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lundi, 21 décembre 2009

au solstice d'hiver

Publiée à l'heure du solstice d'hiver, quand Lucrèce écrit

"viennent en hiver les lenteurs de la nuit".

 



dimanche, 20 décembre 2009

en lisant Polastron

Quand le liseur parcourt cinq cents ans en quarante pages dans les incendies et les massacres, il se perd allègrement dans l'énumération des "Ibn" et des "Al" — nous en sommes à l'Islam des origines, chapitre IV — qui brûlent les bibliothèques, coupent les têtes pour en ériger des tours — sept cent cinquante têtes par tour —, tous événements qui obligent des scribes, des calligraphes, du moins ceux qui n'ont pas eu la tête tranchée, à recopier à longueur de nuits et de jours les livres qui vont resurgir dans d'autres bibliothèques aussitôt incendiées.

 

Dans les flammes et le sang, au détour d'un paragraphe qui a érigé en deux pages les forteresses de l'État des Assassins abritant des collections d'ouvrages les plus divers, une halte  souriante qui apaise le liseur :

 

« On croirait voir Montaigne tombé dans le chaudron de Wagner. »

 

Aucune référence dans cette note à un anti-islam, souvent de mode par les temps qui courent.

Polastron lui-même clôt son chapitre IV par une phrase empreinte d'un sain esprit laïc :

 

« Les schismes et les blocages dus à la religion causèrent plus fréquemment la perte des bibliothèques arabo-musulmanes que la bêtise pure, comme les conflits européens pour la foi* sauront le faire. »

 

* Le liseur souligne.

 

RappelLivres en feu, Lucien X. Polastron, Folio Essais n°519, Denoêl,  2009.

 

samedi, 19 décembre 2009

"Copenhague" en jus de boudin

Ces messieurs annoncent soit un accord "significatif mais insuffisant", soit un accord "positif mais pas parfait".

Pour pallier la banalité de la langue de bois et assumer modestement notre citoyenneté planétaire, la brièveté du poète :

 

Dans nos jardins se préparent des forêts.

 

René Char

Les compagnons dans le jardin

La Parole en archipel

vendredi, 18 décembre 2009

de menus bonheurs

Hier soir, nous sommes allés au Cinématographe — le Celtic de mes enfances buissonnières — voir La Comtesse aux pieds nus de Mankiewicz, un bonheur des années cinquante quand Ava Gardner troublait l'adolescence.


Eh bien, cinquante-cinq ans plus tard, c'est sans doute la déception du technicolor — pourquoi avoir rêvé Ava en noir et blanc ? — mais c'est surtout la profonde fascination pour un homme en trench-coat sous la pluie, à l'écart, un homme qui, une fois, deux fois, plus peut-être, a, dans ce film, l'un parmi les plus beaux gestes qu'un homme peut avoir à l'égard d'une femme : poser doucement ses deux mains sur les épaules de l'amie.

Cet homme : Humphrey Bogart.

 

Et ce matin, dans le panier du marché, je rapporte, entre la botte de choux-verts, la betterave rouge et la mâche, une poignée de Deglet-Nour. La vraie, l'unique, la datte des Zibans. Moelleux et fondant doigt de lumière.

Entre Star Melouk et Sidi Barkat, Biskra ma si douce !

Quand nous enserre, ici, un froid polaire.

Branchette.jpg

Le solstice sera-t-il donc ensoleilé ?


jeudi, 17 décembre 2009

tout tourneboulé

Hallucination !

renecailleclaudelracine001.jpg

Quand, à voix haute, je lis l'un, c'est l'autre que j'entends.

mercredi, 16 décembre 2009

"Copenhague" VII

 

Ne permettons pas qu'on nous enlève la part de la nature que nous renfermons. N'en perdons pas une étamine, n'en cédons pas un gravier d'eau.

 

René Char

Les compagnons dans le jardin,

La parole en archipel.

mardi, 15 décembre 2009

"Copenhague" VI

à Ja et Pi, compagnons de marche

 

Je pensais un peu vaine la publication de ces notes, appuyées sur des textes de René Char que j'estime empreints d'une sagesse enracinée dans une pensée terrienne qui n'est pas si éloignée d'un sens cosmique que seuls détiennent les laboureurs, les marcheurs et les jardiniers. Sinon tous, du moins les attentifs.

Ce matin, ma crainte a été démentie, lors de notre marche hebdomadaire dans la vallée, blanche de givre ensoleillé.

 

Alors,  quand s'annonce la déglingue d'une conférence mondiale qui risque l'échec, il est peut-être nécessaire de continuer la profération du philosophe et poète :

 

Pour l'ère qui s'ouvre : « À la fin était le poison. Rien ne pouvait s'obtenir sans lui. Pas le moindre viatique humain. Pas la plus palpable récolte. » Ainsi fulmine la terre glauque.

 

René Char

Pause au château cloaque,

Retour amont.

lundi, 14 décembre 2009

ce pourrait être une banale histoire de... mais

« C'est un feu dévastateur, c'est un viol immense de la paix humaine, avec tout à coup de ces agenouillements au bord de l'abîme dont le seul Claudel a le secret ; c'est aussi un ramage sublime »....

Stanislas Fumet

 

C'était Partage de midi de ce sacré foutu Claudel... Paul, évidemment. C'était sur France Cul, hier au soir. Il est toujours possible de réécouter, une semaine durant,  ce grand charroi de mots, d'amour trompé, d'amour trompeur, de mer, dans l'écrasement d'un soleil tropical. Et la mort qui rôde !


