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samedi, 29 mai 2010

nommer et ne pas citer ?

Jeudi, suite à la une du LibéLivre sur Calaferte, je nomme un de ses bouquins, Satori, publié en 1968, repris en Folio en 1997. Et je ne cite point. Je nomme La Mécanique des femmes *. Et je ne cite toujours pas.

Absorbé sans doute pas des parcours incessants depuis quelques jours dans les "petits traités" de Pascal Quignard, — des vrais Petits Traités à Zétès —dont les concisions me fascinent toujours autant. Malgré quelques impatiences, irritations, sinon répulsions.

 

Ce matin, je "répare".

 

Le paragraphe 34 :


Ô, mes vénales ! Huppes renardes, lippe engrossée, siphonnez-moi ! Des dents ! Des yeux ! Des fronts ! Des nuques ! Des langues coulomelles ! Pas de nuit sans vos vulves muscates. Tel —, je me hampe sur vos sveltes fumiers. Je fouine, foutre, mange, bâfre et broie, ronge. Mes sordides nourrices ! Tous vos corps ! Tous vos corps ! Tous vos membres ! Les orties de la peau ! Vos salives qui bêlent. Vos mousses alcalines. Vulgaires ! Vos abois ! Je vous hume à la chienne. Je vous constate. Vous octroie. Couvrez, harcelez-moi de vos mamelles floches. Dans le sang ! Dans l'onguent ! Ce sirop ! Ce gluten ! Je gobe vos oursins. Bêtes crottées. Boales.J'entorse vos cheveux. Griffures ! L'acide amer sous vos aisselles. Lèche. Lape. Liche. Râpe. Grumeaux. Sorcières ! Crapulez-moi ! Mon Mal est diabolique. Ruses ! La claque des hanches. Aux lèvres charnelantes je tranche des baisers de boue. Saintes souilleuses ! Abrégez-moi ! Vos grandes bouches disloquées de félicité silencieuse sont mes Rosaires à moi. Je roule. Rauque. Courroucé. Je râle dans vos culs pluvieux. Goules !

 

Le paragraphe 35  — la phrase qui ouvre et qui laisse pressentir les années ultimes:



J'assiste à une représentation qui, déjà, n'est plus la mienne.


 

Citerai-je La Mécanique des femmes ? Brefs appels du désir et cris longs de la jouissance...

Vous ! Allez lire.


 

Et puis à la dernière page de Rag-time, un dernier poème ébouillanté, pour apaiser des tumultes, des orgasmes, des révoltes. Méfiez-vous, on y rencontre la mélancolie et la mort.

 

 

Les arbres sont jolis dans la matinée blonde
et les femmes aussi
les rues et leurs maisons qu'une vapeur inonde
qu'il ferait bon ici

Tout quitter me peine
j'en ai le cœur gros

Les promeneurs sont neufs dans d'élégants costumes
accompagnés d'enfants
on croise des cheveux légers et que parfument
quelques poivres troublants

Tout quitter me peine
j'en ai le cœur gros

Quand je serai parti que d'autres à ma place
passeront par ici
qu'ils aient en souriant pour ma vieille carcasse
une pensée merci

Tout quitter me peine
j'en ai le cœur gros


 

 

* Faut-il signaler l'adaptation réalisée par un certain Jérôme de Missolz ? Mais Christine Boisson y est si luxurieusement belle !

jeudi, 27 mai 2010

lassitude s'éloignant

 

« Seule une grande ferveur intellectuelle triomphe de la fatigue et des flétrissures du corps. »


C'est de Gide cité par Calaferte, cité dans le LibéLivres de ce jour, à propos du Jardin fermé, l'ultime journal de ce dernier.

 

Ça me va bien, quand je commence de remonter la pente en lente hâte. Mais le courage n'est guère pour l'écriture.

 

Je feuillette quelques pages de Satori. Cent pages d'un maelstrom douloureux.

Mais où donc ai-je rangé La Mécanique des Femmes — le bouquin, bien sûr ?

 

 

vendredi, 21 mai 2010

deux ou trois jours à Foleux

Flageolantes, les jambes et le souffle, court..

Nous n'irons point en mer belle ; plus calmes encore seront les rives de Vilaine.

