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vendredi, 13 avril 2007

outils de menuiserie : un lecteur au travail

Char centenaire


Lors du dernier atelier “Jalons pour une éthique”, fin mars, l'animateur propose Ricœur et son approche de l’aporie du Mal, illustré par le mythe adamique, Ève et Adam, le paradis terrestre, l’arbre de la connaissance du bien et du mal, la pomme et le serpent.
Le 11 avril, me procurant Paradisiaques de Quignard en poche, la première de couverture est une miniature extraite des très Riches Heures du Duc de Berry, représentant “Adam et Ève dans le jardin d’Éden”, miniature qu'il faudra confronter au fusain de Giacometti (notre du 28 février 2007)

Voici donc, insistant, le retour du Serpent, le maudit de la Genèse, le messager du Satan, antagonique au débonnaire serpent de René Char.

Mais je pense qu’avant de livrer ma lecture du serpent et la contre-lecture de l’histoire d’Adam et d’Ève, que propose Char, il me faut évoquer — ce qui eût dû être présenté quand j’ai inauguré cette évocation du Char centenaire — les outils que le poète conseille à son lecteur et son comportement face aux “mots”. Enfin, ce que, moi, je perçois et comprends comme outils et comportement.

Et d’abord la relation de lecture, les rapports écrit Char :

Salut, chasseur au carnier plat !
À toi, lecteur, d’établir les rapports.

Merci, chasseur au carnier plat !
À toi, rêveur, d’aplanir les rapports.

Moulin premier, 68


Suis-je, lecteur, un chasseur au carnier plat ?
C’est ce que souhaite le poète : rencontrer un lecteur, certes en chasse, mais qui inaugure un geste de lecture, allégé de toute connaissance ou expérience antérieures à leur rencontre, le carnier plat.
D’un geste volontaire, le lecteur choisit de lire, d’établir. Décision de lier les deux expériences.

Le poète remercie pour l’entrée du lecteur ; désormais, il le laisse libre à sa rêverie — rêveur de mots, écrit Bachelard du lecteur de poèmes — mais à une rêverie active, travailleuse, tout entière à la tâche de se confronter aux mots et aux images, à aplanir. Rencontre devenant au fil de la rêverie sans aspérités.

Rapports qui ne peuvent être que pluriels, impensables d’être ramenés à une singularité, à une univocité.

Établir et aplanir : l’établi et la plane, instruments de menuiserie, introduisent dans l’artisanat du poète.

Avant de retrouver le débonnaire serpent, il me faudra bien m’attarder, le moment d’une note ou deux, à cette confrontation aux mots qui surgit tout au long de l’œuvre d’un Char artisan.

Vint un soir où le cœur ne se reconnut plus dans les mots qu’il prononçait pour lui seul.
Le poète fait éclater les liens de ce qu’il touche. Il n’enseigne pas la fin des liens.

À faulx contente, 1972.

Commentaires

Merci pour ces explications (qui n'en sont pas, justement) à la lecture de René Char. Il y en a trop qui abandonnent dès les premières lignes en disant qu'ils ne comprennent rien. Les gens n'aiment pas chercher en eux-mêmes.

Écrit par : Caroline | samedi, 14 avril 2007

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