mercredi, 28 décembre 2011
Ce soir, on largue
Pour demain retrouver des rivages amis, arpenter les jetées des port Asturiens, larges comme des avenues — car il faut bien résister aux puissantes houles de noroît qui lèvent du Golfe et franchir le passage de 2011 à 2012.
"Nordeste" de Vaquero Turcios.
Asturies
terre de résistance aux conquêtes arabo-andalouses et autre dictature franquiste,
terre de bergers qui jouent de la bombarde, sœur celte de la ghaïta berbère,
terre de mineurs très âgés qui ont mémoire des luttes anciennes et qui, discrètement aujourd'hui encore, se saluent, le poing levé, en entrant dans les cafés.
Élogio del Horizonte d'Eduardo Chillida
13:30 Publié dans Les blogues, les marines, Web | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 26 décembre 2011
ce même jour, il y a vingt ans
Revenant d'une balade au bord de mer........................
MON PÈRE !
Ce pourrait être la chanson de Barbara
Il pleut sur Nantes
Donne-moi la main
.......................................
Faites vite
il y a peu d'espoir
il a demandé à vous voir
Ce pourrait être un poème de Luc Bérimont
J'étais faible, mon père, et tu m'avais quitté
Sans savoir que minuit roulerait sous sa patte
Cet enfant au front lourd dont les larmes tremblaient
ou de Jean Claude Renard
Père dans cette nuit où la mort nous retient
et dans ce sang pareil à un pays brûlé
• Luc Bérimont, Le grand viager.
• Jean Claude Renard, Père, voici que l'homme.
17:50 Publié dans Les nocturnes, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (0)
dimanche, 25 décembre 2011
inventaire d'une nuit de Noël
huitres de ces claires ignorées de la baie de Bourgneuf aux confins indéfinis du Marais breton entre Poitou et Bretagne
Muscadet des vignes de nos ancêtres
foie gras enrobé toute une nuit dans un sel de Guérande parfumé de cassonade et de poivre noir
Chaume de Saint-Aubin de Luigné
dattes aux doigts de lumière — Deglet Nour — de Tolga la palmeraie allongée au pied des Zibans ces petits monts comme derniers replis de l'Atlas avant le vertige des sables
non pas un réveillon
mais un cheminement en des terroirs naguère arpentés et le corps s'éveille aux noms aux senteurs aux saveurs aux paysages
et nous demeurons proches dans le voisinage de l'océan
23:14 Publié dans Les blogues | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 24 décembre 2011
Bonne nuit
Il y avait pas mal de monde à la boulangerie, cet après-midi ; quand j'en suis sorti avec ma bûche et mon pain de campagne, la boulangère m'a dit : « Bon réveillon ! ».
Je ne lui ai pas dit merci, mais je lui ai souhaité une bonne nuit, à elle et à tous ses clients que j'avais précédés. Ils ont tous ri !
Sur le chemin du retour, Cadou et sa nostalgie de païen si proche du divin me sont revenus au cœur.
Paille de la saison
Fraîcheur des tiges nues
Ο nids de neige reconnus
A la fenêtre de l'étable
Passe l'étoile
Ouvre les mains
Amour presqu'île du matin
L'âne suspend son pas
Epaissies sous la langue
Le bœuf a retrouvé
Ses anciennes ciguës
Et Joseph attendri
Par ce bon voisinage
Ecarte de ses yeux
Les guêpes du sommeil
Un mage prie
Moulant ses lèvres de faïence
Sur les mots jamais dits
Et semblables au sel
Tandis que retenant
Son ventre avec tendresse
Marie ne comprend pas
Ce grand soleil éteint.
René Guy Cadou
Nativité
Grand élan, La vie rêvée.
...Retenant son ventre avec tendresse...
en écho tout au long de la nuit, la beauté émouvante des femmes grosses de leur enfant.
19:49 Publié dans Cadou toujours, les lectures, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (1)
mercredi, 21 décembre 2011
et les cargos d'échouer et les bibliothèques de brûler
à Bénédicte, la Piétonne cairote
Et ça continue !
