mardi, 18 novembre 2008
retour à Mallarmé
Dans ma note de mercredi passé, j’évoquais mon inscription à l’atelier “Poésie et philosophie selon Mallarmé”, proposé dans le cadre de l’Université permanente par André Stanguennec. Le vide-grenier gracquien et de fréquents allers et retours sur le VendéeGlobe— passionnant Pot-au-noir — ont pertubé l’approche de mon petit chantier 2008/2009.
Petit ? Peut-être est-il trop énorme pour ma petite comprenoire...
Je me suis trouvé un bon passeur : Claudel, dans ses Mémoires improvisés !
« ...il y a une parole de lui (Mallarmé), qui, au contraire, a profondément marqué mon intelligence, et qui est à peu près le seul enseignement que je reçus de lui, et c'est un enseignement capital : je me rappelle toujours un certain soir où Mallarmé, à propos des naturalistes, de Loti ou de Zola, ou de Goncourt, disait :
« Tous ces gens-là, après tout, qu'est-ce qu'ils font ? Des devoirs de français, des narrations françaises. Ils décrivent le Trocadéro, les Halles, le Japon, enfin tout ce que vous voudrez. Tout ça, ce sont des narrations, ce sont des devoirs. »
Je crois que c'est intéressant de voir cette remarque dans la bouche d'un homme qui était lui-même professeur. Il était professeur d'anglais. Et alors, c'est là où la remarque est importante. Moi, il m'a dit : « Ce que j'apporte dans la littérature, c'est que je ne me place pas devant un spectacle en disant : "Quel est ce spectacle ? Qu'est-ce que c'est ?", en essayant de le décrire autant que. je peux, mais en disant : "Qu'est-ce que ça veut dire ?" »
Cette remarque m'a profondément influé et depuis, dans la vie, je me suis toujours placé devant une chose non pas en essayant de la décrire telle quelle, par l'impression qu'elle faisait sur mes sens ou sur mes dispositions momentanées, mes dispositions sentimentales, mais en essayant de comprendre, de la comprendre, de savoir ce qu'elle veut dire. Ce mot de “veut dire” est extrêmement frappant en français, parce que “veut dire”, ça exprime une certaine volonté. »
Un petit brin de laine venant du gros grand Claudel !
Qui éclaire cette brève de Mallarmé :
Narrer, enseigner, même décrire, cela va et encore
qu'à chacun suffirait peut-être pour échanger la pensée
humaine, de prendre ou de mettre dans la main d’autrui
en silence une pièce de monnaie, l'emploi élémentaire
du discours dessert l'universel reportage dont, la littérature
exceptée, participe tout entre les genres d'écrits
contemporains.
À quoi bon la merveille de transposer un fait de
nature en sa presque disparition vibratoire selon le jeu
de la parole, cependant; si ce n'est pour qu'en émane,
sans la gêne d'un proche ou concret rappel, la notion
pure.
Je dis : une fleur ! et, hors de l'oubli où ma voix relègue
aucun contour, en tant que quelque chose d'autre que
les calices sus, musicalement se lève, idée même et suave,
l'absente de tous bouquets.
Crise de vers, p. 259
Divagations, Poésie/Gallimard
Ce sera quand même ardu !
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samedi, 15 novembre 2008
fin de brocante luxueuse
Pour FB
Quand je suis arrivé mercredi après-midi avec un quart d'heure de retard sur l'ouverture des portes du "hangar", seule ma taille relativement grande m'a permis d'entrevoir du seuil ces têtes et un homme agitant un marteau sur une estrade.
Mon arrivée coïncidait avec un moment intéressant pour mes intérêts en poésie : on adjugeait Commune présence de René Char — édition originale, sur vélin bouffant Téka, portant un envoi autographe signé sur le faux-titre à Julien Gracq/en amitié fidèle/René Char — pour la modique somme de plus de 2 400 € ! Avec les Chants de la Balandrane, il est vrai ! Me contenterai de mon exemplaire n°1621 de la collection Soleil, dont le titre fut tiré à trois mille exemplaires, en 1964, reliure exécutée par Babouot, d'après la maquette de Massin...
Je crois savoir que le texte est le même !
Et pendant ce temps-là, dans la grisaille d'un jour d'automne un peu triste comme scellant le définitif inventaire d'un très vieil écrivain défunt, sous la passerelle Victor Schoechler, le Fleuve, jamais deux fois le même ....
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jeudi, 13 novembre 2008
Les Armateurs — introduction à « Corsaires & Marins Nantais »
LES ARMATEURS
Si l'aumône généreuse est un signe de richesse pour ceux qui la dispensent, les armateurs et négociants de Nantes furent de bonne heure favorisés des dons de la fortune.
Dès le VIe siècle, en effet, nous les voyons « jeter à l'envi leur argent » à saint Germain de Paris, lors de son passage à Nantes, « pour le distribuer aux pauvres » (1) et nous ajouterons, à l'honneur de nos armateurs, qu'ils surent conserver ces traditions de générosité, et que toutes les institutions charitables de notre ville les ont comptés parmi leurs fondateurs ou leurs donateurs les plus désintéressés.
