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mardi, 03 février 2009

Epaules nues et gueule burinée

à M et A H
pour ces jours dans la chaleur de l'amitié,
de la musique et de la mer.


Entre la Folle Journée — avec un pluriel —, de Heinrich Schütz à Jean-Sébastien Bach et le VendéeGlobe, le blogue s'est effacé devant les écoutes, les échanges, les balades et l'amitié.
Il y eut de belles épaules nues sous les projecteurs du palais des Congrès, et l'on peut soupçonner en écoutant le Magnificat en ré majeur de Bach que Gabriel, le visiteur de la future vierge-mère ait eu une archangélique érection spirituelle — il ne venait point pour lui, mais pour l'Esprit-Saint, et il avait annoncé, six mois auparavant, une nouvelle identique à la cousine âgée de :

Miriâm dit au messager :" Comment cela peut-il être
puisqu'aucun homme ne m'a pénétrée ?"
Le messager répond et lui dit :
"Le souffle sacré viendra sur toi, la puissance du Suprême t'obombrera.
Ainsi celui qui naîtra de toi, sacré, sera appelé Bèn ÉLohîm."

Et Miriâm visitant sa cousine, d'entonner le chant :
Oui, le Puissant a fait en moi de grandes choses et sacré est son nom.*

L'archange peut être satisfait de sa tâche de messager, et nous de la musique céleste de Bach qui soulève si allègrement les épaules nues des belles cantatrices.

La Passion selon Mathieu avec le grand vieillard qu'est désormais Michel Corboz fut une longue et paisible méditation nocturne ; je craignais l'ennui sinon l'endormissement, les trois heures furent de haute veille.
Le lendemain, une sonate de Dietrich Buxtehude — les concerts de Schütz et consorts avaient été dévorés par les grands matinaux de la première semaine de janvier qui avaient fait la queue aux portes du palais dès deux heures du matin — et la Cantate 150 de Bach par le Capriccio Stravagante de Skip Sempé et les Solistes de Pygmalion : une musique à pleurer de joie, interprétée dans l'airain des voix et la douceur des cordes.
Comment le père Bach, sur des textes aussi débiles, à en perdre la foi ...si vous l'avez encore, écrivait-il de pareilles compositions ?

Sur Arte, il y a encore de beaux restes à écouter et voir !
Pour la première fois sur ce blogue, je vous propose d'écouter les sons qui vont suivre ; c'était jeudi soir dans la Grande Halle ! La "négraille" d'Aimé Césaire, à sa façon, célèbre Bach et c'est tout aussi fascinant que le soulèvement des épaules blanches et nues des belles du Magnificat.




Non, nous ne sommes pas allé aux jetées des Sables d'Olonne. La foule de la Folle Journée nous suffisait et la bise de Nordé ne devait être guère accueillante. Mais, belle est la victoire du grand à la gueule burinée, grand parmi les marins de la vallée des Fous — ainsi nomme-t-on le vallon où s'ouvre Port-La Forêt.
Amants, nous ne sommes point gens de labour ni valets de moisson. Pour nous la haute et libre vague que nul n'attelle ni n'oblige. Et pour nous, sur l'eau neuve, toute la nouveauté de vivre, et toute la grande fraîcheur d'être...**


Après la musique, l'eau devait manquer aux vieux marins, point fous, que nous sommes devenus, le village de Passay nous accueillit et Grand'Lieu s'étendait comme le long recitativo secco d'une passion de Schütz !

Grand'Lieu - copie.jpg


Post-scriptum :
*Les brefs passages cités — Luc, I, 34-35 — sont extraits de la Bible traduite et présentée par André Chouraqui, chez Desclée de Brouwer, 1989.
** Saint-John Perse, Amers, Poésie/Gallimard, 1970.

L'image du lac est de Nicléane.

Commentaires

Curieuse, tout de même, cette "traduction" Chouraqui : pourquoi, si l'on traduit du grec original vers le français, préférer au traditionnel et littéral "fils de Dieu" cet un peu bien exotique "Bèn Elohîms" ? Le parti pris hébraïsant de Chouraqui, qui ne se justifie absolument pas ici, tourne trop souvent au grotesque — même lorsqu'il paraît défendable — et au charabia. Je préfère une translation classique, accompagnée au besoin de gloses et de notes, à ce galimatias.

Écrit par : C.C. | mercredi, 04 février 2009

Une fois n'est pas coutume, Constantin ! Nous divergeons.
J'ai une grande faiblesse pour le baroque "hébraïsant" de Chouraqui et je n'ai pu résister à "la puissance du Suprême (qui) obombrera (la vierge).
Mais vous avez raison, ce n'est point le texte qui était mis en musique par Bach.

Écrit par : grapheus tis | jeudi, 05 février 2009

Très belle remotivation, en effet, de ce verbe "obombrer", que Féraud déjà donnait pour archaïque. Le terme "baroque", avec tout ce qu'il peut avoir d'ambigu, me semble particulièrement bien choisi pour qualifier ce style... déconcertant.

Écrit par : C.C. | vendredi, 06 février 2009

Les commentaires sont fermés.