« Détruire la bibliothèque est un geste qui remonte à la plus haute Antiquité. Les autodafés, apparus en même temps que les livres, se multiplient à proportion du nombre d'ouvrages. »*
Pour les livres, Lucien Polastron* date de 1358 avant notre ère la destruction des Bibliothèques de Thèbes — tiens ! déjà l'Égypte —, désormais, il nous faudra consigner le 19 décembre 2011 pour l'incendie de l'Institut d'Égypte. Deux cent mille ouvrages, recensent les journaux. Déjà, en janvier 2010, en Tunisie, un Institut des Belles Lettres arabes avait été incendiée.
Pour les bateaux, l'échouement paraît plus banal, sauf pour les riverains, les sables, les rocs et... les noyés. Combien par an ? je ne sais, mais dans ma modeste histoire de vie maritime, depuis l'Amoco Cadiz, le Torrey Canyon, l'Erika, le Prestige, le Joola — échouements ou naufrages — ce sont des paysages qui furent souillés et quelques visages qui s'effacèrent.
Les bateaux, paquebots, cargos, pétroliers, voiliers continueront d'échouer. Mais les livres "numérisés" ? s'écrieront les optimistes. Certes, quand se seront éloignées les convoitises des pharaons de la Toile, nous serons en droit d'espérer atteindre l'éternité des écrits — ...avant que ne surgisse le cataclysme mondial de la panne électrique générale ou de la déflagration nucléaire universelle.
Il faudra, alors, qu'un scribe sur une écorce, une peau de bête, à l'aide d'un bout de bois brûlé, sur une bille d'argile à l'aide d'un silex, trace, à nouveau, le décompte d'une moisson engrangée, l'affontement de dieux inconnus ou une belle et nue romance amoureuse.
La terre, la mer, l'air, le feu !
Ouvrir les fragments d'Héraclite**
γης θάνατος ΰδωρ γενέσθαι και ύδατος θάνατος αέρα γενέσθαι και αέρος πϋρ, και έ'μπαλιν.
Mort de la terre, de devenir mer, mort de la mer, de devenir air, de l'air de devenir feu. Et inversement.
— Les traducteurs s'attardent souvent sur cet "και έ'μπαλιν" et glissent le sens de "et inversement" vers "et indéfiniment", laissant entendre quoi...? L'éternité ?
Que deviennent alors les images de ce cargo échoué et de ces feuilles de papier calcinées ?
La VIE, quoi !
Et demain, le solstice d'hiver : après-demain le soleil, remontant à l'horizon, se couchera plus tard.
* LIVRES EN FEU, Lucien X. Polastron, Folio essais n° 519, 2009. (L'auteur devra ajouter quelques annexes à son ouvrage...)
** Cité par Marc-Aurèle, Pensées, IV, 46.
(AFP PHOTO / DAMIEN MEYER, pour le cargo)
17:37 Publié dans dans les pas d'Héraclite, Les antiques, les lectures, les marines | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 17 décembre 2011
lecture d'après tempête
à celles, seules, qui ont su précéder la vie
Belle insomnie d'après tempête.
Au ciel nocturne lavé, Orion en son zénith, assembleur des âmes — si je croyais encore aux âmes — de mes morts aimés.
Pourquoi donc avoir ouvert Aromates chasseurs ?
Bribes d'images. Brassées, devrais-je écrire !
...l'existence de nos deux espaces immémoriaux : le premier, l'espace intime où jouaient notre imagination et nos sentiments; le second, l'espace circulaire, celui du monde concret. Les deux étaient inséparables. Subvertir l'un, c'était bouleverser l'autre.
Chuchotement parmi les étoiles.......
.......A chacun son sablier pour en finir avec le sablier.
Continuer à ruisseler dans l'aveuglement...........
.....Une écriture d'échouage........
...........un long-courrier retenu jusqu'à son évidence inutile.........
......Ronger c'est ritualiser la mort........
........réapprendre à frapper le silex à l'aube, s'opposer aux mots.
Et puis comme un achèvement en cette fin de nuit et qu'Orion scintille encore dans le suroît
Nuls dieux à l'extérieur de nous, car ils sont le fruit de la seule de nos pensées qui ne conquiert pas la mort, la mort qui, lorsque le Temps nous embarque à son bord, chuchote, une encablure en avant.
...............................................
Refuse les stances de la mémoire
Remonte au servage de ta faim
Indocile et dans le froid
Aromates chasseurs n'est pas encore refermé. Et je ne sais que proposer mes lectures. Non en parler.