Dommage que dieu et sa grâce y soient parfois envahissants. Mais le parfum de la Faute sublime le verbe. Ah ! et cette "Odor di femina" ! N'est-ce pas ?

vendredi, 11 décembre 2009

"Copenhague" V



L'heureux temps. Chaque cité était une grande
famille que la peur unissait; le chant des mains à
l'œuvre et la vivante nuit du ciel l'illuminaient. Le
pollen de l'esprit gardait sa part d'exil.

Mais le présent perpétuel, le passé instantané, sous
la fatigue maîtresse, ôtèrent les lisses.

Marche forcée, au terme épars. Enfants battus,
chaume doré, hommes sanieux, tous à la roue ! Visée
par l'abeille de fer, la rose en larmes s'est ouverte.


René Char

Aux portes d'Aerea,

Retour amont

jeudi, 10 décembre 2009

"Copenhague" IV

 

Nous sommes, ce jour, plus près du sinistre que le tocsin lui-même. C'est pourquoi il est grand temps de nous composer une santé du malheur. Dût-elle avoir l'apparence de l'arrogance du miracle.

 

René Char

À une sérénité crispée

mercredi, 09 décembre 2009

"Copenhague" III

 

L'homme n'est qu'une fleur de l'air tenue par la terre, maudite par les astres, respirée par la mort ; le souffle et l'ombre de cette coalition, certaines fois, le surélèvent.


René Char,

Les compagnons dans le jardin

mardi, 08 décembre 2009

"Copenhague" II

Je connais des copines et des copains, des "citoyen(ne)s vigilant(e)s",  qui maintiennent depuis des mois un piquet, quai Ceineray, devant le Conseil général de Loire-Atlantique pour dire non à un futur monstre aéroportuaire.


Je connais, au sein de ce Conseil, une amie et un ami, élus lucides et... vigilants, qui demandent avec ténacité un moratoire pour enfin sagement renoncer à cette excroissance.

 

Je leur adresse cette parole de poète.

 

Viendra le temps où les nations sur la marelle
de l'univers seront aussi étroitement dépendantes
les unes des autres que les organes d'un même corps,
solidaires en son économie.

Le cerveau, plein à craquer de machines, pourra-t-il
encore garantir l'existence du mince ruisselet
de rêve et d'évasion? L'homme, d'un pas de somnambule,
marche vers les mines meurtrières,
conduit par le chant des inventeurs.


René Char

Feuillets d'Hypnos, 127

 

Nota-bene !!! : En 2005, déjà Airbus chassait le dernier vigneron de ma petite commune.

lundi, 07 décembre 2009

suivre "Copenhague" à ma manière I

c'est-à-dire en lisant un poète :

 

Nous errons près de margelles dont on a soustrait les puits.


René Char

Feuillets d'Hypnos, 91

vendredi, 04 décembre 2009

lire "une" guerre d'Algérie

La peur au ventre. Mais elle est où, la peur au ventre ?
Pas sur les photos.

Aucune d'elles ne parle de ça.
C'est quoi alors, seulement, ce qui reste ?
Moi, je me disais, je suis là, j'ai soixante-deux ans et
dans ce salon, là, à presque quatre heures du matin, je
regarde des photos et mes yeux, les larmes, la gorge
nouée, je me retiens pour ne pas tomber, comme si les
sourires et la jeunesse des gars sur les photos c'était
comme des coups de poignard, va savoir, qui on a été,
ce qu'on a fait, on ne sait pas, moi, je ne sais plus.

Laurent Mauvignier

Des hommes, pp. 259-260

 

Trop de pages à feuilleter sur la table. Dix, quinze bouquins à lire, à relire, à annoter, et ce brûlot rapporté hier, Livres en feu, avec sur sa couverture comme un incunable passé au napalm.

Puis, vers 15 heures, dans le peu de lumière que le ruissellement interminable de la pluie nous consent, cet autre, emprunté à JC comme une urgence, retardée. À la nuit tombée, je scanne les quelques lignes qui ouvrent cette note.

 

C'est cette guerre et ce n'est pas cette guerre. C'est sans doute porté à son extrême le soliloque taiseux de milliers de "gus" : tout y est et c'est peut-être trop.

Est-ce encore assez ? Sans doute un texte fort par son écriture parmi les 500 titres et plus— fiction, histoire, journal, mémoire, correspondance, pamphlet, tous genres confondus — qui relatent chacun, "leur" guerre d'Algérie.

 

Mais que peut écrire, face à un qui fait profession d'écrivain, un témoin obscur qui tenta de maintenir la parole ?

 


samedi, 28 novembre 2009

rien n'est clos

ce 28 novembre 1964

cet absurde qui se clôt en une seule ligne, froide, glacée sur le carton marron passé d'une entreprise funéraire.



cimetière de Pantin, 74e division, 4e ligne, n°4
.



Là où je ne suis plus jamais allé après avoir recouvert la terre de brassées de glaïeuls rouges sang.

Et sans doute aujourd'hui dans l'ossuaire, rejoignant — par un burlesque tragique, la littérature me rattrapant — dans le même amas de poussière qui s'y accumule depuis plus de deux siècles, un certain Isidore Ducasse, comte de Lautréamont.

 

Ce matin, j'ai cueilli dans l'olivier que m'ont offert pour mon entrée dans l'adolescence du grand âge mes cousin vignerons, la centaine d'olives noires et charnues que nous accorde, cette année, l'indulgence de nos brumes d'ouest.



ELLE, je L'ai imaginée enfant dans l'oliveraie de son grand-père sur les flancs du Zaccar.