 

Je n'emporte qu'une "grosse" lecture : La Guerre d'Algérie sous la direction de Mohammed Harbi et Benjamin Stora*, manière de relancer l'écriture d'Algériennes.

 

Quand de vieux nostalgiques protestent contre Hors-la-loi, le film de Rachid Bouchareb, il est bon de réajuster ses pensers en lisant "Rétablir et maintenir l'ordre colonial", pp. 107-112, dans le bouquin ci-desssus cité.

 

Extrait :

 

La loi était suspendue. La nécessité - c'est-à-dire faire face à la menace à Guelma - fit loi, selon la formule. Entre la loi et la nécessité, il y a un rapport ambigu qui justement fonde l'état d'exception.

Jean-Jacques Rousseau considérait que « l'inflexibilité des lois, qui les empêche de se plier aux événements, peut en certains cas les rendre pernicieuses et causer par elles la perte de l'État dans sa crise ».
En affirmant «
la répresson sur mon ordre a été brutale et rapide », en appelant « comité de salut public » ce tribunal expéditif chargé d'envoyer à la mort souvent des innocents, Achiary encouragea l'exception pour conserver l'ordre.



Guelma 1945 n'était pas 1793-1794.
Achiary pensait se placer du côté de la violence comme «
conservatrice du droit » pour reprendre ici l'expression de Walter Benjamin, quitte à se mettre en dehors de la loi en n'exigeant plus par exemple de levée d'écrou écrite à la prison. En réalité, il instaurait comme norme le désordre.
Guelma se trouvait donc bien au paroxisme d'un état d'exception colonial, qui était dans les faits permanent, où la nécessité fondait la loi, en mai-juin 1945 avec encore plus de gravité qu'en temps normal. À Guelma, le droit de la police indiquait «
le point où l'État, soit par impuissance, soit en vertu de tout ordre juridique — colonial — ne peut plus garantir par les moyens de cet ordre les fins empiriques qu'il désire obtenir à tout prix » : la paix dans l'ordre colonial.



Cet État dont Guelma représente l'acmé de l'exception était bâti sur une Union sacrée de tous les Européens face au péril « indigène ». La colonisation et la défense  des intérêts coloniaux dépassaient les différences politiques.
D'où le soutien apporté après les faits à André Achiary et aux forces de l'ordre par tous, des communistes à la droite républicaine.



Jean Pierre Peyroulou, p. 112

 

 

Qui donc, en ce mai 1945, est vraiment HORS-LA-LOI ?

 

 

* La Guerre d'Algérie sous la direction de Mohammed Harbi et Benjamin Stora, aux Éditions Robert Laffont, 2004.

Manière de rendre hommage au vieil éditeur qui vient de disparaître.

Relire aussi

Massacres coloniaux, Yves Benot, préface de François Maspéro, La Découverte/poche, 2001.

et

Les Massacres de Guelma, Marcel Reggui, La Découverte, 2006.

mardi, 18 mai 2010

« Le Verfügbar aux enfers »

 

Survivre, notre ultime sabotage.

 Germaine Tillion


 J'étais sceptique sur la représentation de ces écrits de résistance de Germaine Tillion. Elle aussi sans doute puisqu'elle a retardé, jusqu'à la dernière année  de sa vie, la décision de faire chanter.cette "opérette". Première réalisation pour la scène, en juin 2007 ,au Châtelet, que nous devons grâce à la mise à jour des airs par Nelly Forget, une "ancienne" des Centres sociaux éducatifs en Algérie — elle en fut l'une des premières, j'en fus un des derniers — qui accompagna les annnées ultimes de l'ethnologue des Aurès !

 L'interprétation, à Nantes, par mes collègues de l'atelier d'interprétation vocale de l'Université permanente — vingt-huit femmes évoluant en chœur antique alentour d'un vaste bat-flanc à trois étages, tour à tour wagon de déportation et bat-flanc d'un bloc du camp  — fut d'une forte beauté, renforçant l'humour ravageur, la crudité des corps et l'imbécile cruauté du système nazi.

 

Merci à vous, Femmes.

 

Dans le hall de la salle Vasse, était affiché un texte de René Guy Cadou. L'avais-je oublié ?

