lundi, 27 mai 2013
Du sonnet, une brève bibliographie
• Jacques Roubaud, Soleil du soleil, Anthologie du sonnet français de Marot à Malherbe,
NRF Poésie/Gallimard, avril 1999.
L'incontournable, présentant la naissance du sonnet en France et son épanouissement dans une chronologie originale et efficace par son aspect critique. Pour ces sonnets en 380 pages, Roubaud les a choisis parmi 45 000.
• Alain NIDERST, La Poésie à l'âge baroque, Bouquins, éd. Robert Laffont, 2005.
Ce ne sont pas que des sonnets, mais beaucoup de beaux sonnets par de grands Baroqueux entre 1590 et 1660, ignorés, sinon méprisés par les lettrés de la culture dite classique
Une revue récente FORMULES - Le sonnet contemporain. Retours au sonnet.
Septembre 2007, ( http://www.formules.net/pdf/formules-12.pdf ), téléchargeable ici. Difficile de considérer cette forme comme une vieillerie.
• Et les Cent mille milliards de poèmes de Raymond Queneau, préfacés par François Le Lionnais, qui ne sont que 100.000.000.000.000...sonnets.
Je n'ai point négligé quelques-uns de mes vieux Classiques Larrousse avec de bonnes introductions de "prof's" sans doute aujourd'hui disparus, édités dans les années 30, réédités jusque dans les années 1950.
Ma mère me les avait précieusement conservés :
Œuvres choisies de Du Bellay, par Adrien Cart et Mlle M.-Th. Beynet, 15e édition,
Pages choisies de Nerval, par Gilbert Rougé, 3e édition,
Pages choisies de Baudelaire, par Adrien Cart et Mlle S. Hamel, 17e édition,
Verlaine et les poètes symbolistes, par Alexandre Micha, 17e édition.
RESPECT, comme disent les jeunes de ces temps-ci.
À remarquer que les deux demoiselles étaient professeurs dans l'Enseignement Primaire Supérieur. C'était vraiment le "supérieur" pour les classes populaires. Je me souviens qu'avant mon entrée en VIe, j'étais parvenu en 1ère année de Brevet Élémentaire. J'avais onze ans.
Merci à ma Mère qui quitta l'école des Sœurs à douze ans, ne passa donc point le Certificat d'Études, mais était, née en langue gallèse*, femme de belle goule et grand langage.
Et double respect à Melles Beynet et Hamel.
* Bref rappel : la langue gallèse était jadis le patois parlé en Haute-Bretagne, cette partie Est de l'Armorique ; naguère elle devint le dialecte gallo, du tronc linguistique des langues romanes, dites d'Oil ; aujourd'hui, c'est-à-dire depuis que nous avons une "délégation à la langue française et aux langues de France", elle est nommée "langue" et qualifiée "gallèse". Je n'ai pas encore découvert de sonnet dans la langue de ma mère.
Quelques sites sur la Toile dont un qui permet de défricher, Lexilogos.
17:53 Publié dans glane de sonnets | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 22 mai 2013
Récapitulons : le sonnet, c'est quoi ?
« Sonne-moy ces beaux sonnets, non moins docte que plaisante invention italienne, conforme de nom à l'ode, et différente d'elle seulement, pour ce que le sonnet a certains vers réglés et limités ; et l'ode peut courir par toutes manières de vers librement, voire en inventer à plaisir... Pour le sonnet doncques tu as Pétrarque et quelques modernes Italiens. Chante moy d'une musette bien résonnante et d'une flûte bien jointe ces plaisantes églogues rustiques, à l'exemple de Théocrite et Virgile, marines à l'exemple de Sennazar gentil homme Néapolitain.»
Joachim Du Bellay
Défense et IIlustration de la Langue Française
Livre I, IV
Selon le Trésor de la langue française informatisé
SONNET, subst. masc.
VERSIF. Poème de 14 vers, composé de 2 quatrains aux rimes embrassées, suivis de 2 tercets dont les 2 premières rimes sont identiques tandis que les 4 dernières sont embrassées (sonnet italien) ou croisées (sonnet français).
REM. Sonnettiste, subst. masc. Poète qui écrit des sonnets. De Heredia, ce sonnettiste inférieur à Soulary, lui fait des crasses (RENARD, Journal, 1899, p. 549).
