mercredi, 05 février 2014
retour en force des Anciens Grecs
Depuis le début de cet an, sur la table du lecteur reviennent en force les Grecs, ceux des temps avant notre ère, portés par des passeurs d'aujourd'hui.
Ainsi Homère et L'Iliade ou le poème de la force de Simone Weill appuyé par un bouquin redescendu de l'étagère, Le monde d'Homère de Pierre Vidal-Naquet — depuis quelques mois, il y a déjà deux versions récemment traduites de l'Iliade, celle de Jean-Louis Backès et la superbe de Phillipe Brunet.
Ainsi celui qui suit Homère — mais lequel de cet "Homère pluriel" écrirait René Char — d'un siècle ou deux, le bon Hésiode, berger d'agneaux sur le mont Hélicon qui reçut des "filles du Grand Zeus pour sceptre un rameau d'olivier florissant qu'elles avaient cueilli, un rameau admirable".
Hésiode, le premier JE qui s'écrit dans les écrits d'Occident. Sa Théogonie et Les Travaux et les Jours côtoient donc, sur la table, Homère.
Une lecture linéaire s'avérerait fastidieuse, même avec le recours au Vertige de la liste. Jean-Pierre Vernant, qui, s'il n'est pas ce jourd'hui, sur la table, est tout proche sur l'étagère des Anciens, propose un schéma généalogique, précieux auxiliaire de lecture du monde divin de la Grèce antique se référant à cette Théogonie*.
Mon humble sens marin m'a précipité sur l'évocation de Nérée le Vieillard et ses cinquante filles, les Néréides. Le décompte, selon les éditions, en mentionne ou quarante-neuf ou cinquante-et-une. N'ayant pas trouvé de traduction de leurs quarante-neuf ou cinquante-et-un prénoms, j'y suis allé de mon "Bailly" et de quelques rapprochements avec des adjectifs et des participes présents de verbes. Le sens profond pour moi relevant de cette expérience intime et rêveuse que m'ont forgée les traversées et leurs sillages, les baies et les mouillages, les anses et les abris, les grèves et les chaussées de rocs, les vents et leurs colères, les aurores et les couchants, les brises légères qui se disent "temps de demoiselles" et la bienveillance des ports.
Féminiser l'Océan ? Que oui ! Ces Néréides signifient des instants, des, labeurs, des gestes, rares ou quotidiens, familiers ou étranges.
Νηρῆος δ' ἐγένοντο μεγήριτα τέκνα θεάων πόντωι ἐν ἀτρυγέτωι καὶ Δωρίδος ἠυκόμοιο, κούρης Ὠκεανοῖο, τελήεντος ποταμοῖο,
Πλωτώ τ' Εὐκράντη τε Σαώ τ' Ἀμφιτρίτη τε Εὐδώρη τε Θέτις τε Γαλήνη τε Γλαύκη τε Κυμοθόη Σπειώ τε Θόη θ' Ἀλίη τ' ἐρόεσσα Πασιθέη τ' Ἐρατώ τε καὶ Εὐνίκη ῥοδόπηχυς καὶ Μελίτη χαρίεσσα καὶ Εὐλιμένη καὶ Ἀγαυὴ Δωτώ τε Πρωτώ τε Φέρουσά τε Δυναμένη τε Νησαίη τε καὶ Ἀκταίη καὶ Πρωτομέδεια Δωρὶς καὶ Πανόπη καὶ εὐειδὴς Γαλάτεια Ἱπποθόη τ' ἐρόεσσα καὶ Ἱππονόη ῥοδόπηχυς Κυμοδόκη θ', ἣ κύματ' ἐν ἠεροειδέι πόντωι πνοιάς τε ζαέων ἀνέμων σὺν Κυματολήγηι ῥεῖα πρηΰνει καὶ ἐυσφύρωι Ἀμφιτρίτηι, Κυμώ τ' Ἠιόνη τε ἐυστέφανός θ' Ἁλιμήδη Γλαυκονόμη τε φιλομμειδὴς καὶ Ποντοπόρεια Λειαγόρη τε καὶ Εὐαγόρη καὶ Λαομέδεια Πουλυνόη τε καὶ Αὐτονόη καὶ Λυσιάνασσα Εὐάρνη τε φυήν τ' ἐρατὴ καὶ εἶδος ἄμωμος καὶ Ψαμάθη χαρίεσσα δέμας δίη τε Μενίππη Νησώ τ' Εὐπόμπη τε Θεμιστώ τε Προνόη τε Νημερτής θ', ἣ πατρὸς ἔχει νόον ἀθανάτοιο.
αὗται μὲν Νηρῆος ἀμύμονος ἐξεγένοντο κοῦραι πεντήκοντα, ἀμύμονα ἔργα ἰδυῖαι.