Appartenant à de vieilles familles nobles, ou annoblis par les Rois pour les services qu'ils rendaient au pays, les armateurs de Nantes, — les Marchands à la Fosse, comme on les appelait alors, — actifs, entreprenants, à l'affut de toutes les aventures et de toutes les découvertes, peuplèrent les mers de hardis marins, et nos colonies lointaines d'infatigables pionniers. Partout on trouvait des Nantais ; les grandes maisons d'armement de notre ville possédaient des comptoirs sur tous les points de notre immense empire colonial d'alors ; les armateurs y envoyaient leurs fils ; et même ne craignaient pas d'y passer de longues années, emmenant avec eux toute leur famille de l'autre côté des mers.
De retour à Nantes, ils faisaient construire ces superbes demeures de la Fosse ou de l'île Feydeau, bien plus palais que maisons, et qui, après avoir fait l'admiration de tous les voyageurs pendant près de deux siècles, sont encore dignes de figurer au nombre des édifices les plus remarquables de notre ville.
D'ailleurs, les Marchands à la Fosse n'étaient pas simplement de paisibles commerçants ; et dans un temps où la marine militaire de l'État, encore très faible et mal organisée, faisait un constant appel à la marine de commerce et à l'initiative privée, les armateurs de Nantes prirent rapidement une place glorieuse parmi ces auxiliaires volontaires de nos escadres,
Souvent, en effet, nous verrons les Rois accorder aux navires nantais les prérogatives des navires de guerre de l'État ; leur permettre d'arborer au grand mât la flamme distinctive des unités d’escadre, et conférer à leurs capitaines le grade de capitaine de frégate ou de corvette. Très souvent aussi, nous pourrions dire à chaque guerre de notre histoire, ces mêmes Rois, confiants dans le courage de nos corsaires, invitaient les Marchands à la Fosse à armer en Course, et leur délivraient des lettres de marque pour les autoriser à armer leurs navires en guerre et à courir sus aux Anglais.
(1) A. DE LA BORDERIE, Histoire de Bretagne, t. 1, p. 535.,
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mercredi, 12 novembre 2008
enfin Mallarmé vint
Je suis parti lundi matin, avec en bandoulière, Selon Mallarmé de Paul Bénichou, un peu défraîchi, les derniers feuillets froissés par une vague sournoise qui avait pénétré par le hublot ouvert, il y a bientôt près de dix ans.
Durant les cinquante-six jours de la traversée du Pacifique, j’avais tenté d’ouvrir un “chantier” Mallarmé pour dépasser les souvenirs lycéens des Classiques Larousse qui le cantonnaient dans le Symbolisme à la suite de Verlaine, de Rimbaud, de Henri de Régnier, de Samain en me donnant à lire L’Azur, Le Vierge le Vivace et le Bel... et le Tombeau d’Edgar Poe.
Demeurait en moi de ces années bachelières, l’émerveillement pour sa syntaxe dont j’appréciais le rythme rompu, déhanché, qui me laissait entrevoir une nouvelle langue. La mise en bouche d’un texte mallarméen m’a souvent laissé pantois de plaisir.
Insatisfaction cependant : cet homme laissait pressentir un horizon trop incompréhensible encore et les cinquante années de lecture de textes contemporains — pas mal d'entre eux avouant une influence mallarméenne — ont encore laissé vierge l’appréhension de cette œuvre.
L’approche de Bénichou fut une avancée dans un pas à pas, poème après poème. Je m’acclimatais au poète, je me questionnais sur l’homme de théorie et de méthode.
Lundi matin, dans le tramway m’emmenant aux Chantiers, pour suivre un atelier autour de Poésie et Philosophie selon Mallarmé, c’était donc l’Océan qui me rattrapait. Encore et toujours une histoire de mer :
Au seul souci de voyager
Outre une Inde splendide et trouble
— Ce salut va, le messager
Du temps, cap que ta poupe double
Comme sur quelque vergue bas
Plongeante avec la caravelle
Écumait toujours en ébats
Un oiseau d'ivresse nouvelle
Qui criait monotonement
Sans que la barre ne varie
Un inutile gisement
Nuit, désespoir et pierrerie
Par son chant reflété jusqu'au
Sourire du pâle Vasco.
Poésies — édition Deman
Il n'est pas sûr que le navigateur portuguais fut si désintéressé que le laisse entendre Mallarmé, célébrant en Vasco la passion sans limite de la découverte. Belle, cependant, l'utopie.
11:48 Publié dans "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (0)
mardi, 11 novembre 2008
merdre ! ce n'était pas le bon !
Eh, oui ! Ce n'était pas le bon fauteuil.
Les traces des séants littéraires accueillis par monsieur Louis Poirier auraient été gardées par ses héritiers. Un honneur de conserver le passage des nombreux culs lettrés...ou autres, d'ailleurs.
