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mercredi, 30 mai 2007

Salut à la "Grande Vieille"

Centenaire, elle ! Et vivante.
Je parle de Germaine Tillion.
Elle eut plus de "filles et de fils" qu'elle en eût souhaité.
Je fus l'un de ses tout derniers dans l'ordre de l'Éducation de base et de la culture Aurésienne.
Dans les replis encore ignorés de l'Ahmar Khaddou, il est de Grands Vieux, les Imouqqranen, qui doivent, ce soir encore, évoquer la "Roumia" si attentive à les écouter et à "garder secret ce qui devait l'être".

Le site

mercredi, 25 octobre 2006

sur la Kahéna

Ce qui fait défaut dans La Kahina de Gisèle Halimi*, c'est l'art de muscler les paysages et de revêtir les héros de leurs lumières, leurs ciels, leur roches, terres et sables.
Mon vieux compagnon Er Klasker fut très abrupt : « Bof ! Elle ne parle même pas des Aurès ! »
Il ne suffit point d'énumérer une toponymie, une nomenclature géologique, climatique et végétale pour écrire un "ieu".

C'est la force des chroniques de Giono, cette imprégnation des pays sur les personnages.

Il faudra donc, à cet extraordinaire mythe de la Kahéna, la venue d'un(e) "Giono" maghrébin(e) !
Kateb Yacine** s'était sans doute mis en chemin :

Cueillie ou respirée
Elle vidait sur nous
Son cœur de rose noire inhabitée
Et nous étions cloués à son orgueil candide
Tandis qu'elle s'envolait par pétale,
Neige flétrie et volcanique,
Centre modeste accumulant l'outrage,
Exposée de soi-même à toutes les rechutes
Dilapidée aux quatre vents.
...............................................................
Nous ne sommes pas de ceux
Qui adoraient la Pierre Noire.
Notre idole est cette femme sauvage.
Elle a quitté le sanctuaire,
Déchiré le rideau
Et dispersé les prêtres.


* Gisèle HALIMI, La Kahina, Plon, 2006.
** Kateb Yacine, Parce que c'est une femme, des femmes, Antoinette Fouque, 2004.

dimanche, 19 mars 2006

célébrer un grand Passeur

dédiée à Kheira, à Djanet !
Que sont-elles devenues, ces femmes de grande liberté,
dans la tourmente de ces vingt dernières années ?



Pour commémorer - on commémore beaucoup quand la barbe blanchit - le 19 mars 1962, la confluence des dates avec l'anniversaire de la mort d’Ibn-Khaldûn, il y a 600 ans, m’est apparut comme un sacré signe ; le voisinage du texte sur le Désert pour accompagner la dépouille de Claude n'en est que plus fortuit - qui paraît fortuit, glisserait Borgès - et renforce la tonalité maghrébine de cette note. Et quand, ce soir, au Beaulieu, on passe la Bataille d’Alger, le médiocre film de l'italien PonteCorvo... alors !
Eh, bien alors ! Je me suis replongé dans mon vieux bouquin de la Muqaddima, qui porte en ex-libris “Alger, Pâques 1966 ~ En attendant Kheira...” !

Toujours ce petit bonheur d’avoir naguère - jadis ! - glissé entre les pages du livre des feuillets : ceux-là combien précieux, puisqu’ils évoquent le labeur théâtral que je fis avec René Lafforgue* - où est-il, celui-là ? - autour d’Ibn-Khaldûn pour la fête de la Jeunesse de juillet 1966 au Grand Théâtre d’Alger. J’avais failli tenir le rôle de Pierre le Cruel, roi de Castille, je me bornais à la régie “son”. Dommage, car lors de son séjour, le Castillan était accompagné de sa maîtresse, Maria de Padilla ; dans notre évocation, le rôle était tenu par Djanet, une jeune actrice du Théâtre National Algérien ; elle était sur scène, j’étais derrière ma console ; nous ne fûmes point indifférents, l'autre à l'un. Elle était belle ! Ça ne dura qu’un seul été !

