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lundi, 01 novembre 2004

Autres saints

Au Premier Novembre 2001, le livre de bord de Dac’hlmat mentionne ceci :


Toussaint 2001, sur le Rio Guadiana
Alcoutim, le village de l’Algarve à rive droite,
Sanlucar, le village d’Andalousie à rive gauche.


Belle journée d’été au mitan d’un fleuve aux eaux limoneuses ! J’aime bien cette hésitation du voyageur sur le gué d’une frontière. Manière de l’abolir Nous avions vécu même valse de part et d’autre d’un ruisseau basque, lors d’une randonnée pédestre avec Colette et Jo : cent pas en Espagne, cent pas en France, café en France, bière en Espagne. Mais il est vrai qu’avec l’Europe, se sont heureusement volatilisées douanes et barrières...

Remontée lente du Guadiana, peu de villages sur les deux rives, quelques maisons dans le creux des collines ; première nuit à hauteur de Guerreiros do Rio, un village de pêcheurs d’anguilles. Tiens ! Grand’Lieu et Passay* se rappellent à nous. Silence nocturne qui nous étonne et nous ravit après des nuits de marina où les boites de nuit ne sont jamais très éloignées.

Le 30, nous mouillons sur corps-mort à 20 milles de l’embouchure : Alcoutim et Sanlùcar, blancheurs en miroir, à flanc de coteaux. Mais les ruelles d’Alcoutim se revêtent encore d’un léger négligé de façades et de pavement alors que Sanlùcar, toute aussi tortueuse et pentue, s’ouvre avec une netteté quasi immaculée des murs et des toits.
Par deux fois, au tournant d’une rue de SanLùcar, l’image parfaite d’une Andalousie rêvée : sur le bleu de cet été de Toussaint, angles purs des maisons qui se chevauchent, acéré brun des tuiles vers l’envolée sur le clocher ocre de l’église ; plus loin à la patte d’oie de trois venelles à la descente vertigineuse : un mur blanc, une porte bleue et par-dessus le mur, un olivier...

Un 1er Novembre estival, au bar de l’embarcadère de Sanlùcar, à l’ombre des platanes et dans la senteur du jasmin, les “boqueronès” sont délicatement vinaigrés. Nonchalance rêveuse !


*Lire Grand’Lieu in Dac’hlmat

... l'insurrection algérienne

Quand l’ai-je apprise ?
Chez mes “Bons Pères”, nous étions dans un monde clos ; il leur fallait nous protéger.
Le lendemain ? Aux vacances de Noël ?
La première atteinte, ce fut à l’hiver, quand mon cousin Roger fut parmi les premiers appelés du contingent à partir, ma mère se lamentant sur cette troisième guerre qu’elle allait connaître en cinquante années de vie. Le petit peuple qui est le mien n’était point dupe des “opérations de maintien de l’ordre”.
Acagnardé dans la douce tiédeur d’une salle d’étude, j’étais si loin des tumultes féconds et cruels de ce pays qui, quatre ans, plus tard allaient me rattraper.*
Je rêvais d’Afrique négresse et mon professeur de philo qui était un bon gars nous éreintait Nietzsche. Peu importait l’envoi aux enfers. Demeurait un bref écrit sur la page d’un cahier à spirales :

Je vous en conjure, Mes Frères, restez fidèles à la terre. Ne laissez pas votre vertu s’envoler loin des choses terrestres et battre des ailes contre des murs d’éternité
*Lire algériennes in Dac'hlmat.

Halloween



Vraiment une réjouissance malsaine phagocytée par les épiciers en gros : c’est laid, infernal et redoutable pour la dentition des mômes. Je ne pense pas que la peau de leur visage en soit améliorée.

Qu’une antique célébration celte soit détournée en satanisme mercantile, peu me chaut ! Ce qui me fait chier c’est que Noémie - huit ans - en est revenue terrorisée pour la nuit et que toute une soirée, je fus obligé de descendre de ma “librairie” pour interrompre les sonneries à la porte de la maison !

dimanche, 31 octobre 2004

Las de ces disparitions d'écrans

Là, je ne souffre plus.

J'EN AI MARRE !
:~/


J'en ai marre de ces écrans qui s'en retournent au néant de la blogosphère, parce que je m'entête à rédiger "à chaud" sans le subterfuge d'un traitement de texte.

Deux fois, parce que je suis un "illettré" du blog !

