lundi, 29 octobre 2007
un mot de billet ?
Noémie et Célia sont là. Alors guère le temps depuis samedi, de rédiger le moindre mot de billet. Faudrait-il que "l'outil" ne soit point squatté !
Longtemps, j'ai cru que le "mot de billet" était une incorrection d'origine populaire, un pléonasme, quoi ! pour les puristes. En ai-je fait des mots de billet à l'intention de mon instituteur, des faux pour couvrir mes escapades d'école buissonnière ?
Voilà que lors d'une insomnie, lisant par hasard Le Misanthrope — ce Molière-là est mon préféré* — à l'acte III, scène VI, Célimène dit à Alceste :
Alceste, il faut que j'aille écrire un mot de lettre...
Molière, si ce n'est son nègre... de Corneille — lire sur Litor des controverses acharnées sur le sujet que relance avec pugnacité un certain J.M. Vilprey — me dédouane de mon sentiment honteux d'user de cette expression que je pensais jugée fautive par de fins lettrés. Mais l'est-elle ?
Hier, fêté les quarante ans d'Er qui, pour moi, évoquent une tournée très matinale dans les rues d'Alger à la recherche d'une pharmacie de garde pour apaiser des contractions qui annonçaient bel et bien l'arrivée du premier héritier...pour le soir même !
Crevettes sautées à l'algéroise, de celles que l'on peut encore, je l'espère, déguster dans les gargottes de l'Amirauté et couscous tout autant algérois, mes seules références culinaires magrébines bien maîtrisées !
Arrosés de Sidi-Brahim tunisien (?), à défaut de Mascara algérien, de plus en plus introuvable.
* Le Misanthrope, qui comblait les moments sombres de l'adolescence avec ces deux vers extraordinaires d'orgueil et dédain :
Et chercher sur la terre un endroit écarté,
Où d'être homme d'honneur on ait la liberté.
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jeudi, 25 octobre 2007
"le rêveur éveillé"
de Mj
"Le rêve éveillé est une forme d'amour de la vie, une gravidité dont on a le pressentiment, une forme de conscience rêveuse de la vie. Le rêveur éveillé est celui qui, à l'état de chenille , dans le cocon, rêve la vie du papillon, une plénitude et une beauté indemnes. S'il quittait le cocon et se réveillait, il perdrait cette singulière innocence mais aussi cette totalité unique qu'il n'est possible d'"avoir" que de la sorte. Le désenchantement serait mortel. Le rêveur éveillé se refuse au désenchantement qui intervient avec l'âge adulte. Il est un éternel jeune homme. "
Paul NIZON
Marcher à l'écriture
Actes Sud, 1991
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lundi, 22 octobre 2007
ce que j'aurais lu ce matin
Centenaire René CHAR
Entre les deux coups de feu qui décidèrent de son destin, il eut le temps d'appeler une mouche : « Madame ».
Feuillets d'Hypnos, 42
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dimanche, 21 octobre 2007
Lire en fête ?
"Lire en fête" un peu tristounet sur l'île de Versailles. un atelier d'écriture par ci, une bibliothèque des prisons par là, quelques liseuses pour enfants et beaucoup de "bouquinistes". Était-ce bien des bouquinistes ? Certaines et certains ressemblaient plutôt à des enfants ingrats qui venaient brader la bibliothèque de leurs vieux parents décédés. Ça sentait l'entre-deux-guerres avec des Paul Bourget, Maurice Dékobra, Paul Morand, Jacques Chardonne, pas mal de René Bazin — ô "La terre qui meurt", ô Les Oberlé — directement issus de bien-pensantes étagères vendéennes.
Quelques Péguy, Gide et Koestler réédités chez Gallimard, en collection Blanche, fin des années quarante et les innombrables Fleuve Noir, Masque Noir, défraîchis, écornés. Et encore des Bibliothèque Nelson — à onze ans, dans mon grenier de la rue Rosière d'Artois, au n°9, j'y dévorai La reine Margot et Vingt ans après.
