Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Rechercher : Desnos

Robert DESNOS, le cinquième des...

.

... quatre sans cou Quand ils mangeaient, c'était sanglant, Et tous quatre chantant et sanglotant, Quand ils aimaient, c'était du sang. Quand ils couraient, c'était du vent, Quand ils pleuraient, c'était vivant, Quand ils dormaient, c'était sans regret. Quand ils travaillaient, c'était méchant, Quand ils rodaient, c'était effrayant, Quand ils jouaient, c'était différent, Quand ils jouaient, c'était comme tout le monde, Comme vous et moi, vous et nous et tous les autres, Quand ils jouaient, c'était étonnant. Mais quand ils parlaient, c'était d'amour.
Le plus grand parmi les rêveurs, écrivit André Breton dans le premier Manifeste du surréalisme : “La prodigieuse agilité qu'il met à suivre oralement sa pensée nous vaut autant qu'il nous plaît de discours splendides et qui se perdent, Desnos ayant mieux à faire qu'à les fixer. Il lit en lui à livre ouvert et ne fait rien pour retenir les feuillets qui s'envolent au vent de sa vie”. Il poursuivra dans les Pas perdus et dans les Entretiens radiophoniques avec André Parinaud (de mars à juin 1952), soulignant la capacité prodigieuse de Desnos à “se transporter à volonté, instantanément, des médiocrités de la vie courante en pleine zone d’illumination et d’effusion poétique”. Grand joueur de mots
Pourquoi votre incarnat est-il devenu si terne , petite fille dans cet internat où votre œil se cerna ? Rrose Sélavy
Tour à tour, commis-droguiste, secrétaire dans une maison d’édition, comptable, courtier en publicité, caissier, journaliste, pigiste, journaliste à la radio, réalisateur avec Paul Deharme de la célèbre émission radiophonique La grande complainte de Fantomas, musique de Kurt Weill, Antonin Artaud pour la direction dramatique et le rôle de Fantomas. Il aima le cinéma et lisait des bandes dessinées. Il osa le Corsaire Sanglot et se fit censuré, en 1927, par le Tribunal correctionnel de la Seine
Tes lèvres font monter des larmes à mes yeux ; tu couches toute nue dans mon cerveau et je n’ose plus dormir. La Liberté ou l’Amour
Il aima. Parfois deux amours à la fois, au moins une fois !
Dans la nuit il y a les étoiles et le mouvement ténébreux de la mer, des fleuves, des forêts, des villes, des herbes, des poumons de millions et millions d'êtres. Dans la nuit il y a les merveilles du monde. Dans la nuit il n'y a pas d'anges gardiens, mais il y a le sommeil. Dans la nuit il y a toi. Dans le jour aussi. Les espaces du sommeil
Parfois, il ne fut pas aimé et
The night of the loveless nights
ce fut son Bateau ivre à lui
Nuit putride et glaciale, épouvantable nuit, Nuit du fantôme infirme et des plantes pourries, Incandescente nuit, flamme et feu dans les puits, Ténèbres sans éclairs, mensonges et roueries. Qui me regarde ainsi au fracas des rivières ? Noyés, pécheurs, marins ? Éclatez les tumeurs Malignes sur la peau des ombres passagères, Ces yeux m'ont déjà vu, retentissez clameurs ! Le soleil ce jour-là couchait dans la cité L'ombre des marronniers au pied des édifices, Les étendards claquaient sur les tours et l'été Amoncelait ses fruits pour d'annuels sacrifices.
Il fut grand enfant pour les enfants
Le blaireau Pour faire ma barbe Je veux un blaireau, Graine de rhubarbe, Graine de poireau. Par mes poils de barbe ! S'écrie le blaireau, Graine de rhubarbe, Graine de poireau, Tu feras ta barbe Avec un poireau, Graine de rhubarbe, T'auras pas ma peau.
Ce sont Chantefables et chantefleurs à faire lire par les grands-pères pour toutes les Noémie et Célia du voisinage. Devenant le poète clandestin Il fut Cancale, parigot à l’argot de maquereau
C'est tarte, je t'écoute, à quatre-vingt-six berges, De se savoir vomi comme fiotte et faux derge Mais tant pis pour son fade, il aurait dû clamser
Il fut Valentin Guillois pour célébrer les armes de justice et la fraternité de ceux qui les prirent.
Et bonjour quand même et bonjour pour demain ! Bonjour de bon cœur et de tout notre sang ! Bonjour, bonjour, le soleil va se lever sur Paris, Même si les nuages le cachent il sera là, Bonjour, bonjour, de tout cœur bonjour !
Il fut arrêté par la Gestapo, le 22 février 1944. Il “fit” Fresnes, Compiègne, Auschwitz, Buchenwald, Flossenburg, Flöha. À Térézine, il vécut, quelques jours, libre et à l’agonie.
.... J’ai rêvé tellement fort de toi, J’ai tellement marché.................
Je crois bien que c’est Cadou qui me mena à Desnos. J’étais dans mes années de merde et de feu à Tamloul et l’arme que j’avais, en mains, n’était point de justice : nous tentions d’être propres. Depuis 1956, les lieux que j’habitais n’avaient pas de librairies, mais la Poste délivrait encore les paquets de bouquins au fin fond de la forêt tropicale et jusqu’aux secteurs postaux des pitons d’Algérie. medium_desnos.3.jpg Dans le dernier cahier de certains “Poètes d’aujourd’hui”, Pierre Seghers écrivait : “Demandez à votre libraire habituel de faire, lui aussi, un effort en faveur des poètes. Commandez-lui nos ouvrages. Si nous n’avez pas de librairie à votre disposition, écrivez-nous”. Depuis cinq ans, je lui écrivais et il m’envoyait les poètes. C’était un temps déraisonnable ! ROBERT DESNOS, c’était une première de couverture, blanche avec des lettres noires, qui rompait avec les autres bouquins de la collection. Comme un livre de deuil ! C’était le n°16, une édition nouvelle, avec une étude de Pierre Berger. Dans un avertissement cet homme se défendait d’avoir fait un essai. « La seule ambition de son auteur est d’avoir fait acte de camaraderie. Il ne s’agit donc pas de littérature. D’ailleurs Desnos détestait cela. » Un livre de “copain” ! Il entrelaçait la vie quotidienne d’un Desnos aux petits métiers, grandes misères et les nuits fabuleuses, les amours, les querelles, les injures du grand bazar surréaliste. N’était pas encore venu le temps de la sémiologie, de la stylistique, des thèses. Berger rapporte deux faits :
Après l’arrestation de Desnos, lors d’un dîner en ville entre un haut-fonctionnaire, des écrivains et journalistes de la presse du moment (!), un dénommé Alain Laubreaux hurle à propos de Desnos : « Pas déporté... vous devriez le fusiller. C’est un homme dangereux, un terroriste, un communiste.» Berger poursuit “Alain Laubreaux est actuellement chez Franco. Mais SI ON LE REPREND...”
C’était en 1949. Laubreaux est-il encore vivant ? Le second fait est rapporté par André Verdet, poète et compagnon de déportation :
“À Auschwitz, devant la chambre à gaz, les dix-huit cents camarades du transport attendaient la mort. Abrutis de fatigue, de faim, d’angoisse, la plupart demandaient qu’elle vint vite. Tout à coup il se passa quelque chose : un homme parcourait furtivement les rangs du bétail, prenait les mains de chacun..., examinait les lignes de vie et de chance, prédisait une existence longue et heureuse, la fin des misères, prophétisait encore... C’était Robert Desnos”.
Je ne sais qui est Pierre Berger, il a écrit dans la même collection une introduction à Pierre Mac Orlan, à René Char.
Vous avez le bonjour de Robert Desnos !
Post-scriptum Le rédacteur du blogue, très troublé par le soixantième anniversaire de la libération des camps nazis, a modifié l’ordre de parution de ces retours sur les “POÈTES D’AUJOURD’HUI”, qui devaient suivre l’ordre de ses découvertes. Cette nuit-même, est projeté en continu, sur une chaîne nationale, SHOAH de Claude Lanzman. Le temps de mon enfance fut le temps des assassins :
Robert Desnos, arrêté le 22 février 1944, mort à Térézine, le 8 juin 1945. Max Jacob, arrêté le 24 février 1944, mort au camp de Drancy, le 5 mars 1944. Précédés par Federico Garcia Lorca, fusillé à Viznar près de Grenade, le 19 août 1936
.
Sangs féconds
Pour lire Robert Desnos aujourd'hui • 3 recueils dans Poésie/Gallimard • Des liens - œuvre et biographie de Desnos - Desnos déporté - Desnos célébré (!) - Desnos chanté - Desnos chanté bis

