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lundi, 31 décembre 2007

achever 2007 et un centenaire dans l'ombre d'une chandelle

Centenaire René CHAR


Il ne me déplaît point d'achever ce centenaire avec un cet objet naguère si quotidien et de plus tout autant héraclitéen qu'une bougie, qui donne lumière et ombre et de rapprocher une fois encore un poète d'un autre. Après Camus et Gracq, voici Michaux accoté à Char.
Ainsi sont-ils sur les étagères de " ma librairie" !

La nuit s’imposant, mon premier geste fut de détruire le calendrier nœud de vipères où chaque jour abordé sautait aux yeux. La volte-face d’une bougie m’en détourna. D’elle j’appris à me bien pencher et à me redresser en direction constante de l’horizon avoisinant mon sol, à voir de proche en proche une ombre mettre au monde une ombre par le biais d’un trait lumineux, et à la scruter.
René Char
Éclore en hiver,
La nuit talismanique.

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Dans les pays de forte lumière comme les pays arabes, l’émouvant, c’est l’ombre, les ombres vivantes, individuelles, oscillantes, picturales, dramatiques, portées par la flamme frêle de la bougie, de la lampe à huile ou même de la torche, autres disparus de ce siècle.
Henri Michaux
Émergences-Résurgences


Nous sommes déroutés et sans rêve. mais il y a toujours une bougie qui danse dans notre main. Ainsi l’ombre où nous entrons est notre sommeil futur sans cesse raccourci.
René Char
La nuit talismanique


À la lueur d'une autre chandelle, Char écrit encore à l'usage du lecteur, et cet aphorisme que j'offre au partage avec les lectrices et lecteurs de ce blogue, je le fais mien, pour clôre ce centenaire et pour l'an qui s'annonce dès cette nuit, aux marges, héraclitéennes donc, de la flamme et de l'obscur :
Tenir son livre d'une main sûre est malaisé.

jeudi, 27 décembre 2007

Char lecteur de Gracq

Centenaire René CHAR

Je pensais clore ces notes sur le centenaire de René CHAR, par des textes de Michaux et Char sur la lumière des bougies. Ce sera pour le premier jour de l'an 2008.
La mort de Gracq me fait reporter cette conclusion “lumineuse” au centenaire.
Il n’est pas si fréquent qu’un lecteur puisse trouver dans ses horizons des auteurs qu’il puisse “joindre” sans avoir le cœur fendu des disharmonies entre les uns et les autres.
Par exemple, Char appréciait le poète Michaux, mais Michaux faisait tout — ou presque — pour éviter Char.
Dans les chemins creux de mes lectures, ce manque d’accord me fend, parfois, le mental. Mais, bonheur paradoxal, les livres se côtoient sur les étagères !

En 1950, Empédocle, la revue (dans le n°1 ou 7 ?) fondée par Camus, Char et Grenier, avait publié La littérature à l’estomac, ce texte qu’on nomme pamphlet dans lequel Gracq, ulcéré par l’éreintement de la critique à propos du Roi pêcheur, se fendit d’une belle volée de bois vert. L’écrit fut, la même année, éditée par Corti.

La relation entre Char et Gracq remontait à la parution des Feuillets d’Hypnos.
L’un et l’autre avaient vécu la “drôle de guerre”. Le second écrira plus tard Un balcon en forêt.
Char, dès 1945, publiera, refaçonnés, ses carnets de maquis et Gracq fut sensible à ce “non-récit de guerre” :
« Il est étrange que votre livre, écrit dans de telles circonstances, me donne une impression aussi absolument contemplative. J’aimerais parler de cela avec vous. »


Voici donc dans cette avant dernière-note, un Char lecteur de Gracq* :
À propos des Eaux étroites :
« Ces quelques dizaines de pages pèsent et pèseront plus lourd que les tonnes de littérature vide qu’on trouve actuellement à profusion et dont l’épaisseur est à la mode. Julien Gracq ne se manifeste que par son œuvre, comme Henri Michaux. C’est un rebelle et un discret. »


À propos de En lisant, en écrivant :
« Mes goûts ne sont pas forcément les mêmes que les siens, mais j’ai pour Julien Gracq une estime qui n’est pas seulement littéraire : elle est aussi morale, au sens le plus complet de ce mot dont nous avons tant besoin aujourd’hui. »


À propos du Rivage des Syrtes :
« J’avais cru lire Le Rivages des Syrtes, mais il est possible que je ne l’aie pas lu. Si vous avez raison, ce serait dans ce cas l’ouvrage politique le plus profond qu’on ait écrit en France pour les temps obscurs où nous sommes. »


* J’ai recueilli ces propos dans le livre de Jean Pénard, rencontres avec rené char, Corti, 1991

Chronique portuaire de Nantes LXXIV

Période Révolutionnaire

1797. — CORSAIRES NANTAIS EN 1797.