Nérée et Doris aux beaux cheveux, cette fille du superbe fleuve Océan, engendrèrent dans la mer stérile les aimables nymphes
Proto, Eucrate, Sao, Amphitrite, Eudore, Thétis, Galèné, Glaucé, Cymothoë, Spéio, Thoë, l'agréable Thalie, la gracieuse Mélite, Eulimène, Agavé, Pasythée, Érato, Eunice aux bras de rose, Dolo, Ploto, Phéruse, Dynamène, Nésée, Actée, Protomèdie,Doris, Panope, la belle Galatée, l'aimable Hippothoë, Hipponoë aux bras de rose, Cymodocé qui sur la sombre mer, avec Cymatolège et Amphitrite aux pieds charmants, calme sans efforts la fureur des vagues et le souffle des vents impétueux, Cymo, Eïoné, Halimède à la belle couronne, Glauconome au doux sourire, Pontoporie, Liagore, Évagore, Laomédie, Polynome, Autonoë, Lysianasse, Évarnè douée d'un aimable caractère et d'une beauté accomplie, Psamathe au corps gracieux, la divine Ménippe, Néso, Eupompe, Thémisto, Pronoë et Némertès en qui respire l'âme de son père immortel.
Ainsi l'irréprochable Nérée eut cinquante filles savantes dans tous les travaux.***
Voici donc "mes" Néréides :
Πλωτώ La Crawleuse
τ' Εὐκράντη L'Accomplissante
τε Σαώ La Saine
τ' Ἀμφιτρίτη L'Entourée
τε Εὐδώρη La Généreuse
τε Θέτις La Donnée
τε Γαλήνη La Paisible
τε Γλαύκη L'Étincelante
τε Κυμοθόη La Tumultueuse
Σπειώ La Caverneuse
τε Θόη La Prompte
θ' Ἀλίη La Pêcheuse
τε Πασιθέη La Divine
τ' Ἐρατώ La Charmante
τε καὶ Εὐνίκη L'Apaisante
καὶ Μελίτη La Miellée
καὶ Εὐλιμένη L'Accueillante
καὶ Ἀγαυὴ La Noble
Δωτώ La Donatrice
τε Πρωτώ La Prééminente
τε Φέρουσά La Porteuse
τε Δυναμένη La Puissante
τε Νησαίη L'Insulaire
τε καὶ Ἀκταίη La Riveraine (Protectrice)
καὶ Πρωτομέδεια La Soigneuse
Δωρὶς L'Offerte
καὶ Πανόπη La Regardante
καὶ Γαλάτεια La Nourricière
Ἱπποθόη La Surfeuse
καὶ Ἱππονόη La Méditative
Κυμοδόκη La Bienveillante (Brumeuse)
σὺν Κυματολήγηι L'Apaisante
Κυμώ La Houleuse
τ' Ἠιόνη L'Attentive
τε Ἁλιμήδη La Rêveuse
Γλαυκονόμη La Lumineuse (L'Irradiante)
καὶ Ποντοπόρεια La Marine
Λειαγόρη La Calme (La Paisible Diseuse)
τε καὶ Εὐαγόρη La Grande Pêcheuse
καὶ Λαομέδεια La Mesurée (La Protectrice)
Πουλυνόη La Partageuse
τε καὶ Αὐτονόη L'Opinâtre
καὶ Λυσιάνασσα La Déliante (La Libératrice)
Εὐάρνη La Pastourelle
καὶ Ψαμάθη La Sableuse (L'Infinie)
τε Μενίππη ?**
Νησώ L'Ilienne
τ' Εὐπόμπη La Favorable ( La Guide ou La Pilote)
τε Θεμιστώ La Juste
τε Προνόη La Prévoyante
τε Νημερτής L'Infaillible (La Véridique)
* J.P. Vernant in Encyclopédia Universalis - Grèce antique, le monde divin.
** Seule "Ménippè" a échappé à mon imaginaire marin. J'ai récemment découvert le très bon bouquin Hésiode, Théogonie, La naissance des dieux, traduit par Annie Bonnafé et préfacé par J.P. Vernant. La traduction trop "hippologique" de Ménippè ne me convainct point : volontiers je proposerais : La Chevaucheuse ... des vagues, bien entendu.
*** Édition de Jean-Louis Backès en Folio classique. Il ne donne pas de traduction des noms.
Post-Scriptum :
Que les non-hellénistes me pardonnent mais qu'ils prennent le texte grec pour de belles images.
Homère mentionne quelques Néréides au Chant XVIII de l'Iliade et Brunet donne de belles interprétations de leurs noms.
12:15 Publié dans Les antiques | Lien permanent | Commentaires (0)
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