Lire la suite

mardi, 25 janvier 2005 | Lien permanent | Commentaires (1)

Le ”dernier” texte de Robert Desnos

“Le dernier poème” de Robert Desnos “J’ai rêvé tellement fort de toi” ne serait pas le vrai bon dernier. Le maître du site “robert.desnos.online” le mentionne déjà comme "soi-disant" dernier. Cet après-midi, à la recherche d’un recueil de Paul Verlaine, je retrouve un numéro de la revue...Change*, le n°13 de décembre 1972. Entre Lu Xun, Cortazar, Baffo, Jakobson et André Velter, il y a un dossier DESNOS. Il y est relaté le témoignage de Joseph Stuna qui soigna Desnos dans les jours qui suivirent la libération du camp de Térézin : « Sa seule propriété personnelle, à l’époque, était une paire de lunettes et à part ça on n’a rien retrouvé. » (cité par Adolf Koupa dan les “Lettres Françaises” du 1er mars 1947). Pierre Berger écrit que c’est le même Stuna qui aurait fait parvenir le “dernier poème”. Berger ? Koupa ? Stuna ? Est-ce ainsi que naissent les légendes ? Les manuels de littérature auraient répandu la version “Berger”. Grands sentiments et romantisme, quand vous nous tenez ! Change donne un texte en prose et deux textes en vers du poète, comme étant les “dernières œuvres connues de son écriture”. Du 6 avril 1944 (donc sans doute écrit au camp de Compiègne), l’ultime :

Printemps
Tu, Rrose Sélavy, hors de ces bornes erres Dans un printemps en proie aux sueurs de l'amour, Aux parfums de la rose éclose aux murs des tours, à la fermentation des eaux et de la terre. Sanglant, la rose au flanc, le danseur, corps de pierre Paraît sur le théâtre au milieu des labours. Un peuple de muets d'aveugles et de sourds applaudira sa danse et sa mort printanière. C'est dit. Mais la parole inscrite dans la suie S'efface au gré des vents sous les doigts de la pluie Pourant nous l'entendons et lui obéissons. Au lavoir ou l'eau coule un nuage simule A la fois le savon, la tempête et recule l'instant où le soleil fleurira les buissons.
“Vous avez le bonjour de Robert Desnos.” * Collectif permanent de CHANGE en 1972 : Philippe Boyer, Yves Buin, Jean Pierre Faye, Jean-Claude Montel, Jean Paris, Léon Robel, Mitsou Ronat, Jacques Roubaud.

Lire la suite

jeudi, 10 février 2005 | Lien permanent | Commentaires (1)

Robert Desnos a cent-quinze ans

Il fut le rêveur éveillé des sommeils surréalistes, il fut le joueur des mots, il fut amoureux, il fut fraternel, il fut l'un de nos derniers fabulistes, il fut le cinquième des Quatre sans cou.
Il avait le regard ineffablement doux des myopes
Il fut homme de liberté et de résistance.

Il fut arrêté un jour de février 44.

Ce furent alors de sombres jours, avec des lueurs d'espérance entre avril et juin 1945.
....
Les survivants du convoi atteignirent à Terezine. Il y avait là un fort avec des casemates, des cellules, une chambre de torture, une cour pour les exécutions capitales, une chambre à gaz, un four crématoire.
On empila à coups de crosse les arrivants dans des casemates. Très vite, celles-ci furent pleines. On entassa ce qui restait dans les cellules à raison de vingt par cellule. On poussa l'excédent dans la chambre à gaz.
Parmi ceux des casemates, quelques-uns furent conduits au Revier (infirmerie). On leur ôta leurs loques que l'on remplaça par d'autres loques où grouillaient les poux.
Et ce fut le typhus.
Le 3 mai 1945, les SS s'enfuirent tandis que les forces russes et les partisans tchèques faisaient leur entrée dans la forteresse.
C'était la liberté.
Ce n'était pas encore la vie.

Les libérateurs amenaient avec eux des médecins et des infirmiers. Il s'agissait de faire vite, de sauver ceux que l'on pouvait encore sauver, d'adoucir les derniers jours des mourants.
Certains traînèrent longtemps. Plusieurs semaines après la libération, dans la nuit du
3 au 4 juin, l'étudiant tchèque Josef Stuna, fut exceptionnellement de service à la baraque n° 1. Joseph Stuna compulsa les listes de malades. 
Sur une des cartes, il lut : Robert Desnos, né en 1900, nationalité française. Or l'étudiant tchèque savait qui était Desnos, savait ce qu'était le Surréalisme, la poésie. Il avait lu les livres de Paul Eluard, d'André Breton... Il se souvint d'un portrait de Robert dans Nadja...

Le jour commençait de se lever et d'envahir le bloc. Josef Stuna chercha Robert Desnos parmi les 240 squelettes en- core vifs dont il avait la garde. Il s'arrêta devant l'un d'eux dont le regard presque éteint s'abritait derrière de grosses lunettes. Stuna s'approcha :
—  Est-ce que vous ne connaissez pas le poète français Robert Desnos ? demanda-t-il.
Les yeux du moribond furent alors indicibles. Malgré sa faiblesse extrême, l'homme essaya de se dresser. Puis il dit :
—  Le poète français... c'est moi.