Prononc. et Orth.: []. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1536 (Cl. MAROT, Sonnet à Madame de Ferrare [titre; comp. en Italie] ds Œuvres, éd. C. A. Mayer, t. 4, p. 267). Empr. à l'ital. sonetto, att. dep. le XIIIe s. (GUITTONE D'AREZZO; le genre a été inventé par G. da LENTINI dans la 1re moit. du XIIIe s.; v. DEI et U. RENDA, P. OPERTI, Dizionario storico della letteratura italiana, s.v. Lentini et Sonetto), lui-même empr. à l'a. prov. sonet « chanson, mélodie chantée » (2e moit. XIIe s., GUIRAUT DE BORNELH ds LEVY Prov.); cf. a. m. fr. sonet « id. », att. dep. ca 1200 (Aliscans, éd. E. Wienbeck, W. Hartnacke, P. Rasch, 8306), encore att. en 1570 (J. DORAT, Novem cantica de pace [...] Neuf Cantiques ou Sonetz de la paix [titre]), dér. de son « air de musique » (son2*). Le genre du sonnet a cependant été introd. en France sous l'infl. de Pétrarque, très à la mode à l'époque de la Renaissance.
Le sonnet, dans l'une des dispositions les plus classiques, se compose de deux quatrains aux rimes embrassées et répétées, et de 2 tercets sur 2 ou 3 rimes à disposition variable que l'on trouve parfois en un seul sizain ; les formes les plus courantes en français sont :
ABBA ABBA CCD EED
ou
ABBA ABBA CCD EDE
Cela s'écrit en octosyllabes, décasyllabes, alexandrins. Et plus tard en toute liberté d'une syllabe à plus de douze
La mise en valeur du dernier vers est appelé la chute du sonnet.
Jacques Roubaud dans son incontournable Anthologie du sonnet français de Marot à Malherbe reconnaît à la forme sonnet:
six caractères qui lui donnent une position exceptionnelle parmi les formes poétiques attestées.
1. Il s'agit d'une forme savante, écrite et récente.
2. Sa durée de vie est très grande. Les premiers sonnets datent du premier quart du XIIIe siècle. Il s'en compose encore aujourd'hui. C'est une forme poétique contemporaine.
3. Le sonnet est présent dans la tradition poétique d'un nombre considérable de langues. La forme sonnet n'est pas universelle, mais quasi universelle... *
4. Le sonnet a une qualité spectaculaire (par « qualité » je n'entends pas donner un jugement de valeur), qui apparaît pratiquement : une immense productivité. On peut désigner ce trait comme un pouvoir multiplicateur. Il s'est écrit beaucoup, énormément de sonnets... Et ce pouvoir de multiplication semble récurrent, presque indépendant des époques et des lieux.
5. Le sonnet a ceci de remarquable qu'il a été composé dans cette forme certains des poèmes considérés comme les plus beaux de la poésie universelle. Il n'est pas possible de ne pas tenir compte du fait esthétique dans une discussion de la forme. La forme sonnet est une forme poétique de valeur exceptionnelle. Dans leurs langues respectives, certains sonnets comptent parmi les monuments les plus élevés de l'art de poésie. Ce trait est un trait de reconnaissance...
6. Dernier caractère : un mystère formel. Le sonnet est presque toujours présenté comme une forme fixe, étroitement contrainte. Cela est vrai à tout moment de son histoire et de ses migrations. Ce caractère est tantôt mis à son crédit, fait partie de son prestige, tantôt au contraire lui est reproché, le discrédite. Il est indéniable que, de siècle en siècle, et de langue à langue, les sonnets conservent un air de parenté (et la même désignation).
Pour clore, de celui qui est à l'ouverture de cette note, un sonnet à la forme rigoureuse et ajoutant la beauté formelle et les vertus de et l'élégie et de la satire au "vertige de la liste".