Post-scriptum :
René CHAR, Aromates chasseurs, Gallimard, 20 décembre 1975. Un — l'exemplaire 1518 — parmi les quatre mille neuf cent trent-cinq exemplaires, composés en Baskerville corps 12, sur bouffant alfa des Papeteries Libert. Dommage qu'une édition numérique n'autorise point un tel post-scriptum.
04:40 Publié dans Char à nos côtés, les lectures | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 12 décembre 2011
hier à l'aube
La voix de Mau dans le gris du petit matin : « Étienne est mort ».
J'ai froid. C'était mon Copain !
En boucle dans ma tête, ces bribes du texte de Char :
« Son visage parfois vient s'appliquer contre le nôtre, ne produisant qu'un éclair glacé. Le jour qui allongeait le bonheur entre lui et nous n'est nulle part. Toutes les parties — presque excessives — d'une présence se sont d'un coup disloquées. »
18:00 Publié dans Les nocturnes | Lien permanent | Commentaires (0)
samedi, 10 décembre 2011
L'un est mort avant-hier, l'autre mourra demain
Je parle de Franzt Fanon. Je parle de Xavier Grall.
Au début de cet an, j'avais pensé, non pas célébrer, non pas commémorer, mais au moins relire ceux qui naquirent ou décédèrent, il y a deux cents, cent ans, cinquante ans, trente ans...
Je n'ai réouvert ni Cendrars, ni Hemingway, ni Céline. À peine Saint-Pol-Roux. Un peu Armand Robin. Feuilleté Bougainville, parce que, dans le bras de la Madeleine, est à quai depuis plusieurs mois la réplique contemporaine de sa frégate La Boudeuse, et que naguère deux cents ans après elle, l'étrave d'un voilier a recoupé son sillage. J'étais à bord de ce voilier.
Mais ce décembre 2011, demeurent, au profond des lectures bouleversantes, anciennes et toujours actuelles, ces deux-là, le Nègre et le Celte, pas si loin l'un de l'autre, qui me furent des cris, des ruptures et une refondation.
Allons, camarades, il vaut mieux décider dès maintenant de changer de bord. La grande nuit dans laquelle nous fûmes plongés, il nous faut la secouer et en sortir. Le jour nouveau qui déjà se lève doit nous trouver fermes, avisés et résolus. Il nous faut quitter nos rêves, abandonner nos vieilles croyances et nos amitiés d'avant la vie.
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Si nous voulons que l'humanité avance d'un cran, si nous voulons la porter à un niveau différent de celui où l'Europe l'a manifestée, alors, il faut inventer, il faut découvrir.
Si nous voulons répondre à l'attente de nos peuples, il faut chercher ailleurs qu'en Europe.
Davantage, si nous voulons répondre à l'attente des européens, il ne faut pas leur renvoyer une image, même idéale, de leur société et de leur pensée pour lesquelles ils éprouvent épisodiquement une immense nausée.
Pour l'Europe, pour nous-mêmes et pour l'humanité, camarades, il faut faire peau neuve, développer une pensée neuve, tenter de mettre sur pied un homme neuf.
Frantz Fanon
Les damnés de la terre
quelques lignes de la conclusion.
Je vous salue mes grands oiseaux
qui couvez dans mon cœur des
élans maritimes
je vous salue brousse de houles
je vous célèbre forbans et paladins
..........................................................
J'ai vu, Amer,
des eaux pareilles au lait
des chamelles rieuses
féconder les vallées chérifiennes
ô vie, ô séguias, ô glèbe femelle!
A Témara, prés de Salé
j'ai pleuré sur la splendeur
des mers sarrazines désertées.
Et j'ai rêvé de toi, gardienne
de l'extrême Ouest.
Ah quand allierai-je à tes noroîts
le miel des aurores africaines?
Ah quand allierai-je la vigueur de tes chênes
à la sensualité des figuiers ?
Partir pour revenir à toi
voguer pour retrouver tes abers
te haïr pour férocement t'aimer
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Et ceci sera mon testament
à mes Berbères je lègue
les oiseaux des Glénan
et le sourire de Concarneau
à mes Berbères je lègue
l'allégresse des fontaines
et les printemps du pays Gallo.