Les héritiers des héritiers braderont le fauteuil sans doute un jour lors d'un lointain vide-grenier, les traces ayant été effacées, puis oubliées.
Dans le vide-grenier, il y avait aussi un échiquier
un livret scolaire, appartenant à un lycéen d'élite,
et pendant ce temps-là... jamais deux fois le même, le Fleuve ! Le sien, le mien, le nôtre, le leur.
14:09 Publié dans les diverses | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 10 novembre 2008
le "vide-grenier"
Je l'ai vu, ce fauteuil qui s'avachissait sur les séants des visiteurs de monsieur Louis Poirier.
"Couton & Veyrac est un hôtel des ventes qui tient plus du lieu que, dans sa rage, FB nomme un "vide-grenier". Mais c'est un vide-grenier pour porte-feuilles garnis, un méchant hangar à deux pas du cimetière de Miséricorde et du recoin de la place Viarme où Charette (!) fut fusillé.
Dans quelques vitrines, il y a l'éclat de grands livres et de belles écritures fines.
Le fauteuil ? Je ne sais pas ! moi ! les héritiers qui bradent, ils auraient pu l'offrir à l'un ou l'autre des derniers séants littéraires qui se sont enfoncés dedans.
À FB, par exemple. Ou à Régis Debray !
22:12 Publié dans les diverses | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 08 novembre 2008
prière d'insérer
Voilà que ces jours derniers, dans la tête du blogueur, se mêlent et l'atelier de Grec ancien et le VendéeGlobe et la littérature. Ce ne sont qu'histoires de mer !
Tout a commencé jeudi matin avec un travail de reprise en douceur sur le texte rebattu de l'Anabase de Xénophon : Thalassa ! Thalassa !
Je passe, rue de la Fosse, chez Coiffard, je dois y retirer Les quatre saisons de Ronsard, et de Mallarmé, Divagations, en Poésie/Gallimard, je cherche en vain les Carnets d'un vieil amoureux, je tombe sur Boutès, déjà feuilleté en octobre et qui m'avait frappé par un pré-texte que je pensais être une introduction ou un exergue, qui s'avère être un prière d'insérer, un vrai, feuillet encarté — ainsi jadis adresse de l'éditeur au critique —, Boutès narré par Pascal Quignard, ce lecteur fasciné et fascinant des Latins et des Grecs — je me demande si ce n'est pas sous l'influence de mes lectures de Quignard que j'ai repris l'étude du Grec ancien.
Un prière d'insérer qui concentre en quinze lignes le mythe des Sirènes, les Argonautes et Ulysse et qui s'achève dans la concision d'une chute :
« Seul Boutès sauta.»chute paradoxale qui ne ferme pas, mais ouvre en surprenant le lecteur ignorant. Ce prière d'insérer comme une vie pré-natale du texte qui nous est offert dans les pages suivantes — Quignard explorateur de notre vie "ante". N'en déplaise à Gérard Genette*, cette page est bien adresse non au critique, mais au lecteur;
Boutès**, l'un des cinquante Argonautes, me relance vers ces trente Argonautes contemporains qu'entre deux phrases de version grecque, quelques poèmes de Mallarmé et les dix chapitres du Boutès de Quignard, je vais suivre passionnément, trois mois durant.
* Gérard Genette, Seuils, coll. Poétique, au Seuil, 1987 : un merveilleux bouquin sur l'alentour du livre, le "paratexte", tout ce qui enserre le texte et lui fait référence, mais qui n'est pas le texte?
** Apollodore dans La Bibliothèque, I, 9, 25.
20:53 Publié dans Les antiques, les lectures, les marines, quelquefois Quignard | Lien permanent | Commentaires (0)
jeudi, 06 novembre 2008
Les chantiers de construction navale — introduction à "Corsaires et Marins Nantais"
LES CHANTIERS DE CONSTRUCTIONS NAVALES
Dans la Description de la Ville de Nantes... par un des habitants de cette Ville imprimée en 1646, on peut lire cette phrase :
« ... Aussi sçavons-nous que de tous tems on y a bâti très grand nombre de vaisseaux, et les plus beaux de la France. »Dès l'occupation Romaine, en effet, l'embouchure de la Loire possédait des chantiers de constructions navales ; et nous savons, par les Commentaires, que César donna l'ordre à son lieutenant Crassus d'y construire des galères, lui recommandant de choisir des formes fines et élancées, afin d'éviter plus sûrement les bancs de sable : Naves longuas œdificari in flumine Ligeri. II semble difficile, toutefois, de placer à Nantes ces chantiers de constructions, si l'on observe que les galères ordonnées par César étaient destinées à combattre la flotte des Venètes, et que les Namnètes étaient alors les alliés de cette vaillante peuplade. Aussi serait-il plus vraisemblable de les supposer sur une rive favorable aux Romains, par exemple à Ratiatium, déjà occupé par leurs cohortes.