Tout fut soudain inouï. Robert n'était plus seul. Un ami était là. Cet ami savait qui il était, connaissait sa poésie. Dès lors, il ne s'agissait plus de mourir. Josef Stuna alla chercher son amie, l'infirmière Alena Tesarova. Elle comprenait le français mieux que lui. Elle parla de longues heures avec le poète mourant.
Il était très fatigué. Les souffrances du dernier transport l'avaient épuisé. La fièvre ne descendait jamais au-dessous de 39,6. Josef Stuna et Alena Tesarova firent tout pour le
sauver.
Ces trois êtres, dont l'un était promis à la mort, parlèrent de tout : de Paris, de la Liberté, de la Fraternité, de la Poésie, des arbres, du vent, des océans. Desnos disait ce qu'avait été la Résistance française contre les Allemands et aussi ce qu'avait été le Surréalisme, cette résistance à l'obscurantisme du monde. Alena Tesarova lui apporta une fleur d'églantier. La fleur se fana très vite. Le poète la garda quand même près de lui.

Au bout de trois jours il entra dans le coma.

Le 8 juin à 5 heures du matin, il mourut.




Pierre Berger
Poètes d'aujourdhui n°16
Pierre Seghers éditeur, 1960

 

Il mourut donc libre.
Maintenant continuons de le lire.



Coucher avec elle

Pour le sommeil côte à côte

Pour les rêves parallèles

Pour la double respiration

Coucher avec elle
Pour l’ombre unique et surprenante

Pour la même chaleur

Pour la même solitude


Coucher avec elle

Pour l’aurore partagée

Pour le minuit identique

Pour les mêmes fantômes


Coucher avec elle
Pour l’amour absolu

Pour le vice
Pour les baisers de toute espèce


Coucher avec elle

Pour un naufrage ineffable

Pour se prouver et prouver vraiment

Que jamais n’a pesé sur l’âme et le corps des amants

Le mensonge d’une tache originelle

 

Coucher avec elle
1942

 Vous avez le bonjour de Robert Desnos.

Desnos008 - copie.jpg

La photo de Robert Desnos, prise par Man Ray
et publiée dans Nadja d'André Breton
édition du Livre de Poche, 1964

 

Post-scriptum : En janvier 2005, il fut publié quelques notes sur ce blogue à propos du bouquin paru chez Seghers en 1960 ; je le tins entre mes mains sur le piton de Rhardous en mars 1961; il était alors, pour moi, cette lueur d'espoir comme seul, le Veilleur du Pont-au-Change,  le poète de The night of loveless nights, des Sans cou, du Brochet et du Pélican pouvait la dispenser.

Lire la suite

lundi, 08 juin 2015 | Lien permanent

Salut ! Robert !

...je relevai la robe de soie noire dont elle s'était débarrassée. Nue, elle était nue maintenant sous son manteau de fourrure fauve. Le vent de la nuit chargé de l'odeur rugueuse des voiles de lin recueillie au large des cotes, chargé de l'odeur du varech échoué sur les plages et en partie desséché, chargé de la fumée des locomotives en route vers Paris, chargé de l'odeur de chaud des rails après le passage des grands express, chargé du parfum fragile et pénétrant des gazons humides des pelouses devant les châteaux endormis, chargé de l'odeur de ciment des églises en construction, le vent lourd de la nuit devait s'engouffrer sous son manteau et caresser ses hanches et la face inférieure de ses seins. Le frottement de l'étoffe sur ses hanches éveillait sans doute en elle des désirs érotiques cependant qu'elle marchait allée des Acacias vers un but inconnu. Des automobiles se croisaient, la lueur des phares balayait les arbres, le sol se hérissait de monticules, Louise Lame se hâtait.
Robert Desnos La Liberté ou l'Amour Les profondeurs de la nuit
Belle manière d'assècher la Camarde !

Lire la suite

mercredi, 26 janvier 2005 | Lien permanent | Commentaires (1)

Rilke non lu

Rainer Maria RILKE ...ou le livre jamais lu. Il est partie de cette livraison qui me parvient à Rhardous entre Forêt-Affaïne et Djebel Bou-Maad, au printemps 1961. Un petit paquet des éditions Seghers : Rilke, Jouve, Reverdy, Pessoa, Desnos. Deux sont marqués d’un drôle de cachet rond SP, que je comprendrai que plus tard. Fin de stock ? Pourquoi cette marque ? Parce que vendus par correspondance ? Non : spécimen.

medium_rilke.jpg
Le Rilke doit être une réédition ; le bouquin est le numéro 14 de la collection, donc un des tout premiers de la collection qui date de 1945 ; l’achevé d’imprimer de l'exemplaire que j'ai est de décembre 1958. Le rédacteur de l’essai est un certain Pierre Desgraupes ; je dis “un certain” , car la télévision n’a pas encore pénétré dans tous les foyers français. Mais il s’agit bien du plus qu’excellent chroniqueur de “Lectures pour tous” avec Pierre Dumayet et Max-Pol Fouchet. Livre jamais lu, à peine entrouvert aujourd’hui encore. Par exemple, le mois dernier, il en est question dans l’approche littéraire du mythe d’Orphée, mais c’est Pierre Emmanuel que je vais réouvrir. Pierre Emmanuel dont la lecture du Tombeau d’Orphée de suite s’imposera sur les Sonnets à Orphée de Rilke écrits en 1922, inspirés au poète par la mort d’une jeune danseuse et musicienne. Un livre de la non-lecture, de ces livres dont parlait récemment François Bon dans son Tumulte , de ces « livres qu’on a achetés et pourtant pas lus, pour l’instant ou pour toujours ? » J’en ai quelques autres sur les étagères. Pourquoi l’avoir acquis ? Pour la réputation de l’auteur, la fascination des titres : les Élégies de Duino, les Cahiers de Malte Laurids Brigge ? Pour la renommée troublante, trouble, d’un nom de femme Lou Andréas-Salomé. Lecture “naïve”, lecture critique ? Quand la première est muette, la seconde peut ouvrir l’intérêt et le plaisir. Mais non, pas à chaque fois. Avouer n’avoir jamais lu et tenter de comprendre ce non lire. La “gueule, quand on la voit, de l’auteur qui ne vous revient pas ; c’est bête mais c’est le cas pour Rilke, les yeux globuleux, la bouche lippue, la moustache qui recouvre la lèvre supérieure. Les jeunes filles qui ne sont pas mes jeunes filles, le dieu si loin de mes dieux. La traduction, et là plus encore que dans les autres livres, les traducteurs multiples, j’en ai dénombré dix. L’effleurement des pages quand aucune accroche ne s’attarde aux mots. Fragile adhésion aux images, donc à la langue (difficulté rencontrée avec Essénine, mais pas avec Lorca) L’essai pourtant comme possible entrée ? Je ne les lisais que peu, et toujours après avoir découvert les textes du poète. Même encore ce jour. Mais alors quand le texte n’est qu’un mur lisse sans prise ? Georges Mounin dans la Communication poétique, Jean Onimus dans la Communication littéraire démontent bien ces mécanismes de lecture et de non-lecture. Faut-il à chaque page ouverte cette communauté d'expérience, même infime, pour que le lien s'établisse entre l'auteur et le lecteur ? Des années que je tourne et retourne cette question, qui, parfois, s'efface, qui d'autres fois, se fait abîme. Et voilà le livre qui se fane sur une étagère non vitrée, exposé aux poussières, le dos délavé et la tranche jaunie par la lumière du jour Dans une lettre à Lou Andreas-Salomé, Rilke écrit :
« L'art est, en effet, chose bien trop grande et trop lourde, et trop longue pour une vie, et les vieillards y commencent à peine leur chemin. »
Puis il cite Hokusaï :
« C'est à l'âge de soixante-treize ans que j'ai compris à peu près la forme et la nature vraie des oiseaux, des poissons et des plantes. »
Pour Rilke, pour d’autres, je n’ai pas encore trouvé de passeur !
L’esseulement qui t’assaillit te rend capable de mettre en équilibre la solitude des autres.
La lettre à Liliane
Sur la Toile, quelques sites : • Anthologie de la poésie • Sur le site de Jean-Michel Maulpoix • Rilke "l'Européen", en français, en allemand, en anglais