Un petit éclat rouge : je suis tombé entre deux tomes des Oberlé sur APOLLINAIRE, dans ma chère collection Poètes d'Aujourd'hui, chez Seghers. Ce n'est pas la première édition par André Billy, n°8, mais le n°227 de mai 1975 par Daniel Oster. C'est très post-soixante-huit, entre psychanalyse et sémiotique, jeux de mots inclus, et ce, dès les premières lignes :
Au moment d'écrire sur Guillaume Apollinaire, découverte de l’apolinéarité d'Apollinaire, toujours en ligne au-dessus de lui-même. Apollinaire, le poète hors de soi, périphérique. Poésie en recherche d'apogée. Flottement, expansion, extériorisation ou évanouissement. Rarement linéaire, marginal de son propre discours. On ne peut donc parler d'Apollinaire que d'une façon apolinéaire, par-dessus, en vol, commentateur-Icare, au risque de se brûler les ailes. (Apollinaire s'écrit avec deux ailes.) Apollinaire exige que je nous tienne en respect entre terre et ciel.
Pourquoi ne m'étais-je point procuré le n°8 ?
Sans doute parce que j'ignorais encore les Seghers et qu'en 1954, déjà dans les marges de la littérature qu'on m'enseignait — et que j'aimais d'ailleurs, j'avais clandestinement dans mon pupitre de lycéen Apollinaire par lui-même de Pascal Pia, dans "Écrivains de toujours" Au Seuil (1954), glissé prudement sous le Paul Claudel de Louis Barjon aux Éditions Universitaires, maison très appréciée chez mes Bons Pères.
C'était assez éclectique, c'était mes premières démarches critiques hors des manuels scolaires et, ma foi, Apollinaire et Claudel, côte à côte, ce m'était déjà une belle harmonie des contraires. Quoique, Claudel ?
Mon achat d'hier ne fut donc que la remontée sentimentale de mes lectures adolescentes.
Il fut troublant, cet Apollinaire de Pascal Pia, ce n'était encore ni les Poèmes à Lou, ni Les onze milles verges, mais quel plus doux émoi, alors, que la prose de L'enchanteur pourrissant, soutenu par les gravures sur bois d'André Derain.
« Je suis belle comme le jardin d'avril, comme la forêt de juin, comme le verger d'octobre, comme la plaine de janvier ». S'étant dévêtue alors la dame s'admira. Elle était comme le jardin d'avril où poussent par places les toisons de persil et de fenouil, comme la forêt de juin, chevelue et lyrique, comme le verger d'octobre, plein de fruits mûrs, ronds et appétissants, comme la plaine de janvier, blanche et froide........... .
«........J'ai laissé mon castel Sans-Retour, sur le mont Gibel. J'ai laissé les jeunes gens que j'aime et qui m'aiment de force, au castel Sans-Retour, tandis qu'ils aiment de nature les dames errant dans les vergers, et même les antiques naïades.
Je les aime pour leur braguette, hélas ! trop souvent rembourrée et j'aime aussi les antiques cyclopes malgré leur mauvais œil. Quant à Vulcain, le cocu boiteux m'effraye tant que de le voir, je pète comme bois sec dans le feu. »
Lui ayant prêté cet Apollinaire, l'une de mes amours d'alors me l'avait rendu en rougissant. Et pourtant elle n'était point bégueule.
Donc, Apollinaire m'a enjolivé ce samedi d'un "Lire en fête" qui s'exténue — lointaine, "la Fureur"... !
Ce qu'il écrivit à vingt ans me troubla à dix-huit et m'émeut encore à....
Sur toi Hélène souvent mon rêve rêva
Tes beux seins fléchissaient quand Pâris t'enleva.
18:05 Publié dans les lectures, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (3)
samedi, 20 octobre 2007
nostagie des Marquises
Centenaire René CHAR
Cette note est dédiée à Xavier et Mathieu.
Hier boudant le rugby, je regarde Thalassa qui s'achève sur les Marquises.
Depuis, une nostalgie irrépressible, qui me fait feuilleter les petits albums : Nuku-Hiva, la baie d'Anaho, Ua-Huka et la baie de Vaipaee, Nicolas et son arboretum : ce Marquisien a arpenté tous les rivages du Pacifique sud. Y a-t-il un arbre de ces rives qu'il ignore ?
