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samedi, 28 août 2010

après les bornes, les stèles et autres repères, ... les livres...

Après avoir appeler — crier ? — à la dispersion — à l'abolition ? — de tous repères et limites des territoires de l'homme, voici que Perse demande l'éventement de toutes les poussières — pruine, poudre, loess, fard, cendres, squames — en introduisant dans la « Basilique du Livre », « un homme de peu de nom », qui vient rire — ricaner ? —.

Et que les vents donc envoient aux quatre horizons toute la quincaillerie des livres, « le fonds de commerce de la boutique à comprendre », écrira Claudel.

L'auteur ? l'éditeur ? le libraire ? le bibliothécaire ? le critique ? le liseur ? le blogueur ? tous et tout ?

 

Tout à reprendre. Tout à redire. Et la faux du
regard sur tout l'avoir menée !

Un homme s'en vint rire aux galeries de pierre
des Bibliothécaires. — Basilique du Livre!...
Un homme aux rampes de sardoine, sous les prérogatives
du bronze et de l'albâtre. Homme de peu de nom.
Qui était-il, qui n'était-il pas?

Et les murs sont d'agate où se lustrent les lampes,
l'homme tête nue et les mains lisses dans les
carrières de marbre jaune — où sont les livres au
sérail, où sont les livres dans leurs niches, comme jadis.
sous bandelettes, les bêtes de paille dans leurs jarres,
aux chambres closes des grands Temples — les livres
tristes, innombrables, par hautes couches crétacées
portant créance et sédiment dans la montée du temps.

Et les murs sont d'agate où s'illustrent les lampes.
Hauts murs polis par le silence et par la science,
et par la nuit des lampes. Silence et silencieux offices.
Prêtres et prêtrise. Sérapéum!

A quelles fêtes du Printemps vert nous faudra-t-il
laver ce doigt souillé aux poudres des archives
— dans cette pruine de vieillesse, dans tout ce fard
de Reines mortes, de flamines — comme aux gise-
ments des villes saintes de poterie blanche, mortes
de trop de lune et d'attrition?

Ha! qu'on m'évente tout ce lœss! Ha! qu'on m'évente tout ce leurre!
Sécheresse et supercherie d'autels...
Les livres tristes, innombrables, sur leur tranche de craie pâle...

Et qu'est-ce encore, à mon doigt d'os, que tout
ce talc d'usure et de sagesse, et tout cet attouchement
des poudres du savoir? comme aux fins de saison
poussière et poudre de pollen, spores et sporules de
lichen, un émiettement d'ailes de piérides, d'écailles
aux volves des lactaires... toutes choses faveuses à la
limite de l'infime, dépôts d'abimes sur leurs fèces,
limons et lies à bout d'avilissement — cendres et
squames de l'esprit.

 

Vents, I, 4.


 

« La littérature, je n'en suis pas » proclamait l'ancien diplomate, au moment où il s'autopubliait en Pléiade (1972) après avoir accepté en 1960 le Nobel de ... littérature.

Bon ! cette affirmation qui n'est pas dans Vents n'est sans doute qu'une hyperbole.

 

Il n'empêche que je me rêverais bien devant nombre de bouquins en cet homme de peu de nom, qui s'en vint rire aux galeries de pierre des Bibliothécaires.

 

Mais !

Mais n'oublions point qu'ensuite, il nous faudra nous laver ce doigt d'os ! Et continuer de lire ce qui advient à la page suivante :

 

Que si la source vient à manquer d'une plus haute connaissance,

L'on fasse coucher nue....


 

Post-scriptum : Lire Saint-John Perse, c'est accroître, quasi à chaque page, son vocabulaire en botanique, biologie, mythologie, géologie !


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