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mercredi, 12 novembre 2008

enfin Mallarmé vint

Je suis parti lundi matin, avec en bandoulière, Selon Mallarmé de Paul Bénichou, un peu défraîchi, les derniers feuillets froissés par une vague sournoise qui avait pénétré par le hublot ouvert, il y a bientôt près de dix ans.
Durant les cinquante-six jours de la traversée du Pacifique, j’avais tenté d’ouvrir un “chantier” Mallarmé pour dépasser les souvenirs lycéens des Classiques Larousse qui le cantonnaient dans le Symbolisme à la suite de Verlaine, de Rimbaud, de Henri de Régnier, de Samain en me donnant à lire L’Azur, Le Vierge le Vivace et le Bel... et le Tombeau d’Edgar Poe.
Demeurait en moi de ces années bachelières, l’émerveillement pour sa syntaxe dont j’appréciais le rythme rompu, déhanché, qui me laissait entrevoir une nouvelle langue. La mise en bouche d’un texte mallarméen m’a souvent laissé pantois de plaisir.
Insatisfaction cependant : cet homme laissait pressentir un horizon trop incompréhensible encore et les cinquante années de lecture de textes contemporains — pas mal d'entre eux avouant une influence mallarméenne — ont encore laissé vierge l’appréhension de cette œuvre.
L’approche de Bénichou fut une avancée dans un pas à pas, poème après poème. Je m’acclimatais au poète, je me questionnais sur l’homme de théorie et de méthode.
Lundi matin, dans le tramway m’emmenant aux Chantiers, pour suivre un atelier autour de Poésie et Philosophie selon Mallarmé, c’était donc l’Océan qui me rattrapait. Encore et toujours une histoire de mer :

Au seul souci de voyager
Outre une Inde splendide et trouble
— Ce salut va, le messager
Du temps, cap que ta poupe double

Comme sur quelque vergue bas
Plongeante avec la caravelle
Écumait toujours en ébats
Un oiseau d'ivresse nouvelle

Qui criait monotonement
Sans que la barre ne varie
Un inutile gisement
Nuit, désespoir et pierrerie

Par son chant reflété jusqu'au
Sourire du pâle Vasco.


Poésies — édition Deman

Il n'est pas sûr que le navigateur portuguais fut si désintéressé que le laisse entendre Mallarmé, célébrant en Vasco la passion sans limite de la découverte. Belle, cependant, l'utopie.

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