Oserai-je écrire que j’ai retrouvé Ibn-Khaldûn lors de notre périple ibérique de 2001/2002 ? Au cours de la visite de l’Alcazar de Séville et de ses jardins, en novembre 2002, son ombre est revenue :


...Ou peut-être, un siècle plus tard, avez-vous croisé Ibn Khaldûn venu à la cour de Pierre le Cruel en ambassadeur de l’émir de Béjaia : vous l’avez questionné sur son étonnante démarche d’un voyageur qui s’intéresse avec tant d’insistance aux groupes humains et à leur organisation sociale ; plus tard, les lettrés diront qu’avec sa Muqaddima, il fut le premier à jeter les jalons de la sociologie !

Coule la fontaine !



J’avais déjà mis mes pas dans les siens dans les années 60, dans une Algérie enfin libre et pour quelque temps encore heureuse : à Tlemcem, Constantine, Bedjaïa, Batna, Biskra.
Sur certaines terrasses de Biskra ou de Baniane, je suis resté longuement rêveur devant la palmeraie qui s’étendait jusqu'aux confins du désert. Toujours il y eut des musiques : chaâbi constantinois, raïta guerrière, rebbäb nostalgique, musique douce andalouse, humble et rustique roseau du nomade.
Peut-être qu’entre deux ambassades, un enseignement, deux recrutements de mercenaires, une charge de caïdat, s’était-il retiré, là, pour méditer et construire son grand œuvre ?
Il l’élabora au cours d’un siècle obscur, tumultueux et un parcours de vie qui ne lui épargna aucune vicissitude. Rien de l’activité humaine ne lui sera étranger ; on le fait l’ancêtre de la sociologie ; il est bien au delà. Aurais-je brièvement l’audace d’évoquer un Pierre Bourdieu ? un Edgar Morin ?
Pas un mot plus haut qu’un autre, il observe, décrit, définit, classe, hiérarchise, compare, analyse ; il développe, il expose, il ne juge pas ; quand il pressent le désaccord qui se dessine, il écrit : « Nous réfuterons.» Quand il avance une preuve, il avoue que cette preuve “se fonde uniquement sur la difficulté de la chose et l’impuissance de l’esprit humain de tout comprendre”.

Sur la science et l’Islam

Lorsque la communauté musulmane étendit son empire et absorba d'autres nations, les sciences des Anciens furent effacés par la révélation prophétique et le Livre. L'inculture était alors la marque distinctive de cette communauté. Mais ensuite la souveraineté, la puissance et les services forcés des peuples vaincus la façonnèrent (aux usages) de la civilisation sédentaire et adoucirent ses mœurs. Dès lors l'enseignement des sciences religieuses, qui s'était fait chez les musulmans par la voie de la transmission orale, devint un art et le progrès de leurs connaissances amena la composition d'une foule d'ouvrages et de recueils. Mus par le désir de connaître les sciences des autres peuples, ils les intégrèrent à leur savoir en les traduisant et en les adaptant à la forme de leurs propres spéculations.


Sur la pensée et la faim


Il faut savoir que la faim est de toute manière plus favorable au corps qu'une surabondance d'aliments, pourvu qu'on puisse s'habituer à l'abstinence ou à réduire son alimentation. La faim agit favorablement sur le corps et l'esprit : elle entretient la santé de l'un et éclaircit l'autre ainsi que nous l’avons dit.
On peut en juger par l'effet que les aliments produisent sur le corps. Nous avons observé que si des hommes adoptent pour nourriture la chair de très gros animaux, leurs descendants prennent les qualités de ces animaux. La chose est évidente si l'on compare les Bédouins aux citadins.



Je ne savais plus qui dédaigneusement laissa brûler la bibliothèque d’Alexandrie, arguant que si le savoir de la Bibliothèque était contre le Coran, il fallait la détruire et que si ce savoir était déjà dans le Coran, ce dernier suffisait et que point n’était besoin de la bibliothèque, qu’il convenait donc de la brûler.

