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mercredi, 05 novembre 2008

embellie automnale

Dac'hlmat ventilé par la légère brise de suet, soleil à profusion, silence à peine troué par l'aboiement lointain d'un chien : bonheur d'une sieste philosophe en bouquinant Le Christianisme hédoniste d'Onfray, tome II de sa Contre-histoire de la philosophie .

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J'avais achevé ma journée de lundi sur la prééminence du juste sur le vrai ; Onfray me fait découvrir, dans le capharnaum sectaire des Gnostiques qui suit l'effacement des Antiques et accompagne l'avènement du Christianisme, Épiphane qui, à peine âgé de dix-sept ans au commencement du IIe siècle de notre ère, écrit un traité De la Justice qu'Onfray qualifie de brûlot qui semble pouvoir être dit anarchiste tant il voue aux gémonies les dieux de papier, d'argent et de fumée célébrés par la plupart des vivants.
Un Père de l'Église, Clément d'Alexandrie, peu enclin à l'indulgence face aux Gnostiques, sauvera quelques-unes des idées du traité d'Épiphane, que Jacques Lacarrière nomme un "Rimbaud gnostique"*.
Me voilà renvoyé dans la douceur de l'après-midi à ma sentence de la veille au soir. Y a-t-il si grand écart entre Épiphane et ma "grande vieille" des Aurès, Germaine Tillion ?
Le Juste serait-il valeur moins pérenne que le Vrai ?

Nicléane est revenue de sa promenade dans les collines avec un plein cageot de pommes de Chailleux qu'elle a ramassées dans un pré laissé en friche.
Le soir, après avoir longé la côte de Piriac, nous sommes passés par Guérande, GwenRan, le Pays blanc. Des années, que nous n'étions pas entrés dans l'enceinte des remparts. La petite ville d'été des Ducs est devenue un clinquant lacis de rues à touristes en mal de celtitude. Seuls, les chocolatiers échapperaient à ma rogne.

* Les Gnostiques de Jacques Lacarrière. Je ne cite ce site (!!!) que pour la seule lecture de l'extrait concernant Épiphane.

samedi, 01 novembre 2008

temps de Toussaint

Vrai temps de Toussaint : vent de Nordet et battant les vitres, une pluie froide.

Temps de Toussaint ne réjouit point le marin

Un temps à mouiller l'ancre de Dac'hlmat dans l'anse d'Er Salus, mer plate et gréément hurleur, j'aime. Mais aujourd'hui ce sera temps à se calfeutrer dans la "librairie" avec de bons livres et des musiques — temps à écouter du Wagner et son Vaisseau Fantôme !
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Temps des saints, temps des morts, de mes morts, de ma morte.
Me reviennent souvent en ces jours de novembre ce que j'ai appris — naguère ? jadis ? — lors d'un trop bref séjour chez les Dogons : par des rites funéraires, qui entraînent le mort hors du domaine terrestre, les Dogons vont rompre les dernières attaches du défunt avec sa vie passée ; de son état de "mort", il passe, par la rupture de ses outils d'homme, au statut d'ANCÊTRE vivant.
Ancêtre qui vient du latin "antecessor", celui qui précède, d'abord attesté, non comme lointain aïeul, mais comme terme commun au sens de « éclaireur ».
Les ancêtres comme des éclaireurs ! soninke.jpg
Les Dogons ne sont pas loin de nous proposer une amorce de réponse, incertaine certes comme toutes les réponses, qu’elles soient celle du croyant, avec la foi et l’espérance en un au-delà, plus juste, qu’elles soient celles de l'incroyant — ce que je suis devenu — dans le désespoir et la béatitude de l’épicurien ou du stoïcien, une réponse donc à l’au-delà de cette vie, à notre interrogation sur l'immortalité .
Ce que les Dogons nous disent, c’est cette exhortation fraternelle : « Et si c'était de notre ressort à nous, les encore vivants, de continuer nos morts bien au delà du simple et pieux souvenir ? D’entretenir à travers nos enfants et les enfants de nos enfants, la force vitale et les vertus qui animaient les actes du mort ! »
René Char rejoignait les Dogons écrivant ceci qui pour moi, dans la lumière de la mort des aimées et des vieux copains, prend encore davantage sens :
Avec celui que nous aimons, nous avons cessé de parler, et ce n’est pas le silence. Qu’en est-il alors ? Nous savons, ou croyons savoir. Mais seulement quand le passé qui signifie s’ouvre pour lui livrer passage. Le voici à notre hauteur, puis loin, devant.