J'avais lu pas mal de blogs. De tout poils !
Comme on va au marché !
Je commentais "mon panier", mais tout s'est évanoui dans le blanc néant des écrans.

Je reprendrai un jour autre, mes interrogations sur les philosophes, les pornographes, les poètes, les artistes, les politiques qui hantent ce petit coin de marché.

Si je n'oublie point de "POSTER".
C'est à tort que je signe "Grapheus".
J'aurai dû signer "PERSONNE”.

samedi, 30 octobre 2004

Un cahier, un crayon ?

Parce que quand on a deux petites-filles - Noémie et Célia - et donc qu'il faut lire avec, cuisiner pour, se promener et jouer ensemble, discuter longuement et faire de "l'ordi"... Quand on entreprend d'améliorer son Mac avec un nouveau système plus perfomant, mais qu'il vous faut réinstaller le pilote de votre raie-modem et paramètrer à nouveau votre connexion, reconstituer votre carnet d'adresses et vos signets... Que vous arrive une nouvelle imprimante dite "multifonctionnelle".d'une complexité pas possible.... Que s'annonce à l'horizon proche de ces jours-ci l'évocation d'une insurrection qui fut une balise de fin d'adolescence... C'est sans doute vrai qu'on ne vieillit point, mais "on" fatigue ! Le cahier et le crayon n'attendaient point de lectrice, point de lecteur ! Quoique ? À tout hasard, la lectrice en puissance, l'hypothétique et "hypocrite" lecteur peuvent, pour combler les trous et les jours vides de ce "blog", aller s'égarer sur Dac'hlmat. Ce devait être le pseudo de ce blog, c'était déjà un site pour tenter une phalanstèrienne aventure.

vendredi, 29 octobre 2004

Virée d'Aquitaine


Entre le 21 et le 28 novembre
allant chercher Noémie et Célia en Agenais
Halte dans la longue amitié de nos années algériennes chez Colette et Jo.
Si l’une peint et jardine, l’autre écrit.
Clos-Favols est un agréable jardin et le vin y est bon.

clofav.2.jpg



Après son “Homo capiens” et “Baniane, une Algérie fraternelle”*, Jo s’est engouffré dans des recherches bibliques et coraniques : il accumule écrans et pages sur son ordinateur, livres de référence en sa bibliothèque...

Pêle-mêle,
Foi et savoir de Jacques Derrida,
em>La Bible dévoilée de Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman,
Islam et liberté de Mohamed Charfi,
Textes akkadiens d’Ugarit, présentés par Sylvie Lackenbacher,
Les nouveaux penseurs de l’Islam de Rachid Benzine,
L’âge d’or de l’Islam de Aly Mazahéri,
La condition de la femme dans l’Islam de Mansour Fahmy,
Le moine, l’imam et le rabbin, avec le bénédictin Benoît M. Billot, Zuhair Mahmood l’imam et Michel Serfaty le rabbin,
De Chahdortt Djavann, Bas les voiles et Que pense Allah de l’Europe ?

jusqu’à

Les chamanes de la préhistoire de Jean Clottes et David Lewis-Williams.

J'avoue que je me suis écarté de son questionnement ; "mes" Grecs sont un autre viatique.

Il serait difficile de ne pas citer le trésor de sa bibliothèque , les dix-sept tomes des

Œuvres complètes de Saint Augustin,
traduites en français pour la première fois,
sous la direction de M. Raulx,
Doyen de Vaucouleurs,
Bar-le-Duc, L. Guérin & Cie, Éditeurs
publiées en 1864 et 1871.

Pierre Mamet, curé de la Mission de France et vieux compagnon de lutte pour l'indépendance algérienne,qui habita le presbytère de Soukh-Arhas - le lieu de naissance du grand homme - lui en fit don.


Le tome XIV, celui des œuvres polémiques, s’ouvre sur une petite merveille à la Prévert, un inventaire des hérésies qui ont méchamment surgi dès que le Seigneur se fut évanoui dans les cieux ; de I à LXXXVIII, quand le chat n’est plus là, les souris dansent et Augustin ne peut attendre la venue, quinze siècles plus tard, de l’inénarrable Jean-Paul II, il lui faut de suite ferrailler contre

les Simoniens, les Ménandriens, les Saturniniens....
les Nicolaïtes...
les Colorbasiens...
les Pépuziens...
les Tessarescédécatites....
les Apollinaristes...
les Antidicomarites...
ceux qui ne sont pas d’accord avec l’état du monde - déjà -
ceux qui marchent nu-pieds...
les Jovinianistes, les Abéloïtes, les Pélagiens ou Célestiens.