Jusque vers la fin du XVIe siècle, les chantiers de constructions navales nantais furent situés au Port-au-Vin (place du Commerce). Transférés en 1583 sur le quai de l'Ile-Gloriette, ils se trouvaient en 1738 à l'embouchure de la Chézine, comme en témoigne l’Arrest du Conseil d'Etat du Roy en date du 18 juillet 1738, relatif à la construction des vaisseaux à la Chézine. Ces chantiers étant devenus insuffisants, les constructeurs en établirent un autre au pied des carrières de Miseri, et l'Apollon (1), le premier navire construit sur ces nouvelles cales, y fut lancé en 1745, Enfin, en 1780, les derniers chantiers de la Chézine furent transférés à la Piperie, en Chantenay. Notons également que, tant que Paimbœuf servit d'avant-port à Nantes, les constructeurs nantais y établirent des chantiers, et qu'un grand nombre de navires de guerre et de commerce y furent mis à l'eau. On pourrait en dire autant de Vertou et de Basse-Indre, où nos constructeurs possédaient également des cales et des chantiers.
Les navires construits à Nantes avaient une réputation justement méritée de vitesse et de bon marché. Une lettre de la Cour, adressée le 1er janvier 1786 à l'Administration de la Marine à Nantes, nous marque, en effet, que les navires construits dans cette ville coûtaient un tiers moins cher que ceux construits en Angleterre ; il est vrai, par contre, qu'ils ne duraient en moyenne que de douze à quinze ans, tandis que ceux de nos rivaux fournissaient une carrière d'à peu près vingt-et-un ans.
En 1793, le ministre Monge, auquel le commerce nantais s'était adressé pour demander qu'il soit construit à Nantes trente bâtiments de guerre, répondait, à la date du 22 février, qu'il pensait en effet :
« que pour augmenter nos forces navales, la rivière de Nantes offrait des avantages trop réels pour les négliger. J'ai donne ordre en conséquence, — ajoutait-il, — d'y construire des frégates et des corvettes, et il va être incessamment envoyé des plans sur lesquels on opérera. »
De fait, durant la Révolution et l'Empire, les chantiers nantais firent preuve d'une activité intense ; et, d'après un état nominatif de l'Administration de la Marine, nous constatons que de 1797 à 1846, les frères Crucy construisirent, à eux seuls, cinquante-sept bâtiments pour le compte de l'Etat, dont dix vaisseaux de 74; quatorze frégates; cinq corvettes ; deux flûtes et douze bricks ; et radoubèrent 382 bâtiments de toute espèce.
A l'avènement de Louis XVIII cependant, les chantiers de Nantes, en ce qui concerne la marine militaire du moins, avaient été supprimés ; « il semble inutile, — écrivait le ministre, — de conserver à Nantes un chantier de navires ». À ce moment, quatre bâtiments destinés à la marine militaire étaient en construction ; deux bricks : le Huron et le Silène, qui furent lancés peu après, et deux frégates : l'Armide et l'Astrée, qui furent démontées et transportées dans un port de guerre pour y être achevées.
Parmi les navires les plus célèbres sortis des chantiers nantais, nous signalerons rapidement :
Les deux grandes carraques de 1.000 tonneaux chacune, construites en 1496 par ordre de Charles VIII.
Le vaisseau la Nonpareille, construit sous François Ier, et appelle ainsi « pour sa démesurée grandeur ».
Les vaisseaux le Grand-Henry et le Grand-Carraquen, « les plus grands qu'on n'ait point vus en nostre Océan », construits sous Henri II.
L'Apollon, lancé en 1745 aux chantiers de Miséri.
Le navire La Rosière d'Artois, lancé en 1777 aux chantiers de la Chézine, en présence du Comte d'Artois, depuis roi de France sous le nom de Charles X.
La corvette la Jacobine, lancée à Basse-Indre en 1794.
La frégate la Loire, donnée à la République par le commerce nantais, et lancée en 1796.
La frégate la Méduse, mise à l'eau à Paimbœuf, en juin 1810, et dont tout le monde connaît la fin tragique.
Les frégates l'Aréthuse et le Rubis, lancées en 1812 ; l'Étoile et la Sultane, en 1813.
Le Fils-de-France, lancé en 1818, et dont le duc d'Angoulême, grand amiral de France, avait posé la quille l'année précédente.
L'Arche-d'Alliance, lancée en 1845.
La frégate blindée le Castelfidardo, construite en 1862 pour le compte du gouvernement italien.
Les frégates la Belle-Poule, l'Andromaque, la Créole, l'Heureuse, la Chiffonne, la Renommée, la Flèche, la Curieuse, la Pallas, la Minerve, la Néréide, la Gloire, etc., construites à différentes époques, et qui fournirent des carrières brillantes dans nos Annales maritimes.
L'aviso l'Épervier, commandé d'abord par le capitaine Halgan, plus tard vice-amiral ; puis par le lieutenant de vaisseau Jérôme Bonaparte.
