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vendredi, 17 février 2006

@nonym@t, auteur et justice

Entre deux épopées - l’Anabase et la Chanson de Roland - trois heures de vacance sur les quais et dans les rues de ma ville.

Il y a longtemps que je n’étais pas entré dans une salle d’Assises. Vieille habitude prise depuis le temps quand je passais enfant devant l’ancien palais de justice et que j’étais révolté- je le suis encore - quand je voyais passer un homme menotté entre deux gendarmes. Dès que mon statut de citoyen - avoir vingt-et-un ans - m’a autorisé à entrer dans un prétoire, j’ai usé de ce droit pour aller voir et entendre comment siègeait la Justice, souvent aveugle et surtout hautaine et si sûre de son droit.
Je n’ai aucune indulgence pour les salauds, j’aurais même quelque conviction intime, non avouée à ce jour, pour le talion...
Mais cette morgue justicière me fait dresser le poil.

Hier jeudi, on y jugeait un pauvre mec, violeur “assoiffé de tendresse”, plaidera son avocat - ce qui est fort plausible. Cependant, deux jeunes femmes violentées aux aurores : il devait y avoir des pulsions de prédateur, chez ce tendre ! Douze ans, c’est toujours trop ou trop peu !
Je suis resté assis quand la “Cour” est sortie du prétoire. Ça m’emmerde cette révérence pour les gens de Robe.
Je me sens toujours blessé quand il est ordonné au prévenu, même coupable avéré, de se lever pour qu’il parle ou entende, ultime humiliation du pécheur qu’on ne met plus à genoux, certes.
Donc je laisse mon cul rivé au banc inconfortable dont Jean Nouvelle a doté son “juste” et noir palais de justice. La vision du “menotté” de mon enfance, sans doute.
Dans les temples, je demeure désormais assis aussi pour la proclamation de la parole de dieu.
Je ne hausse mon cul que pour les dames et l’amitié !

Chez Hebken, repas de galettes, un vrai avec deux paires au beurre et une grande bolée de lait ribot.

Entre deux grains - dans le front froid d’une belle et bien large dépression atlantique, c’est si rare en cet hiver - retour aux Chantiers pour “Les grands textes du Moyen-Âge”.
C’est moins pour la gymnastique des mots et du dictionnaire - le grec ancien amplement me suffit - que pour éclairer et des connaissances confuses sur cette ère et le comment du glissement de l’anonymat des scripteurs et autres copistes à la naissance de l’AUTEUR - j’eusse préféré une fausse couche - que je me suis inscrit à cet atelier.
Le retour à l’@nonym@t sur la Toile me semble se dessiner à l’horizon de nos écrans et ça me plaît.
« Nous ne faisons que nous entregloser. », écrit l’ami Montaigne dont il est indirectement fait mention dans le Libé d’hier et le Nouvel Obs d’aujourd’hui, à propos du dernier bouquin de Marcel Conche, “Avec des « si ». Journal étrange”*.
Des nuances certaines entre Garcin, laudateur, et Lançon, plus acerbe sur les non-engagements du vieux philosophe.
Conche que j’avais découvert par Comte-Sponville m’a ouvert de beaux sentiers dans Héraclite et chez Montaigne. Il rejoint Giono dans le pacifisme, dit garder quelque sympathie pour l’union soviétique et refuse le nazisme de Heidegger. Comme Char, qui lui, par contre,
m’assure sur le parfois nécessaire engagement politique et violent.

* Marcel CONCHE, Avec des « si ». Journal étrange, PUF, 342 p.

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