Lire la suite

lundi, 15 mai 2006 | Lien permanent | Commentaires (2)

il ne fait pas bon avoir la tête épique

... en France. Du moins !Et la récente biographie parue sur Alexis Léger dit Saint-John Perse* semble bien confirmer l'adage littéraire. Aux dires des critiques, Jacque Julliard dans le Nouvel Obs de la semaine dernière et Philippe Lançon dans le LibéLivres d'hier, la stèle érigée par le diplomate-poète lui-même commencerait de se lézarder. Ce ne sont que critiques de critique.Julliard appuye là où sans doute le jeune universitaire auteur de la biographie fait déjà mal — ce serait surtout le diplomate qui serait visé, ouf !, affabulateur... problème d'identité... don de réécriture de l'histoire... pseudomanie galopante... ondoyant et divers... dissimulé, calculateur, opportuniste. Julliard clôt son article assez bêtement : « Il y aura toujours des unhappy few pour préférer Éluard, Char et Saint-John Perse à Apollinaire, Aragon et Desnos. » Mais non, mais non ! monsieur Julliard, qui n'aimez point Saint-John Perse, le lecteur peut préférer (!) les six à la fois.Lançon écrit plus mesurément sur le diplomate, mais sans l'épargner : « Craignant d'être tué sous les bombes, il rejoint aussitôt les États-Unis. Il y nuit avec efficacité à l'image gaullienne. » Et la chute de l'article qui ébranle le "monument" Pléiade, après les allusions aux manœuvres diplomatiques pour obtenir le Nobel : « Le mausolée de la Pléiade roule la pierre sur cette destinée accomplie entre élévations et reniements. Quelques vers splendides, de beaux hommages, cette extraordinaire cadence verbale statufiée, continuent de s'en échapper. Et cette question sans réponse, posée dès l'âge de 20 ans : "sinon l'enfance, qu'y avait-il alors qu'il n'y a plus ?..." Rien. » Critique de critiques ! Certes. Faudra-t-il lire le livre de Renault Meltz ? Sinon la curiosité. Quand les statues sont ébranlées, la lecture n'en peut être que libérée. Mais, que m'ont apporté récemmment, les biographies de Greisalmer sur Char, de Martin sur Michaux, passé un certain premier malaise dans le dévoilement de "l'humain, trop humain" de ces hommes ?Des années de lecture furent dans l'ignorance des petitesses et des grandeurs ; le retour aux textes estompent très vite, sinon effacent, les gênes biographiques tant qu'il n'est en question que les trivialités des vies quotidiennes et que les valeurs de la common decency** ne sont point lézardées.Demeure la grande vendange de la langue et du rythme. Scribes dépassés par leur propre labeur : ils seraient demeurés anonymes, le lecteur n'en serait pas moins comblé.Un des ultimes textes de Perse me parait être à la fois un aveu, un plaidoyer et une réponse au biographe et à ses critiques.

LES voici mûrs, ces fruits d’un ombrageux destin. De notre songe issus, de notre sang nourris, et qui hantaient la pourpre de nos nuits, ils sont les fruits du long souci, ils sont les fruits du long désir, ils furent nos plus secrets complices et, souvent proches de l’aveu, nous tiraient à leurs fins hors de l’abîme de nos nuits... Au feu du jour toute faveur ! les voici mûrs et sous la pourpre, ces fruits d'un impérieux destin — Nous n’y trouvons point notre gréSoleil de l’être, trahison ! Où fut la fraude, où fut l’offense ? où fut la faute et fut la tare, et l'erreur quelle est-elle ? Reprendrons- nous le thème à sa naissance ? revivrons-nous la fièvre et le tourment ?... Majesté de la rose, nous ne sommes point de tes fervents : à plus amer va notre sang, à plus sévère vont nos soins, nos routes sont peu sûres, et la nuit est profonde où s'arrachent nos dieux. Roses canines et ronces noires peuplent pour nous les rives du naufrage.Les voici mûrissants, ces fruits d’une autre rive. « Soleil de l’être, couvre-moi ! » — parole du transfuge. Et ceux qui l’auront vu passer diront : qui fut cet homme, et quelle, sa demeure ? Allait-il seul au feu du jour montrer la pourpre de ses nuits ?... Soleil de l’être, Prince et Maître ! nos œuvres sont éparses, nos tâches sans honneur et nos blés sans moisson : la lieuse de gerbes attend au bas du soir. — Les voici teints de notre sang, ces fruits d’un orageux destin.À son pas de lieuse de gerbes s'en va la vie sans haine ni rançon.
Nocturne1972.
* Alexis Léger dit Saint-John Perse, par Renault Meltz, Flammarion.** ma note du 5 décembre : j'ai fait l'école buissonnière.

Lire la suite

vendredi, 19 décembre 2008 | Lien permanent

répondre à René Char

En octobre 1938, le huitième Cahier G.L.M. publie le texte d'une enquête anonyme: « La Poésie indispensable » - sorte de manifeste sur le statut de la poésie - à laquelle les lecteurs sont invités à répondre en citant vingt poèmes* qu'ils jugent «indispensables» non pas en référence à l'idée qu'ils se font de la culture, mais à celle, plus essentielle, de leur existence. 
Le texte de l'enquête a été rédigé par Char qui livre sa propre réponse, sous son nom et à la suite du texte.

Jean Arp, André Breton, Roger Caillois, Robert Desnos, Francis Curel, Paul Eluard, Pierre-Jean Jouve, Gilbert Lely, André Masson, Benjamin Péret, Philippe Soupault... et d'autres encore répondent dans le cahier suivant.

* Pourquoi 20 ? A cause de l'incommodité de ce nombre. Mais vous êtes invité à motiver votre désaccord.

 

ENQUÊTE   DANS   LES   CAHIERS   G. L. M.*
LA   POÉSIE   INDISPENSABLE

Questionnaire.
     Soit duplicité soit ignorance, les conducteurs écoutés de la Poésie soulèvent de moins en moins de protestations de la part de l'ensemble des lecteurs contre leur volonté grossière de réduire à nouveau cette Poésie aux dimensions gracieuses, inoffensives ou politiquement utilisables (excluant alors merveilleux, érotisme, humour et fantastique, dénoncés hypocritement comme facteur de confusion et d'ankylose), que l'esprit bourgeois et un certain opportunisme révolutionnaire n'ont jamais désespéré d'imposer. Cette démarche va à l'encontre de l'interrogation creusante, en permanence posée à l'homme — ce briseur de satisfactions —, par la simplicité sans limites de son devenir autant que par l'essence magique de son origine (en proie aux déchirements des milieux contradictoires où il circule, en proie à son angoisse, à son mal-être, aux rapports non fondamentaux avec les structures des sociétés, en proie aux allégresses tranchantes, en proie à de subtiles nausées, etc.).
NOUS VOUS POSONS LA QUESTION SUIVANTE :
      Contre toute tentative d'annexion, de stabilisation, d'estimation bornée de la Poésie, désignez-nous vingt poèmes, sans restriction de pays ni d'époque, dans lesquels vous aurez reconnu l'INDISPENSABLE qu'exige de vous non pas l'éternité de votre temps mais la traversée mystérieuse de votre vie.

