vendredi, 21 mai 2010
deux ou trois jours à Foleux
Flageolantes, les jambes et le souffle, court..
Nous n'irons point en mer belle ; plus calmes encore seront les rives de Vilaine.
Je n'emporte qu'une "grosse" lecture : La Guerre d'Algérie sous la direction de Mohammed Harbi et Benjamin Stora*, manière de relancer l'écriture d'Algériennes.
Quand de vieux nostalgiques protestent contre Hors-la-loi, le film de Rachid Bouchareb, il est bon de réajuster ses pensers en lisant "Rétablir et maintenir l'ordre colonial", pp. 107-112, dans le bouquin ci-desssus cité.
Extrait :
La loi était suspendue. La nécessité - c'est-à-dire faire face à la menace à Guelma - fit loi, selon la formule. Entre la loi et la nécessité, il y a un rapport ambigu qui justement fonde l'état d'exception.
Jean-Jacques Rousseau considérait que « l'inflexibilité des lois, qui les empêche de se plier aux événements, peut en certains cas les rendre pernicieuses et causer par elles la perte de l'État dans sa crise ».
En affirmant « la répresson sur mon ordre a été brutale et rapide », en appelant « comité de salut public » ce tribunal expéditif chargé d'envoyer à la mort souvent des innocents, Achiary encouragea l'exception pour conserver l'ordre.
Guelma 1945 n'était pas 1793-1794.
Achiary pensait se placer du côté de la violence comme « conservatrice du droit » pour reprendre ici l'expression de Walter Benjamin, quitte à se mettre en dehors de la loi en n'exigeant plus par exemple de levée d'écrou écrite à la prison. En réalité, il instaurait comme norme le désordre.
Guelma se trouvait donc bien au paroxisme d'un état d'exception colonial, qui était dans les faits permanent, où la nécessité fondait la loi, en mai-juin 1945 avec encore plus de gravité qu'en temps normal. À Guelma, le droit de la police indiquait « le point où l'État, soit par impuissance, soit en vertu de tout ordre juridique — colonial — ne peut plus garantir par les moyens de cet ordre les fins empiriques qu'il désire obtenir à tout prix » : la paix dans l'ordre colonial.
Cet État dont Guelma représente l'acmé de l'exception était bâti sur une Union sacrée de tous les Européens face au péril « indigène ». La colonisation et la défense des intérêts coloniaux dépassaient les différences politiques.
D'où le soutien apporté après les faits à André Achiary et aux forces de l'ordre par tous, des communistes à la droite républicaine.
Jean Pierre Peyroulou, p. 112
Qui donc, en ce mai 1945, est vraiment HORS-LA-LOI ?
* La Guerre d'Algérie sous la direction de Mohammed Harbi et Benjamin Stora, aux Éditions Robert Laffont, 2004.
Manière de rendre hommage au vieil éditeur qui vient de disparaître.
Massacres coloniaux, Yves Benot, préface de François Maspéro, La Découverte/poche, 2001.
et
Les Massacres de Guelma, Marcel Reggui, La Découverte, 2006.
17:51 Publié dans les lectures, les marines | Lien permanent | Commentaires (0)
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