 

A Ravensbruck en Allemagne
On torture on brûle les femmes

On leur a coupé les cheveux
Qui donnaient la lumière au monde

On les a couvertes de honte
Mais leur amour vaut ce qu'il veut

La nuit le gel tombent sur elles
La main qui porte son couteau

Elles voient des amis fidèles
Cachés dans les plis d'un drapeau

Elles voient Le bourreau qui veille
A peur soudain de ces regards

Eles sont loin dans le soleil
Et ont espoir en notre espoir.


Ravensbruck
Pleine poitrine

1944-1945

samedi, 15 mai 2010

palmes et murmure des "séguia"

Relisant paresseusement Le voyage en Algérie, voici, s'insinuant, la douce-amère nostagie — c'est très sain, énonce une dame dans le Monde Magazine de ce jour — je m'y "évaille" donc paisiblement :

 

Biskra, 30 novembre (1903)



Je rentre au cœur de ma jeunesse. Je remets mes pas dans mes pas. Voici les bords charmants de ce sentier que je suivais, ce premier jour où, faible encore, échappé de l'horreur de la mort, je sanglotai, ivre du simple étonnement d'être, du ravissement d'exister. Ah ! qu'à mes yeux encore fatigués l'ombre des palmes était calmante ! Douceur des ombres claires, murmures des jardins, parfums, je reconnais tout, arbres, choses... le seul méconnaissable, c'est moi.


... ce jardin que j'ai vu planter, est déjà feuillu, touffu, compliqué. Il s'assombrit d'ombrage et de mystère...


Qu'il ferait bon, s'il n'était tant de pauvres sur la terre, y deviser sans bruit, avec quelques amis, ce matin.

 

André GIDE

 

Moins de soixante ans après Gide, la palmeraie avait à peine frémi.

Mais aujourd'hui ?


Y retournerai-je jamais ?



 


samedi, 08 mai 2010

les écrits brûleront encore

 

« J'affirme que ce livre est interminable. »

 

À la page 319 de son Livres en feu*, voilà ce qu'écrit Polastron.

 

Il a déjà parcouru depuis 1358 avant notre ère toutes destructions et incendies des bibliothèques ; il vient d'évoquer l'invasion de l'Irak par les "Marines" en 2003 , les diverses bibliothèques de Bagdad, pillées ou incendiées, selon.

 

Il nous livre encore 224 pages pour évoquer les dommages de paix jusqu'aux embarras que sans doute suscitera "la connaissance ignifugée", en clair la numérisation des toutes les bibliothèques du Monde. Il ajoute postface, annexes (3), appendices incluant remerciements, chronologie sélective, bibliographie, notes et index.

 

Tout quoi ! de ce quoi doit être fait un livre.

Pour les liseurs, lecteurs, auteurs, écrivains, écrivants, éditeurs, libraires, bibliothécaires, instituteurs, professeurs, animateurs, acheteurs, vendeurs, tous les passionnés de ce support de nos écrits**.

 

Mon avis est qu'il aurait dû, chapeautant le colophon, répéter cette terrible phrase :

 

« J'affirme que ce livre est interminable. »

 

 

* Lucien X. POLASTRON, Livres en feu, Folio essais n°519, 2009.

** Ne pas oublier de féminiser tous ces usagers de l'objet. Peut-être sont-elles plus les nombreuses ?

 

Éventuellemnt relire les notes des 20 et 23 décembre 2009, sur des lectures dues au conseil érudit de Constantin Copronyme.

lundi, 03 mai 2010

ils n'étaient que sous-entendus

 

Saluons donc les "vieux travailleurs" !

 

Pour contenter le commentaire de PI, j'use d'une bonne vieille expression, jadis employée, mais qui en suggère plus que l'injuste terme de "retraités".

De quoi nous serions-nous mis en retrait ?

Le "vieux travailleur" — je n'oublie point la vieille travailleuse — laisse entendre qu'il est toujours sur le chantier.

samedi, 01 mai 2010

un Premier Mai

 

Salut aux travailleuses et aux travailleurs !

 

(Mais que les banquières et les banquiers aillent se faire f...!)