1937
in La Recherche de la Base et du Sommet

 


Ma réponse à René CHAR

Tardive, certes.
Quatre-vingts années après le lancement de cette enquête ! 


Mais il a bien fallu soixante-dix ans au lecteur depuis son enfance, avec cette récitation scolaire du sonnet XXXI de Du Bellay, jusqu'au seuil désormais franchi de la vieillesse, avec quelques pages de Quignard, pour "reconnaître l'Indispensable" qui m'aura été nécessaire à la traversée.


           Le premier — ai-je dix ans ? —

Les Regrets de Joachim Du Bellay
Les Chimères de Gérard de Nerval
Cinq grandes Odes de Paul Claudel
Les Illuminations d’Arthur Rimbaud
Hélène ou le règne végétal de René Guy Cadou
Feuillets d'Hypnos de René Char lui-même
La nuit remue d’Henri Michaux
Le Divan du Tamarit de Federico Garcia Lorca
Amers de Saint-John Perse
Les Noces suivi de Sueur de sang de Pierre Jean Jouve
Les Essais de Michel de Montaigne
Fragments d’Héraclite
L’Odyssée dHomère
L’Homme foudro de Blaise Cendrars
Le Chant du Monde de Jean Giono
Haïkaï de Bashô
Nedjma de Kateb Yacine
Le Fou d’Elsa de Louis Aragon
La Presqu'île de Julien Gracq
Sur l'idée d'une communauté de solitaires de Pascal Quignard

— le vingtième — et je suis entré dans les octantes ! —

Vingt poèmes ?
Mais qu'est donc un poème ?
Sinon le singulier matériau d'une langue.

Ces vingt livres, m'ayant ouvert au-delà de leurs vingt titres, quasi l'œuvre entier de ces vingt poètes, philosophes, romanciers, essayistes, m'ont livré, les uns et les autres, à travers un vers, une strophe, un sonnet, quelques lignes, deux paragraphes, une page, dix pages, cent pages, l'entier de leurs chapitres, l'INDISPENSABLE de ma vie, pour mieux vivre le pays natal, l'océan et ses îles d'enfance, la langue et ma parole, la Femme, l'Autre, les compagnonnages, la guerre, les voyages et les îles aux rivages inconnus et encore et toujours l'AUTRE, dans les interrogations et la beauté, dans le retour de "tout l'avenir  au présent"**....

Et quand Char invite au désaccord pour les vingt textes, c'est qu'il me faudrait en citer et dix et vingt autres : d'abord des femmes, Sapho, Louise Labé, Marguerite Yourcenar,  Assia Djebar, Simone Weill, Barbara Cassin, toutes veilleuses au ventre libertaire ;  puis encore parcourant les temps de la langue, Jaufré Rudel, François Villon, Victor Segalen, Gaston Bachelard, Jorge Luis Borgès, Roland Barthes, Pierre Guyotat, Antonio Lobo Antunès, coups de boutoir dans les certitudes, soulèvements dans le morne des jours, irruptions incandescentes dans les ténèbres de la mort, apaisements sur les ravages des cruautés...


 

S'il leur plaît,
que les lectrices et lecteurs de ce blogue
répondent, Elles et Eux, 
à René CHAR !

Nous sommes au delà du temps.

 

Bibliothèque - copie.jpg

La Bibliothèque de René Char
Vieira da Silva

 

* G. L. M., trois initiales pour l'éditeur Guy Lévis Mano, imprimeur, éditeur, poète, qui imprima et édita quelques œuvres de René Char, comme Dehors la nuit est gouvernée précédé de Placard pour un chemin des écoliers ou Sur la Poésie 1936 - 1974
** Lettre de René Char à Albert Camus, le 4 octobre 1947.

                  

Lire la suite

vendredi, 11 août 2017 | Lien permanent | Commentaires (1)

René CHAR

René CHAR ...ou le combat avec l’Ange Aujourd’hui encore, à l’ouverture de ce livre, l’étonnement adolescent, la naïve lecture.... Toutes les lectures qui suivront lecture de ce livre, se tiendront entre cette déflagration que fut l’une des premières lignes lues