Ce sont les derniers et quatre-vingt-huitièmes.

Bel appauvrissement en seize siècles !
Ce ne sont point :
les Méthodistes, Luthériens, Presbytériens, Épiscopaliens,
les Évangélistes, Baptistes, Pentecôtistes, Témoins de Jéhovah, Mormons
e
t autres Adventistes,
les Orthodoxes, Coptes et Maronites - y ajoutant même
les Chiites et les Sunnites, les Soufis, Kharéjites et Maléchites

qui parviendront au chiffre LXXXVIII et ébranleront la certitude romaine.

Certains d’entre eux – réintégrons les catholiques romains - éliront peut-être même Bush Junior !

Contre ce enfouissement marécageux, retour à René Char :
« Obéissez à vos porcs qui existent. Je me soumets à mes dieux qui n'existent pas. Nous restons gens d'inclémence. »


Alentour de Clos-Favols, Blaye n’est pas loin et son si tendre Jaufré Rudel apaise de ces divagations politico-divines, par sa complainte d’amant :

Jamais d’amour ne jouirai
Si je n’aie joie d’amour de loin
Plus noble et plus gentil n’en sais
En nulle part, ni près, ni loin
Tant est son prix constant et vrai
Qu’être captif des Sarrasins
Me serait être tout près d’elle
.


Que s’y reconnaissent mes trop lointaines Comtesses de Tripoli !



* Joseph SAOUTER, Homo Capiens
Baniane, une Algérie fraternelle

aux Éditions Reconnaissances, 11 rue du Télégraphe, Paris 20e.

jeudi, 21 octobre 2004

Sur un aphorisme

 

ÑO ênaj o tÚ mante›Òn •sti tÚ ¢n Delfo›w oÌte l•gei oÌte krÊptei ãllå shma€nei.
ÑHrèkleitow



J'étais heureux. Robert C, hier au soir, me conseille un site qui permet de saisir quasi directement du grec ancien, sans être obligé de recourir toutes les deux ou trois lettres à une table de concordance.
Ben, oui !
Mais écrire du grec à six heures du matin, c'est s'engager sur des sentiers tortueux.
Monsieur "mon Fournisseur d'accès", qui vous nommez Benoît Desavoye, je crois, s'il vous plait, comment puis-je faire du grec ancien sur votre serveur ?

Par-delà les Enfers, l'eau, le feu et la foudre, les fumiers et les âtres où se dissimulent les dieux inexistants, les bornes de l'Aurore et du Soir, les cordes de la lyre et la vis du foulon, toutes les harmonies qui s'accordent en se désaccordant et les chiens qui le dévorèrent, Héraclite vous en saura gré.




L'illisible aphorisme qui ouvre la page de ce jour est :
"Le maître dont l'oracle est à Delphes, ni ne dit, ni ne cache, il donne signes."

Il n'est pas sûr que l'aphorisme soit plus lisible !

 

 

Nota-bene : Cinq ans après, le 10 octobre 2009, l'aphorisme est enfin scriptible en Grec — en est-il plus lisible ? :

 

ὁ ἄναξ οὗ τὸ μαντεῖόν ἐστι τὸ ἐν Δελφοῖς, οὔτε λέγει οὔτε κρύπτει ἀλλὰ σημαίνει.

mercredi, 20 octobre 2004

à Pierre Aigüe

 

Pierres-Aigues - copie.jpg



Marche active - trop active ? - ce matin.
Et ce soir grande lassitude un peu béate.

Quand les gens de Passay nous parlaient, l'ami Daniel écrivait ceci :

«Choses vécues par milliers... le paradis terrestre est plein d'eau. D'air et de vent. De lumière, de chaleur, de feu. Grand Lac, Grand Lieu, Grand Ëtre.»

 

lundi, 18 octobre 2004

L'invention de la Croix du Sud

Invention :
Action de trouver, de découvrir (une chose qui existe mais jusque là inconnue). Synon. découverte. L'invention d'un trésor. (Dict. XIXe et XXe s.).


