jeudi, 15 septembre 2005
Humeur
La forfanterie de monsieur Dantzig* m’amuse et m’emmerde. Du moins, avec le peu que je puisse en lire dans ce qu’il livre aux journalistes, Pierre Lepape, Didier Jacob et autres... Lecteur à 7 ans de Verlaine, de Baudelaire à 10 ans ? Fichtre ! Quel lecteur !
Je ne suis point fils de lettrés et ma grand-mère lavait, aux bords de Vilaine, le linge sale des nobles de sa paroisse. À 7 ans, je lisais le Général Dourakine, à 10 ans, le Dernier des Mohicans, Les Chasseurs de loups, Cœurs vaillants et la semaine de Suzette, à 11 ans - et c’était un exploit - La Reine Margot.
Il m’amuse quand il renvoie Claudel - que j’aime - à la fonction de grand emmerdeur... Saint-John Perse - que j'aime aussi -aux pompes... et Sade - que je n'ai jamais été foutu de lire sans en avoir les poils hérissés - à "l'un des romans les plus mal écrits de la langue française"
J’irai le lire - je n’achèterai point - j’irai le lire en l’empruntant, même pas en le volant. Je le lirai cependant avec quelque doute sur ses capacités de lecteur.
À cause de cet aveu :« Ce sera pour ma vieillesse, Montaigne. Huit fois j’ai décidé de lire les Essais ; allez, cette fois-ci, en entier jusqu’au bout ! Huit fois, j’ai abandonné, la plus longue après deux cents pages. Il ne me parle pas beaucoup ; ou je ne l’entends pas beaucoup. Pour tout dire, il m’emmerde.»
Je doute, que, vieillard, s’il y parvient, il puisse lire Montaigne de telle manière** !
À la neuvième tentative, lui restera-t-il assez de jours, pour franchir le cap - pour lui, fatidique - du chapitre XXXI, Livre I, page 202, de l’édition aux Presses universitaires de France ?
Qui contient, page 205, cet admirable passage :
Or, je trouve, pour revenir à mon propos, qu’il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu’on m’en a rapporté, sinon que chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage...
Sans doute devrais-je appliquer ce sage et tolérant principe “montaignien” à ma propre lecture de monsieur Dantzig !
* Dictionnaire égoïste de la littérature française, par Charles Dantzig, Grasset, 968 pages. Ça a un prix, quoiqu'en dise Jérôme Garcin : 28,50 €. (À noter que le bouquin fait 1 000 pages dans le Magazine littéraire et qu'il se réduit à 968 dans le Nouvel Obs. Trente-deux pages à la trappe !)
** Il eût fallu conseiller à monsieur Dantzig de lire "à sauts et à gambades" le chapitre 3, du Livre III du dit Montaigne, pp. 818 à 829, dans l'édition précédemment citée. Il a 44 ans, dit-on ! J'étais un bien mûr quinquagénaire, quand je découvris cette "clé". Peut-être, n'est-ce pas, pour lui, trop tard ?
15:20 Publié dans les lectures | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Il y a déjà quelques années que le jeune Dantzig essaie de faire parler de lui en utilisant le nom et le talent des autres - de Vialatte, notamment. La persévérance semble payer. Assouline l'encense... Il en faut peu pour ébaubir le tout petit monde des Lettres !
Personnellement, je me méfierais de quelqu'un qui ose avouer que Montaigne l'emmerde - façon de dire qu'il est incapable d'en comprendre le premier mot...
Écrit par : Constantin Copronyme | jeudi, 15 septembre 2005
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