lundi, 05 janvier 2015
Vautier est mort
Ce dimanche, en fin d'après midi, j'ai compris pourquoi au début du flot la mer bretonne s'était engrisée dans le deuil.
Le corps de René s'est évanoui dans des horizons incertains entre mer d'Iroise et gorges aurèsiennes de l'Oued Abiod.
Je dis "René". Il n'aurait pas aimé que de lui je dise qu'il fut mon maître ès cinéma. C'était un compagnon — camarade, aurait-il précisé — de plus d'ancienneté qui accompagnait avec passion et rigueur souriantes ses compagnons plus jeunes. Je l'avais accueilli, fin 1962, à Biskra au seuil des Aurès libres. Il lançait les CINE-POP Algériens et, une semaine durant, je l'ai trimbalé dans ma 2 CV camionnette avec mon projecteur DEBRIE 16 mm entre Tolga et T'Kout. Dans les galettes d'alu, il y avait Alexandre Nevsky et un certain Drapeau du Forgeron...
Au printemps 1963, sous l'égide du ministère algérien de la Jeunesse et des Sports, Bouteflihka en étant le ministre et Hervé Bourges, le chef de cabinet, René organisa, à Tixeraïne-El Riath, un regroupement des chefs des ex-Centres Sociaux Éducatifs*, pour consolider la structure des "Ciné-Pops". Il était accompagné, entre autres cinéastes internationaux et ...révolutionnaires (!), d'un jeune assistant frais émoulu de Sciences Po qui se préparait sans doute à rejoindre les maquis sud-américains, Régis Debray...
J'ai revu et l'un et l'autre dans les années 1980-2000 au hasard de projections, de manifestations culturelles, de signatures : l'évocation de ces moments fut toujours une très forte charge d'émotion.
Pressentiment de la mort de René : avant Noël, je venais de m'offrir, chez les Mutins de Pangée, le coffret DVD de ses films algériens.
* Fondés en 1956, lors de la guerre d'indépendance, par Germaine Tillion.
À quand, par la Cinémathèque de Bretagne, la publication des entretiens que Germaine Tillion et René Vautier eurent longtemps après ce combat que l'une et l'autre menèrent avec des armes qui peuvent paraître fort opposées, mais furent également libératrices ?
Ces entretiens furent projetés aux Archives départementales de Loire-Atlantique, il y a trois ou quatre ans. J'avais été sollicité comme intervenant lors du débat qui suivit la projection.
11:19 Publié dans les autres... arts, Les graves, Parfois un film | Lien permanent | Commentaires (1)
Commentaires
Je n'aime pas pressentir la mort -
Certains d'entre nous en ont l’acuité ?
Nous sommes comme des chiens ne sachant pas hurler la mort -
Intime conviction hélas-
Ma bougie a brûlé pour Cabu -
Merci pour votre témoignage, voici le mien :
''Je vis comme 1 morpion sur ce monde'' __Cabu
J'ai croisé la haine ce soir -
Dessein -
J'avais des yeux d'enfant au club de Dorothée
Et j'en pinçais pour toi pour tes coups de pochoir
Duduche j'ai pas connu et puis ce fut l'espoir
Tes dessins sulfureux ton humeur complotée
Tes dessins poésie giflant l'âme agitée
De cette engeance aveugle armée à s'en déchoir
Et de nouveau la haine à mon grand désespoir
J'écoute ton Mano et si je suis athée
Je te promets Cabu de prier ton tracé
Sans ferveur sans aveu ni culte opiacé
Je te promets Cabu de plomber la bêtise
De ce sniper impur qui s'est pris pour son dieu
Pour oser t'achever avant de dire adieu
Tu seras ma légende à jamais insoumise !
07/01/2014 - P/Cabu -
Écrit par : Curare- | lundi, 19 janvier 2015
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