« Pendant notre séjour à l'embouchure du fleuve, nous ne vîmes qu'une fois la tramontane, qui nous parut très basse à l'horizon ; aussi nous ne pûmes la voir que par temps clair et serein et encore nous apparut-elle à la hauteur d'une lance au-dessus de la mer. Nous vîmes également six étoiles basses sur la mer, grandes, lumineuses et brillantes, qui nous servirent de repères. Il nous sembla reconnaître le chariot austral, mais nous ne pûmes apercevoir l'étoile principale, ce qui ne se pouvait raisonnablement, sans perdre la tramontane. »*

Voici ce qu'aurait pu nous lire l'aimable et jeune conférencier de cette bien maigre soirée, organisée par Nantes-Histoire, à propos de "l'invention de l'Afrique" sous les premiers regards européens.
Le lundi précédent sur "L'Afrique avant la colonisation : un continent sans États ? " avait été affligeant. Inconnu l'empire du Ghana, inconnu l'empire du Mali, inconnus les royaumes Ashanti, d'autres et d'autres ; ils ne sont point mentionnés dans des documents écrits. Un soupçon de Bénin sans doute pour le croustillant exotisme des Amazones ! Et encore ? La tradition orale est-elle bannie par la rigueur de certains parmi les historiens français.

Le jeune homme de ce soir a, cependant mentionné Alvise Ca'da Mosto, l'homme qui "inventa" la Croix du Sud. Mais ignoré, l'infant dom Henrique dit le Navigateur, qui jamais ne navigua.

« ...ce qui ne se pouvait raisonnablement, sans perdre la tramontane. »
Tout l'avenir de l'invention du monde se cristallise dans l'intense de ce moment : ou l'horizon se referme, et pour combien d'années encore, ou le marin ose franchir l'invisible ligne de partage des hémisphères : il perd la tramontane** et il parie sur le chariot austral***.
D'autres avant Ca'da Mosto ont peut-être fait ce pari, nous l'ignorons, la trace de ces autres est muette. Ca'da Mosto, lui, l'inscrit.
L'homme d'Europe hésite encore, mais la Croix du Sud se lève dans ses regards et aux étraves s'ouvre l'immensité du monde.
Bonheur et malheurs : ce monde mettra moins de cinq siècles à rétrécir !


* Alvize CA'DA MOSTO, Voyages en Afrique Noire (1455 & 1456), Collection Magellane, Éditions Chandeigne/UNESCO, Paris, octobre 1994.
(Un parmi plus de trente beaux bouquins, beau papier, belles fontes, une iconographie rare)
Ceux qui passent par Paris, passeront 10 rue Tournefort, dans le Ve.
** L'Étoile polaire.
*** La Croix du Sud

dimanche, 17 octobre 2004

Déjà une semaine


Vendredi en fin d’après-midi, je suis allé me faire livrer l’ordinateur portable que me demandait Dawda. Il avait trouvé sur la Toile un site qui lui en offrait à bas prix ; il me demandait de faire la transaction depuis la France.
N’étant qu’un “macIntochiste” borné n’y connaissant rien en PC, j’ai appelé JeanJo à mon secours et il m’a emmené de suite à Saint-Herblain, dans une boite d’insertion qui pratique l’occasion et assure une garantie : nous avons donc dégoté pour l’ami Dawda un joli IBM ThinkPad rénové, mis au point avec Windows 95 ; ce n’est pas un monstre, il n’a même pas le processeur Pentium II. Mais il a un lecteur de CD et un modem ; Dawda, des rives de sa Falémé, là-bas, aux confins du Mali et de la Mauritanie pourra - la ligne téléphonique parvenant enfin à Djimbé, panneau solaire et batterie aidant - se connecter sur la Toile :
« Allo, le Monde ! Ici, Djimbé ! »

Un vrai bonheur d’avoir pu lui donner ce coup de main.
Être aussi avec nos copains du Sahel dans l’instantanéité de l’écriture et de la lecture. Impatience joyeuse de l’amitié : je voudrais déjà qu’il l’ait sous les doigts, ce petit outil.

Me souviens qu’il y a huit ans, je lui avais laissé gaiement mon premier portable, un PowerBook 145b équipé d’un mini-panneau solaire, que je trainais dans tous les recoins que j'arpentais, en mer et au désert.
Il a résisté à la chaleur, aux bourrasques de l’hivernage, au sirocco et à ses ciels plombés de poussière ocre. L’ami Dawda en prenait un soin jaloux. Le petit Mac marchait vaillamment ; il n’a point résisté à la petite pègre de Bakel, cette Sodome du Gadiaga.
JeanClaude lui emporte le petit dernier à la mi-novembre.