L'année 1797 vit un grand nombre de corsaires nantais sortir de la Loire et y ramener de nombreuses prises :

Le Colon, cap. Villy, qui prit quatre prises en une seule sortie.
L'Eugénie, joli et léger trois-mâts, armé de 16 can. et commandé par le cap. Héraud, qui amarina à l'entrée de la Manche un fort corsaire de Liverpool armé de 18 caronades de fort calibre, après un combat acharné.
La Nouvelle-Eugénie, lancée peu après l'Eugénie, et qui suivit les traces de son aînée en amarinant la BÉNÉFICIAIRE, de 14 can. de 9.
Le Neptune, qui amarina le SWIFLD de 250 tx.
La Riza, cap. Clément Roux, qui s'empara du danois KERREN-ET-SOPHIE.
Le Duguay-Trouin, brick de 250 tx., 20 can., 2 obusiers, et 100 h., cap.Dutache, spécialement construit pour la Course, et qui enleva le RAIMBOURG et le brick FRIENDSHIP.
L'Intrépide, brick de 80 tx,, 10 can., 2 obus., et 76 h., cap. Jean-B. Candeau, puis Villeneuve, sous les ordres duquel il aborda la DIANE-DE-LANCASTER qu'il força à amener pavillon après un rude combat.
L'Actéon, corvette de 150 tx., 14 can., et 110 h.. cap. Louis Thibeaud, spécialement construit à Nantes pour la Course, et qui amarina le Suédois l'UnioN, puis la TARTANA, de 12 can., et le LIGTHORSE.
La Constance, qui amarina les bricks anglais l'ACTIVE, la MARIE, la FANNY, et la goélette le CUMBERLAND.
Le Jason, qui enleva le brick I'AMI-DE-DARMOUTH, et le HARRIOT, de 400 tx.
L'Étoile, cap. Chauveau, qui captura les bricks anglais FRONTOMALK, de 300 tx., ENTREPRISE de 120 tx, et RECOVERY, de 350 tx.
Enfin, L’Anonyme, brick de 150 te., 8 can., 2 obus., 2 pier. et 80 h.,cap.Bertho ; l'Oiseau, brick de 16 can. et 100 h. ; le Vautour, trois-mâts de 300 tx., 20 can., et 17 h., cap. Jacques François ; le Barbier-de-Séville, brick de 150 tx,, 8 can. et 100 h., cap. Vincent Magouet ; la Musette ; la Julie ; l'Actif; le Furret ; l'Autour ; etc (1)
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(1) GALLOIS, Les Corsaires Français sous la Révolution et l'Empire, t. II, pp. 415-418.

dimanche, 23 décembre 2007

«... pareil au verrou tiré sur la journée finie. »

Bonsoir, monsieur Gracq.

... il sembla d'abord que ce fût le silence. Puis le froissement faible des roseaux passa avec une bouffée de vent ; des cris d'enfants montèrent de l'autre bout du pâtis, aussi suraigus que des cris de martinets. Puis des voix d'hommes toutes proches, à l'abri derrière un appentis de charrettes : voix du soir qui parlent pour parler, plus égales et moins hautes, déjà au bord du silence, avec de longs intervalles, comme si à travers elles la trame de la journée se défaisait. Puis le gong lointain d'une casserole heurtée, passant par une porte ouverte — l'épais froissement de roseaux d'une toue invisible, le râclement mou, étouffé, de la proue plate glissant pour l'accostage sur la vase de la berge, et le bruit final de bois heurté de la gaffe reposée sur les planches, pareil au verrou tiré sur la journée finie...


Voilà la page que je m'étais promis de lire à voix basse, le soir où j'apprendrai que Julien Gracq a "descendu le Fleuve". Je n'ai rien à dire, rien à écrire que redonner à lire ces quelques lignes de la Presqu'île, sur un soir briéron, en ce pays d'Ouest qui fut le sien, qui est le mien.

samedi, 22 décembre 2007

au solstice d'hiver

Centenaire René CHAR

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...pas un...qui n'ait, passant la porte, brûlé les yeux aux preuves de cette chandelle. La femme explique, l'emmuré écoute. Les mots qui tombent de cette terrestre silhouette d'ange rouge sont des mots essentiels, des mots qui portent immédiatement secours

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...le poignard de la flamme...






La flamme des chandelles qui tremble dans les tableaux de Georges de La Tour hantent les nuits de René Char et de son lecteur.
Depuis le 20, chaque soir, le soleil s'attarde une minute de plus au bord de l'horizon.
Pour moi, l'électricité est loin d'être "haïssable" ; à preuve, cet écran et ces signes qui s'y affichent !
Mais pourquoi, sur nos murs et dans nos rues, ces clignotements absurdes me tiennent-ils éloigné de la flamme chaleureuse ?