Si nous habitons un éclair, il est le cœur de l’éternel.
jusqu’au geste de se courber au plus ras de la terre
À partir de la courge, l’horizon s’élargit.
En avril 1955, depuis la découverte de Claudel, de Cadou, l'aventure de la poésie moderne me passionne ; à la librairie, je vais droit au rayon où s'alignent les "Seghers". Sous une couverture marron, le n°22 des Poètes d’aujourd’hui. Une photo du poète : un bel homme mûr au front large, tient “sa clope entre index et majeur”, il ressemble à mon père, c’est pour cette ressemblance et cette beauté que je prends le livre. C’est René Char ! Les premiers mots lus tiennent de l’aveuglement ; je n’y comprends rien, mais c’est beau. Beau à lire ! Ce qui peut paraître contradictoire avec l’aveuglement. medium_char.3.jpg Le livre, signé par Pierre Berger, le même qui rédigea “Robert Desnos”, s’annonce “essai”. Soit ! Un essai qui tient de l’hagiographie, long et lyrique commentaire du seul recueil, Feuillets d’Hypnos, qui, d'ailleurs, ne figurera pas dans “les œuvres choisies et textes inédits”, présentés à la fin du bouquin : Une incantation entre admonestations et objurgations. À l’instar de Char, mais pas du meilleur Char, écriraient les détracteurs et du poète et de l’essayiste. Écrit sans doute au début des années cinquante, il est marqué par l’effervescence inquiète qui suit la Libération : le monde rêvé des grands idéalistes est investi par les profiteurs de tous bords. Longtemps, cette introduction au poète me paraîtra aussi obscure, sinon plus, que le texte de Char lui-même. L’important pour le lecteur, ce sont les citations en italiques de l’essai - je lirai ainsi les Feuillets d’Hypnos. C’est le choix des œuvres et quelques inédits d’alors - jusqu’aux Matinaux inclus. Ce sont les photographies - Char avec ses amis de la Sorgue, avec les habitants de Céreste libéré, avec Camus. C’est un dessin d’Henri Matisse, laissant entrevoir les rapports intenses que le poète entretiendra avec les peintres , ses “alliés substantiels”. Ce sont les fac-similés des manuscrits - la graphie finement penchée et très lisible. La collection Poètes d’aujourd’hui, dans sa maquette et son appareil éditorial, offrait ainsi toute une culture du livre qu’ignorait trop souvent l’enseignement traditionnel de la littérature. Les quelques 120 pages du choix de textes vont être le seul viatique du jeune lecteur jusqu’en 1963, date d’acquisition de La parole en archipel, éditée en 1962. Cadou, c’était le Végétal, les vents humides, les nuits. Voici le Minéral, le solaire dans son écrasement, les aubes et les crépuscules. Tout s’annonce et s’assemble : la beauté, l’amour, la colère, la bonté, la philosophie, la cruauté, l’érotisme, la tendresse.... Les titres des recueils, des poèmes délivrent des aperçus. Pêle-mêle :
.... Arsenal, le Marteau sans maître, L’alouette, Robustes météores, Premières alluvions, Le poème pulvérisé, Le vitrail de Valensole, La révélée, La murmurée, La torche du prodigue, À une sérénité crispée, Le soleil des eaux, Affres détonation silence, Jacquemard et Julia; Dehors la nuit est gouvernée...
L’approche de cet homme, aujourd’hui encore, sera une lutte pour la compréhension, un corps à corps avec ses mots, avec ses images et mes propres émotions.
Salut, chasseur au carnier plat ! À toi, lecteur, d’établir les rapports. Merci, chasseur au carnier plat. À toi, rêveur, d’aplanir les rapports.
Ainsi sommé, le lecteur ne peut que continuer avec ce sentiment d’être sur l’arête extrêmement aiguë d’une crête à l’air raréfié. Il faudra beaucoup de jours, des expériences enfin vécues, des rencontres assumées, l’émotion forte d’un moment : s’éclaire alors le texte. Alchimie langagière entre le poème et ma vie.
medium_depadpic.jpg
dessin de Picasso pour le poème Dépendance de l'adieu
De suite, des évidences martelées qui haussent
Aptitude : porteur d’alluvions en flamme. Audace d’être un instant soi-même la forme accomplie du poème. Bien-être d’avoir entrevu scintiller la matière-émotion instantanément reine. Je ne plaisante pas avec les porcs.
La pensée sage est secouée à la découverte de ces aphorismes, si éloignés des sentences classiques. Et par delà Char, se découvrent ceux d’Héraclite où il affirme l’harmonie des contraires. Char va prolonger “la route qui monte, descend et est la même” de ce philosophe ancien dit “l’obscur” qui convoque les dieux au coin de son âtre. Char désigne, lui, l’humble carreau de la fenêtre :
Pures pluies, femmes attendues La face que vous essuyez, De verre voué aux tourments, Est la face du révolté ; L’autre, la vitre de l’heureux Frissonne devant le feu de bois. Je vous aime mystères jumeaux, Je touche à chacun de vous ; J’ai mal et je suis léger.
la tension de l'arc
L'obsession de la moisson et l'indifférence à l'Histoire sont les deux extrémités de mon arc.
la densité de la foudre
L'éclair me dure.
Héraclitéen, certes, dans l’usage terrien des mots et le concret des moments de vie. On peut aussi l’imaginer devisant dans le jardin d’Épicure : un René Char, philosophe en son jardin. Car il faut avoir longuement observé la terre et la rivière pour nommer le serpent, le lézard, le rouge-gorge, la truite,
Rives qui croulez en parure Afin de remplir tout le miroir Gravier où balbutie la barque Que le courant presse et retrousse, Herbe, herbe toujours étirée, Herbe, herbe jamais en répit, Que devient votre créature Dans les orages transparents Où son cœur la précipita ?
avoir quotidiennement surveillé la pousse des végétaux