Sur l’incendie de la Bibliothèque d’Alexandrie

Les sciences intellectuelles acquirent une très grande importance chez les Perses, et leur culture y fut très répandue, ce qui tenait à la grandeur de leur empire et à sa vaste étendue. On rapporte que les Grecs les apprirent des Perses à l'époque où Alexandre tua Darius et se rendit maître de l'empire des Achéménides. Alexandre s'empara alors de leurs livres et (s'appropria la connaissance) de leurs sciences. Nous savons cependant que les musulmans, lors de la conquête de la Perse, trouvèrent dans ce pays une quantité innombrable de livres et de recueils scientifiques, et que (leur général) Sa'd ibn Abi Waqqaç demanda par écrit au Khalife Umar ibn al-Khatib s'il lui serait permis de les distribuer aux croyants avec le reste du butin. Umar lui répondit en ces termes : « Jette-les à l'eau ; s'ils renferment ce qui peut guider vers la vérité, nous tenons de Dieu ce qui nous y guide encore mieux ; s'ils renferment des tromperies, nous en serons débarrassés, grâce à Dieu ! ». On jeta donc les livres à l'eau ou dans le feu, et dès lors les sciences des Perses disparurent au point qu'il ne nous en est rien parvenu.



Je ne sais comment mon passé algérien va me rattraper ce soir avec “La bataille d’Alger”, ce dont je suis sûr, c’est que, depuis deux jours, de m’être replonger dans les pages de la Muqaddima, m’a joyeusement réconcilié avec la pensée d'un très grand Maghrébin.
Cet homme est toujours un PASSEUR entre nos rives.

Post-scriptum :
• Les extraits de la Muqaddima présentés par Georges Labica et traduits par Jamel-Eddine Bencheikh ont été édités en 1965, par Hachette, pour le Centre Pédagogique Maghrébin.
• Un premier tome des Œuvres d’Ibn Khaldûn, Le Livres des exemples, traduit et présenta par Abdesselam Cheddadi, a été publié par Gallimard, en Pléiade, en décembre 2002.
• Dans l'encyclopédie collective de la Toile, Wikipédia, une biographie qui semble juste.

* Oui ! Qu'est-il devenu, ce vieux compagnon ? Instructeur national "théâtre" à la Fédération nationale des Maisons des jeunes et de la culture, à l'époque où nous travaillions sur Ibn Khaldûn, il mettait en scène pour Paris - mais quelle salle de théâtre ? - Noces de sang de F.G. Lorca

samedi, 18 mars 2006

Le mercredi 19 mars 1406

Il y a six cents ans, plus justement, le 25 ramadhan 808, meurt au Caire le Grand Cadi malikite IBN KHALDÛN.

Il était né le 1er ramadhan 732 (27 mai 1332) à Tunis, dans une famille de notables féodaux installée en Andalousie depuis le IXe siècle et originaire de l'Hadramawt, région de l'Arabie du Sud .

Il s'appelait Abû Zayd Abd-ar-Rahman ibn Muhammad Ibn-Khaldûn Wali ad-Din at-Tunisi al-Hadrami al-Ichbili al-Maliki.

jeudi, 16 mars 2006

Que plorant dessor la peitrine...

J’avais écrit une note, hier soir.
Perdue, cette nuit dans les dédales étranges de “Hautetfort”.
Toujours cette fâcheuse coutume de publier directement sans passer par le bon vieux traitement de texte et l'utilisation, après le dernier mot, d'un tout aussi bon vieux copier-coller.