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Servante ou maitresse, proche du souffle et de la main, rasante et meurtrie, cette flamme dont j’avais besoin, une bougie me la prêta, mobile comme le regard.
L’eau nocturne se déversa dans le cercle verdoyant de la jeune clarté, me faisant nuit moi-même...

La nuit talismanique

vendredi, 21 décembre 2007

marche dans la vallée

Centenaire René Char
l'antépénultième note


Marche très matinale. La tasse de thé vert tient chaud au ventre.
Les étoiles paraissent encore si proches.
Les étoiles sont acides et vertes en été ; l'hiver elles offrent à notre main leur pleine jeunesse mûrie.


Parvenu à la rive du fleuve, dans l'enfilade glacée du Nordet, les roselières de la Sangle s'inclinent :
Oiseaux qui confiez votre gracilité, votre sommeil périlleux à un ramas de roseaux, le froid venu, comme nous vous ressemblons.


Je rentre à la maison, passant par le jardin, herbes gelées de givre.
Fourche couchée, perfection de la mélancolie.

lisant
La nuit talismanique


Ce soir, une dépression portuguaise nous ramène par le Suet les douceurs atlantiques.

jeudi, 20 décembre 2007

Chronique portuaire de Nantes LXXIII

Période Révolutionnaire


1794.— LA VEUVE DE DU COUÉDIC.
La veuve de l'héroïque commandant de la Surveillante s'était retirée à Nantes après la mort de son époux ; et une pension de cent-vingt livres reposant sur les octrois lui avait été accordée. Lors de la suppression des octrois en 1791 elle fut réduite à redemander au Conseil de lui maintenir cette pension sans laquelle elle n'avait plus de quoi vivre. Dans sa séance du 16 janvier, le Conseil lui vota six mois, soit soixante livres, sans décider pour l'avenir (1).
En 1794, une bande avinée de membres de la Compagnie Marat envahit sa demeure en la traitant d'aristocrate et de mauvaise patriote. La noble femme, sans s'émouvoir de leurs menaces, leur montra le tableau de la Surveillante luttant contre le Québec, que lui avait donné le Roi, et leur dit simplement : «Je suis la veuve du commandant de la Surveillante qui combattit et mourut pour sa patrie ».
Les terroristes honteux et subjugués par son calme se retirèrent en s'excusant (2).

1795. — LE CAPITAINE LEBESQUE.

Au combat de Groix, le 23 juin 1795, entre la flotte de l'amiral Villaret-Joyeuse, composée seulement de douze vaisseaux, et une escadre anglaise de dix-sept vaisseaux, le capitaine nantais Lebesque se distingua par son courage, et, bien que grièvement blessé, refusa de quitter son poste de combat.
Un autre Nantais, d'adoption du moins, le capitaine Moncousu, se fit également remarquer par sa bravoure à cette affaire (3),

1796. — CORSAIRES NANTAIS EN 1796.

Le 9 avril 1796, le brick corsaire la Vengeance, de 220 tx. et 15 can., commandé par « le citoyen Leveilley, lieutenant de vaisseau, capitaine de la rivière de Nantes » entrait en Loire après une campagne de quelques mois, au cours de laquelle il avait amariné quatorze prises. II en repartait le 4 juin, et dans une croisière d'environ un an, s'emparait de treize navires ennemis. Déjà, au début de l'année, il avait amariné vingt prises anglaises en trente-deux jours ; ce qui lui faisait le joli total de quarante-sept captures en dix-huit mois (4).

Un autre corsaire nantais, la Musette, armateur Félix Cossin, cap. Desbrosses, sorti de la Loire en octobre 1796, amarinait peu de jours après le brick charbonnier de 250 tx., l'OCÉAN, puis le JEUNE-JACKSON et la CRÉMONE à quelques jours d'intervalle. Il se laissait ensuite porter sur le trois-mâts de 16 caronades, la BETZY, l'abordait vergue à vergue après une canonnade intense, et les Nantais, sautant sur le pont du trois-mâts, assaillaient son équipage à l'arme blanche et s'en emparaient.

En décembre de la même année, la Musette amarinait deux Anglais ; I'INDUSTRIEUSE et un brick de 200 tx., qui furent vendus 150.000 francs ; elle fut à son tour capturée par une frégate anglaise, et son équipage, Desbrosses en tête, enfermé dans un ponton (5).
Indépendamment de la Musette, l'un de nos plus célèbres corsaires, Félix Cossin armait également en Course : l'Oiseau, cap. Lebreton ; la Constance, cap. Basile Leray ; le Volage, cap. Desagenaux ; la Julie, cap. Gautreau ; le Papillon, toute une flotte d'intrépides corsaires qui causèrent un mal énorme aux Anglais, en même temps qu'ils protégeaient efficacement nos côtes et notre commerce.


LANCEMENT DE LA FRÉGATE LA "LOIRE".