Si les pommes de terre ne se reproduisent plus dans la terre, sur cette terre nous danserons. C’est notre droit et notre frivolité. On n’enfonce pas son pied dans la source Pour paraître l’égal de l’amandier ...Jadis l’herbe avait établi que la nuit vaut moins que son pouvoir, que les sources ne compliquent pas à plaisir leur parcours, que la graine qui s’agenouille est déjà à demi dans le bec de l’oiseau. Jadis terre et ciel se haïssaient, mais terre et ciel vivaient.... Salut, poussière mienne, salut d’avance, joyeuse, devant les pattes du scarabée.
Les premiers dialogues entre langue et peinture vont s’écrire dans la fréquentation de Corot, de Courbet, de Georges de la Tour ; Char a dit sa reconnaissance à ce dernier dont la reproduction du Prisonnier l’accompagna dans le maquis et par la suite, jusqu’au terme final. Il relate dans La Fontaine narrative une rencontre nocturne avec une inconnue alors qu’il vient d’achever un “poème qui (lui) a beaucoup coûté
Madeleine à la veilleuse
Je voudrais aujourd’hui que l’herbe fût blanche pour fouler l’évidence de vous voir souffrir : je ne regarderais pas sous votre main si jeune la forme dure, sans crépi de la mort. Un jour discrétionnaire, d’autres pourtant moins avides que moi, retireront votre chemise de toile, occuperont votre alcôve. Mais ils oublieront en partant de noyer la veilleuse et un peu d’huile se répandra par le poignard de la flamme sur l’impossible solution.
Dommage que les beautés obscures s'enlisent dans le bric-à-brac surréaliste, dans des pages aux pans aussi lisses que des parois à pic... Parfois, le lecteur doit-il craindre une incompréhension définitive ? À moins que.... Dans le tohu bohu surréaliste, l’hermétisme passait ; ce sera plus difficile quand, aux fureurs de jeunesse, s’ajouteront des préciosités et d’obscures, très obscures admonestations . Fallait-il absolument écrire et faire éditer tel ou tel recueil qui, pour n’être point trop mince, demandait des ajouts comme autant de quincailleries inutiles, qui trouent les derniers livres, pour vendre, pour vivre ? Et si peu d’humour ! Ne passons point sous silence ; cependant, allons au-delà. Il est de grands cris
Placard pour un chemin des écoliers
Enfants d’Espagne, — ROUGES, oh combien, à embuer pour toujours l’éclat d’acier qui vous déchiquète ; — À vous.
C’est écrit en mars 1937 Le Placard s’achève sur une tendre et grave balade, Compagnie de l'écolière
Je sais bien que les chemins marchent Plus vite que les écoliers Attelés à leur cartable Roulant dans la glu des fumées Où l'automne perd le souffle Jamais douce à vos sujets Est-ce vous que j'ai vue sourire Ma fille ma fille je tremble. N'aviez-vous donc pas méfiance De ce vagabond étranger Quand il enleva sa casquette Pour vous demander son chemin Vous n'avez pas paru surprise Vous vous êtes abordés comme coquelicot et blé Ma fille ma fille je tremble La fleur qu'il tient entre les dents Il pourrait la laisser tomber S'il consent à donner son nom À rendre l'épave à ses vagues Ensuite quelque aveux maudit Qui hanterait votre sommeil Parmi les ajoncs de son sang Ma fille ma fille je tremble Quand ce jeune homme s'éloigna Le soir mura votre visage Quand ce jeune homme s'éloigna Dos voûté front bas et mains vides Sous les osiers vous étiez grave Vous ne l'aviez jamais été Vous rendra-t-il votre beauté Ma fille ma fille je tremble La fleur qu'il gardait à la bouche Savez-vous ce qu'elle cachait Père un mal pur bordé de mouches Je l'ai voilé de ma pitié Mais ses yeux tenaient la promesse Que je me suis faite à moi même Je suis folle je suis nouvelle C'est vous mon père qui changez.
Il est vrai que dans le même Placard, il est des jouets étranges qui tiennent de la quincaillerie évoquée plus haut. Il nous faudra, avec Célia, six ans et Noémie, neuf ans, tenter à voix haute l'Exploit du cylindre à vapeur. N’y aurait-il qu’une lecture à sauver - le livre à emmener sur l’île déserte ? Ce sont les Feuillets d’Hypnos, les carnets de maquis, édités en 1946 - Char avait, de 1940 à 1944, décidé le silence - qui questionnent la nécessaire et juste violence, dont la concision devrait inspirer les plumitifs va-t'en guerre et autres guérilleros trop bavards.
medium_rene_char.3.jpg
couverture pour le cahier de L'Herne - 1971
Cet homme m’a aidé à me tenir debout.
Je rêve d’un pays festonné, bienveillant, irrité souvent par les travaux des sages en même temps qu’ému par le zèle de quelques dieux, aux abords des femmes Le 45e feuillet d’Hypnos.
Le post-scriptum qui aussi une brève (!) bibliographie et plus...
René CHAR, Œuvres complètes, introduction de Jean Roudaut, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard. • En Poésie/Gallimard, au moins neuf recueils. • Sur l'œuvre, depuis les années cinquante, beaucoup d’approches avec des visées très différentes : de Greta Rau (1957) à Paul Veyne (1990) en passant par............................etc. • Sur l'homme, une biographie récente de Laurent Greilsamer, L'éclair au front, chez Fayard, en 2004 L’ensemble peut - fera - l’objet d’une chronique ultérieure. Pourquoi pas ? • Pierre Boulez a composé des musiques sur le Marteau sans maître et le Soleil des eauxTerres mutilées, montages de textes, dits et chantés, par Hélène Martin. Mais, l’incontournable qui m’a ouvert les chemins de la poésie et de la littérature en tous ses états : • Georges MOUNIN, La communication poétique, précédé de Avez-vous lu Char ?, les Essais CXLV, NRF Gallimard, 1947, réédité en 1969. En espérant qu’il ne soit point épuisé. • La Toile se prête à la littérature aphoristique et au voisinage des poètes et des peintres : René Char se dissémine - se dissimule (!) - sur pas mal de sites, blogues et groupes de discussions. • Pour entendre Char dit par d’autres que par lui-même, un nom, un seul : Laurent TERZIEFF.