Enfin, les corsaires le Duc-de-Bourgogne, le Saint-Adrien, la corvette Actéon, le brick l'Oiseau, le Vautour, le Duguay-Trouin, le Barbier-de-Séville, l'Eugénie et la Nouvelle-Eugénie, le Voltigeur, le Chéri, etc, en un mot, toute une flotte d'intrépides corsaires, spécialement construits pour la Course sur nos chantiers, et dont nous aurons maintes fois l'occasion de raconter les prouesses.
__________________________________________________
(1) Au cours de cette étude, tous les noms de navires nantais, construits ou armés à Nantes, ainsi que ceux commandés ou montés par des Nantais seront écrits en caractères gras, ceux qui luttèrent contre les navires nantais, furent amarinés par eux, ou, au contraire, les enlevèrent, seront indiqués en CAPITALES ; enfin, tous les autres navires que nous aurons à mentionner incidemment, français ou étrangers, seront désignés par des caractères italiques.
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mercredi, 05 novembre 2008
embellie automnale
Dac'hlmat ventilé par la légère brise de suet, soleil à profusion, silence à peine troué par l'aboiement lointain d'un chien : bonheur d'une sieste philosophe en bouquinant Le Christianisme hédoniste d'Onfray, tome II de sa Contre-histoire de la philosophie .
J'avais achevé ma journée de lundi sur la prééminence du juste sur le vrai ; Onfray me fait découvrir, dans le capharnaum sectaire des Gnostiques qui suit l'effacement des Antiques et accompagne l'avènement du Christianisme, Épiphane qui, à peine âgé de dix-sept ans au commencement du IIe siècle de notre ère, écrit un traité De la Justice qu'Onfray qualifie de brûlot qui semble pouvoir être dit anarchiste tant il voue aux gémonies les dieux de papier, d'argent et de fumée célébrés par la plupart des vivants.
Un Père de l'Église, Clément d'Alexandrie, peu enclin à l'indulgence face aux Gnostiques, sauvera quelques-unes des idées du traité d'Épiphane, que Jacques Lacarrière nomme un "Rimbaud gnostique"*.
Me voilà renvoyé dans la douceur de l'après-midi à ma sentence de la veille au soir. Y a-t-il si grand écart entre Épiphane et ma "grande vieille" des Aurès, Germaine Tillion ?
Le Juste serait-il valeur moins pérenne que le Vrai ?
Nicléane est revenue de sa promenade dans les collines avec un plein cageot de pommes de Chailleux qu'elle a ramassées dans un pré laissé en friche.
Le soir, après avoir longé la côte de Piriac, nous sommes passés par Guérande, GwenRan, le Pays blanc. Des années, que nous n'étions pas entrés dans l'enceinte des remparts. La petite ville d'été des Ducs est devenue un clinquant lacis de rues à touristes en mal de celtitude. Seuls, les chocolatiers échapperaient à ma rogne.
* Les Gnostiques de Jacques Lacarrière. Je ne cite ce site (!!!) que pour la seule lecture de l'extrait concernant Épiphane.
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lundi, 03 novembre 2008
le vrai et le juste
Cet apès-midi, je déroge à mon principe de n'acheter que chez mes libraires, je suis tombé, au Centre culturel du Leclerc de la route de Pornic, sur le tome II de la Contre-Histoire de la philosophie de Onfray, ...en poche évidemment. Trop onéreux en broché. J'avais enregistré en 2004 les six cours sur Montaigne. Précieusement. Le rendu écrit est ponctué de sous-titres rapportés au corps qui, déjà, me font salivé le "mens" : l'étrangeté à soi-même, une parole couchée, le corps aéré de la voix, avoir dans la bouche une langue morte, excréments, fagotage et fricassée, une pensée du fleuve, des baisers dans la moustache...
J'avais entendu, je vais lire.
Plus tard, j'ai glissé dans mon dossier Lectures de Toile, de Delaume, la belle guerrière, S'écrire, mode d'emploi et de FB, Exercice de la littérature. Mais n'ayant point encore de "liseuse", je suis astreint au déroulement vertical du volumen que m'impose le fomat PDF ; je ne suis guère à l'aise dans cette espèce de régression que m'imposent et la numérisation d'un texte et mon impécuniosité. Certaine me dirait : ou le bateau ou la littérature !
Avant le sommeil, je lis ceci sur un papier, glissé du sous-main :
Dire le vrai ne suffit pas, il faut dire le juste.De Germaine Tillion.
Demain, je fais un tour du côté de la Vilaine pour ensoleiller Dac'hlmat, mon bon voilier. Voilà pourquoi je n'ai pas encore de liseuse".
Une pensée du fleuve, quoi !
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dimanche, 02 novembre 2008
le cœur des arbres : dialogue
Dialogue entre Ruth Stégassy et Francis Hallé, botaniste, un samedi passé dans "Terre à terre"* :
— Si on creuse un arbre pour en trouver le cœur, le cœur de l'arbre c'est déjà lui. C'est déjà l'arbre qu'il était quand il était jeune.
— C'est admirable, ça, en effet.
— Un arbre garde en lui toutes le étapes de sa croissance ; donc, le cœur de l'arbre , c'est l'arbre le plus jeune qui est en même temps le plus ancien.