Il nous donna des fruits, beaucoup de fruits.
Puis, j'ai réouvert mon livre de bord de cette traversée "Pacifique". J'y avais consigné des bribes de beauté recueillies dans l'illisible du Partage formel de René Char. Nous avions remonté le mouillage depuis plus de huit jours ; nous étions à quelques 3 000 milles de Panama.
je les livre en fétus :
...une éternité de tenailles...
...qui va nue sur ses pieds de roseaux, sur ses pieds de caillou
... en laines prolongées...
... en aurore artérielle...
Le poète étend sa santé chaque jour.
... ayant tes lèvres pour sagesse et mon sang pour rétable...
... orages pélerins...
... le visage de l'échange.
la pastorale des déserts
... l'exégèse des dieux puissants et fantasques...
Derrière cette persienne du sang brûle le cri...
... la voix de ses fontaines
...tirer parti de l'éternité d'une olive...
Toute respiration propose un règne...
...à l'écart, suivant l'allée de la vigne commune... avec la Femme à son côté s'informant du raisin rare.
Soleil et nuit dans un or identique... la mort, université suspensive.
Lectures en rêveries suspendues.
19:55 Publié dans Char à nos côtés, les marines | Lien permanent | Commentaires (2)
vendredi, 19 octobre 2007
un Char automnal et plus énigmatique encore
Centenaire René CHAR
Hors de nos mains, les anses de la marmite ! Y cuit l'amanite panthère après les souples confitures !
La collation interrompue
Effilage du sac de jute, 1978-1979.
Nous sommes enfin depuis quelques matins entrés dans l'automne.
Voilà ma glane, alors que, ayant parlé hier au soir, avec Gianni* d'Olivier Messiaen, je me suis mis en quête de rapprocher les passions ornithologiques du poète et du musicien.
C'est la teinte automnale des confitures et des champignons qui a prévalu. Mais pourquoi Char en empoisonneur ?
Faut-il rechercher dans les voisinages ésotériques ? Chamaniques, plutôt ?
...elle (l'amanite panthère) contient de la muscarine, de l'acide iboténique et du muscimole dont les propriétés hallucinogènes l'ont désignées pour un usage chamanique dans un but d'ivresse extatique.
in Wikipédia
* Voir dans les sites qui assurent provende : Cie Gianni Joseph.
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jeudi, 18 octobre 2007
ajout à la chronique portuaire LXV
Ils ne sont pas tristes, les grands bourgeois nantais : partisans de la République, soit ! Cette République, d'ailleurs, n'est-elle pas, dans son essence une république bourgeoise ? Les paysans insurgés de 1793 ne s'y tromperont point. C'est une autre...histoire.
Les armateurs nantais, quant à eux, sont loin, très loin encore de soutenir la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen d'août 1789.
S'ils avaient pu la faire abroger !
Et cette arrogance pour justifier la Traite. Des infâmes, vous-dis je !
Paul Legrand a quelque mérite, citant de tels propos en 1908.
13:40 Publié dans Les chroniques portuaires | Lien permanent | Commentaires (0)
Chronique portuaire LXV
Période Révolutionnaire.
1789. — PROTESTATIONS CONTRE LE PROJET DE SUPPRESSION DE LA TRAITE .
Pour répondre aux bruits qui commençaient à circuler, d'une abolition prochaine de la Traite, les Députés de Nantes, Blin et Baco, protestaient énergiquement contre ce qu'ils appelaient « l'anéantissement du commerce nantais ».
« II est indécent, — écrivait Baco, le 23 novembre, — il est odieux d'alarmer ainsi les esprits ; cette conduite mérite le blâme. Il importe à la prospérité de la France que ce commerce se soutienne et s'étende. »
De son côté, Blin écrivait aux officiers municipaux de Nantes :
« J'ai interrogé beaucoup de personnes dans l'Assemblée sur cette motion. Tous l'ont traitée d'extravagante ; je puis donc vous affirmer que personne n'extravague au point de vouloir mettre sur les grands chemins six millions d'âmes que l'abolition de la Traite en France réduiraient au désespoir » (1).