La frégate la Loire, offerte à la République par les habitants de Nantes, au moyen d'une souscription ouverte le 12 avril 1794, à la Société Républicaine, fut mise à l'eau le 23 mars 1796, le jour même de la prise de Charette. On lit en effet dans la Feuille Nantaise de ce jour : « Ce soir, à la pleine mer, sera lancée à l'eau là superbe frégate la Loire, de 36 canons en batterie, donnée à la République par les citoyens de Nantes » (6).
La Loire fut d'abord placée sous le commandement du capitaine nantais Desagenaux, puis en dernier lieu du capitaine Ségond.
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(1) VERGER, Archives curieuses de Nantes, t. V, p.223.
(2) Revue du Bas-Poitou, Année 1907, p. 191.
(3) MELLINET, La Commune et la Milice de Nantes, t. VII, p. 94.
(4) S. DE LA NICOLLIÈRE-TEIJEIRO, La Course et les Corsaires de Nantes, pp. 302-7.
(5) GALLOIS, Les Corsaires Français sous la République ef l'Empire, t. II, pp. 428-9
(6) S. DE LA NICOLLIÈRE-TEIJERO, La Course et les Corsaires de Nantes, p. 258.
Feuille Maritime Nantaise, n° du 3 germinal, an IV

dimanche, 16 décembre 2007

« Bien égaux » ? Non ! deux biographies

Centenaire René CHAR
(ça va bientôt s'achever !)


J'ai sur ma table depuis jeudi soir la seconde biographie de René CHAR, par Danièle Leclair. La semaine précédente, intrigantes dans le Nouvel Obs, quelques lignes de France Huser : « Enfin la biographie que méritait Char ! Elle retrouve la vérité, même la plus diffcile à dire. »
En 2004, Greilsamer, le premier biographe n’avait point un total satisfecit ; le livre était très journalistiquement rédigé, des dialogues recréés comme de faux décors. J’y notai, alors, la “présence” de madame Char : quand on lit Char depuis cinquante ans et qu’on sait les points de vue passés du poète sur la conjugalité, on esquisse un sourire — enfin, j’esquissais un sourire. Bref ! La suite de la vie éditoriale de l'œuvre verra souvent apparaître le nom de Marie-Claude Char, accompagné assez souvent de celui de Paul Veyne, l’homme, latiniste distingué, auteur d’un René Char en ses poèmes, qui ne peut accompagner que maigrement le lecteur.

La nouvelle biographie semble remettre quelques pendules à l’heure ; elle convoque des témoins, des proches. J’ai commencé de lire par larges tranches : ça éclaire "à distance"et je n’ai point trop le sentiment de regarder par le trou de la serrure.
Il y a, par exemple, entre la page 266 et la page 295, un parallèle Camus/Char, À UNE SÉRÉNITÉ CRISPÉE/L'HOMME RÉVOLTÉ, d'une grande force ; le chapitre VII, une fin de vie très sombre, peut atterrer, même le lecteur de Jean Pénard — voir Rencontres avec René Char, chez Corti.
Quand je place les deux livres l’un près de l’autre, trivialement, “il n’ y a pas photo” pour les premières de couverture. Il suffirait de lire titre et sous-titre pour estimer le registre et de l’une et de l’autre. L'austérité de mes goûts m'incline pour l'autre.

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J’ignorais jusqu’à ce jour les éditions Aden ; peut-être que le nom de Robert Bréchon comme directeur de collection (Collection "le Cercle des poètes disparus") m’assure d’une certaine crédibilité ; il est l’auteur d’un Henri Michaux dans Pour une Bibliothèque idéale de Gallimard (1959). Diable d’homme ! quel âge a-t-il ?

Avouerai-je, quand même, que je suis très heureux d'avoir été un lecteur "nu" de René Char, de René-Guy Cadou, d'Henri Michaux, avant que ne paraissent des années plus tard après mes découvertes de jeune lecteur des biographies, qui, certes, peuvent mener sur des chemins d'accès mais tant encombrer l'intangible relation des expériences qui se confrontent silencieusement entre écriture et lecture.

Entre légende et mythologie ? À propos de Bob Dylan, François Bon prononçait ces mots, hier sur France Cul, dans Projection privée.
L'autobiographie dévoile et éclaire, mais cache et crypte, elle exalte et démystifie, elle est hagiographie et appareil critique, elle contemple l'étendue des hauteurs mais, accroupie derrière la porte, elle guette par le trou de la serrure.
Fassent les divinités tutélaires de la Littérature qui n'existent pas, qu'elle ne trouble point la nue modestie du lecteur !
Et ce qui vient d'être écrit sur les ouvrages de monsieur Laurent Greisalmer et madame Danièle Leclair ne sont que le ressenti "d'un lecteur en son jardin"... gelé !
D'un "grapheus tis" qui souhaitait écrire, ce soir, sur le poème Biens égaux et sur l'angle fusant d'une rencontre, d'où est partie cette aventureuse lecture d'un poète, qui ne fut et n'est pas seulement une simple lecture, mais une vie d'homme tout aussi simplement.