À nos premiers courriels, Dawda !
Pour célébrer la Korité... ou Noël !
Nous sommes œcuméniques ! Vains dieux !


Ce dimanche matin - tiens ! déjà une semaine de chronique - il n’y a plus seulement les huîtres à aller chercher. Il importe de monter au bourg, pour prendre Le Monde du dimanche-lundi et son DVD, au café de la Place de l’église.

Belle surprise, ce jour, c’est Ma nuit chez Maud d'Éric Rohmer.

« Catholique pratiquant ?
– Ben ! Oui ! »

Lui, un Jean-Louis Trintignant, retenu, attentif et cependant léger, léger, d’une innocence non feinte, à l’audace soudaine et silencieuse :
« Ça m’amuse même beaucoup plus que vous ne le pensez. »

Elle, la si belle Françoise Fabian, corps et voix :
«...je l’enlève pour dormir. Je dors toujours à poil. Je ne comprends pas comment on peut garder quelque chose qui se froisse et qui remonte quand vous vous retournez. »
– ainsi Aragon, dans je ne sais plus quel livre - La mise à mort ? - qui refuse le port du pyjama et se veut nu dans les replis du drap.

Plus tard, le baiser dans la montagne, neige et froid, ils se tiennent enlacés :
« Je ne me suis jamais autant amusé.
– C’est vrai
– Vous le sentez bien ! »

Plus belle encore, elle, cinq hivers ont dû s’écouler, et cet été-là, remontant de la plage :
« Du soir ? Vous voulez dire de la nuit ! De notre nuit ! Je n’ai rien oublié. »


Les huîtres de la baie de Bourgneuf arrosées d’un grosleau gris étaient gouleyantes à souhait. Des roubinettes - une nouvelle espèce de pommes dorées au four comme dessert.-



Et feuilletant La mise à mort, pour retrouver trace de l’absence de pyjama chez Aragon, ceci :

« Quand elle chante, j’aime bestialement son âme. »

samedi, 16 octobre 2004

Houat petite île



Il y a trente ans la beauté nue
de la grève d’ En Tal
en plein visage

le village aux maisons à croupetons
autour de son clocher trapu

des heures pour le regard
et parfois l’insolite

dans l’encadrement des portes
les aïeules là depuis des années
adossées au chambranle

désormais vêtues de sombre
elles vivent placides et seules
occupant la vacuité de l’attente
dans les parleries du soir

les aïeux tassés noueux songeurs
ça ne va plus en mer
les aïeux comme de vieux outils
appuyés aux jetées

de nulle part à nulle part vers ailleurs

il n’est pas un jour pas un lieu de cette terre qui ne soit parcouru de vent

passage du front froid
le vent de galerne
est bleu

l’écume neige sur les rocs de Tréac’h Béniguet
je suis le témoin effaré de cette fin de terre

sel sur les lèvres
rougeur aux joues
l’air ventile à profusion
des plaisirs qui irriguent le corps

espace ivre

rasant la mer un cormoran

à Chubègue Bras ailes déployées
un autre cormoran hiératique

au creux des landiers
se tait
le froissement continu de l’eau

Gildas l’ermite autrefois se terrait au profond du vallon de Lann-er-Hoëd

au mouillage de Tréac’h Gouret
un soir de septembre
l’air calme
était épaisseur colorée

certains matins la rumeur de mer n’est plus qu’un léger ressac alentour de l’île et on entend à nouveau les oiseaux


vendredi, 15 octobre 2004

dictons... comme des haïkou bretons



Sur la Vilaine, retour de mer.
Soleil à haubans
Marin, prends ton caban



Paisiblement, vers le mouillage de Foleux
Qui trop écoute la météo
Tire des bords au bistrot !



jeudi, 14 octobre 2004

De quelles lectures s'agit-il ?