Notons que les cahiers de Doléances et Remontrances du Commerce Nantais portaient au nombre de leurs vœux celui : « Qu'il plaise également à Sa Majesté d'accorder protection pour les navires négriers pendant le temps de leur Traite à la côte « d'Afrique » (2).
1790. — PROTESTATIONS CONTRE LE PROJET DE SUPPRESSION DE LA TRAITE.
Le 18 février 1790, le sieur Cottin, député de Nantes à l'Assemblée Nationale, répondait ainsi à ceux qui osaient lancer contre lui une accusation « aussi atroce » que celle de faire partie de la Société des Amis des Noirs :
« Quant à l'abolition de la Traite des Noirs, ainsi que leur affranchissement dans les colonies, la philosophie a pu faire germer cette opinion dans l'esprit des philanthropes, les principes d'humanité ont pu égarer leur zèle, mais une opinion particulière à une Société qui se fait gloire de la professer sans en avoir calculé toutes les conséquences, ne saurait être manifestée par un homme qui, honoré de votre confiance, la trahirait en renonçant au vœu que la politique réprouve et qui contrarierait si ouvertement vos intérêts, quand elle ne troublerait pas la tranquillité publique ».
De son côté, le frère de ce député, le sieur Cottin des Sources, protestait dans le Journal de la Correspondance de Nantes, contre cette accusation qui, disait-il, ne pouvait émaner que d'un « libelliste mal intentionné » (3).
Le 13 mai de la même année, cent trente membres de la Chambre de Lecture Le Soleil, de Nantes, se désabonnaient en masse du Patriote Français, coupable de défendre les Noirs, et écrivaient à Brissot de Warville, directeur de ce journal :
« Votre obstination, Monsieur, à faire parade d'une morale pernicieuse, vos principes désastreux pour l'abolition de la Traite des Noirs, sans égard aux malheurs qui en seraient les suites inévitables, nous déterminent à voua déclarer l'abandon que nous vous faisons de la somme souscrite par nous pour votre Patriote Français. Changez ce titre, Monsieur l'Ami des Noirs, qui n'êtes l'ami de personne. Vous l'avez profané par une doctrine impolitique et cruelle faite pour plonger des milliers d'hommes, vos frères, dans la misère et le désespoir.
Gardez votre feuille pour vos amis les Africains, mais dispensez-vous de nous l'envoyer désormais » (4),
Enfin, le journal parisien Les Actes des Apôtres, publiait en 1790 une Adresse du Comité de la Ville de Nantes à l'Assemblée Nationale, dont les signataires s'efforçaient de légitimer la Traite, et suppliaient « l’auguste assemblée » de rejeter « l’extravagante motion » de la liberté des Noirs si un organe corrompu osoit la faire entendre ».
Le journal faisait précéder cet article de la note suivante :
« On a beaucoup parlé d'une adresse aristocratique de la Ville de Nantes à l'Assemblée nationale relativement à la Traite des Noirs » (5).
APOGÉE DU COMMERCE DE NANTES AU XVIIIe SIÈCLE.
C'est en 1790 que le commerce de Nantes au XVIIIe siècle atteignit son maximum. On
comptait alors au port de Nantes :
259 navires long-courriers jaugeant ........... 97.000 tx.
271 navires de grand cabotage jaugeant... 42.221 tx.
725 navires de petit cabotage jaugeant .... 70.927 tx.
et 1.303 barques de sel jaugeant..................... 15.000 tx.
soit un nombre total de 2.558 navires jaugeant ensemble 226,047 tonneaux, chiffre considérable pour l'époque (6).
Pendant la Révolution, ce mouvement maritime diminua considérablement ; et seul le petit cabotage se maintint et même s'accrut légèrement. Les long-courriers et les navires employés au grand cabotage furent presque tous armés en course, et les riches prises qu'ils amenèrent à Nantes dédommagèrent largement les armateurs de la cessation presque absolue du commerce.
____________________________________________________________________
(1) L. BRUNSCHWIG, Ephémérides Nantaises du Centenaire de la Révolution.
