfance, avec cette récitation scolaire du sonnet XXXI de Du Bellay, jusqu'au seuil désormais franchi de la vieillesse, avec quelques pages de Quignard, pour "reconnaître l'Indispensable" qui m'aura été nécessaire à la traversée.
Le premier — ai-je dix ans ? —
Les Regrets de Joachim Du Bellay
Les Chimères de Gérard de Nerval
Cinq grandes Odes de Paul Claudel
Les Illuminations d’Arthur Rimbaud
Hélène ou le règne végétal de René Guy Cadou
Feuillets d'Hypnos de René Char lui-même
La nuit remue d’Henri Michaux
Le Divan du Tamarit de Federico Garcia Lorca
Amers de Saint-John Perse
Les Noces suivi de Sueur de sang de Pierre Jean Jouve
Les Essais de Michel de Montaigne
Fragments d’Héraclite
L’Odyssée d’Homère
L’Homme foudroyé de Blaise Cendrars
Le Chant du Monde de Jean Giono
Haïkaï de Bashô
Nedjma de Kateb Yacine
Le Fou d’Elsa de Louis Aragon
La Presqu'île de Julien Gracq
Sur l'idée d'une communauté de solitaires de Pascal Quignard
— le vingtième — et je suis entré dans les octantes ! —
Vingt poèmes ?
Mais qu'est donc un poème ?
Sinon le singulier matériau d'une langue.
Ces vingt livres, m'ayant ouvert au-delà de leurs vingt titres, quasi l'œuvre entier de ces vingt poètes, philosophes, romanciers, essayistes, m'ont livré, les uns et les autres, à travers un vers, une strophe, un sonnet, quelques lignes, deux paragraphes, une page, dix pages, cent pages, l'entier de leurs chapitres, l'INDISPENSABLE de ma vie, pour mieux vivre le pays natal, l'océan et ses îles d'enfance, la langue et ma parole, la Femme, l'Autre, les compagnonnages, la guerre, les voyages et les îles aux rivages inconnus et encore et toujours l'AUTRE, dans les interrogations et la beauté, dans le retour de "tout l'avenir au présent"**....
Et quand Char invite au désaccord pour les vingt textes, c'est qu'il me faudrait en citer et dix et vingt autres : d'abord des femmes, Sapho, Louise Labé, Marguerite Yourcenar, Assia Djebar, Simone Weill, Barbara Cassin, toutes veilleuses au ventre libertaire ; puis encore parcourant les temps de la langue, Jaufré Rudel, François Villon, Victor Segalen, Gaston Bachelard, Jorge Luis Borgès, Roland Barthes, Pierre Guyotat, Antonio Lobo Antunès, coups de boutoir dans les certitudes, soulèvements dans le morne des jours, irruptions incandescentes dans les ténèbres de la mort, apaisements sur les ravages des cruautés...
S'il leur plaît,
que les lectrices et lecteurs de ce blogue
répondent, Elles et Eux,
à René CHAR !
Nous sommes au delà du temps.
La Bibliothèque de René Char
Vieira da Silva
* G. L. M., trois initiales pour l'éditeur Guy Lévis Mano, imprimeur, éditeur, poète, qui imprima et édita quelques œuvres de René Char, comme Dehors la nuit est gouvernée précédé de Placard pour un chemin des écoliers ou Sur la Poésie 1936 - 1974
** Lettre de René Char à Albert Camus, le 4 octobre 1947.
16:22 | Lien permanent | Commentaires (1)