jeudi, 13 décembre 2007

Chronique portuaire LXXII


Période Révolutionnaire


1794.— LANCEMENT DE LA "JACOBINE".
La Feuille Maritime de Nantes, du 9 germinal an II, insérait l'avis suivant ; « Demain Décadi, on doit lancer à l'eau, à la Basse-Indre, la corvette de la République, la Jacobine ».
La Société Populaire de Nantes, sur la motion du citoyen Prieur, avait décidé qu'elle se rendrait en masse au lancement, accompagnée de tous les citoyens et citoyennes qui voudraient assister à ce patriotique spectacle ; et de fait, une foule considérable se rendit à Basse-Indre pour la mise à l'eau de la corvette (1).
Nantes, comme tout le reste de la France, était alors en proie à la famine ; les discordes civiles ayant causé la ruine de l'agriculture et du commerce.

ENTHOUSIASME PROVOQUÉ PAR L'ANNONCE DE L'ARRIVÉE D'UN CONVOI.

Aussi, la nouvelle connue le 11 juin, qu'un convoi de blé venant de l'Amérique du Sud était entré à Brest, causa-t-elle dans la ville un enthousiasme indescriptible ; on « s'embrassait dans les rues ». L'escadre de l'amiral Villaret-Joyeuse, envoyée au devant de ce convoi avait dû livrer un terrible combat à la flotte anglaise qui se disposait à l'enlever. Sur les cent-seize bâtiments de transport et huit prises dont il était composé, trente-trois transports et deux prises étaient destinés à Nantes (2).


MORT DE L'AMIRAL DU CHAFFAULT.

Lors de la reprise de Montaigu par les Républicains en 1793, le vieil amiral Du Chaffault, qui y vivait retiré, avait été arrêté et conduit à Nantes sous l'inculpation d'avoir organisé la défense.
Par respect pour son grand âge et ses blessures glorieuses, il avait été envoyé à Lusançay, dont le régime, si on le comparait à celui des affreuses geôles révolutionnaires, était plutôt celui d'une maison de santé que d'une prison.
Le vieillard fut incapable cependant de supporter les privations de sa captivité. En vain demanda-t-il son élargissement ; en vain écrivit-il au Représentant du Peuple : « J'ai servi ma patrie pendant soixante-quinze ans avec quelque distinction »; sa lettre touchante ne reçut que cette froide et banale réponse : « Vu les mesures qu'ont nécessité contre eux les gens de cette classe, il n'est pas possible ».
Le vieil amiral nantais mourut le 29 juin 1794 à l'âge de quatre-vingt-sept ans ; il était Lieutenant-général des armées navales, Commandeur de Saint-Louis, et avait publié un ouvrage technique très apprécié intitulé : Signaux de jour, de .nuit et de brume pour l'escadre du Roi, par M. Du Chaffault, Chef d'escadre des armées navales.

Du Chaffault avait la réputation d'être l'un des plus habiles manœuvriers de notre histoire maritime, et son portrait, qui orne la grande salle du Borda, est encore montré aux jeunes élèves de notre marine, comme étant peut-être celui de l'homme qui sut le mieux faire évoluer, et penser pour ainsi dire, ce merveilleux assemblage de bois et de fer qu'est un vaisseau (3).
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(1) Feuille Maritime de Nantes, n° du 9 germinal, an II.
(2) L. BRUNSCHWIG, Éphémérides nantaises du Centenaire de la Révolution.
(3) S.DELANICOLLIÈRE-TEIJEIRO, Comte du Chaffault, pp. 65-66.
Revue du. Bas-Poitou, Année 1906, pp. 120-1.
Annales de la Société académique, Année 1861, pp. 221-252

mardi, 11 décembre 2007

« soleils jumeaux »

Centenaire René CHAR


aux amis présents pour la lecture de la Lettera amorosa

L'année du centenaire s'achève. S'espaceront les chroniques, mais ne faiblira point la lecture entreprise, il y a plus de cinquante ans. Une des dernières évocations de la soirée de vendredi dernier aborda l'amitié si forte qui lia Char et Camus. Et la communauté constante de leur pensée.