dimanche, 26 octobre 2008

un homme à mi-mât

Le VendéeGlobe, un matin d'automne, il y a trois jours. Nicléane photographie les lignes, les couleurs, les pavillons, la complexité de l'accastillage, le "tissage" des gréements. Ce ne sont point les "monstres" dont parle la presse dite spécialisée, ce sont de superbes carènes pour affronter toutes mers du monde, menées par de très bons marins DSC_3244.jpg

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Un homme à mi-mât ?
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Nicléane photographie. Une heure plus tard, au restaurant du Ponton à une table voisine, un équipage, celui de Roxy, et un profil que nous croyons reconnaître ? C'est bien lui. Il y a bientôt dix ans, il avait vingt ans. C'était aux Marquises, le grand large lui paraissait encore une épreuve. J'ai toujours gardé nostalgie de son débarquement, sur l'unique quai de NukuHiva. Ce jour d'octobre, sur les pontons de Port-Olonna, il a la belle trentaine et il est devenu Homme de mer ! Une forte émotion réciproque. Nous nous embrassons. Plus tard en enregistrant les images : cet homme à mi-mât. C'est lui Erwan Le M! L'après-midi, nous irons jusqu'à l'extrémité de la digue de Saint-Nicolas : dans notre suroît, la bouée du Nouc'h, et l'ouvert du golfe de Gascogne. Dans quinze jours, trente marin(e)s s'effaceront à l'horizon.
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Dans un recoin du village du Vendée Globe, comme un clin d'œil, vieux de plus de quatre cents ans :
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La Pinta, une caravelle de l'escadre de Colomb, la première qui revint des "Indes occidentales" à Bayona, port de Galice, commandée par Martin Alonso Pinzon.

vendredi, 03 octobre 2008

Les cinq Pen Duick

Elles* ne sont pas quatre, mais cinq, les belles "mésanges à tête noire", dans la lumière crue d'un front froid.

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* Les voiliers se déclinaient naguère au féminin.

mardi, 23 septembre 2008

retour de mer

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Er Salus, comme un petit moment d'éternité, trois jours durant et Dac'hlmat bien abrité des vents aigres de nordet.
Des ciels nocturnes d'une netteté froide — toujours par la vertu de ces vents — et je relève dans le Livre de bord la contemplation de "mes" constellations.:
Nuit du 20 au 21 septembre, dernière nuit d'été (...ou première de l'automne),
à minuit : presqu'au zénith, ancrée par Deneb et s'appuyant au noroît sur la Lyre avec Véga et l'Aigle avec Altaïr, la Croix du Cygne.
à l'aube, dans le suet : Orion par Aljunina s'appuie en déséquilibre sur Sirius, d'une verdeur bleue comme jamais.
Pour la première fois, dans l'ouest de celle-ci, j'identifie Mirzam.