Ennuyeuse soirée à la médiathèque Condorcet. Les certitudes de dames qui s'estiment passionnées par la 4coinlect.jpglecture - quelle lecture ? -me hérissent plus encore aujourd'hui que naguère quand je faisais profession de conseiller d'Éducation populaire "Livre & Lecture". Je n'ai pu m'empêcher de rétorquer qu'il existe nombre de lecteurs qui ne sont point "passionnés", mais qui sont, interrogateurs, à la recherche de réponses et de questions nouvelles. Que pour ces lecteurs-là, il serait opportun de prolonger l'ouverture de la médiathèque, une fois, une seule fois par semaine, le vendredi, par exemple, jusqu'à 22 heures. Je pensais soulever un tollé chez les professionnels de la lecture publique, mes copines bibliothécaires. Eh bien, non ! Ce sont des "usagères" qui ont ridiculiser ma proposition. Elles, ce qu'elles veulent, c'est un club de lecture - en soi pourquoi pas ? - mais je crains l'objet des échanges : la littérature pour dames d'œuvre, ça sévit encore. Dans les six ou sept cents romans annoncés, la provende est abondante pour nourrir la passion de ces dames... Il me faudrait peut-être "déconstruire" mon point de vue. Nous nous retrouvons à la mi-novembre ; par provocation, je suis fichu de leur proposer des "lectures" autour de mes "alliés substantiels". Si la provocation échoue, je me retire dans mon encoignure de lecteur : telle, en sa tour, l'encoignure de l'ami Montaigne . 

mercredi, 13 octobre 2004

... en marchant...


À neuf heures, nous ne sommes que trois pour la marche habituelle du mercredi matin, Jeanne, Joa et moi. Capes déjà ruisselantes. Il pleut dru.

L’automne est bien là
ce qui me le fait comprendre
c’est l’éternuement
Buson



Qu’à cela ne tienne, nous partons. La Couillauderie, les Bauches-du-Désert, jusqu’aux abords de la Mouchonnerie. Retour par les Grands-Champs, la Caillière et les hauts de la Bouguinière.

Le plaisir, pour moi, de ces marches du mercredi, c’est tout autant que la saine activité physique, l’effervescence mentale, les échanges, les liens déjà tissés mais qui se resserrent dans la belle oisiveté - l’otium latin - de la retraite.

Nous avons marché tout en parlant de Derrida, des blogs, de la solidarité internationale, de l’emprise insidieuse de la Communauté urbaine, de l’excision qui agite beaucoup, ces temps, notre petite collectivité, de la beauté des vignes-vierges à l’automne.

Sans savoir pourquoi
je me sens attaché à ce monde
où nous ne venons que pour mourir
Sôseki


Ce soir, mes anciens engagements professionnels me rattrapent : invitation à Condorcet pour la présentation de « Lire en Fête » et pour la création d’un éventuel “groupe-lecture” qui “prendrait des initiatives pour donner envie de lire”.
Fourbir mes vieilles hypothèses : contre le plaisir de lire - ce sera énoncé avec gentillesse -, pour le questionnement et le projet du lecteur « qu’est-ce que je cherche ? pourquoi je cherche ? - ce sera dit avec passion.

Ça tombe bien ; ce matin-même, sur France Cul, le rapport Thélot sur l’École agitait experts et journalistes, républicains et pédagogues, autoritaires et libertaires.
Il y était question d’une intervention de Finkielkraut, mon “gant de crin” du samedi ; je l’aime bien, cet homme ! Il me met dans des rognes noires, mais je n’oublie point qu’il commit avec Pascal Bruckner, en 1977, ce qui me fut un livre de salubrité et de risque “Le nouveau désordre amoureux”.

Alors, ce soir, si nous ne parlons pas de l’école et de l’apprentissage de la lecture, je veux bien retirer des orties ma pédagogie.

Pour clore la journée
Comme le fil coupé
d’un cerf-volant
mon âme légère
des jours de jeunesse
s’est envolée dirait-on pas ?


Ce n’est pas un haïku, c’est un tanka de Takuboku.

mardi, 12 octobre 2004

... au petit matin

Ce n'est pas encore le jour.
Et déjà un sonnet en bouche, le XIIe, ce matin, de la Belle Louise

« Oh si j'estois en ce beau sein ravie »


Puis m'en aller chez Joachim, parcourir ses sonnets "phalanstériens" , entre le 128e et le 147e

« Ce n'est pas de mon gré, Carle...
...................................................
Ne te fâche, Ronsard.... »

Voilà qui apaise des tumultes de la soirée !
J'ajoute la petite surprise -un tantinet attendue - de voir surgir (!) le bandeau publicitaire qui surplombe sans humour la citation de Char, "les mots qui vont surgir..." Non, ce n'était point "BlogJob" que je guettais ! Tant pis ! Je veux écrire gratuit, il faut bien que je paie !