Et ceci sera mon testament
à mes amis je lègue
l'alliance de l'Ouest et du Sud
le mariage des dolmens
et des mosquées
et les fiançailles des roses
d'avec les oliviers.
Xavier Grall
Le rituel breton.
In memoriam :
Frantz FANON, mort le 6 décembre 1961.
Xavier GRALL, mort le 11 décembre 1981.
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mercredi, 07 décembre 2011
deux notes retrouvées
Cet après-midi de pluie froide — l'automne serait-il enfin là quand s'annonce déjà le solstice d'hiver — je décide d'ajouter enfin le deux centième titre à ma biblitohèque virtuelle, Babélio, où depuis deux ans, j'insère mes bouquins préférés à dose homéopathique.
Après trois "Casanova" suscités par l'actualité éditoriale et l'exposition de la BNF, après l'Art de jouir de La Mettrie, je choisis du sérieux, comme un remontant en ces tristes jours d'Europe en dérive autocrate : Démocratie Citoyenneté et Héritage gréco-romain. C'est signé, entre autres, par Pierre Vidal-Naquet et Jean-Pierre Vernant.
Le feuilletant, deux papiers que j'y avais glissés, en tombent, notes jetées en réponse à de vieux compagnons qui m'avaient sans doute questionné :
La première note :
Pourquoi suis-je "Grec" et non "Juif ? Parce que l'interrogation et la réflexion sur les Autres et sur eux-mêmes ont commencé avec les Grecs, alors que les Juifs n'ont été qu'exhortation et imposition de lois pour un monde de l'au-delà. Mais c'est le monde de ce jour-ci qui me passionne. Non celui douteux de demain.
La seconde dont le premier paragraphe a quelque lien avec celle qui précède :
Pour la "philia", je pense que J.P. Vernant a cerné la meilleure définition de ce qu'est la "philia grecque" :
« Pour les Grecs, l'amitié (la philia) est un des éléments qui fonde la cité. Elle tisse un lien entre le privé et le public, par lequel entre soi et l'autre «quelque chose» circule, «quelque chose» qui, tout en laissant chacun singulier, forge une communauté homogène. L'amitié, c'est mettre en commun. Par conséquent, il n'y a pas d'amitié sans égalité... On ne peut avoir d'amitié que pour quelqu'un qui est, d'une certaine façon, son semblable : un Grec envers un Grec, un citoyen envers un citoyen... Et pour les Grecs, il ne s'agissait pas seulement de vivre ensemble, mais de bien vivre ensemble. »
Quant à "l'otium"qu'il faut bien se garder de traduire trivialement par "oisiveté", je le conçois comme l'art d'utiliser son temps à se bien cultiver sans souci de briller ou de rentabiliser — les Romains opposaient "l'otium "au "negotium ". À la nécessité du négoce, du labeur, mise en œuvre d'un art de la paresse au noble sens du terme décrit par Paul Laforgue dans son bouquin, "Le droit à la paresse".
L'otium est la "talvera"*, le chaintre de ma vie quotidienne, espace et temps improductifs mais qui génèrent la "vie bonne".
On ne s'est guère éloigné de Casanova !
* La “talvera”, pour moi, c’est l’équivalent occitan de notre chaintre gallo ou poitevin — cet espace nécessaire pour tourner la charrue et son attelage, à chaque extrémité du champ labouré. C’était — ça n’existe plus avec le tracteur — un espace “perdu” mais fécond que bordait la haie. S’y développait la liberté des herbes folles ! S'y reposaient mes ancêtres laboureurs des servitudes que leur imposaient les seigneurs !
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jeudi, 01 décembre 2011
à propos de Casanova
©Hugo Pratt
« Le plaisir, c'est la vertu sous un nom plus gai. »
Ce pourrait être de Casanova ; c'est de La Mettrie. Il n'est pas étonnant que celui-ci était admiré par celui-là.
Ajout (plus long, à la brièveté de cette note) :
En ces jours où sur les ondes, France Cul naturellement, sont à "podcsater" la Fabrique de l'histoire sur Casanova et les Nouveaux chemins de la connaissance sur un de leurs ancêtres, ÉPICURE, voilà cette Europe dont je rêve, avec de tels citoyens.
11:20 Publié dans les lectures | Lien permanent | Commentaires (0)