jeudi, 05 octobre 2006
Chronique portuaire de Nantes XXIV
Au XVIIe Siècle
1624. — PROLONGEMENT DU QUAI DE LA FOSSE.
En 1622, la Municipalité de Nantes avait fait marché pour la construction d'un nouveau quai à la Fosse, et cent-vingt-sept toises avaient été adjugées à 7 livres la toise ; en 1624, ce quai fut prolongé de 200 toises.
La Ville profita de ce travail pour faire curer les ports de la rivière obstrués par les sables. Tous les mendiants valides y furent employés à raison de 6 sous par jour pour les hommes et 4 sous pour les femmes et les enfants ; les sables et les vases recueillis par deux grandes gabares étaient ensuite étendus sur les quais et les places publiques pour les exhausser (1).
1625. — ARMEMENT DES NAVIRES FLAMANDS.
Le 30 janvier 1625, un arrêté du Bureau de Ville ordonnait d'armer en guerre les navires flamands qui se trouvaient dans le port, et de leur permis de remonter la rivière (2).
Nantes entretenait alors avec les Flamands et les Hollandais un commerce très actif, et leurs « hourques » pesamment chargées déposaient sur nos quais des épiceries de toutes sortes et des poissons salés, pour remporter du vin d'Orléans, du brande-vin de Blois et des « clincailleries ».
1626. — ORIGINE DE LA COMPAGNIE DES INDES.
Lors de son passage à Nantes, en juillet 1626, Louis XIII approuva le projet de Richelieu de fonder par toute la France une grande Compagnie commerciale destinée à développer le commerce maritime. Cette Compagnie, que le ministre appelait du nom bizarre de Compagnie de la nacelle de Saint-Pierre fleurdelisée, devint en 1644 la Compagnie des Indes (3).
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(1) MEURET, Annales de Nantes, t. II, pp. 176-7.
MELLINET, La Commune et la Milice de Nantes, 1.1, p. 277.
(2) TRAVERS, Histoire de Nantes, t. III, p. 249.
(3) RENOUL, Le Tribunal consulaire à Nantes, pp. 104-116.
L. GUÉRIN, Histoire maritime de ta France, t. II, p. 409.
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mercredi, 04 octobre 2006
retour à plus de sérieux
Le guain de notre estude, c'est en estre devenu meilleur et plus sage.
Montaigne,
lettre à Diane de Foix, I, 26
Ce matin, "rentrée des classes" pour celles et ceux que notre société effrénée de travail nomme les "inactifs".
Aux Chantiers, inscription pour l'année 2006-2007, comme une joyeuse émulation, dans ces corps aux marques bien affirmées de l'avancée en âge, qui se croisent, se reconnaissent.
Nicléane a pris les Traditions de sagesse et la Révolution française, j'ai accumulé le Grec ancien, où conscient de mon laxisme en grammaire, je me suis rétrogradé en seconde année, des Jalons pour une éthique, une initiation à Linux — la nique à Bill Gates et Steve Jobs — et une approche du système colonial : fondements, mythes, ambitions, réalites, manière de me faire "gratter la couenne" de mon histoire africaine personnelle — je pressens quelques grognes et rognes !
Mais cet après-midi, je m'en vais jouer au "conteur", alors que j'ai toujours refusé lors de mon compagnonnage avec Jaulin, Pottier, Berthet et autres Desprez de me mettre en cette posture.
C'est à propos du film "Le vieil homme et la mer" et les filles de CinéMioches m'ont sollicité : je leur ai affirmé que je ne contais point, mais que je pouvais peut-être dire des histoires de mer.
Ça me va mieux, les gens de mer ne sont point conteurs, ils tiennent leur livre de bord et racontent, non ce qu'ils auraient inventé en regardant l'océan, mais ce qu'ils ont affronté sur la "peau du diable" de celui-ci.
J'ai décidé de parler des grands ancêtres — pêle-mêle et... dans l'ordre - de Jason, d'Ulysse, de Brandan, d'évoquer d'autres moins connus : Jeanne de Belleville, Alvize Ca'da Mosto, Fridtjof Nansen, Charcot, d'autres plus contemporains, Le Toumelin ou Moitessier, Tabarly ou la petite — et très grande — Ellen MacArthur..
Que les Mioches aient quelques repaires pour lire des livres, des bandes dessinées, pour voir d'autres films et même des feuilletons télévisés, pour aller contempler les étoiles et rêver sur les quais du port.