J'ai retrouvé dans mon dossier "Char" une coupure de presse de juillet 1990, signée A.V. sans doute, André Velter ; l'article, intitulé SOLEILS JUMEAUX, Char-Camus : deux hommes révoltés citait un extrait de la préface de Camus à l'édition allemande des Poésies de Char :

Certaines œuvres méritent qu’on saisisse tous les prétextes pour témoigner même sans nuances, de la gratitude qu’on leur doit...
Dans l’étrange et rigoureuse poésie que Char nous offre, notre nuit elle-même resplendit, nous réapprenons à marcher. ce poète de tous les temps parle exactement pour le nôtre. Il est au cœur de la mêlée, il donne ses formules à notre malheur comme à notre renaissance : « Si nous habitons un éclair, il est le cœur de l’éternel.» La poésie de Char habite justement l’éclair, et non seulement au sens figuré. L’homme et l’artiste qui marchent du même pas, se sont trempés hier dans la lutte contre le totalitarisme hitlérien, aujourd’hui dans la dénonciations des nihilismes contraires et complices qui déchirent notre monde. Du combat commun, Char a accepté le sacrifice, non la jouissance. « Être du bond, ne pas être du festin, son épilogue. » Poète de la révolte et de la liberté, il n’a jamais accepté la complaisance, ni confondu selon son expression, la révolte avec l’humeur. On ne dira jamais assez, et tous les hommes tous les jours nous le confirment, qu’il est deux sortes de révolte dont l’une cache d’abord une aspiration à la servitude, mais dont l’autre revendique désespérément un ordre libre où, selon le mot magnifique de Char, le pain sera guéri. Char sait justement que guérir le pain revient à lui donner sa place, au-dessus de toutes les doctrines, et son goût d’amitié. Ce révolté échappe ainsi au sort de tant de beaux insurgés qui finissent en policiers ou en complices. Il s’élèvera toujours contre ceux qu’il appelle les affûteurs de guillotine. Il ne veut pas du pain des prisons, et juqu’à la fin le pain chez lui aura meilleur goût pour le vagabond que pour le procureur.


Albert Camus, 1959.

lundi, 10 décembre 2007

en merci

Centenaire René CHAR


En merci à celles et ceux qui, amicaux et rares, ont répondu à l’invitation de la soirée-lecture de la Lettera amorosa,
un des textes de René CHAR, que je n'ai pas lu, qui me paraît bien résumer nos échanges de l’autre soir :
les thématiques fondamentales
celle de la nature — la “phusis” au sens grec — dans l’approche de la campagne — l'accoudoir de solitude —, du jardin, des végétaux — attentif aux sèves —, de l’intervention humaine — la main infirme de hommes, — jusqu’en sa dimension esthétique — baisant des yeux formes et couleurs

celle de l’amour en tout ses états, dans l’incomplétude et la fusion — hymne raboteux —, l’absence et le retour — chétive volte-face
.

BIENS ÉGAUX


Je suis épris de ce morceau tendre de campagne, de son accoudoir de solitude au bord duquel les orages viennent se dénouer avec docilité, au mât duquel un visage perdu, par instant s'éclaire et me regagne. De si loin que je me souvienne, je me distingue penché sur les végétaux du jardin désordonné de mon père, attentif aux sèves, baisant des yeux formes et couleurs que le vent semi-nocturne irriguait mieux que la main infirme des hommes. Prestige d'un retour qu'aucune fortune n'offusque. Tribunaux de midi, je veille. Moi qui jouis du privilège de sentir tout ensemble accablement et confiance, défection et courage, je n'ai retenu personne sinon l'angle fusant d'une rencontre.

Sur une route de lavande et de vin, nous avons marché côte à côte dans un cadre enfantin de poussière à gosier de ronces, l'un se sachant aimé de l'autre. Ce n'est pas un homme à tête de fable que plus tard tu baisais derrière les brumes de ton lit constant. Te voici nue et entre toutes la meilleure seulement aujourd'hui où tu franchis la sortie d'un hymne raboteux. L'espace pour toujours est-il cet absolu et scintillant congé, chétive volte-face? Mais prédisant cela j'affirme que tu vis; le sillon s'éclaire entre ton bien et mon mal. La chaleur reviendra avec le silence comme je te soulèverai. Inanimée.

Le poème pulvérisé,
Fureur et mystère.


Une lecture à voix haute, simple lecture de lecteur, à hauteur des mots, suffit parfois pour donner l’essor aux poèmes et l’écoute attentive est un miroir qui lance de minces éclats de lumière dans l’obscur des aphorismes et chez celles et ceux qui écoutent et chez celui qui lit.
Sans négliger les jaillissements des images qui agrandissent le sens de notre langue quotidienne.
Sans oublier la pensée “politique” quand Char rejoint son ami Camus dans la tension entre liberté et justice.
Nous aurions pu achever la soirée sur la parole d’Héraclite l’Éphésien :
Le Maître dont l’oracle est à Delphes ne dévoile, ni ne cèle, il donne signes.

jeudi, 06 décembre 2007

Chronique portuaire LXXI

Période Révolutionnaire


1794. — CORSAIRES NANTAIS EN 1794.

