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dimanche, 04 décembre 2005

De la "vie secrète" au "cul de Judas"

Vendredi, tellement obnubilé - ce n’est guère sérieux pour un lecteur - par le prix des QUIGNARD(s), que j’en ai oublié le bandeau de la Une du Monde des Livres.

À gauche :

Antonio Lobo Antunes
Rencontre avec le grand romancier portugais à l’occasion...

À droite :
Pascal Quignard
Pas moins de six volumes de l’auteur de « Vie secrète »....


Et pourtant, elle m’a frappé, cette Une, accotant les deux auteurs qui depuis dix ans, m’ont enfin désappris la lecture du roman traditionnel. L’un, l’Ibère lisboète, par le tumulte symphonique de ses monologues infinis, l’autre, par la concision de ses fragments. Dans l’un, de la nécessité de me couler de longues heures dans un fleuve charriant l’immondice et la beauté. Dans l’autre, le né normand devenu ermite bourguignon, du luxe de ne m’accorder que de brèves minutes pour cueillir l’essentiel souvent sensuel, parfois cruel, toujours érudit d’un moment, d’un paysage, d’un corps.

Bref, il y est des vendredis fastes du Monde des Livres où je renoue avec “mes” auteurs, n’en déplaise à certains grognons des blogues qui donnent , par l’envie qui suinte de leurs écrits, raison à ces journalistes médiatiques tout aussi envieux décriant la blogosphère et les humbles écrivants que nous sommes. (Aller entendre sur le blogue non envieux du Désordre à la date du 27 novembre).

En cette époque de remémorations confuses et superficielles, quand on sort du Tombeau pour cinq cent mille soldats de Pierre Guyotat, on peut farouchement plonger dans Le Cul de Judas, La splendeur du Portugal et Le Retour des Caravelles de Lobo Antunes. On resurgit dans la colère de Césaire ! C’est fort, beau et rinçant pour la mémoire. Je n’ai pas lu Exhortations aux crocodiles, ce serait peut-être un titre utile pour certains jeunes historien(ne)s du colonialisme. De toute obédience

vendredi, 02 décembre 2005

Livres et marché ! Marché du livre !

Retour du cours de Grec ancien - thème : l’ostracisme - halte coutumière aux rayons du libraire, chez Coiffard, rue de la Fosse. Je feuillette l’un des derniers Quignard publié aux éditions Galilée, Écrits de l’éphémère.
Bel objet austère avec le retour à d’un procédé d’imprimeur-éditeur, le Prière d’Insérer, depuis des années supplanté par le texte d’accroche de la quatrième de couverture. S’évanouit la lourdeur publicitaire, on revient à une finesse qui devait se partager entre lettrés.
Seulement ! Seulement, un hiatus : l’art de vivre lettré se paie. 45 €, le beau bouquin.
Nous attendrons la parution en poche, messieurs de Galilée !

À fortiori quand Quignard, très en verve éditoriale, publie quelques opuscules plus minces mais tout aussi bellement édités que Écrits de l’éphémère :
Pour trouver les enfers, Georges de La Tour, Le vœu de silence, Une gêne technique à l’égard des fragments, Inter ærias fagos, qui sont, sans nul doute, des regards aigus sur la littérature, la peinture, les écritures, l’histoire gréco-romaine
Je n’ai point l'espoir que ma bibliothèque communale s’engage dans l’achat de ces Quignard(s). J’avais eu quelques remarques réticentes quand, avant même qu’il ne reçoive le Goncourt, j’avais déposé une suggestion d’achat pour les trois tomes du Dernier Royaume.

Toujours et encore le clivage « littérature populaire/littérature lettrée ». Ça m’avait bien amusé les remarques des critiques sur le marquage très “élitaire” quant à l’attribution du prix à Quignard. Le Goncourt, n’est-ce pas, c’est ni trop peu, ni pas assez !

Post-scriptum :
Je suis allé au marché, ce matin, et par grand vent. D’excellentes darnes de lieu jaune à préparer avec un émincé de poireaux et d’échalotes, revenu sur un fond de cidre. J’ai aussi, dans le panier, la mâche, la brioche, les pieds de porc et Le Monde du vendredi ; j’ouvre l’encart “Livres”, la page 3 est quasi entière sur le Quignard nouveau ! Je fus “précédé”.
Je ne puis que, jalousement et prosaïquement, me rabattre sur les coûts.
Je fais mon marché, alors les prix, ça me connaît. Si la passion “Quignard” est vôtre - c’est la mienne ! - ce sera 163 €, non inclus le Inter ærias fagos en édition de luxe et à tirage limité...
Ils sont chers les Quignard(s) de fin d’automne !

Post-scriptum II :
S'ajoute le retour, dans le même numéro du quotidien, en pleine page du "vicaire" de l'athéisme et de l'hédonisme, Michel Onfray. J'ai entrevu sur les rayons de la FNAC - qu'il m'arrive de fréquenter en dilettante - qu'il est très sérieusement "encadré" par un anti-traité d'athéologie - même format, mêmes couleurs, mise en page identique de la première de couverture - et par l'ouvrage d'une dame d'œuvres pieuses.
J'ai "décroché" depuis "la Politique du Rebelle", estimant qu'il ressasse toujours le même "Art de jouir" depuis 1991. Que n'a-t-il trouvé d'autres chemins que l'édition pour règler ses malheurs d'enfance avec les Salèsiens ?
Je lui suis encore très fidèle quand, sur la Toile, il publie ses cours de l'Université populaire ; il est, là, très bon dans ses remontées au jour des penseurs écartés par l'ordre.
Saint-Èvremond, le curé Meslier, La Mothe Le Vayer, Cyrano de Bergerac, les Grecs qu'on voulut effacer, même Montaigne et Spinoza, racontés par Onfray, donnent appétit à ma pensée ! Racontés, il est vrai ! Il est plus historien de la philosophie que philosophe ; ce fut déjà écrit à son sujet ! Mais c'est pertinent, cette démarche "de l'anecdotique au philosophique" ; il y en eut un bel exemple, ce matin sur France Cul, avec Véronique Nahoum-Grappe.

Tiens ! On s'est éloigné d'Alain et de ses tourments, méchamment classé parmi les "nouveaux réacs" par quelques branleurs et branleuses du Nouvel Obs.