Le lendemain, nous remontons par le Nord en escale au Crouesty pour une douche brûlante et faire le plein de palets bretons, de cakes au beurre et de chouchen.
Au kiosque de presse, je suis attiré par un magazine assez luxueux, PLUME, le magazine du patrimoine écrit. Le thème, Arthur au-delà de la légende, me pousse à l'achat. Il y fait mention de l'exposition rennaise aux Champs-Libres sur la légende arthurienne (jusqu'au 4 janvier 2009).
D'autres articles intéressants pour un vieux lecteur, sur Lamartine, Nerval : je tique sur l'achat du manuscrit du Manifeste du surréalisme. Manifestement, la rédaction dudit magazine préfère l'initiative privée à la préemption par l'État. Ça me renvoie à la dispersion du "42, rue Fontaine" et de la lutte menée par remue.net et François Bon. J'avais, pour ma part, humblement proposé de rendre au Lot les agathes que Breton y avait collectées.
Rien d'étonnant, l'acquéreur du manuscrit est aussi le directeur de publication de PLUME, qui est aussi le fondateur du musée des Lettres et Manuscrits.

Le plus piquant — j'ai envoyé derechef un courriel — est la brève suivante que l'on trouve en page 6 :
Inépuisable Odyssée... Des indices astronomiques, recueillis dans le texte de l'Odyssée ont permis de dater précisément le retour d'Ulysse près d'Hélène...

Gaste ! s'écrieraient les arthuriens, nous savions Ulysse peu enclin à la fidélité, nous savions les cocufiages subis par la patiente Pénélope.
Mais, de là... à laisser entendre qu'Hélène, pour occuper le lit au pied taillé à la racine dans un olivier, aurait — par quels vents miraculeux ? — précédé Ulysse en Ithaque  et aurait trucidé* Pénélope !
Ce n'est qu'une coquille m'écrirez-vous ! Certes, mais quelle conque !
Amusant avatar causé par un obscur scribe du libéralisme culturel. Peut-être le scribe était-il plongé dans un rêve épique de réécriture ? Surréaliste, non !

Le patrimoine homérique serait-il en danger ? Vains dieux !

* Une impardonnable inattention m'a fait mettre à l'infinitif le verbe "trucider". Un courriel de la rédaction de PLUME, aussi peu amène que celui que j'avais écrit, me fut sur le champ envoyé. De bonne guerre, certes, mais ma coquille était si mince...







lundi, 15 septembre 2008

à nouveau je largue

L'anticyclone nordique est favorable : je vais mouiller un pied d'ancre à Er Salus, pour six ou sept jours.

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mardi, 15 juillet 2008

et parallèlement, le de-ci de-là de Nicléane

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samedi, 21 juin 2008

viatique pour un cabotage

Dimanche, j'embarque pour un premier cabotage estival : nous n'irons guère au-delà du Raz-de-Sein.
Ce sera un cabotage "studieux" je m'engage à achever ma chronique d' Algériennes* pour la fin de l'an et je souhaite poursuivre jusqu'à la sécession de Chabani en avril 1964.
J'emmène un mince viatique de lectures : le Livre II des Essais de Montaigne, Mars ou la guerre jugée de Alain, pour éclairer et creuser ce qui me paraît encore fort narratif dans l'évocation de ces années de merde et de feu.

J'allégerai les heures d'écriture avec le Cendrars de chez Seghers dont je compte bien publier la note dans "Poètes, vos papiers !" pour septembre.
J'avoue que je troue ma chronologie de découverte des poètes, sautant et Pessoa et Reverdy ; je les remettrai sur l'établi à l'automne.

Curieusement, je laisse sur ma table trois petits bouquins, acquis hier après beaucoup de tergiversations.
Souvent, j'hésite à confronter à des lectures universitaires des lectures qui me furent — et me sont encore — des chemins de traverse n’appartenant qu’à moi seul, inaugurées seules sans jalons autres que les premières pages et quelques lignes glanées au gré des feuilletages, qui sont peut-être mes lectures des trois derniers auteurs achevant le cycle des découvertes du siècle passé, qui me creusent et m’amplifient.
Les écrivants du XXIe m’indiffèrent, me laissent froid.