Il y était question, non point de funérailles - c’est demain que nous accompagnons, “copains d’abord”, Claude, pour son dernier désert - mais très trivialement du plein de la cuve de fioul que les frimas prolongés de l’hiver épuisent, du retard du livreur, de la plainte d’Hécube penchée sur le corps brisé d’Astyanax, son petit-fils - oui, oui, le fils d’Andromaque ! - que célèbre Euripide dans les Troyennes, plainte péniblement traduite et dont j’ignore, vu mon absence, à l’atelier de Grec ancien, le nombre de faux-sens et contre-sens commis, il y était question, écrivais-je, de la découverte d’une autre plainte, le beau et poignant lamento d’Énide.
Je me refusais d’en donner la traduction, toujours terne, quand l’extrême concision du vieux français fait merveille et en dit tant plus.

(Que plorant dessor la peitrine
An chieent les lermes sor lui,
Et dist :] "Lasse, con mar m'esmui
De mon païs! Que ving ça querre?
Bien me devroit sorbir la terre,
Quant toz lî miaudre chevaliers,
Li plus hardiz et li plus fiers,
Li plus biaus et li plus cortois,
Qui onques fust ne cuens ne rois,
A del tôt an tôt relanquie
For moi tote chevalerie.
Donques l'ai je honi por voir ;
Nel vossisse por nul avoir.


Je ne suis point un fan de Chrétien de Troyes qui affadit trop, par morale et chrétienne et courtoise, la fort libertaire “matière de Bretaigne”. Augustinien en diable(!), le clerc tonsuré de Marie de Champagne aurait-il lu et médité le Père de l'Église ? Sa tonsure ne le contraignait point à tant de prudrerie ! La lamentation qu'il met dans la bouche d'Énide est à nouveau, aujourd'hui, allègrement niée par notre "Faites l'amour, pas la guerre !".
Mais se mettre en goule :

Lasse, con mar m’esmui
De mon païs ! Que ving ça querre ?


c’est d’un autre bonheur que

Malheureuse, que j’ai eu de malchance !
Loin de mon pays, que suis-je venu chercher ici ?


Pour avouer tout, je ne me hasarderai point à traduire - quoique ! - mais je ne refuse pas le conseil d'une honnête traduction de cet Érec et Énide.

...A del tot an tot relanquie
Por moi tote chevalerie.

jeudi, 02 février 2006

à propos de caricatures injurieuses faites d'un prophète

À l'aide, Aristote, reviens et réécris-nous le Livre II de ta Poétique !
Qui nous l'a perdu ?

jeudi, 21 octobre 2004

Sur un aphorisme

 

ÑO ênaj o tÚ mante›Òn •sti tÚ ¢n Delfo›w oÌte l•gei oÌte krÊptei ãllå shma€nei.
ÑHrèkleitow



J'étais heureux. Robert C, hier au soir, me conseille un site qui permet de saisir quasi directement du grec ancien, sans être obligé de recourir toutes les deux ou trois lettres à une table de concordance.
Ben, oui !
Mais écrire du grec à six heures du matin, c'est s'engager sur des sentiers tortueux.
Monsieur "mon Fournisseur d'accès", qui vous nommez Benoît Desavoye, je crois, s'il vous plait, comment puis-je faire du grec ancien sur votre serveur ?

Par-delà les Enfers, l'eau, le feu et la foudre, les fumiers et les âtres où se dissimulent les dieux inexistants, les bornes de l'Aurore et du Soir, les cordes de la lyre et la vis du foulon, toutes les harmonies qui s'accordent en se désaccordant et les chiens qui le dévorèrent, Héraclite vous en saura gré.




L'illisible aphorisme qui ouvre la page de ce jour est :
"Le maître dont l'oracle est à Delphes, ni ne dit, ni ne cache, il donne signes."

Il n'est pas sûr que l'aphorisme soit plus lisible !

 

 

Nota-bene : Cinq ans après, le 10 octobre 2009, l'aphorisme est enfin scriptible en Grec — en est-il plus lisible ? :

 

ὁ ἄναξ οὗ τὸ μαντεῖόν ἐστι τὸ ἐν Δελφοῖς, οὔτε λέγει οὔτε κρύπτει ἀλλὰ σημαίνει.