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vendredi, 10 octobre 2008

ce Nobel, un peu "téléphoné", non ?

La semaine dernière, un entretien avec Garcin dans le Nouvel Obs et en baie de Douarnenez, un "7 à 9" avec Ali Baddou et sa fine équipe, mercredi matin et hier au soir, le Prix. Certes, on savait Le Clézio "nobélisable", mais le hasard médiatique a trop bien fait les choses.
Ce qui m'a paru intéressant, c'est le contenu de la revue de presse internationale de ce matin, sur France Cul. Pourra-t-on écrire plus juste sur le "saint" de notre appareil littéraire, ainsi qualifié par Sollers, ce vieux "satan" — Lévy et Houellebecq n'étant, en ces jours d'effervescence éditoriale, que des "diablotins" ?

Après Désert, j'ai rouvert le dernier qui me chamboula l'âme, et pour cause, il me renvoyait à ces années côte-d'ivoiriennes, quand je descendais le soir, au bord de l'étang derrière la concession de l'école, pour me baigner parmi les nudités éclatantes des filles du Moronou.

Les jeunes filles étaient très belles, longues, étincelantes dans l'eau de la rivière. Il y avait une femme étrange que Bony emmenait (Fintan) voir, chaque fois, à travers les roseaux. La première fois qu'il l'avait vue, c'était peu de temps après son arrivée, il pleuvait encore. Elle n'était pas avec les autres filles, mais un peu à l'écart, elle se baignait dans la rivière.
Elle avait un visage d'enfant, très lisse, mais son corps et ses seins étaient ceux d'une femme. Ses cheveux étaient serrés dans un foulard rouge, elle portait un collier de cauris autour du cou. Les autres filles et les enfants se moquaient d'elle, ils lui jetaient de petites pierres, des noyaux. Ils avaient peur d'elle. Elle n'était de nulle part, elle était arrivée un jour, à bord d'une pirogue qui venait du sud, et elle était restée. Elle s'appelait Oya.
Elle était nue au milieu de la rivière. Elle se lavait, elle lavait ses vêtements. Le cœur de Fintan battait fort, pendant qu'il la regardait à travers les roseaux. Bony était devant lui, pareil à un chat à l'affût.
Ici, au milieu de l'eau, Oya n'avait pas l'air de la folle à qui les enfants jetaient des noyaux. Elle était belle, son corps brillait dans la lumière, ses seins étaient gonflés comme ceux d'une vraie femme. Elle tournait vers eux son visage lisse, aux yeux allongés. Peut-être qu'elle savait qu'ils étaient là, cachés dans les roseaux. Elle était la déesse noire qui avait traversé le désert, celle qui régnait sur le fleuve.


De Onitsha
J.M.G. LE CLÉZIO.


Plus de cinquante ans ! Et c'est encore hier.
Je n'en étais point à l'ère du post-exotisme ; l'Afrique me façonnait dans la sensualité et la rudesse.

Décidément, il m'est très bon de relire de grands romans.

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