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lundi, 30 janvier 2012

« lettre à des amis perdus »

Il suffit d'un bref article dans le quotidien régional* pour aller sortir de l'étagère le bouquin d'un poète. Ce matin-là, le titre était « Nantes va acquérir des lettres du poète Cadou » ; le sous-titre « La ville de Nantes après délibération de son Conseil, va acquérir 74 lettres du poète René Guy Cadou. Cette acquisition de 17 800 € rejoindra le fonds Cadou de la Bibliothèque municipale ».

Certes chercheurs, érudits, bibliophiles de se réjouir. Quant à moi, j'éprouve toujours au su de telles tractations quelque répugnance : se diffuse alentour une odeur de marchands du Temple, quand ce ne sont point les circonvolutions rapaces des ayants droit qui assombrissent les horizons lettrés.

À  240 €, la bafouille ? Le gars René qui ne sablait pas le champagne tous les jours, mais qui se descendait facilement quelques chopines de muscadet avec ses copains de haut-bord au bistrot du bourg aurait rondement arrondi son traitement d'instituteur.

Et aujourd'hui encore, par les temps qui courent... Hein !

Quand on sort d'une lente lecture dense d'Après le livre de François Bon, on n'en est que plus marri. Y a-t-il le moindre espoir, dans la Toile, pour l'abandon de ces négoces sordides ?

La correspondance de Cadou, ces lettres envoyées à ses copains, ça me fait songer à ces tapis de haute-laine qu'une enfant des Aurès tisse pendant des jours et des jours, des mois et des années et qui seront mis en vente dans un ouvroir pour touristes.

Y a -t-il un prix pour ces laines et ces mots ? C'est trop ou... pas assez.

cadou - copie.jpg 

Je n'ai pas reçu de lettres de René Guy Cadou. Ou plutôt je ne les ai reçues que trois ou quatre ans après sa mort. Reçues comme des poèmes.

Et j'ai toujours beaucoup tardé à lui répondre.

Ce sont ces trente-cinq notes où s'inscrit le nom de René Guy Cadou, notes à lui entièrement dédiées, notes pour une mince allusion, ou pour un seul verset de lui : j'ai souhaité tirer ces notes de la "fosse à bitume" — comme l'écrit François Bon — qu'est un blogue. Suffit de créer une "catégorie" nouvelle, même si les "catégories" d'un blogue — le mien n'y échappe point — peuvent être de multiples petites "fosses à bitume" immergées dans la grande.

Donc "Cadou toujours" dans la colonne de droite entre "les fréquentations" — mes liens qui renvoient aux blogues et aux sites de mon "nuage" — mon phalanstère, aurais-je écrit naguère — et les rares commentaires qui sont apportés parfois à ces notes.

Je souhaiterais simplement que cette catégorie "Cadou toujours" soit pour les lectrices et les lecteurs de ce blogue comme cette lettre à des amis perdus que confiait gratuitement René Guy Cadou parfois à des ramiers, parfois à des enfants :

 


Vous étiez là je vous tenais
Comme un miroir entre mes mains
La vague et le soleil de juin
Ont englouti votre visage


Chaque jour je vous ai écrit
Je vous ai fait porter mes pages
Par des ramiers par des enfants
Mais aucun d'eux n'est revenu
Je continue à vous écrire


Tout le mois d'août s'est bien passé
Malgré les obus et les roses
Et j'ai traduit diverses choses
En langue bleue que vous savez


Maintenant j'ai peur de l'automne
Et des soirées d'hiver sans vous
Viendrez-vous pas au rendez-vous
Que cet ami perdu vous donne
En son pays du temps des loups


Venez donc car je vous appelle
Avec tous les mots d'autrefois
Sous mon épaule il fait bien froid
Et j'ai des trous noirs dans les ailes


Lettre à des amis perdus
Pleine poitrine.


 

* Ouest-France du vendredi 27 janvier 2012.

mercredi, 25 janvier 2012

Quel titre pour la tristesse ?

 

Le pas suspendu de la cigogne ?

L'Éternité et un jour ?

affiche-1.jpg

 “ Je ne suis qu'un visiteur", faisait-il dire à un de ses personnage dans Le Pas suspendu de la cigogne.