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Je lis Annie Ernaux depuis 1974, et mon commencement, ce fut Les armoires vides.
Je lis Pascal Quignard depuis 1987, et je ne sais quoi de La leçon de musique, ou des Tablettes de buis d’Apronenia Avitia m’amena à accumuler, en poche, les Petits Traités et autres minces recueils.
Je lis François Bon depuis 1990, et La folie Rabelais, Daewo ,Tumulte , respectivement, me relancèrent dans mon adolescence qui se rêvait rabelaisienne, dans mes traces vécues de culture ouvrière et dans le tohu bohu d’un monde écrit qui advient.
Ils seront, en septembre, tous trois, sur la table du retour et leurs livres dégringoleront des étagères pour les confrontations, qui, je ne le nie point, lèveront des horizons que, solitaire, ma lecture n’eût pas découverts.

J’aavoue qu’au fond du sac marin, il y aura, comme à chaque départ, un Char pour les rocs et un Saint-John Perse pour les houles.
Le sang est à quai. À chaque époque ses lesteurs.

René CHAR
Moulin premier, XXXI


Que les vents vous soient favorables !

* Quelques extraits d'Algériennes sont lisibles sur le site SPIP — rudimentaire ! — de grapheus tis

mardi, 03 juin 2008

les Rencontres du Fleuve

Demain, à Concarneau pour convoyer dans la fervente amitié marine, Le Marche-Avec, sardinier concarnois, qui remontera vendredi l'estuaire de la Loire pour participer aux Rencontres du Fleuve.
Aux quais des anciens Chantiers de la Loire, puis en semaine de Nantes à Paimbœuf, la batellerie fluviale croisera avec les vieux gréements de travail de la Bretagne-sud et du nord Vendée, sur un fleuve enfin assaini de la pollution de mars.

Et les Vikings seront de retour !

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jeudi, 08 mai 2008

en mer

Matin lavé comme l'épouse. Et la couleur au monde restituée : entremetteuse et mérétrice ! La mer est là, qui n'est plus songe.

Saint-John Perse


Ce, jusqu'à mercredi 14 mai.

samedi, 12 avril 2008

où le sujet est encore une histoire de voiliers nantais

Quand on s'embarque dans des histoires de voiliers et de longs- courriers, on revient toujours à ce vieux cap-hornier Louis Lacroix, natif de la Bernerie-en-Retz et fils de notaire, qui gravit de novice à capitaine l'échelle de la hiérarchie de la "Marchande". Il termine sa carrière comme capitaine-visiteur du port de Nantes et trouve le temps de rédiger le livre des dernières heures de la marine à voile.
Tout môme, j'avais entendu parler de ce vieux marin. Peut-être l'ai-je croisé dans les années 46-47 quand je descendais, le jeudi matin de la rue Rosière d'Artois au quai de la Fosse rêver de grands départs ?
Mais c'est Cendrars qui me jeta dans l'épopée. L'été 1961, j'étais immergé dans les lectures de L'homme foudroyé et de Bourlinguer quand je tombai sur une des notes du chapitre VIII Gênes, certainement une des plus belles recensions écrites à propos des bouquins de Louis Lacroix :

Note 12.
Je profite de l'occasion pour rendre hommage aux bons, gros bouquins du capitaine Lacroix, cap-hornier, qui a bourlingué sur les sept mers du globe et qui a fourré dans ses livres, en plus des mirobolantes photographies et des documents que l'on ne trouve nulle part ailleurs, tout ce qu'il a pu apprendre et voir de ses yeux durant ses longues croisières et ses dures campagnes de mer, sans parler des aventures de mille navires et des mille et un secrets du métier dont les
marins ne sont jamais chiches. Ses livres constituent l'épopée de la marine à voile, et qu'importe son tour de plume puisque le vieux loup de mer a tant de choses à nous dire et à nous apprendre, et qu'il est profondément humain! Le capitaine Lacroix est en train d'écrire, sans s'en douter dans sa bonhomie, l'Histoire de la marine marchande française, la vraie, et dont tout le pays se désintéresse! C'est déjà un monument, et ce n'est pas fini...