Sans oublier que le sonnet vient de "sonare", chanter, et qu'à défaut de chanter, il est fort agréable de se le "mettre en goule"
Ceulx qui sont amoureux, leurs amours chanteront,
Ceulx qui ayment l’honneur, chanteront de la gloire
Ceulx qui sont pres du Roy, publiront sa victoire
Ceulx qui sont courtisans, leurs faveurs vanteront
Ceulx qui ayment les arts, les sciences diront
Ceulx qui sont vertueux, pour tels se feront croire
Ceulx qui ayment le vin, deviseront de boire
Ceulx qui sont de loisir, de fables escriront
Ceulx qui sont mesdisans, se plairont à mesdire
Ceulx qui sont moins fascheux, diront des mots pour rire
Ceulx qui sont plus vaillans, vanteront leur valeur
Ceulx qui se plaisent trop, chanteront leur louange
Ceulx qui veulent flater, feront d’un diable un ange
Moy, qui suis malheureux, je plaindray mon malheur.
Joachim Du Bellay
Les Regrets, V
*Dans les notes précédentes, quand s'est relancé l'intérêt du blogueur pour le sonnet : Michel-Ange, Shakespeare, Lorca, Rilke.
19:55 Publié dans Du Bellay mon voisin, glane de sonnets, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (3)
vendredi, 17 mai 2013
un dernier faux sonnet, celui de René Guy Cadou
Naguère — c'était à Nantes en 1999 — lors d'un colloque sur René Guy Cadou, un poète dans le siècle, Paule Plouvier, une universitaire de Montpellier III, présenta sa contribution sous le titre suivant Cadou, Char, alliances secrètes.
Belle audace !
En quarante-quatre ans de lecture de l'un et de l'autre, je n'avais jamais imaginé possibles ces alliances, tant les deux René étaient en moi, leur liseur, l'harmonie des contraires.
Paule Louvier les lient par l'enracinement dans leurs contrées natales, la terre provençale et le paysage nantais, baignées par leurs lumières singulières, habitées par leurs bestiaires et leurs propres floraisons végétales, mais contrées cependant "qui ouvrent à l'universel car ce sont (elles) qui, en modelant une sensibilité, permettent au sujet de forer au plus profond d'une recherche de la parole juste, susceptible de témoigner de la vérité de l'homme.."
J'y ajouterai les liens de l'amitié qui enlacent les recueils de l'un et l'autre et c'est ainsi que je parviens à l'un des rares textes de Cadou qui rejoint la forme de Remise, quand, en quatorze vers, Cadou, l'élégiaque au bord des larmes, évoque une soirée de solitude.
LA SOIRÉE DE DÉCEMBRE
Amis pleins de rumeurs où êtes-vous ce soir
Dans quel coin de ma vie longtemps désaffecté?
Oh! je voudrais pouvoir sans bruit vous faire entendre
Ce minutieux mouvement d'herbe de mes mains
Cherchant vos mains parmi l'opaque sous l'eau plate
D'une journée, le long des rives du destin!
Qu'ai-je fait pour vous retenir quand vous étiez
Dans les mornes eaux de ma tristesse, ensablés
Dans ce bief de douceur où rien ne compte plus
Que quelques gouttes d'une pluie très pure comme les larmes ?
Pardonnez-moi de vous aimer à travers moi
De vous perdre sans cesse dans la foule
O crieurs de journaux intimes, seuls prophètes
Seuls amis en ce monde et ailleurs!
René Guy CADOU
Hélène ou le Règne végétal (1950)
Ces trois notes sont à l'adresse de certain(e)s
qui hantent les parages de ce blogue
et cheminent depuis longtemps parfois
en forant à la recherche de la juste parole,
dans les textes de Michaux, de Char, de Cadou.
« ...seuls prophètes, Seuls amis...»
Je pense à l'un d'entre eux qui, l'hiver 2008,
m'adressa en commentaire cette Soirée de Décembre.
Mais dieux, c'est quoi un Sonnet ?
18:56 Publié dans Cadou toujours, Char à nos côtés, glane de sonnets, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (1)
mercredi, 15 mai 2013
le faux sonnet de René Char
Ce n'est toujours pas un sonnet, mais les quatorze vers y sont, leur métrique est, pour la plupart d'entre eux, proche de l'alexandrin : douze pieds, — syllabes, disent désormais certains puristes. C'est un texte encore dans la quincaillerie surréaliste,— Char s'est récemmment séparé du mouvement, mais ne renie point son appartenance passée — avec des images superbes et un hermétisme certain, cette obscurité héraclitéenne, souvent revendiquée.