VERGER, Archives curieuses de Nantes, t. IV, p. 214.
(2) TREILLE, Le Commerce de Nantes et la Révolution, page 60.
(3) Journal de la Correspondance de Nantes, Année 1790, n° 4, p. 62.
(4) Journal de la Correspondance de Nantes, Année 1790, p, 173.
(5) Les Actes des Apôtres. Version seconde. À Paris, l'an de la République sanctionnée Ier,
n° XXXII, p. 7.
(6) LEBEUF, Du Commerce de Nantes, pp. 214-5-9.
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mercredi, 17 octobre 2007
où l'on reparle de Tréac'h er Béniguet
Quand j'ai découvert, après mes pérégrinations africaines, les espaces marins proches que nous ignorions, parce que, dans les années cinquante, et même plus tard, les familles ouvrières nantaises ne s'aventuraient guère au-delà des plages entre Pénestin et la Bernerie, Tréac'h er Béniguet, cette grève de l'île de Houat, enserrée dans un chaos de récifs, qui n'était accessible qu'après une bonne heure de marche à travers les landiers déserts, battus par le vent, me fut un de ces lieux très "gracquiens" qui vous arriment, des heures durant, dans la méditation océane.
Un soir de tempête hivernale, dans les années quatre-vingt, j'en ramenai cet écrit, comme le final d'un récit amoureux contemporain.
L’an 2020, le printemps finissant, un enfant qui péchait des ormeaux découvrit sur Tréac'h Er Béniguet les cadavres enlacés d'une femme et d'un homme. La peau ridée et les toisons blanchies dénotaient un grand âge. De haute stature, l'homme, à plat dos, cheveux et barbe longues, tenait, blottie dans ses bras, la femme à demi-couchée sur lui.
Le visage reposant sur l'épaule de l'homme gardait une fascinante beauté sous la neige de la chevelure. Les cuisses étaient si fortement nouées que les corps ne purent être séparés.
La mort que l'on crut par immersion avait laissé sur les visages une telle sérénité que les Iliens vinrent longuement contempler ces gisants apportés par la houle.
Un observateur attentif eût remarqué l'infime incision aux poignets gauches du couple.
En dépit des tentatives réitérées pour les séparer - certains soutinrent que la mort les avait saisis dans leur ultime acte d’amour - ventres et cuisses demeurèrent littéralement soudés. Les corps, déposés sur un bûcher de bois flottés, furent brûlés lors de la nuit du solstice d'été et les cendres dispersées sur l'Océan...
En 3040, un barde qui recherchait le passé dans un ermitage de la Grande Terre ouvrit un mince codex épargné par le cataclysme nucléaire qui ravagea le ponant de ces terre dans les dernières années du troisième millénaire.
II y déchiffra lentement le récit de la mort de Muirgen et de Owârn.
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mardi, 16 octobre 2007
arpentant Tréac'h er Béniguet
Centenaire René CHAR
Samedi, à l'extrême ouest de Houat, Tréac'h er Béniguet, la grève qui clôt la chaussée du Béniguet — les prévisions météo donnaient une petite houle de 1 mètre à 1 mètre 50.
La brume du matin s'est déchirée. Si peu de vent, netteté ensoleillée des roches. L'océan s'engouffre entre l'île Cenis et l'île Guric, fracassant les brefs silences entre deux vagues.
Pieds nus, longuement, lentement, j'arpente la grève, à la limite du ressac qui fait du sable si fin, quand la vague se retire, un miroir.
Tu es plaisir, avec chaque vague séparée de ses suivantes. Enfin toutes à la fois chargent. C'est la mer qui se fonde, qui s'invente. Tu es plaisir, corail de spasmes.
La Lettera amorosa,1953
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jeudi, 11 octobre 2007
c'était déjà hier
Relisant — ça m'arrive souvent — la note d'avant-hier, à l'instar des "embrouillardées" de JCB, j'y suis allé d'un "écritoire" au masculin alors que je devrais savoir qu'écritoire est de jolie féminité.
Donc L'Écritoire du gué : du nom donné naguère à l'ébauche de micro-édition pour les petites brochures des ateliers, tout en gardant "grapheus tis" qui signifie bien cet "un quelconque écrivaillon".