Le 22 janvier 1794, le corsaire nantais les Deux-Frères, armé de 22 can. et monté de 100 h. d'équipage, sous le commandement du cap. Quirouard, venu de Baltimore en 36 jours, entrait en Loire. Pendant sa croisière, il avait amariné le DOLPHIN, gros brick hollandais, cap. Kenutet, qu'il avait fait conduire à Baltimore, où il avait été estimé 6 à 700.000 livres (1).
Le 7 avril, s'ancraient à Paimboeuf deux prises anglaises faites par les corsaires nantais ; l'une : « un charmant navire de 220 tx., 6 can. et 14 h. » avait été amariné par la Tribune ; l'autre, « un joli petit corsaire de 14 can. », avait été enlevé par la frégate « ci-devant anglaise » la Tamise (2).

En mai, montait à Nantes la prise l'ANNA, trois-mâts négrier de Liverpool, armé de 16 can,, amariné par la corvette la Difficile, cap. Bertrand, et le Fabius, cap, Lecourt ; l'ANNA fut estimé 300.000 livres (3).
Enfin, le 19 juin, le cutter le Courrier ramenait le VRY-FRIES, Hollandais de 300 tx. ; et la Musette envoyait le Portugais la SEGNORA, de 400 tx. Quelques jours après, la Musette expédiait également à Nantes, le JAMES, Danois de 22 tx. (4).
La Musette était commandée par le brave marin nantais Joseph-Augustin Desagenaux, l'un des meilleurs capitaines Corsaires de notre port, et qui obtint le grade de capitaine de frégate dans la marine de l'État (5).

La même année, le capitaine Marie Laine enlevait un navire de guerre anglais à l'abordage avec les embarcations de la frégate l'Embuscade (6).

DONS PATRIOTIQUES DE NAVIRES.

Un reçu du Chef principal des Bureaux de la Marine, Even, constate en date du 21 février 1794, que les citoyens Louis Drouin et C°, armateurs, firent don à la République de leurs deux navires, la Sophie et la Confiance, estimés 139.093 livres (7).
Deux mois après, un autre navire était offert à l'État par souscription publique des habitants de Nantes. Le 12 avril, en effet, un Sans-Culotte prenait la parole à la Société Républicaine de Nantes et proposait la motion suivante : « Frères et amis, les bons Sans-Culottes sont toujours prêts à faire des sacrifices pour les succès des armes de la République. Je demande qu'une frégate soit « offerte par les Nantais à la République ».
Une citoyenne, au nom de toutes les assistantes, déclara alors que « les citoyennes des tribunes demandaient à prendre part à cette souscription publique », et la motion fut acceptée avec enthousiasme. Nous verrons cette superbe frégate, lancée en 1796 sous le nom de la Loire, terminer en 1798, sa courte mais glorieuse carrière.(7)
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(1) Feuille Maritime de Nantes, n° du 9 pluviôse, an II.
(2) Feuille Maritime de Nantes, n° du 19 germinal, an II.
(3) Feuille Maritime de Nantes, n° du 4 prairial, an II.
(4) Feuille Maritime de Nantes, n° du 6 messidor, an II.
(5) S. DE LA NICOLLIÈRE-TEIJEIRO, La Course et les Corsaires de Nantes, pp. 340.
(6) VERGER, Archives curieuses de Nantes, t. I,p.270.
(7) Feuille Maritime de Nantes, n° du 19 germinal, an II.
(8) Feuille Maritime de Nantes, n° des 24 et 29 germinal, an II

mercredi, 05 décembre 2007

Être le premier venu

Centenaire René CHAR


« La lecture de la Lettera amorosa, précédée et suivie de quelques autres poèmes », voici ce que j'annonce pour vendredi soir.
Oh ! j'ai bien quelques idées pour les textes qui précéderont : A***, La compagnie de l'écolière, Bora, Congé au vent, Marthe, La compagne du vannier , j'évite Le visage nuptial, je crains d'effaroucher (!) ; j'ai très envie de commencer, après l'écoute du madrigal de Monteverdi, ce chanté-récité poignant — un "sprechgesang" qui a quatre siècles d'avance — par Pedro Liendo du Clémencic Consort, dans le silence qui suivra et la pénombre qui se sera établie autour de la petite table, de la lampe et du livre par ce premier texte :

Être
Le premier venu.
L'Amour
Arsenal

comme cri ? comme murmure ?
Aurai-je le culot ? J'ai promis : « Ni cours, ni spectacle, une lecture nue, quelques dessins et peintures des "Alliés substantiels" du poète, projetés.
Fuyant le théâtral, sur quelle image ?
Poser la voix, mais dans quel silence précédent et suivant ce :

Être
Le premier venu.
?

mardi, 04 décembre 2007

Le grand combat et une certaine... "bravitude"

La justification du terme emprunté par madame Royale sur la Muraille de Chine pour exprimer je ne sais quelle brave attitude... me semble fort déplacée.
Que "-itude" soit ou non un suffixe — après recherche, ces trois syllabes n'apparaissent point dans le répertoire des suffixes grecs, latins ou autres qui forgent notre langue — la dame pousse le bouchon un peu loin en se référant aux fabrications langagières de Michaux.