— L'arbre qui est à la fois le plus jeune et le plus vieux. L'artiste italien, Giuseppe Penone **, en retirant le vieil arbre, retrouve le jeune arbre avec ses branches au cœur du vieux tronc.
Je n'envie point l'immortalité des plantes et des arbres, telle qu'elle fut envisagée, précédant et suivant ce dialogue, un vrai dialogue pour un jour des Morts — tous ces cadavres passés et à venir, le vôtre et le mien entre autres, qui nourrissent et nourriront l'immensité végétale.
Cependant, je me satisferais bien de cette étonnante métaphore pour justifier de l'inévitable vieillissement allié à la jeunesse pérenne et du cœur et du mental.
* À propos de la parution de l'ouvrage collectif Aux origines des plantes, sous la direction de Francis Hallé, chez Fayard,
Tome 1 : Des plantes anciennes à la botanique du XXIe siécle
Tome 2 : Des plantes et des hommes.
Dommage que le prix....!
** Sur Penone, visiter le site du Centre Pompidou.
Post-scriptum :
Je m'étais avisé d'aller bidouiller dans ma feuille de style pour rétablir des couleurs qui s'affadissaient et des polices qui s'engraissaient.
Je me suis si bien "paumé" que le dérèglement fut général et que je n'ai pu retrouver le petit équilibre que Ya m'avait aidé à établir trois années durant.
Je souhaitais une meilleure lisibilité ; j'ai opté d'abord pour un fond "noir" estimé trop pompeux, je me retranche dans le gris. Mais ces barres verticales qui soulignent le retrait (ou rentrée ou renfoncement) dit "citation en exergue" mise en œuvre par le "blockquote" m'horripilent, je crains de retomber dans la pétaudière si j'efface des balises qui sont innocentes de ces vilaines barres verticales. Une barre, ça passe, deux, ça casse !
15:23 Publié dans les autres... arts | Lien permanent | Commentaires (2)
samedi, 01 novembre 2008
temps de Toussaint
Vrai temps de Toussaint : vent de Nordet et battant les vitres, une pluie froide.
Temps de Toussaint ne réjouit point le marin
Un temps à mouiller l'ancre de Dac'hlmat dans l'anse d'Er Salus, mer plate et gréément hurleur, j'aime. Mais aujourd'hui ce sera temps à se calfeutrer dans la "librairie" avec de bons livres et des musiques — temps à écouter du Wagner et son Vaisseau Fantôme !
Temps des saints, temps des morts, de mes morts, de ma morte.
Me reviennent souvent en ces jours de novembre ce que j'ai appris — naguère ? jadis ? — lors d'un trop bref séjour chez les Dogons : par des rites funéraires, qui entraînent le mort hors du domaine terrestre, les Dogons vont rompre les dernières attaches du défunt avec sa vie passée ; de son état de "mort", il passe, par la rupture de ses outils d'homme, au statut d'ANCÊTRE vivant.
Ancêtre qui vient du latin "antecessor", celui qui précède, d'abord attesté, non comme lointain aïeul, mais comme terme commun au sens de « éclaireur ».
Les ancêtres comme des éclaireurs !
Les Dogons ne sont pas loin de nous proposer une amorce de réponse, incertaine certes comme toutes les réponses, qu’elles soient celle du croyant, avec la foi et l’espérance en un au-delà, plus juste, qu’elles soient celles de l'incroyant — ce que je suis devenu — dans le désespoir et la béatitude de l’épicurien ou du stoïcien, une réponse donc à l’au-delà de cette vie, à notre interrogation sur l'immortalité .
Ce que les Dogons nous disent, c’est cette exhortation fraternelle : « Et si c'était de notre ressort à nous, les encore vivants, de continuer nos morts bien au delà du simple et pieux souvenir ? D’entretenir à travers nos enfants et les enfants de nos enfants, la force vitale et les vertus qui animaient les actes du mort ! »
René Char rejoignait les Dogons écrivant ceci qui pour moi, dans la lumière de la mort des aimées et des vieux copains, prend encore davantage sens :
Avec celui que nous aimons, nous avons cessé de parler, et ce n’est pas le silence. Qu’en est-il alors ? Nous savons, ou croyons savoir. Mais seulement quand le passé qui signifie s’ouvre pour lui livrer passage. Le voici à notre hauteur, puis loin, devant.
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vendredi, 31 octobre 2008
Les Origines - introduction à "Marins et Corsaires Nantais"
INTRODUCTIONLES ORIGINES
L'an de la création du monde 2888 — si l'on en croit la légende, — 308 ans avant la fondation de Rome et 1061 ans avant Jésus-Christ, Brutus de Troie, arrière-petit-fils d'Enée, errant à travers les Océans avec un petit groupe de Troyens, remonta l'estuaire d'un large fleuve, sur la côte des Celtes, et s'établit avec ses compagnons dans le lieu qui, plus tard, devint Nantes.