Quel malheur qu'il n'y ait pas quelque part, perdu dans sa province natale, un retraité colonial qui ne soit en train d'en faire autant pour les Colonies, dont tout le pays se désintéresse également! Je pense à un trafiquant ou à un planteur, plein de verve, d'expérience, d'anecdotes vraies, de choses vues, d'aventures vécues pour nous donner une idée de conquête pacifique, de lente pénétration de la civilisation, et non à un militaire de plume.

Voici la liste des ouvrages du capitaine Louis Lacroix, tous sont copieusement illustrés et ont paru Aux Portes du Large, à Nantes, entre 1936 et 1946 : Les derniers Grands Voiliers ; Les Derniers Cap-Horniers ; Baye de Bretagne; Les Derniers voyages de Bois d’Ébène, de Coolies et de Merles du Pacifique ; Les Derniers Voyages de Forçats et de Voiliers en Guyane et les Derniers Voiliers Antillais; Les Écraseurs de Crabes sur les Derniers Voiliers caboteurs; Les Derniers Clippers (en préparation).
Blaise Cendrars
in Bourlinguer,
Gênes, l'épine d'Ispahan, pp. 268-269
Livre de poche, 1960, première édition chez Denoël en 1948


Post-scriptum : J'ai failli ne pas publier le second paragraphe de la note où Cendrars sollicite le retraité colonial qui pourrait entreprendre l'histoire des Colonies, conquête pacifique, lente pénétration de la civilisation (sic et re-sic)... me disant en mon for intérieur : « Même, soixante ans après, les lecteurs de 2008 vont prendre Cendrars pour un sacré ringard réactionnaire ! »
Puis, très vite, j'ai pensé que c'était une bonnne ruade dans toutes les idées, parfois très saines, qui sévissent dans les têtes des enfants et petits-enfants qui jugent sans nuances, ni égards, le passé obscur, trouble même, de leurs pères.

dimanche, 23 mars 2008

joyeuses pâques ! et merdre !

En guise d'œufs de Pâques, nous ramassons, ici, des boulettes de fuel.
C'est un cadeau d'un de nos principaux mécènes d'Estuaire 2007 : quatre cents tonnes dans le fleuve depuis le dimanche des Rameaux.
Total a dû penser qu'une société pouvait avoir aussi autant d'idées intelligentes que beaucoup des "ârtistes" qu'elle avait soutenus avec l'accord de nos édiles. Elle pense seulement avec quelques mois de retard sur les événements subventionnés.

Alors, messieurs les maires, réélus récemment, de Nantes et de Saint-Nazaire, qu'en pensez-vous pour Estuaire 2009 ?
Par exemple, un bon, beau, grand pétrolier échoué sur le plateau de la Lambarde ? Ou mieux entre le Grand Charpentier et la pointe de Chemoulin ? Avec la mise en scène du sieur Courcoult qui sait tout de l'art de mal faire couler de fausses maisons ou de l'autre, plus comique encore, Florentijn Hofman, qui gonfle un canard géant à l'en faire crever et que nous ne verrons donc jamais flotter.
Un beau pétrolier éventré et plein de tuyaux de raffinerie crevés : ça nous ferait de beaux noirs à la Soulages sur les rocs, les sables et les roselières des marais.

lundi, 21 janvier 2008

Les mots de l’un pour saluer le retour de l’autre

Il a achevé un périple, devenu commun, mais qu’il a rendu par sa ténacité, sa modestie, son intelligence des éléments, pour une fois encore hors du commun.
Il ne me déplaît point d’apprendre qu’après avoir franchi la “Ligne” entre les Fillettes et le Petit-Minou, Francis Joyon a choisi de passer sa dernière nuit au mouillage de Roscanvel, seul.
Après cinquante-sept jours de bonheurs et d’enfers, de bruits et de fureurs, ce nécessaire face-à-face enfin silencieux avec soi-même dans ce drôle d’engin qu’est un voilier devenu son corps second, ses mains, ses bras, ses jambes, son ventre, son cul !

