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mardi, 07 novembre 2006

la pédagogie aux orties

Dix ans, déjà ! Je décidais ce qui précède.
Voilà bien un anniversaire que j'ai failli oublier. Comme quoi, cesser l'activité professionnelle n'était, pour moi, qu'une légère modification de statut social.
"Aux orties", c'est ainsi que dans la campagne gallo, mes ancêtres nommaient les écarts où l'on jetait toutes ces choses qui, aujourd'hui, vont dans les décharges et les déchetteries. À l'époque, il y en avait peu de choses bonnes à jeter et la pollution était un mot ignoré : ça pourrissait, ça rouillait, ça se décomposait et les orties poussaient à foison.
Je ne suis plus un praticien, je ne suis plus qu'un témoin.
Et je témoigne pour rappeler !
Dans les écarts, comme une petite poignée d'orties.

Une belle plante, l'ortie !

Post-scriptum :
J'adresse un grand merci à F qui m'a envoyé, par commentaire, un beau coucher de soleil sur Loire et en mots. Le troc sur la Toile, j'aime bien !
J'insiste : il importe d'aller lire et relire sa rubrique en son l'ensemble, "Ce n'est pas un métier". Il contribue fort à enrichir et actualiser "Les salons littéraires" de l'ami Berlol. Je vais certainement en causer vendredi en m'appesantissant sur "les cercles ouvriers de lecture" — à relire, un autre vieux compagnon, Noë Richter sur "lecture populaire et lecture ouvrière".

dimanche, 05 novembre 2006

blogues et littérature ?

À la question d'un magazine : "Peut-on approximativement dénombrer le nombre de blogs d’écrivains en France ?"

il répondra :

« Quantitativement, la question n’a pas grand sens, parce qu’émergent via Internet des usages qui déplacent le statut même de l’écrivain. Des sites Internet qui ne sont pas littéraires questionnent l’écriture, l’ouvrent....
La question plutôt devrait être : comment veiller ensemble à ce que ce soit un véritable espace critique, un véritable espace d’expérimentation et création ? »


À lire sans modération dès maintenant avant que ça ne paraisse dans le dit magazine.
C'est de... François BON, dans son tiers livre !
Ça me comble amplement pour ce soir.

mercredi, 01 novembre 2006

« Sauvons-nous ! Nous-mêmes ! » ou la lecture et le monde du travail

Je suis invité à intervenir dans un Colloque sur Lecture/ Monde du Travail, les 9 et 10 novembre 2006, au Centre de Culture Populaire de Saint-Nazaire.
Je trouve que l'idée de ce colloque est plutôt bonne, dans un temps où tout ce qui concerne livres et lectures me parait se niveler, se dissoudre dans les béates consommations de papier et d'écran ou, à l'autre extrême, dans les sempiternelles déplorations sur la lecture qui baisse et l'illettrisme qui progresse....

Mais je ne tiens pas à faire d'exposé, plutôt l'apport d'un témoignage d'un modeste praticien..., fils d'un ouvrier métallurgiste des Chantiers de la Loire, devenu lettré — grâce à des "bons Pères" qui n'ont point laissé de son enfance, "un cadavre décomposé" (cf. Onfray sur France Cul, hier) — et au-delà, conseiller d'Éducation populaire !

J'ai toujours deux utopies qui m'animent :
• la bibliothèque comme lieu de formation de la lectrice et du lecteur
• la bibliothèque comme lieu de la prise de parole et comme lieu d'écriture de la lectrice et du lecteur.
Tout cela prenant racine dans l'histoire toujours en tension Éducation ouvrière><Éducation populaire.
Je crois (!) encore que cette confrontation n'est pas ringarde.
Peut-être simplement (!) me faudrait-il une mise à jour de la notion de classe ouvrière en 2006 ? Peut-être faut-il, désormais parler de la classe des "invisibles" sur laquelle écrit Stéphane Beaud*, un sociologue nantais qui est interviewé dans le dernier numéro du Nouvel Obs ?

Ce colloque devrait servir à rappeler

. les histoires de la culture ouvrière et les ouvertures que laisse entrevoir la Toile,
. qu'il existe toujours un réseau lettré et un réseau de masse,
. que la Bibliothèque véhicule prioritairement la culture lettrée (alors que je pense aussi par mes humbles observations que la culture de masse s'insinue avec une habileté mercantile dans ses catalogues et rayons),
. que les cultures minoritaires — et l'ouvrière — sont tout autant, sinon plus renvoyées à l'obscurité du "troisième rayon" (comme on dit le "second rayon"),
. qu’il serait intéressant de faire, à nouveau, le point sur les représentations de la lecture en milieu populaire,
. qu'il importe de mettre en valeur les deux ou trois vrais écrivains de ces jours : entre autres, Gérard Mordillat, l’ami François Bon, qui font entendre dans leurs écrits les trop rares échos du monde du travail— sont-ils des "post-modernes", ces deux-là ?

Bref, c'est ce que j'aimerais parfois entendre dans ce colloque et ce dont je causerai puisque "on" me tend une perche.
Je ne suis pas dupe — je ne pense pas l'avoir jamais été — des aliénations culturelles des syndicats qui ont toujours redouté les questionnements que posaient certains de leurs intellectuels — je pense aux courants de syndicalisme d'action directe avec Fernand Pelloutier et Marcel Martinet. La devise de la Librairie du Travail de Marcel Hasfeld était :
Sauvons-nous, nous mêmes !


Post-scriptum :
Fernand Pelloutier et les origines du syndicalisme d'action directe par Jacques Julliard, au Seuil, 1971.
La culture prolétarienne par Marcel Martinet, aux Éditions Agone .
La librairie du Travail par Marie-Christine Bardouillet, Maspéro, 1977.
La France invisible, *ouvrage collectif, La Découverte, 2006
Daewo, François Bon, Fayard, 2004, en Livre de poche, 2006.
Les Vivants et les Morts, Gérard Mordillat, Calmann-Lévy, 2005.
Sans oublier, de Michel Ragon,
Histoire de la littérature ouvrière, aux Éditions Ouvrières, 1953, devenues récemment éditions de l'Atelier,
réécrite sous un titre nouveau, plus soixante-huitard,
Histoire de la littérature prolétarienne de langue française, chez Albin-Michel, 1974, puis au Livre de Poche, 2006.