Quelle que lointaine que soit cette origine, elle n'a pas paru suffisante cependant pour satisfaire tous les vieux Chroniqueurs ; et pour un grand nombre de nos anciens historiens, Nantes aurait été fondée par Namnès, descendant de Japhet, fils de Noë, à une époque contemporaine de la Tour de Babel (1).
Si, écartant ces origines légendaires sur lesquelles il est inutile d'insister autrement qu'en les citant, nous recherchons la date de la fondation de Nantes, et l'histoire vraie de ses origines comme port de mer, nous sommes obligés d'avouer que nous ne savons rien de ce qu'était notre ville avant l'occupation romaine. Arguant de certaines pièces d'or antérieures à la venue de César, trouvées aux environs de la ville, et échafaudant sur ce léger indice une construction savamment édifiée, certains auteurs prétendent que la civilisation était déjà très florissante sur les rives de la Loire, et que, bien avant la conquête romaine, le port des Namnètes, l'un des plus anciens et des plus riches de la Gaule, jouissait d'une prospérité commerciale excessivement développée.
D'autres, au contraire, — et ceux-là sont plus près peut-être de la vérité, — ne voient dans ce très ancien Nantes, qu'un faible Oppidum gaulois ; une bourgade de peu d'importance, nullement maritime ni commerciale encore, et dont les habitants semblent avoir ignoré totalement l'usage du fleuve, si ce n'est pour y placer leurs primitifs engins dépêche.
De la conquête Romaine prend donc date, — historiquement du moins,— la naissance du port de Nantes ; et nous aurons l'occasion de constater qu'il devint, dès cet instant, l'un des plus prospères de nos côtes.
Depuis cette époque, il n'a pas cessé de se perfectionner et de s'accroître ; passant, il est vrai, par des alternatives de prospérité et de décadence profonde, et toujours en lutte avec le fleuve.
Lutte incessante du port qui veut de l'eau, et du fleuve qui ne lui apporte que du sable ; lutte incessante du tonnage des navires qui augmente et du tirant d'eau qui diminue ; lutte enfin qui a enregistré des défaites et des victoires pour les deux partis, mais qui, — Nantes peut en être sûre parce qu'elle le veut fermement, — prendra fin par le triomphe définitif du port sur ses deux ennemis qui l'assaillent et semblent vouloir le combler : le sable qui descend, et la vase qui monte.
Alternatives de défaites et de victoires, disons-nous, et il est intéressant de noter sur la carte de l'embouchure de ce fleuve rebelle, les phases les plus importantes du gigantesque combat. Au lendemain de l'occupation Romaine, le port de Nantes, le Portus Namnetum, envahi par les sables, est peu à peu abandonné pour son rival, le port des Pictons : Ratiatium (Rezé), où se transporte bientôt tout le commerce maritime. Au VIe siècle, les travaux de l'Evêque saint Félix dans le port y ramènent insensiblement les navires ; et Ratiatium abandonné perd toute son importance pour n'être plus qu'un simple hameau de pêcheurs. Puis, à un nouvel ensablement, correspond une nouvelle émigration des intérêts maritimes ; et, cette fois, c'est le village de Paimbœuf qui, devenu l'avant-port de Nantes, voit soudain ses quais neufs couverts de marchandises et sa rade de vaisseaux. Plus tard, des dragages et des digues ayant amélioré le chenal, les navires remontent de nouveau jusqu'à Nantes ; puis s'arrêtent à Saint-Nazaire, lors de la création en ce port d'un bassin à flot, pour remonter encore à Nantes dès l'ouverture du canal maritime, qui leur en permet l'accès.
Et de même qu'à chaque émigration du mouvement maritime, quittant momentanément Nantes, correspond toujours une tendance de plus en plus accusée à se rapprocher de l'embouchure : Rezé, Paimbœuf, et enfin Saint-Nazaire ; de même aussi, à chaque retour de la navigation à Nantes, après une absence plus ou moins longue, elle se fixe insensiblement de plus en plus bas sur le fleuve : le port de Richebourg, sous les Romains ; le Port- Maillard, au XIIIe siècle ; le Port-au-Vin (place du Commerce), au XVe siècle ; au XVIe, la Fosse, qui, depuis cette époque jusqu'à nos jours, n'a cessé de se prolonger vers l'Ouest ; hier, Chantenay ; et enfin, demain, Roche-Maurice et Basse-Indre.
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(1) ALAIN BOUCHARD, Bréviaire des Bretons, Feuillet III.
Note du scanneur
Si l'émigration du mouvement maritime s'est enfin stabilisé entre Donges et Saint-Nazaire — Port aux bois et Port aux sables demeurant fixés sur la rive gauche du fleuve, en aval de Nantes, entre l'ile de Cheviré et Port-Lavigne, de 1908 à 2008, il faut bien reconnaître qu'est toujours d'actualité "le sable qui descend et la vase qui monte", que Nantes n'a point triomphé, qu'elle serait même défaite, que le fleuve "sauvage" en son amont est menacé par le bouchon de vase de son estuaire et que s'ajoutent à ces avatars les dangers permanents de la pollution de la raffinerie de Donges et d'une navigation pétrolière, certes contrôlée, mais toujours menacée par d'éventuelles tempêtes ou... par la rupture inopinée d'amarres mal entretenues.