 « Où s'est-il retiré, où s'en est-il allé, le Sage ? —
Après tous les miracles qu'il a faits,
après que la renommée de son enseignement
se fut répandue sur tant de nations,
il s'est dérobé aux regards et personne n'a pu apprendre
avec certitude ce qu'il est devenu...


Constantin Cavafis
Pour autant qu'il soit mort

 

lundi, 23 janvier 2012

Grands Barbus en petit livre*

Homère.jpg

 

 

 

 

C'est un petit bouquin qui a paru en novembre 2011. Trouvé par hasard au kiosque "livres" du Lieu Unique en sortant du débat "France : terre de machisme" où s'affrontaient Clémentine Autain, droite et claire comme épée de justice et Christine Boutin, dame démocrate chrétienne qui aimerait bien être présidente

Il est préfacé par... Victor Hugo qui, en 1845, écrivit une lettre dite « du Barbu » :

Dieu avait donné à l'homme, le jour même où il le créa, ce magnifique cache-sottises : la barbe. Que de choses en effet, au grand avantage de la face humaine,disparaissent sous la barbe : les joues appauvries, le menton fuyant, les lèvres fanées, les narines mal Héraclite.jpgouvertes, la distance du nez à la bouche, la bouche qui n'a plus de dents, le sourire qui n'a pas d'esprit. À toutes ces laideurs, dont quelques-unes sont des misères et quelques autres des ridicules, substituez une végétation épaisse et superbe qui encadre et complète le visage en continuant la chevelure, et jugez l'effet ! L'équilibre est rétabli, la beauté revient.

Mais

Le bon Dieu fut vertement tancé pour avoir inventé la barbe. L'homme orné de cette chose fut déclaré bouc. Démocrite.jpgLa barbe fut décrétée laide, sotte, sale, immonde, infecte, repoussante, ridicule, antinationale, juive, affreuse, abominable, hideuse, et, ce qui était alors le dernier degré de l'injure - romantique.

 

Il présente vingt-quatre Grands Barbus et parmi eux, j'ai quelques préférences fortes: Diogène, François d'Assise, Karl Marx, Henry David Thoreau, Gustave Courbet, Walt Whitman, Herman Melville, Élisée Reclus, Auguste Rodin, Vincent Van Gogh.

Et l'éditeur — est-il barbu lui-même ? — de lancer dans son Avertissement

Eschyle.jpg

 

Le barbu est largement sous-estimé. Rien ne serait plus faux que de voir dans la barbe un archaïsme : même dans les temps où les rasoirs étaient de silex, la barbe n'était pas une fatalité, mais déjà un choix esthétique et moral. Masculine et fleurie, terrifiante et douce, animale et cultivée : la barbe, c'est le paradoxe même de la sagesse - l'art de maîtriser le laisser-aller, ou de laisser le savoir s'embroussailler...

Sophocle.jpgEt si c'était la barbe qui faisait le sage ? Avec en moyenne cinq cents poils au centimètre carré, ses joues sont un jardin, un bois, une forêt - un radar qui le relie aux forces du cosmos.

À notre siècle où la barbe revient en force, chez les rugbymen ou chez les rockers, barbe de trois jours ou barbe des bois, barbe des villes ou barbe des champs, ce petit ouvrage veut rendre un hommage contemporain à la figure tutélaire du barbu, homme libre et puissant, tendre et viril, paternel et sauvage.
Euripide.jpg

 

 

 

Mais il en manque, et pour moi, tout aussi grands sinon plus. De gauche à droite et de haut en bas :

Les GrecsÉpicure.jpg

Homère, Héraclite, Démocrite, Eschyle, Sophocle, Euripide, Épicure,

 

Le Romain Lucrèce,

 

 

Lucrèce.jpg

 

Ibn Khaldûn.jpg    Le Maghrébin Ibn Khaldûn,


Les deux de la Renaissance

Joachim.jpg

 

Montaigne.jpg

Joachim Du Bellay,

Michel de Montaigne, Gaston.jpg

 

 

 

 Et, point d'orgue du XXe Siècle, ce bon Gaston Bachelard.