Pourquoi "du gué" : parce qu'au bas de la Basse Bouguinière, remonte un étier jadis emprunté par les pêcheurs pour parvenir à leurs viviers et que pour franchir un étier soumis aux marées, il faut un gué !
Plus guère de traces de ce passé marinier, sinon le ruisseau, s'évasant en étang, qui traverse le parc du Champ-Thoury, le calvaire de... la Croix-du-Gué et la rue du Vivier.
Merci aux commentaires, aux courriels et aux liens qui m'encouragent pour une quatrième année.
À lundi soir, retour de mer !
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mercredi, 10 octobre 2007
Chronique portuaire LXIV
Du Commencement du XVIIIe Siècle à la Révolution
1785. — NANTAIS COMPAGNON DE LA PÉROUSE.
Parmi l'État-major de L’Astrolabe, l'un des deux navires de La Pérouse qui quittaient Brest le 1er août 1785, figurait un Nantais, le lieutenant de vaisseau Augustin de Monti.
Appelé le 24 avril 1785 au commandement de la Dorade, il avait refusé ce poste pour suivre La Pérouse ; ce dernier lui en sut gré, d'ailleurs, en donnant son nom à l'une des baies qu'il découvrit, la baie de Monti, par 60° lat. N. et 145° long. O. .
Après la mort de son capitaine, de l'Angle, de Monti prit le commandement de L’Astrolabe, et disparut avec toute l'expédition, probablement en 1788, à l'âge de 34 ans.
Augustin de Monti était l'arrière-petit-fils d'Yves de Monti, en faveur duquel Louis XIV avait érigé, en 1672, la terre de la Chalonnière et de Rezé en comté. Avant de s’embarquer pour cette fatale expédition, il avait chargé son frère, Joseph, chevalier de Monti de Lormière, d'acheter en son nom le château et la terre noble de la Cholière, paroisse d'Orvault, et cette acquisition fut faite le 12 mai 1787.
Le chevalier Augustin de Monti avait fourni une carrière de dix-huit ans dans la marine de l'Etat. Il avait servi avec éclat sous les ordres de Guichen, de son parent Du Chaffault de Besné, du Comte de la Motte-Piquet ; et, le 24 octobre 1784, avait reçu la croix de Saint-Louis par anticipation, car la décoration ne s'accordait qu'aux lieutenants de vaisseau ayant vingt-deux ans de service, et la pension seulement aux officiers ayant vingt ans d'exercice ou des blessures qui les missent hors d'état de servir (1),
1787. — PROJET DE CANAL DE NANTES À PORNIC.
En 1787, le Marquis de Brie-Serrant, dernier seigneur de Retz, présentait un projet de canal maritime de Nantes à la mer par le lac de Grand-Lieu, et aboutissant à Pornic ; projet qu'il se proposait d'exécuter « à ses risques et périls », et qui, cependant, ne fut pas pris en considération. Vingt ans après, l'Amiral le Ray, alors député, reprit cette idée, et la fit accepter par le Gouvernement, mais l'opposition de la Ville de Nantes en empêcha la réalisation (2).
_____________________________________________________________________
(1) Revue historique de l'Ouest, Un Monti compagnon de La Pérouse, par Ch. COURTEAUD.
(2) Lycée Armoricain, 4° volume, 1824, pp. 320 et s.
Ici, s’achève le chapitre IV ,
Du Commencement du XVIIIe Siècle à la Révolution
tiré de
Marins et Corsaires Nantais
par Paul Legrand
Héron - J. Mesnier & C° - Éditeurs
7, Rue de Strasbourg - Nantes - 1908
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mardi, 09 octobre 2007
qu'est-ce qu'un blogueur de trois ans ?
Trois ans de blogue !
Je suis un lecteur, écrivant, écrivassier, écrivailleur, qui vais en mer, j’ai trop de livres sur ma table pour être un écrivain, pour être un marin, je ne suis pas un professionnel, je redoute, sinon honnis ce terme, naguère, j’ai pratiqué un métier, je ne suis pas certain que c’était une profession.