De passage ici, cette fin de semaine, ÉL m’a offert le livre d’un homme que je ne connaissais pas : un bénédictin de Ligugé* qui va en mer. Il a écrit Pélagiques :

La mer existe depuis toujours, et ce toujours de la mer existe toujours dans les hommes ; dans la tête des hommes ; dans le cœur des hommes ; dans les yeux des hommes ; dans les mains des hommes. Dans les couilles des hommes...........................................................
................ la mer tout à l’entour certifie le regard. Mer paupière elle-même, mer pupille. Étant là tout exprès pour s’ouvrir, pour s’offrir à la plus respectueuse rapacité de l’homme —celle du regard —, la mer magistrale apprend à l’homme, non pas seulement à se servir de ses yeux, mais à les servir. Car, amariné, l’œil est roi.


Je sais aussi d’autres êtres humains qui n’ont pas de couilles, mais qui ont un ventre autrement fécond : les Femmes de mer !

* François Cassingena-Trévedy, PÉLAGIQUES, éditions du Gerfaut, 2007

samedi, 20 octobre 2007

nostagie des Marquises

Centenaire René CHAR

Cette note est dédiée à Xavier et Mathieu.

Hier boudant le rugby, je regarde Thalassa qui s'achève sur les Marquises.
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Depuis, une nostalgie irrépressible, qui me fait feuilleter les petits albums : Nuku-Hiva, la baie d'Anaho, Ua-Huka et la baie de Vaipaee, Nicolas et son arboretum : ce Marquisien a arpenté tous les rivages du Pacifique sud. Y a-t-il un arbre de ces rives qu'il ignore ?
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Il nous donna des fruits, beaucoup de fruits.

Puis, j'ai réouvert mon livre de bord de cette traversée "Pacifique". J'y avais consigné des bribes de beauté recueillies dans l'illisible du Partage formel de René Char. Nous avions remonté le mouillage depuis plus de huit jours ; nous étions à quelques 3 000 milles de Panama.
je les livre en fétus :

...une éternité de tenailles...
...qui va nue sur ses pieds de roseaux, sur ses pieds de caillou
... en laines prolongées...
... en aurore artérielle...
Le poète étend sa santé chaque jour.
... ayant tes lèvres pour sagesse et mon sang pour rétable...
... orages pélerins...
... le visage de l'échange.
la pastorale des déserts

... l'exégèse des dieux puissants et fantasques...
Derrière cette persienne du sang brûle le cri...

... la voix de ses fontaines
...tirer parti de l'éternité d'une olive...

Toute respiration propose un règne...

...à l'écart, suivant l'allée de la vigne commune... avec la Femme à son côté s'informant du raisin rare.

Soleil et nuit dans un or identique... la mort, université suspensive.

Lectures en rêveries suspendues.

mardi, 16 octobre 2007

arpentant Tréac'h er Béniguet

Centenaire René CHAR


Samedi, à l'extrême ouest de Houat, Tréac'h er Béniguet, la grève qui clôt la chaussée du Béniguet — les prévisions météo donnaient une petite houle de 1 mètre à 1 mètre 50.
La brume du matin s'est déchirée. Si peu de vent, netteté ensoleillée des roches. L'océan s'engouffre entre l'île Cenis et l'île Guric, fracassant les brefs silences entre deux vagues.
Pieds nus, longuement, lentement, j'arpente la grève, à la limite du ressac qui fait du sable si fin, quand la vague se retire, un miroir.

Tu es plaisir, avec chaque vague séparée de ses suivantes. Enfin toutes à la fois chargent. C'est la mer qui se fonde, qui s'invente. Tu es plaisir, corail de spasmes.
La Lettera amorosa,1953