 

 

 

Elles ne sont point — et pour cause ! — dans ce petit livre des Grands Barbus. Je les ajoute — leur seul nom, car existe-t-il d'elles une image ? — pour illuminer d'un sourire toutes ces barbes "tendres et viriles, paternelles et sauvages" et pour que je ne sois point suspect du moindre copeau de machisme.

J'ai nommé Sappho de Mytilène et Louise Labé.

Ou tout aussi bien Haspasie, Hypatia, Râbi'a al-Adawiyya ou Simone de Beauvoir.

 

 Mais tout ceci, ce livre, ces noms, ces visages, ces poètes, ces philosophes, ces dramaturges, mon visage même, par la grâce de ces quelques vers qui remontent de mon adolescence :

J'ai revu cette nuit les compagnons de mon enfance
Qui pourraient vivre chantournés avec des barbes comme des crédences
Ce sont les prêtres de ma religion

René Guy Cadou


...chantournés avec des barbes comme des crédences....


 

* Mathieu DUMONT, Le petit livre des Grands Barbus, Esprits sauvages de Lao Tseu à Bob Marley, Éditions WildProject, 2011.

dimanche, 22 janvier 2012

l'autre soir, au Lieu Unique

 Tout le jour, la ville s'était enroulée dans une bruine persistante sans vent qui est le propre de ces bordures de l'anticyclone hivernale.
Tout le jour, dans ma petite "librairie", j'avais laissé ruisseler les Suites, les Toccatas de Froberger, de Couperin, de Frescobaldi sur le clavecin de Leonhardt, disparu la veille.


Je me disais que j'allais traverser des miroirs, des inversions, des antipodes, que j'allais m'assècher, me glacer en allant écouter Bon lisant sa Traversée de Buffalo. L'expérience de lecture du livre numérisé sur mon écran d'ordi avait été rude, austère. Pas de tablette, ni de liseuse — ça coûte ! Mais cette balade de mots sur les images de Google maps m'apparaissait moins un survol qu'une errance sur une carte surréelle.

Dans une salle triangulaire, une estrade, deux petites tables : sur chacune, ce que je reconnais comme deux Mac en veille, si identifiables à leur pomme croquée lumineuse dans le semi-obscur que troue un immense fond d'écran, l’entrelacs d’un de ces nœuds autoroutiers qui enserrent dans le bitume et le béton de Buffalo, cette ville des Grands Lacs américains ?

L'entrée du Lecteur et du Musicien, ce fut à l'inverse de la descente aux enfers chantée dans l'Odyssée : nous étions de plain-pied dans cet enfer moderne. Et pourtant il y avait de l'Ulysse dans les rondeurs socratiques de François Bon et de l'Orphée dans la longue chevelure de Dominique Pifarély.

Leurs claviers de Mac effleurés quelques secondes comme un duo qui accorde ses instruments. Et la voix scandant  dans une économie un peu haletante du souffle.

 

Un monde hostile : parce qu’ici il en offrait l’image ? Tu t’y sentais paradoxalement plus à l’aise que dans les villes d’autrefois, avec les objets du monde proche. On avait arasé sur la terre de quoi y tendre les bras, de quoi y hurler tous les cris : regarde, mais regarde l’image, là où tu marches tu es seul, là où tu marches personne ne te suit. La terre est noire quand on la broie, et le ciment une fuite, des stries divergentes, et le parking à peine un décor pour série télévision (pensais-tu, toi qui n’avais jamais supporté ni télévision ni téléphone). Dans la ville que tu construisais il y avait cela : voitures qui filaient, étendues vides striées dans la terre noire, et ce type aux bras tendus, qui hurlait.Bon 2.JPG

Le violon va lentement s'immiscer dans les mots.

Dans l’île de chacun, ce qu’on a laissé dehors, sous les intempéries du ciel, et la dureté de ciment des cours. C’est du vrac, un désordre, on a posé ça ici parfois il y a longtemps, un jour il faudrait s’en occuper, et trier, mais on attend demain. Dans l’île de chacun, tellement de place pour rien : cet abandon qu’on traverse, ces espaces qu’on ne voit plus, et l’eau, au bout. L’eau verte, opaque, dure, immobile. Parfois on vient, là, tout au bord, on regarde l’eau. Ça fait du bien, de regarder l’eau. Puis on rentre dans la tour. On trouve commode cette répartition, l’étage où on mange, l’étage où on dort, et la grande pièce nue où on a son ordinateur, sa musique, ses rêves.