Le titre est, comme souvent chez Char en rapport subtil avec le texte, et même avec le recueil, Dehors la nuit est gouvernée. Il est le pénultième d'une mince brochure, parue en 1938, imprimée et rééditée bellement en 1949 par Guy Lévis Mano, augmentée d'un Placard pour un chemin des écoliers, dédié aux enfants d'Espagne.
Naguère, le lecteur était nu devant un tel écrit. C'était peut-être aussi bien pour la saisie émotionnelle. Désormais, les biographes se sont emparé du quotidien, jusqu'au plus trivial.
Entre 1936 et 1938, c'est la la guerre d'Espagne, c'est le bond social et ambivalent du Front Populaire, c'est dans l'intime du poète une maladie grave et des soucis avec l'artisanat familial, c'est le pressentiment de ces annnées si sombres qui adviennent.
Les textes, hors Une Italienne de Corot et les casseurs de cailloux de Courbet, sont amers, tourmentés. Dans l'introduction qu'il écrit en 1948, Char le reconnaît :« J'étais parvenu à cette époque, avec mon tourment, sur ces crêtes où hauteur et profondeur n'échangent plus leur différence, sont inexorablement étales. »
Remise est donc bien le lieu écrit où, après un long et tortueux périple, on "laisse filer les guides" dans l'apaisement de la plaine et le lecteur crée le lien avec le premier vers.
La sérénité et la chaleur du compagnonnage sont retrouvées quoique demeurent les images menaçantes de dangers qui exigent vigilance et attention. D'un vers à son suivant, on mesure cette nécessité de l'alliance des contraires d'où surgit la beauté du texte.
REMISE
Laissez filer les guides maintenant c'est la plaine
Il gèle à la frontière chaque branche l'indique
Un tournant va surgir prompt comme une fumée
Où flottera bonjour arqué comme une écharde
L'angoisse de faiblir sous l'écorce respire
Le couvert sera mis autour de la margelle
Des êtres bienveillants se porteront vers nous
La main à votre front sera froide d'étoiles
Et pas un souvenir de couteau sur les herbes
Non le bruit de l'oubli là serait tel
Qu'il corromprait la vertu du sang et de la cendre
Ligués à mon chevet contre la pauvreté
Qui n'entend que son pas n'admire que sa vue
Dans l'eau morte de son ombre.
René CHAR
Dehors la nuit est gouvernée, 1938
Les cinq derniers vers me sont indéchiffrables. Je n'ai comme seul recours à une amorce de compréhension que ce dicton Halpulaar que je tiens d'un sage très âgé du village de Sébou sur les rives du fleuve Sénégal :
Les yeux voient ce qu'ils ne veulent pas voir, mais les pieds ne vont que là où ils veulent aller.
Mais là, ne se rapproche-t-on pas plus de Michaux ?
Et Remise n'était donc point un sonnet. Par contre, dans Placard pour un chemin des écoliers, Char se rapproche de François Villon et d'un genre très ancien de notre langue, il écrit une très belle ballade, Compagnie de l'écolière.
* Remise (in Trésor de la langue française informatisé)
1. Vieilli. Local couvert destiné à abriter des véhicules. Synon. entrepôt, garage, hangar. Les remises à voitures sont toujours rectangulaires; les remises à machines sont, ou rectangulaires, ou en forme de secteur de cercle, ou entièrement circulaires (BRICKA, Cours ch. de fer, t. 1, 1894, pp. 253-254). J'avais une chambre à moi; elle donnait sur la cour, face au bûcher, à la buanderie, à la remise qui enfermait, périmées comme d'anciens carrosses, une victoria et une berline (BEAUVOIR, Mém. j. fille, 1958, p. 82).
2. Dépendance, local où sont rangés des instruments, des objets. Remise aux outils. L'atelier de Labanne était si rempli de livres qu'on eût dit une remise de bouquiniste (A. FRANCE, Chat maigre, 1879, p. 217).
12:30 Publié dans Char à nos côtés, glane de sonnets, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (0)
lundi, 13 mai 2013
...ne furent point "sonnettiers"
Je le regrette. Les trois hommes, René Guy Cadou, René Char, Henri Michaux, qui m'ouvrirent, dans les années cinquante, à la poésie contemporaine d'alors n'écrivirent pas un sonnet, ce poème en 14 vers —de la monosyllabe à l'alexandrin, répartis en 2 quatrains et et 2 tercets aux rimes alternées ou embrassées
J'ai tenté avec le seul critère des quatorze vers de lire — élire — quelques rares textes de ces trois poètes qui, en vers libres et sans rimes, approchaient au plus près ce qu'est le sonnet.