Je suis un amateur.
J’ai griffonné dans des carnets, sur des feuillets, dans des cahiers, j’ai lu sur les écrans, puis j’ai écrit sur ces mêmes écrans avec mes savoir-faire de lecteur et d’écrivailleur, écrivassier, écrivant.
Je suis passé du papier à l’écran. Mais il n’est pas sûr que ce glissement ait changé mes us, je ne fais que maigre utilisation des possibles de l’informatique et/ou du multimédia, je suis encore mentalement dans l’A-quatre et le codex.
Depuis 1991 et mon premier Mac : petites brochures d'ateliers d'écriture, un ou deux bouquins, deux gazettes.
La Toile en 1996, des courriels, un site en 2000, un blogue en 2004.
Des lectrices et lecteurs chaque jour, dont le nombre me satisfait fort ; encore me faudrait-il savoir combien de moteurs s'ajoutent pour une pleine satisfaction. Commentaires rares, mais aussi des relations non "virtuelles" !
Créer un site d'écritures, Une écritoire du gué ?
Tant de livres à lire.
Et sur cette table, à l’opposé du Mac, Char, sa Lettera amorosa et trois catalogues sur les expos le concernant, Jouve, celui de Micha qu’il va bien me falloir présenter dans Poètes, vos papiers ! et celui de Frank Venaille, Annie Ernaux et son Écriture comme un couteau, Kenneth White, Le visage du vent d’est, errances asiatiques et ses Finisterres de l’esprit qui cachent sous de minces pages l’immensité du monde de Segalen, du cinéma, avec les Années Karina de Godard, Orson Welles dans les Cahiers du cinéma/Le Monde, le dvd de Citizen Kane, et même L’aigle des mers avec Errol Flynn, Monsieur Vincent avec Pierre Fresnay, pour donc ne pas citer Michael Curtiz et Maurice Cloche, ces films de mon enfance.
Il y a pour demain soir, au Lieu Unique, Daeninck et Meurtres pour mémoire, formidable polard noir — le 17 octobre 1961 est proche.
Et puis nous sommes sur la Toile, n’est-ce pas, François Bon conseillait L’écrit Web de Joël Ronez, j’y ajoute ce qui me paraît être le prolongement des Salons littéraires sont dans l'Internet de Patrick Rebollar, Un laboratoire de littératures, ouvrage collectif édité par la BPI du Centre Pompidou.
J’ai beau ne plus exercer le métier, je croule sous l’intérêt.
Et jeudi, je m’en vais sur l'océan— encore —ne fut-ce que pour vérifier l’indistinct entre mer et ciel en cette douceur automnale.
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vendredi, 05 octobre 2007
sur une ardoise
Centenaire René Char
Sur une ardoise, posée sur un joli chevalet installé par Nicléane dans le couloir d'entrée, j'ai écrit ce matin et pour la semaine :
J'ai hâte de tenir dans mes mains la joie des tiennes. Quelquefois j'imagine qu'il serait bon de se noyer à la surface d'un étang où nulle barque ne s'aventurerait. Ensuite ressusciter dans le courant d'un vrai torrent où tes couleurs bouillonneraient.
Guirlande terrestre, 1952
Je n'ai écrit sur l'ardoise que la première phrase qui ne figure plus dans la Lettera amorosa.
Les propositions suivantes me ramènent avec gravité à la mort volontaire et récente de Dorine et André Gorz.
J'entends ce texte comme une réponse anticipée à l'article qu'un agrégé de philosophie, Jean-Jacques Delfour, publiait, hier, dans Libération.
Entre l'agrégé et le poète, je choisis le poète.
12:20 Publié dans Char à nos côtés | Lien permanent | Commentaires (1)
jeudi, 04 octobre 2007
Je continue de m’instruire
Voilà enfin achevée la seconde rénovation de la Basse Bouguinière ; le peintre a enlevé ses échelles et autre échafaudage.
Une année aura été nécessaire, mais ce qui vient d’être fait nous mènera bien encore aux trente ans qui s’annoncent — je ne doute de rien quant à ma longue vieillesse !
la Basse Bouguinière, 30 ans après sa première rénovation
Le jardin a rétréci, mais la “librairie” a un bel escalier et je continue de m’instruire.