La scansion haletante devient transe. Le lecteur s'appuie au mur. Le violon s'exacerbe : il fouille les masses bétonnées des prisons, des dortoirs, les drôles de cadrans que dessine une usine de traitements des eaux, des yeux globuleux qui sont des espaces verts.

Hommes qui marchiez sur la terre noire, hommes qui mangiez ces boues noires, hommes venus là pour malaxer le bitume et le sol spongieux organique et lourd d’essences riches d’où extraire, raffiner, élaborer jusqu’à ce que cela explose, jusqu’à ce que cela donne aux hommes leurs armes contre les autres hommes : vos établissements d’hommes vous les aviez implantés à même là où vous marchiez, avec vos prothèses d’acier, vos baraques et vos tentes, où on désenfouissait les vieilles terreurs en noir, en orange, en bleu, avec les verts du minerai de cuivre et les blancs des alumines et la rouille vieille du fer à même cette terre qui s’effrite quand serrée dans la paume – hommes, vos couleurs pour repeindre la ville.

Le violon n'accompagne plus les mots : il les suscite, les éjecte de ces aligements, de ces obliques, de ces cercles.

Regardez, regardez l’autoroute : il y avait des lois, pour la protection des forêts, on y ménageait des passages souterrains pour la migration des espèces.... Des errants cherchaient, dans le dédale des voies droites, le lieu où elles se repliaient en courbe pour l’enfoncement dans la terre.

Je ne sais plus si je suis les mots du diseur ? ou les stridences du violoneux ?

Plus tard, après avoir salué François, exténué, je sors dans la nuit de bruine. Ma ville ? La ville de mon enfance, celle dont André Breton dans Nadja disait :

 ...la seule ville de France où j'ai l'impression que peut m'arriver quelques chose qui en vaut la peine, où certains regards brûlent pour eux-mêmes de trop de feux... où pour moi la cadence de la vie n'est pas la même qu'ailleurs, où un esprit d'aventure au-delà de toutes les aventures habite encore certains êtres.

Une autre ville ?


Tiens ! c'est peut-être cela, le post-moderne. Il me faudra arpenter les images nantaises de Google maps.
Avant de remettre mes pas dans ceux de René Guy Cadou et de Julien Gracq.

 Et puis j'irai en mer.


bonpifarely.jpg



Post-scriptum :

• Il faut revisiter le livre numérisé en inscrivant son propre parcours et sa rêverie sur Google maps. J'ai pris le dit du lecteur et les stridences du musicien comme une invite à ce geste.

Une Traversée de Buffalo
sur www.publie.net
coopérative d’édition numérique

• Cette perfomance/lecture s'est déroulée au Lieu Unique, dans le cadre du Labo Utile Littérature - séquence « Cités et frontières, parcs et paysages  », labo animé avec grande intelligence et sensibilité par Thérèse Jolly.



mercredi, 18 janvier 2012

Gustav Leonhardt ne nous quittera point

 

 Leonhardt001.jpg

Ce matin au lever du jour, j'apprends que s'en est allé le grand claveciniste.

Je ne suis qu'un piètre mélomane. Je ne puis écrire que ma tristesse, j'aimais beaucoup cet homme au visage émacié, à la carrure d'ascète. Une fois, à Nantes, l'été 1980, en l'Église Saint-Croix, nous l'avions écouté : il avait joué Froberger.

J'ai réouvert ma vieille platine, j'ai fait glisser la grande galette noire hors de la pochette noire d'Harmonia Mundi, laissé se poser la fine tête de lecture : la Suite XX en Ré majeur, "Méditation faite sur ma mort future laquelle se joue lentement avec discrétion".

Une tant belle musique pour tenter de bien mourir.

Cette autre aussi est belle. Il suffit d'écouter.*

 

 

 

* Tombeau sur la mort de monsieur de Blancrocher.

mardi, 17 janvier 2012

et un paquebot échoué

Respect pour les morts noyés. Respect pour les disparus.