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jeudi, 30 octobre 2008
tri dans mes journaux "à livres"
Tous les mois, je revisite mes sources d'information aux fins d'éventuelles lectures.
Rares, elles sont trois : le LibéLivres du jeudi, le Monde des Livres du vendredi. Et dedans, je trie les signatures : Robert Maggiori, Édouard Laumet, récemment Claire Devarrieux, Roger-Pol Droit, Robert Solé (je fuis Savigneau, Ceccaty, Kechichian, Douin), Jérome Garcin, Jacques Drillon, JeanLouis Ézine (je saute Aude Lancelin).
Bel accord pour octobre entre Devarrieux, le 9, Solé, le 10 et ce jour d'hui, Garcin à propos d'un certain Marcel Mathiot, maître d'école et conseiller municipal pour ses Carnets d'un vieil amoureux :
« Décidément, je ne guérirai jamais de mon enfance. »Moi non plus, et ce n'est point nostalgie !
Nouvelle convergence, sur les Esquisses algériennes de Pierre Bourdieu : Libé Livres avec un bon mois d'avance, le 11 septembre, Le Monde, le 17 octobre et le Nouvel Obs, ce jour avec La jeunesse kabyle de Bourdieu, signé Jean Daniel.
Il me faut ici revenir sur Images d'Algérie, une affinité élective, paru en 2003, réunion de notes et de photographies prises par Bourdieu entre 1958 et 1960, un Bourdieu déjà engagé et encore lisible qui va de ses émotions à "l'objectivation engagée" du scientifique.
Pour achever ce tri, un mince voile de tristesse, sinon une certaine rogne : pourrai-je, dans vingt ans, lire les 3 500 pages des Notules de Julien Gracq, puisque celui-ci stipule "qu'elles ne pourront faire l'objet d'aucune divulgation" ?
Entretenons-nous donc une vigoureuse santé avec la lecture de Mathiot sans en sauter une ligne, mais sans, non plus, le suivre à la lettre, le gaillard.
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mardi, 28 octobre 2008
préface à « Marins & Corsaires Nantais »
PRÉFACE
Flumen laetificat civitatem.
Que de fois, descendant la Loire par une froide et brumeuse soirée de décembre ou une claire matinée de printemps, n'avons-nous pas songé aux origines de notre cité et rêvé de découvrir, dans la brume des lointains, comme dans le recul fabuleux des temps, la trirème phénicienne qui amenait vers le Condivicnum les géographes Pithéas ou Strabon, — ou les « chioules » agiles des Vikings envahisseurs ! Que de fois aussi, de l'esplanade de Sainte-Anne ou de l’avenue de Lusançay, ne nous sommes-nous pas pris à songer, en regardant le grand fleuve se perdre entre ses rives grasses, entraînant des barques indolentes ou des cargos pesamment chargés, aux caravelles des Croisés ou aux frégates des Corsaires qui, par bonne brise et favorable marée, appareillaient et prenaient leur vol vers la haute mer. Tout ce port qui se creusait sous nos yeux, plein d'une immense agitation, nous semblait une ruche féconde dont le passé indécis était énigmatique et tentateur comme un sphinx antique.
Aujourd'hui, cette lacune n'existe plus. Un des rédacteurs du « Pays d'Arvor », condensant ses patientes et méthodiques recherches dans une substantielle brochure, vient de résumer tous les travaux des polygraphes qui se sont occupés de notre passé maritime.
Cette compilation n'a pas la prétention d'être complète ; semblable entreprise ne serait réalisable qu'en de volumineux in-folios. Elle est néanmoins suffisante pour permettre aux curieux de se faire une vue d'ensemble, pleine cependant de document suggestifs et de savoureux détails.
Ce travail vient à son heure; pour nos hôtes comme pour nos concitoyens, il restera un mémorial captivant de la « Grande Semaine Maritime Française» de 1908 dans l'estuaire de la Loire. Aussi le « Pays d'Arvor » n'a-t-il rien négligé pour faire de cette édition à la fois un manuel de vulgarisation et une luxueuse plaquette de bibliophile.
Nous avons lieu de penser que la faveur du public Nantais ratifiera le jugement élogieux et les encouragements par lesquels la Société Académique, la Société Archéologique, la Société de Géographie commerciale de Nantes et de la Loire-Inférieure, et la Ligue Maritime française, ont voulu reconnaître le mérite de ce consciencieux travail et de cette louable initiative.
René de LAUNAY,
Secrétaire de Rédaction du PAYS D'ARVOR.
Nantes, le 1er août 1908.
RAPPEL
Préface à
Marins et Corsaires Nantais
par Paul Legrand
Héron - J. Mesnier & C° - Éditeurs
7, Rue de Strasbourg - Nantes - 1908
Pages scannées par grapheus tis
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