Que tout, y compris la révolte fondamentale contre la langue, soit récupérée, c'est devenu monnaie courante.
Qu'on justifie l'utilisation d'un néologisme que j'estime laid — l'adéquation phonique avec la création d'un sens recherché me semble une règle — et qui n'agrandit point le sens donné par la langue, est de l'outrecuidance !

Entendons « bravitude » .

Laissons retentir :

Il l'emparouille et l'endosque contre terre ;
Il le rague et le roupète jusqu'à son drâle ;
Il le pratèle et le libucque et lui barufle les ouillais ;
Il le tocarde et le marmine,
Le manage* rape à ri et ripe à ra.
Enfin il l'écorcobalisse.
L'autre hésite, s'espudrine, se défaisse, se torse et se ruine.
C'en sera bientôt fini de lui ;
Il se reprise et s'emmargine... mais en vain
Le cerceau tombe qui a tant roulé.
Abrah ! Abrah ! Abrah !
Le pied a failli !
Le bras a cassé !
Le sang a coulé !
Fouille, fouille, fouille
Dans la marmite de son ventre est un grand secret
Mégères alentour qui pleurez dans vos mouchoirs ;
On s'étonne, on s'étonne, on s'étonne
Et vous regarde,
On cherche aussi, nous autres, le Grand Secret.

Henri Michaux
Qui je fus, 1927


Non, Madame, sur la Grande Muraile, vous ne cherchiez pas le Grand Secret !

* Manage ? Tiens, tiens !

dimanche, 02 décembre 2007

où l’on retrouve le serpent

Centenaire René CHAR


Adam et Ève, la condition humaine : Todorov signe dans le Monde des Livres de vendredi, un brève présentation d’un bouquin de François Flahault : celui-ci y analyse l’universalité de l’histoire d’Ève et d’Adam et l’opposition fondamentale qui traverse l’histoire de l’Occident, sinon de l’humanité, entre deux grandes conceptions de la condition humaine... L’une des traditions, celle du paganisme, pour qui le mythe dit l’incomplétude de notre nature humaine, à la fois manque mais aussi chance, car grâce à elle, nous rencontrons les autres et nous en jouissons. L’autre, celle des religions monothéistes, qui y voit le récit de la chute, l’apparition du mal et l’émergence du salut à condition de choisir “dieu”.

Me voilà renvoyé tout droit

à ce texte de Ricœur, dans Le conflit des interprétations (1969), que j’ai abordé avec l’ami Bal, lors de l’atelier Jalons pour une éthique, en mai :
C’est pourquoi le mythe adamique... introduit dans le récit la figure hautement mythique du serpent. Le serpent représente, au cœur même du mythe adamique, l’autre face du mal que les autres mythes tentaient de raconter : le mal déjà là, le mal antérieur, le mal qui attire est séduit l’homme. Le serpent signifie que l’homme ne commence pas le mal. Il le trouve. Pour lui, commencer, c’est continuer. Ainsi, par-delà la projection de notre propre convoitise, le serpent figure la tradition d’un mal plus ancien que lui-même. Le serpent, c’est l’Autre mal humain.


et, au IIIe Fascinant de René Char et à la civilisation serpentaire (notes des 24 et 28 février de cette année)

Prince des contresens, exerce mon amour
À tourner son Seigneur que je hais de n'avoir
Que trouble répression ou fastueux espoir.

Revanche à tes couleurs, débonnaire serpent,
Sous le couvert du bois, et en toute maison.
Par le lien qui unit la lumière à la peur,
Tu fais semblant de fuir, ô serpent marginal !


Je ne veux pas opposer Char et Ricœur, qui dans ce texte, en quête des origines du Mal, démonte le mythe adamique dans son contexte judéo-chrétien.
L’apposition des deux textes souligne simplement le refus fondamental de Char de la tradition monothéiste.
Char se dresse à contresens de la foi religieuse - refus du salut, fastueux espoir et de la damnation, trouble damnation .

Quant on songe aux multiples représentations picturales de la Chute d’Adam et d’Ève, le serpent séducteur dans l’arbre dominant Ève et un Adam, à l'écart hors du "coup", et au mince vipéreau qui émerge des broussailles pour converser avec l’Ève de Giacometti*, surprise mais attentive et sensuelle, on ne peut que s’émerveiller de la convergence entre le plasticien, illustrant Le Visage nuptial, et le poète, dans la révision de nos habitudes millénaires de penser le monde humain et nous-mêmes et de l'invite "serpentaire" à porter un autre regard sur la condition de notre double humanité, non récit d'une chute mais d'un avènement.
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* Mais où donc est passé Adam ? Sans doute, est-ce Char écrivant le poème ? Giacometti traçant le dessin ?