Lire la suite

mardi, 08 février 2005 | Lien permanent | Commentaires (2)

Paul ÉLUARD

Voici donc le numéro 1 de la collection Poètes d’aujourd’hui : une aventure éditoriale et une construction assez complexe avec deux coauteurs, Louis Parrot et Jean Marcenac. “C’est avec le livre consacré à Paul Éluard que naquit réellement la maison d’édition”. Pierre Seghers relate avec précision l’histoire de sa collection dans le n°164, Pierre Seghers par l’auteur, pages 56 et 57. Le texte de Parrot avec un choix de poèmes est achevé d’imprimer le 10 mai 1944. “Au plus noir de l’occupation”, Seghers annonce deux autres titres : Max Jacob, Aragon.

medium_eluard1.jpg
Cette aventure mérite d’être soulignée : la maquette est de Boris Lacroix - elle existait encore, au moins dans son format et son principe éditorial - présentation de l’auteur et choix de textes - jusqu’en 2003, Francis Ponge présenté par Sollers, par exemple. Ce jour, le format 135x160 semble avoir été abandonné au profit d’un 145x195, plus traditionnel et c’est le Jean Grosjean de Jean-Luc Maxence qui en fait les frais et/ou en bénéficie. Le conseiller de Seghers sera Paul Éluard lui-même : « Non pas une brochure, une plaquette. Mais un livre. Faites de vrais livres ! » Ce fut sans doute le premier livre de poche sur un poète et l’occupant était encore là. L’élaboration du bouquin dans la clandestinité justifie cette superposition de strates d'écrits : le texte de Louis Parrot en mai 1944, préfacé en mars 1945, postfacé en août 1948. Précédé par Parrot, Éluard meurt le 18 novembre 1952 . Seghers confie, de suite, à Jean Marcenac, la charge d’une nouvelle postface ; celui-ci reprend, en la commentant, une longue intervention - 45 pages -, Les progrès de l’espérance, écrite pour la revue Europe en avril 1950. Le choix des poèmes d’Éluard s’enrichit des dernières œuvres publiées et d’inédits. Qu’écrit Parrot ? Il réfute, dès les premières lignes, une présentation qui ne soit que critique et esthétique ; il affirme ne pas “vouloir expliquer” l’œuvre, mais “indiquer dans quelles conditions elle est née,... donner quelques précisions sur la vie de son auteur”. La biographie du poète devient aussi une approche de l’histoire du Surréalisme, des liens avec les peintres. Qu’écrit Marcenac ? La discrétion politique que montrait Parrot évoquant “ la vie publique du poète, au moment où il allait entreprendre ses longues et amicales tournées d’amabassadeur de la poésie nouvelle et des idées les plus généreuses en Grèce, en Yougoslavie, en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Italie” va laisser place à une entreprise de récupération, certes nuancée par la tristesse de la disparition récente et l’amitié désertée, mais noyée dans un pathos où se découvrent Orphée, les Argonautes, Byron, le soir de Grèce, le soleil de Chine, les dockers en lutte, les augmentations de salaire pour aboutir à cette extraordinaire “nouvelle qui passe en grandeur tout ce qui peut se rêver et nous apprend qu’en U.R.S.S., on envisage de ne plus vendre le pain, mais de le donner...” (sic), récupération à la gloire du Parti ! Le péan sera entonné, de la page 240 à 242, quand Éluard “avec les clairvoyance du génie,... était allé au communisme pour couronner par lui sa poésie et son génie, leur donner leur conclusion nécessaire, leur efficace plénitude, parce que le communisme est cette science du bonheur”. Suivent Lénine, MaÎakovski (!), Neruda, Aragon, les Congrès pour la paix et les fêtes anniversaires de Gogol et de Victor Hugo, célébrées à Moscou en 1952, où Éluard représente “le peuple français” ! Jean Marcenac fut un homme très respectable, militant communiste, poète engagé dans la Résistance, militant qui fut, je crois, journaliste à “l’Huma” et aux Lettres Françaises. Le portrait d’Éluard ci-contre est bien dans le ton du réalisme socialiste. L’ironie que peuvent laisser percer ici ces quelques lignes ne sont, sans nul doute, que l’amertume d’espoirs déçus dans un bien sombre magma. Et ce qu’avaient vécu de tels hommes était-il donc si atroce qu’ils fussent aveuglés dans leur rêve d’horizon ? Demeure la question sous-jacente à beaucoup de livres de la collection. Seghers fit-il le meilleur des choix en confiant le rôle de passeurs de poètes à d’autres poètes ? Certes, il “faisait” vivre et les uns et les autres. Mais... (lire le blogue de Florence Trocmé sur Perse et Bosquet et son commentaire ci-dessous, ajouté ce 2 mars). Le livre arrive à Bongouanou, accompagné de deux autres titres de la collection Arthur Rimbaud par Claude Edmonde Magny et Francis Jammes par Robert Mallet. Faut-il avouer qu’en mars 1957, je ne m’attarde guère aux écrits de présentation et autres "seuils" littéraires, comme écrirait Gérard Genette. Au poème même ! L’objectif de Seghers me comblait d’aise : “Sevré de contacts et d’informations... ni radios, ni T.V., ni bibliothèques ouvrant aux modernes leurs portes,” je me voyais offrir, au fin fond de ma brousse tropicale et coloniale, la possible lecture de poètes que je découvrais, pas "illuminé" comme certain(!) me qualifie, mais pour le moins émerveillé ! Ils me donnèrent quelques coups de pied au cul et soutinrent ma tentative d'auto-décolonisation. À petits pas, j’allais apprendre à fréquenter les rayons de librairies où je trouverais mes nourritures. Parce que, entre autres démarches de recherche, j’aurai appris à maîtriser les catalogues de certains éditeurs dans l’immense chambre de la concession scolaire d’une subdivision côte-d’ivoirienne. Retour à Paul Éluard. Comme certains, à l’image de Cadou, Desnos, Prévert, il est trop vite devenu le poète des livres de classe, des cours de collèges, des anthologies lycéennes et des “poèmes pour tous” à offrir aux jeunes mariés. Trop aisé à cerner, à définir, à classer dans une tradition À tel point que chez le lecteur, s’est souvent annoncée comme une usure du sens. Ainsi de ces métaphores populaires, telles "prairie émaillée de fleurs", "mon sang ne fit qu'un tour" et autres qui naquirent du génie inventif de la langue et ne sont plus que clichés éculés. Et pourtant
Bonne journée j’ai revu qui je n’oublie pas Qui je n’oublierai jamais Et des femmes fugaces dont les yeux Me faisaient une haie d’honneur Elles s’enveloppèrent dans leurs sourires Bonne journée j’ai vu mes amis sans soucis Les hommes ne pesaient pas lourd Un qui passait Son ombre changée en souris Fuyait dans le ruisseau J’ai vu le ciel très grand Le beau regard des gens privés de tout Plage distante où personne n’aborde Bonne journée journée qui commença mélancolique Noire sous les arbres verts Mais qui soudain trempée d’aurore M’entra dans le cœur par surprise. 16 mai 1936 Les yeux fertiles, 1936
Une cueillette dans Blason des fleurs et des fruits dédié à Jean Paulhan
À mi-chemin du fruit tendu Que l’aube entoure de chair jeune Abandonnée De lumière indéfinie La fleur ouvre ses portes d’or Rose pareille au parricide Descend de la toile du fond Et tout en flammes s’évapore Dahlia moulin foyer du vent..... Tulipe meurtrie de lune..... Colchique veilleuse nacrée... Marguerite l’écho faiblit Un sourire accueillant s’effeuille Goyave clou de la paresse Muguet l’orgueil du maître pauvre.... Dans le filet des violettesmedium_eluard3.jpg La fraise adore le soleil Glycine robe de fumée Œillet complice de la rue Digitale cristal soyeux Lilas lèvres multipliées Amarante hache repue Brugnon exilé jusqu’aux ongles Iris aux mains de la marée Passiflore livrée aux hommes Clématite jeunesse comble Chèvrefeuille biche au galop ...................................................... Fleurs récitantes passionnées Fruits confidents de la chaleur J’ai beau vous unir vous mêler Aux choses que je sais par cœur Je vous perds le temps est passé De penser en dehors des murs. Le livre ouvert II, 1947
Il faut cependant revenir à la Femme et à l’Avenir. L’amertume du lecteur n’a point éteint toute lueur dans le large de ce double horizon. Char, le copain d’Éluard, n’écrivait-il pas ! : « Il faut intarissablement se passionner. En dépit d’équivoques découragements et si minimes que soient les réparations. » (in À une sérénité crispée).
J'ai cru pouvoir briser la profondeur l'immensité Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges Comme un mort raisonnable qui a su mourir Un mort non couronné sinon de son néant Je me suis étendu sur les vagues absurdes Du poison absorbé par amour de la cendre La solitude m'a semblé plus vive que le sang Je voulais désunir la vie Je voulais partager la mort avec la mort Rendre mon cœur au vide et le vide à la vie Tout effacer qu'il n'y ait rien ni vitre ni buée Ni rien devant ni rien derrière rien entier J'avais éliminé l'hivernale ossature Du vœu de vivre qui s'annule. Tu es venue le feu s'est alors ranimé L'ombre a cédé le froid d'en bas s'est étoile Et la terre s'est recouverte De ta chair claire et je me suis senti léger Tu es venue la solitude était vaincue J'avais un guide sur la terre je savais Me diriger je me savais démesuré J'avançais je gagnais de l'espace et du temps J'allais vers toi j'allais sans fin vers la lumière Là vie avait un corps l'espoir tendait sa voile Le sommeil ruisselait de rêves et la nuit Promettait à l'aurore des regards confiants Les rayons de tes bras entrouvraient le brouillard Ta bouche était mouillée des premières rosées Le repos ébloui remplaçait la fatigue Et j'adorais l'amour comme à mes premiers jours.
medium_eluard4006.jpg
Les champs sont labourés les usines rayonnent Et le blé fait son nid dans une boule énorme La moisson la vendange ont des témoins sans nombre Rien n'est simple ni singulier La mer est dans les yeux du ciel ou de la nuit La forêt donne aux arbres la sécurité Et les murs des maisons ont une peau commune Et les routes toujours se croisent. Les hommes sont faits pour s'entendre Pour se comprendre pour s'aimer Ont des enfants qui deviendront pères des hommes Ont des enfants sans feu ni lieu Qui réinventeront les hommes Et la nature et leur patrie Celle de tous les hommes Celle de tous les temps.
La mort, l’amour, la vie Le Phénix, 1951 Pour conclure écrites avec André Breton, quelques lignes de L’Immaculée Conception ........................ medium_eluard4.jpg
32. Lorsque la vierge est renversée en arrière, le corps puissamment arqué et reposant sur le sol par les pieds et les mains, ou mieux par les pieds et la tête, l’homme étant à genoux, c’est l’aurore boréale. L’amour multiplie les problèmes. La liberté furieuse s’empare des amants les plus dévoués l’un à l’autre que l’espace à la poitrine de l’air. La femme garde toujours dans sa fenêtre la lumière de l’étoile, dans sa main la ligne de vie de son amant. L’étoile, dans la fenêtre, tourne lentement, y entre et en sort sans arrêt, le problème s’accomplit, la silhouette pâle de l’étoile dans la fenêtre a brûlé le rideau du jour. L’amour
L'Immaculée Conception, 1930.
Ce blogue du 1er mars consacré à Paul Éluard est dédié à Ch.A.A. qui y reconnaîtra peut-être la jeune lectrice... qu'elle est encore.
Post-blogue : Ne saisissez pas seulement "l'Immaculée Conception" dans Google. Vous auriez un afflux de pages sur une autre immaculée conception, guère plus vierge, en son avenir, que celle d'Éluard et de Breton !

Lire la suite

mardi, 01 mars 2005 | Lien permanent | Commentaires (1)

Page : 1