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lundi, 02 octobre 2006
l'une pisse, l'autre chie... et c'est beau !
Plus poliment :
« L'une urine, l'autre défèque », mais c'est moins beau !
En me préparant à suivre un atelier de quatre soirées autour de Pascal Quignard, au Lieu Unique* — un peu pour apprendre et beaucoup pour échanger —, j'ai rouvert La Frontière. Il me fut aisé de faire remonter à ma mémoire un autre auteur, deux peintres et une photographe.
Je ne commente point. Cependant, cet moment trivial dans l'un et l'autre récit est un événement fondateur qui détermine le parcours à venir du héros, sinon de l'héroïne !
Le hasard voulut qu’il vit une jeune femme qui s’approchait en hâte dans l’obscurité. Monsieur de Jaume se cacha aussitôt derrière un grand camélia.
La femme s’approcha des feuillages d’un laurier et s’accroupit soudain dans un grand bruit de jupes froissées. Elle tourna un visage anxieux vers la façade intérieure du palais et Monsieur de Jaume reconnut aussitôt que c'était Mademoiselle d'Alcobaça qui s'était accroupie.
Elle releva davantage ses jupes en poussant un soupir.
Le visage de Mademoiselle d'Alcobaça rayonnait. Les seins et le front rond étaient dorés. Les cheveux noirs se répandaient sur ses épaules et se relevaient ensuite vers le cercle de perles blanches qui les retenaient. Ses lèvres étaient deux taches de rouge et formaient elles-mêmes un arc de cercle tandis qu'elle poussait une part d'elle qui retombait sur la terre.
Monsieur de Jaume resta dans l'ombre du camélia alors que Mademoiselle d'Alcobaça se redressait et rajustait l'apparence de sa robe. Son esprit ne put plus se défaire de ce spectacle qu'il avait surpris. Il prit conscience que la petite enfant qu'il avait connue était devenue une femme, que ses fesses étaient très belles et robustes et qu'il la désirait.
Pascal Quignard, La Frontière, 1992
J'entendis venir de loin une voiture lourde, à petit train ; je me cachai et me tins coi : le plein soleil frappait la route et j'étais là dans l'ombre à regarder cette route au soleil, pas plus haut que la terre, invisible. A dix pas de moi et de mes porcs dans la lumière de l'été un carrosse s'arrêta, peint, chiffré, avec des bandes d'azur ; de cette caisse armoriée jaillit une fille très parée qui riait, elle courut comme vers moi ; elle m’offrit ses dents blanches, la fougue de ses yeux ; toujours riant elle se suspendit à la limite de l'ombre, résolument me tourna le dos, un interminable instant elle se campa dans ce soleil marbré de feuilles où flambèrent ses cheveux, ses jupes d'azur énorme, le blanc de ses mains et l'or de ses poignets, et quand dans un rêve ces mains se portèrent à ses jupes et les levèrent, les cuisses et les fesses prodigieuses me furent données, comme si c'était du jour, mais un jour plus épais ; brutalement tout cela s'accroupit et pissa. Je tremblais. Le jet d'or au soleil sombrement tombait, faisait un trou dans la mousse. La fille ne riait plus, tout occupée à serrer haut ses jupes et sentir d'elle s'évader cette lumière brusque ; la tête un peu penchée, inerte, elle considérait le trou que cela fait dans l'herbe. La défroque d'azur lui bouffait à la nuque, craquante, gonflée, avec extravagance offrant les reins. Dans le carrosse, dont la porte peinte battait encore un peu tant la pisseuse l'avait allègrement poussée, il y avait un homme accoudé, en pourpoint de soie défait, qui la regardait. Il avait autant de dentelles à son col qu'elle en avait aux fesses...
Pierre Michon, Le Roi du bois, 1996
Le premier tableau est de Rembrandt,
la photographie de Sophy Rickett — elle fut exposée, il y a quelques années, au Musée des Beaux-Arts de Nantes —, (je la pose là, comme un contre-point ),
le second tableau est de Picasso.
* Les cours de l'Université Pop'littérature seront diffusés sur la radio web de France Cul, dans "Les sentiers de la création".
Les ateliers autour de Quignard auront lieu les 11,18, 25 octobre et 8 novembre 2006.
13:30 Publié dans les autres... arts, les lectures, quelquefois Quignard | Lien permanent | Commentaires (1)