dimanche, 07 avril 2013
le fin blogueur toujours actuel
Sortons, Dilliers, sortons, faisons place à l'envie,
Et fuyons désormais ce tumulte civil,
Puisqu'on y voit priser le plus lâche et plus vil,
Et la meilleure part être la moins suivie.
Allons où la vertu et le sort nous convie,
Dussions-nous voir le Scythe ou la source du Nil,
Et nous donnons plutôt un éternel exil,
Que tacher d'un seul point l'honneur de notre vie.
Sus donques, et devant que le cruel vainqueur
De nous fasse une fable au vulgaire moqueur,
Bannissons la vertu d'un exil volontaire.
Et quoi ? ne sais-tu pas que le banni romain,
Bien qu'il fût déchassé de son peuple inhumain,
Fut pourtant adoré du barbare corsaire ?
Les Regrets, 50
Du Bellay adresse sa "note" à Dilliers un ami dont on sait peu de choses, sinon qu'il était aussi lié à Olivier de Magny, compagnon proche de l'exil romain de notre Joachim, même si l'ambiguité de la diplomatie avec le pape et l'empereur Charles-Quint les vit rivaux.
Au cinquième vers — second quatrain — le verbe "convie" n'est accordé selon l'usage de l'époque, hérité du latin, qu'avec le sujet le plus proche.
Le "banni romain" du second tercet est Scipion l'Africain consul romain, héros des guerres puniques début des années 200 avant notre ère, qui fut condamné à l'exil pour un scandale... financier. Que l'on soit général glorieux de la république romaine de jadis ou ministre retors du budget de la république française actuelle, on voit bien « la meilleure part être la moins suivie ».
18:38 Publié dans Du Bellay mon voisin, glane de sonnets, les civiques | Lien permanent | Commentaires (0)
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