Pour les autres, mais qu'allaient-ils faire dans cette galère ?  Quatre mille passagers, mille galériens — un pour quatre, le luxe du servage ! JeanLuc Godard aura filmer les séquences marines de Socialisme  sur ce Costa  Concordia.

Faut-il, après lui, filer la métaphore jusqu'à l'ultime ?

 

À propos :  y avait-il une Bibliothèque à bord ?

lundi, 16 janvier 2012

à chacun son Maghrébin

Au vieux maître — Lucien Jerphagnon — le Berbère, Augustin de Thagaste, jeune latiniste débauché puis évêque d’Hippone, Père de l’Église.


À son turbulent étudiant devenu maître — Michel Onfray — le Pied-Noir, Albert Camus de Belcourt, gardien de but du Racing Universitaire d'Alger, journaliste de Combat, philosophe prolétaire (si ! si !).



Onfray est un habile raconteur de la philosophie ; il avait plus ou moins laissé pressentir qu’il narrerait cette belle histoire d’un penseur isssu du peuple pauvre, sinon miséreux quand il écrivait en 2007, dans un mince opuscule, La Pensée de midi, Archéologie d’une gauche libertaire*, un hommage à Camus qu’il inscrivait dans une filiation qui reliait les rives méditérranéennes aux rivages bretons à travers une approche de Georges Palante et de Jean Grenier. Il y va de 600 pages  qui font un certain raffut dans la sphère de la critique journalistique : un vrai lancement publicitaire (!) avec Franz-Olivier Giesbert, un soutien amical et nuancé de Jean Daniel et un “halte-au-feu” d’Olivier Todd, qui doit craindre une chute des ventes de son excellent bouquin, Albert Camus une vie, beau pavé de plus de huit cents pages, datant de 1996.

Je continue de lire Onfray. Sa contre-histoire de la philosophie m'était une nécessité. Aujourd’hui, je m’avoue qu’il est plus conteur qu’historien, plus bretteur que philosophe, chaleureux, menteur par omission, à pas un oxymore près — feu sur Sartre sur une page, révéré à la page suivante — ; il pisse les feuillets, les articles, les livres en négligeant allègrement le précepte de Pline “Adversus solem ne meiito” — ne pisse pas face au soleil — qui reprend lui-même la recommandation moins aphoristique d’Hésiode***:

N’urine pas debout, tourné vers le soleil,
Ni entre le coucher de l’astre et son lever,
Ni marchant en chemin, ni sur les bas-côtés,
Ni en te dénudant. Car les nuits sont aux dieux.
L’homme pieux satisfait ce besoin accroupi
Ou bien contre le mur d’une cour bien fermée. **


Mais Onfray renvoie aux calendes grecques les préceptes :  c’est un “chien”, un vrai de vrai Cynique, quoi !

Pour acquérir L'ordre libertaire, j’attendrai sans doute la parution en poche de son "pamphlet hagiographique" (?) (c'est écrit dans le sous-titre du Nouvel Obs qui balise les deux pages de remerciements de Jean Daniel à la dédicace de Onfray).
Pour le bénéfice de l’éditeur, ça ne tardera guère.

Dans l'attente, je relis avec bonheur — et gratitude envers Michel Onfray — Sa pensée de midi. C’est la très belle et brève histoire d'un lien entre trois philosophes.


 

 

* Michel ONFRAY, La Pensée de midi, Archéologie d'une gauche libertaire, Galilée, septembre 2007.

** Pour qui souhaiterait vérifier la justesse de la traduction— ce que j'avoue n'avoir pas encore pris le temps de faire :

μηδ' ἄντ' ἠελίου τετραμμένος ὀρθὸς ὀμιχεῖν·
αὐτὰρ ἐπεί κε δύῃ, μεμνημένος, ἔς τ' ἀνιόντα·
μήτ' ἐν ὁδῷ μήτ' ἐκτὸς ὁδοῦ προϐάδην οὐρήσῃς
μηδ' ἀπογυμνωθείς· μακάρων τοι νύκτες ἔασιν·
ἑζόμενος δ' ὅ γε θεῖος ἀνήρ, πεπνυμένα εἰδώς,
ἢ ὅ γε πρὸς τοῖχον πελάσας ἐυερκέος αὐλῆς.