Mais déjà, le premier d'entre les trois s'écartait de la règle des quatorze vers. La parole à Michaux.
EMPORTEZ-MOI
Emportez-moi dans une caravelle,
Dans une vieille et douce caravelle,
Dans l'étrave, ou si l'on veut, dans l'écume,
Et perdez-moi, au loin, au loin.
Dans l'attelage d'un autre âge.
Dans le velours trompeur de la neige.
Dans l'haleine de quelques chiens réunis.
Dans la troupe exténuée des feuilles mortes.
Emportez-moi sans me briser, dans les baisers,
Dans les poitrines qui se soulèvent et respirent,
Sur les tapis des paumes et leur sourire,
Dans les corridors des os longs, et des articulations.
Emportez-moi, ou plutôt enfouissez-moi.
Henri MICHAUX
Mes Propriétés, 1929
L'ouverture au premier quatrain est une poignante élégie océane. Supplique adressée à ces divinités que par défaut nous nous inventons pour pallier les cieux désertiques.
Le quatrain suivant, Michaux revient à la terre invoquant en lieux de perte le minéral, l'animal et le végétal.
Faut-il pressentir l'amour — d'aucuns l'avancent — dans le dernier, comme une infinie douceur, précédant la dureté et le glissement rugueux dans les "lointains intérieurs" et ce que j'entends comme un cri exigeant l'ultime délivrance :
ou plutôt enfouissez-moi.
Ce presque sonnet rejoint ou annonce le lyrisme désespéré de Nausée ou c'est la mort qui vient, d'Amours, du Repos dans le malheur, de Sur le chemin de la mort, Dans la nuit et de Ma vie.
La révolte et ses contres, l'humour et ses rires ravageurs sont proches. Que se méfient les dieux et le Roi ! Dans Face aux verrous, sans implorer, sans supplier, il écrira :
Assez. J'ai passeport pour aller demain de par les mondes.
Adieux d'Anhimaharua.
Henri Michaux s'immobilisera enfin, le 19 octobre 1984. Incinéré avec quelque retard* : le crématorium du Père-Lachaise était en panne ! Même sans sonnet, Monsieur PLUME sera donc toujours parmi nous. Et sur ma table de lecture.
*Lu dans l'épaisse et très bonne biographie Henri MICHAUX, par Jean-Pierre Martin, Biographies, nrf, Gallimard, octobre 2003.
11:21 Publié dans Cadou toujours, Char à nos côtés, glane de sonnets, "Poètes, vos papiers !" | Lien permanent | Commentaires (0)
mercredi, 01 mai 2013
honnir, non la chose, mais le mot
Le 1er Mai, le travailleur chôme, le travailleur défile, le travailleur jardine. La travailleuse souvent cuisine. Et tant d'autres travailleuses et travailleurs travaillent
Mais que fait le sonnettiste sinon fabriquer un sonnet !
C'est un artiste. Comme le violoniste, le pianiste, le flûtiste, le contrebassiste. Ce n'est point un "sonneteur", un "sonnettailleur. Ni un "sonnettier" dont le mot affirmerait pourtant le métier, comme bonnetier, bourrelier, charpentier, éclusier, gabier, marinier. Et si joli serait le nom de la "sonnetière", comme le fut la Belle Cordière.
Vu le soin ménager, dont travaillé je suis,
Vu l'importun souci, qui sans fin me tourmente,
Et vu tant de regrets, desquels je me lamente,
Tu t'ébahis souvent comment chanter je puis.
Je ne chante, Magny, je pleure mes ennuis :
Ou, pour le dire mieux, en pleurant je les chante,
Si bien qu'en les chantant, souvent je les enchante
Voilà pourquoi, Magny, je chante jours et nuits.
Ainsi chante l'ouvrier en faisant son ouvrage,
Ainsi le laboureur faisant son labourage,
Ainsi le pèlerin regrettant sa maison,
Ainsi l'aventurier en songeant à sa dame,
Ainsi le marinier en tirant à la rame,
Ainsi le prisonnier maudissant sa prison.
Joachim Du Bellay
Les Regrets, XII
09:14 | Lien permanent | Commentaires (0)