Avant-hier, inscription à l’Université Permanente, dans les locaux des anciens Chantiers de la Loire, près des grandes Machines Nantaises - vous avez bien entendu parlé des suites de Royal de Luxe, de l’Éléphant, des Anneaux de Buren, d’Estuaire 2007 et du Hangar à bananes, d'où de trop beaux jeunes gens, hélas, partent, ivres, se noyer en Loire.
Naguère — enfin, jadis — pour moi, il y avait “le” Pont-Transbordeur, et là où le père construisait des bateaux, le fils vient y faire du Grec.*
Je me suis promis une meilleure assiduité. Enfin ! l'an écoulé, j’avais quelques excuses : un trou béant en place du vieil escalier, des bâches plastiques sur les rayons de livres, l’inaccessibilité au “ Bailly” et le petit “Mac”, sa LiveBox et son imprimante descendus dans la salle de séjour.
Donc, du Grec et un soupçon — six séances — d’approche architecturale autour du Palais de Justice, le nouveau, celui de Jean Nouvel et du Passage Pommeraye, l'ancien, de Jean-Baptiste Buron et Hippolyte Durand-Gasselin : le XIXe et le presque XXIe siècle confrontés !
Et puis, pour persévérer dans les lieux branchés — parfois le petit Nantais du marché Talensac se demande ce qu’il vient y foutre — l’Université Pop’ (sic) du Lieu Unique (l’ancienne biscuiterie LU) et ses cours de littérature contemporaine gérés par Bruno Blanckeman de l’Université de Haute-Bretagne, un homme à la belle gestuelle un tantinet ecclésiastique, à la diction fort précieuse, aux “hein !” subtilement glottés, qui renvoie dos à dos Tzvetan Todorov qui déplore la disparition de la littérature, et les tenants de la Littérature-Monde — Le Bris, Rouaud et les Antillais qui “claironnent la vitalité retrouvée” de cette même littérature, Blanckeman, lui, se contentant d’habiller de mots neufs — littérature consentante/littérature résistante — le vieux, très vieux, conflit entre bonne et mauvaise littérature, tout en faisant glousser les belles vieilles rombières du Lieu Unique, — j’en suis un des vieux fourbes —, sur "Alexandre Nothomb et Amélie Jardin, sur Max Réza et Yasmina Gallo" (à moins que ce ne soit Alexandre Réza, Amélie Gallo, Max Nothomb et Yasmina Jardin, je ne sais plus ! À votre guise !) et les retours "polnarefiens"de littérateurs "qui montrent leur vécu à tous les passants" (sic).
Bref ! Un beau menu avec Didier Daeninck, Jean-Marie Gustave Le Clézio, Jacques Jouet, Linda Lê, Olivier Rolin, Assia Djebar, Pierre Guyotat et quelques autres... un bref passage de Pascal Quignard qui s’était abstenu, l’an dernier et... un “arrêt sur ouvrage” d’un certain Mark Z. Danielewski traduit par un non moins incertain Claro...
De quoi satisfaire mes plaisirs de lutte contre l’érosion de la langue, de déconstruction et reconstruction des formes, de confrontation à l’obscur, “le tâtonnement expressif” de mon “éveilleur d’échos” de la semaine dernière, Michel Chaillou, homme toujours en avant, “pas encore mort, pas encore très âgé et pas trop souffrant”, dirait le professeur Blanckeman.
Assia Djebar et Pierre Guyotat, qui viendront nous rendre visite, m’auraient largement comblé et le professeur ci-dessus cité est, au-delà de son brillant, un homme de littérature fort perspicace !
Suffirait que notre bon professeur de Grec ancien, plus qu’excellent helléniste, veuille mettre un peu plus d’andragogie (pédagogie des adultes, vue du Québec)) dans sa méthode pour que je puisse me dire :
« Décidément, je m’offre une belle année. »
* Affirmation dite et redite...
06:00 Publié dans Les antiques, les autres... arts, les lectures, quelquefois Quignard | Lien permanent | Commentaires (2)