*** Référence à une recension de Pierre Assouline qui n'est point dans mes fréquentations quotidiennes, sur les Adages d'Érasme,"Erasmemania" dans le Monde des Livres du vendredi 13 janvier. Piquante à lire ! Et à ouvrir le fichier qui livre aperçu de ces fameux Adages en cliquant sur ce lien, Adagesbooklet.pdf

mercredi, 11 janvier 2012

au décours de...

un mot au ...détour d'une notice d'information médicale sur l'anesthésie. Et surgit comme une sensation ruisselante, légère. Un mot nouveau dont je ressens imperceptiblement le sens. Je l'ai lu pour la première fois quelques minutes avant qu'on ne me fasse coucher dans un lit mobile d'où je ne vois en accéléré que les plafonds des longs couloirs, de l'ascenceur, d'autres longs couloirs, jusqu'à une vague aire de stationnement où semblent se croiser d'autres lits aussi mobiles que le mien.

au décours de...

Un visage aigu à lunettes qui se penche et me dit : « Je vais vous accompagner tout au long de l'intervention ! » Je pense : pourquoi ne dit-elle point "jusqu'au décours" ?

Une infime piqure sur le dos de la main gauche. Le même visage me propose un masque d'oxygène : « Air alpin ou air pyrénéen ? » me propose-t-elle.
Elle ne peut savoir d'où je viens : « Air marin ! » Je lui suggère. Elle nous, elle et moi, embarque en paroles apaisantes dans l’air salin, les beaux nuages et le bleu de la mer.
Moi, je ne perçois au plafond qu’un assemblage de tuyaux crèmes mais sereins je n’entends plus les mots je deviens attentif à cette lourdeur qui m’empoigne paisiblement les épaules la nuque mon regard qui efface l’assemblage et entre dans l’autre monde — non, un autre monde — c’est bien ainsi oui ça doit être ainsi au décours de...

au décours de....    j’entends mon nom         le nom d’un autre que je ne suis pas        mon nom        l’air salin dans la bouche      bruissements de voix claires froides trop claires         je n’ai encore cette fois ramené aucun rêve         seule cette impression d’un temps abrégé      déjà !      Et le retour trop lucide par les mêmes longs couloirs le même ascenseur et les autres longs couloirs

L’air salin dans la bouche, ce n’est que le goût salé de mon sang. Ce n’est rien qu’un simple aléa dentaire dû à l’adolescence du grand âge.
La saveur fraîche d’une compote.
La vie revient neuve.

Mais la note d’information médicale du Service Anesthésie et Réanimations de l’Hôtel-Dieu précise bien “qu’au décours de l’intervention, l’anesthésie peut provoquer, etc.”

Allons, le décours me plaît bien.

lundi, 09 janvier 2012

retour des Asturies 2

Dialogue surréel dans les rues d'Oviédo — je ne sommeille point, je lis un livre de bronze que me commente le statufié.

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Plus tard, un autoportrait sur l'angle du mur de la très vieille maison asturienne couverte de lauzes, qui nous abrita.

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Sur le banc de l'image précédente, sans doute pouvait-on y lire ce texte du poète galicien José Àngel Valente 


Une fois encore, le sot
inutile étend
sa perisitance et triste araignée
vers quelle ombre ?

L'éclat, V

dimanche, 08 janvier 2012

retour des Asturies 1

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©Nicléane

 

Les vieux mineurs qui levaient le poing ne sont plus sur les quais des ports et au Cabo de Peñas les grandes strophes de Perse semblaient demeurer muettes.

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©Nicléane

Les grandes houles de noroît n'étaient que portées musicales fracassantes fracassées.

dimanche, 01 janvier 2012

Pour 2012


« Ne ratez pas le printemps ! »

écrivait Jankélévitch

Et c'était mon souhait pour 2011.

Le même souhait peut se récrire en 2012. J'ajoute :

 

Saluez vigoureusement les aurores de l'été

 

Le lever du jour - copie.jpg

 

contemplez apaisé(e)s les crépuscules de l'automne

La tombée du jour - copie.jpg

l'hiver vous sera favorable.